Archives de l’auteur : Laura

Chronique : Un écrivain, un vrai

Un roman passionnant sur la question épineuse : qu’est-ce qu’un écrivain ? Et quels sont les critères pour le définir ?

Pia Petersen est une autrice Danoise qui vit en France depuis presque toujours. Elle écrit tous ses ouvrages en français. L’un de ses plus connus est celui chroniqué ici, Un écrivain, un vrai (Actes Sud, Babel), mais on peut également citer Paradigma (paru il y a peu aux Arènes) ou encore Une livre de chair (Actes Sud).

Une téléréalité hors-norme pour un écrivain qui l’est tout autant

Gary Montaigu vient de recevoir un coup de massue en apprenant qu’il avait remporté le Man Booker Prize (équivalent du Goncourt aux USA), c’est ainsi qu’on lui propose de participer à l’émission Un écrivain, un vrai. Cette téléréalité a de quoi étourdir par son ambition ; en effet, Gary Montaigu va devenir une star parmi les stars avec l’émission.

Son concept ? Filmer quasiment tout du quotidien de l’auteur, mais surtout voir son processus créatif. Cependant, les téléspectateurs vont peu à peu donner leur avis sur l’ouvrage en cours d’écriture… est-ce nécessairement une bonne idée de s’immiscer dans l’intimité de création d’un auteur ? Est-ce stimulant ? Ou autre chose ?

Un roman aux allures de satyre de notre société

Très introspectif et réfléchi, Un écrivain, un vrai nous propose une belle façon de penser notre société au travers du prisme de l’écriture. L’intrigue est très prenante (bien que le déroulement assez lent), mais je pense qu’il faut voir au-delà et ne pas penser qu’à l’histoire. Il y a beaucoup de symboliques et de circonspection dans ce roman, différents niveaux de lecture également.

Rien qu’au niveau des symboles, ont peux réfléchir à l’étrange patronyme de notre écrivain star : Gary Montaigu. Est-ce un clin d’œil à Romain Gary et à l’une des pièces les plus connues de Shakespeare, Roméo et Juliette ? Une double référence littéraire ? Je pense que oui, et ça me fait sourire… surtout en découvrant la suite de l’histoire.

Par ailleurs, les personnages ont beau être peu nombreux, ils sont fort bien développés. Je pense notamment à la femme de Gary, la calculatrice Ruth. Difficile à cerner, facile à détester au travers des yeux de Gary… l’est-elle vraiment ? A vous de juger… Même réflexion sur la fameuse Alana censée être utilisée comme « ressort » dans l’émission pour créer une tension dramatique dans le couple Ruth/Gary. Son but ? Faire de l’audience en endossant le rôle de la « seconde femme ».

Pia Petersen invente au passage un terme intéressant bien qu’effrayant, celui de télé-lecteur. Comme le téléspectateur, il a une opinion bien arrêtée, jugera très vite de ce qu’il souhaite ou ne souhaite pas voire ou lire. C’est ainsi, que peu à peu, le processus de création de Gary Montaigu est freiné… tant il est ausculté dans les différentes facettes de sa vie.

C’est donc un très bon roman que Un écrivain, un vrai. Pas nécessairement aussi facile d’accès que les lectures que j’ai habituellement, mais tout aussi plaisant. Une ambiance particulière s’en dégage, et j’adore lire des romans qui parle d’auteurs, de processus de création, d’édition et d’écriture… et c’est l’apogée du plaisir de lecture pour moi.

Le décor dans lequel j’imagine parfaitement l’intrigue de ce roman, la pièce parfaite pour l’écrivain new-yorkais.
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Chronique : Salina

Le grand retour de Laurent Gaudé dans le roman initiatique. Dans une Afrique fantasmée qui ressemble à l’univers de La mort du Roi Tsongor

Laurent Gaudé est un auteur français à l’œuvre très prolifique. Il écrit aussi bien des romans, que de la poésie ou du théâtre. D’ailleurs, Salina était une pièce de théâtre écrite en 2003 avant de devenir un roman en 2018. Et il est magistral.

Par ailleurs, vous connaissez certainement un des ouvrages de Laurent Gaudé : Le soleil des Scorta, Eldorado, ou encore Ouragan et mon préféré par-dessus tout : La mort du roi Tsongor (qui pour moi se déroule dans le même univers que Saline, ou un très ressemblant).

Un fils en quête d’un lieu de sépulture pour sa défunte mère…

Salina est morte. Elle était exilée, oubliée de tous ou haïe, sauf d’une personne : son seul et unique fils. Elle lui a tout appris, à survivre dans le désert, à s’y repérer… Maintenant qu’elle n’est plus là, il est de son devoir de trouver un lieu de repos digne de celle qu’a été sa mère. Une femme rebelle et indépendante qui aura bravé les conventions par amour, et qui n’a rien eu en retour… ou presque.

Un texte court et mémorable

Salina a beau ne faire que cent-cinquante pages à peine, cela est bien suffisant pour s’imprégner de l’ambiance particulière de ce texte. A la fois mythe, roman d’amour, légende, quête initiatique, récit… Salina est extraordinaire. Dans beaucoup de moments, j’ai retrouvé la beauté de la tragédie chère à Laurent Gaudé, tout comme dans La mort du Roi Tsongor (un texte qui fut une révélation pour moi).

Le désert, comme je l’imagine dans le roman…

On est dans une sorte d’Afrique imaginaire, sans nom, sans époque, juste pleine de ses légendes qui traversent oralement les générations et les villages.

Le fils de Salina va-t-il trouver un lieu de sépulture à la hauteur de ce qu’à été cette femme pour lui ? Va-t-il avoir le courage de la transporter par-delà les territoires qu’il connaît ? Vous aurez toutes les réponses à ces questions… et la conclusion en est magnifique.

J’imagine parfaitement cette ville dont parle Laurent Gaudé. Avec ses barques qui suivent la légende orale de Salina contée par son fils, et qui au fil de l’histoire grossissent les rangs. Avec son étrange et mystérieuse île-cimetière, qui ne s’ouvre uniquement si on a conté l’histoire du défunt avec éloquence et sincérité…

……..

Si vous êtes à la recherche de beauté, de poésie et de magnificence tout en simplicité, Salina sera pour vous. On ressort grandit d’un conte onirique comme celui-là. Et on y repense souvent… Merci Laurent Gaudé pour ce texte, cela faisait des années que j’en attendais à nouveau un comme cela.

Chronique : Âpre cœur

Roman phénomène aux Etats-Unis, Âpre Cœur de Jenny Zhang a débarqué en France aux éditions Picquier. Plébiscité par la critique – française et étrangère – il est également optionné pour une adaptation cinématographique. A la découverte d’un roman atypique qui mêle humour noir, vécu romancé et vérité sociale sur les immigrés chinois installés au Etats-Unis.

Jenny Zhang est une essayiste, poétesse et autrice américaine d’origine chinoise. Elle est née à Shanghai et vit désormais à Brooklyn. Fille d’immigrés chinois, elle base l’essentiel de son oeuvre sur cette double appartenance à deux cultures très différentes. Âpre Cœur en est l’illustration parfaite.

Entre le roman et le recueil de nouvelles qui se recoupent pour former un ensemble cohérent, Âpre Coeur est un ouvrage qui nous fait découvrir une facette méconnue des Etats-Unis au travers d’une population qui ne s’exprime que rarement.

L’ouvrage va être adapté prochainement au cinéma.

Un recueil de nouvelles aux points communs diffus mais bien présents

Pas évident d’appréhender au début la lecture d’Âpre Coeur, à la fois roman et recueil de nouvelles assez longues. Mais ces dernières elles sont toutes liées entre elles, même si le lien qui les unit est extrêmement ténu parfois.

Personnellement, j’ai trouvé plus facile d’approcher l’ouvrage en me disant que je lisait un recueil d’histoires plutôt que comme un roman linéaire. Je ne me suis ainsi pas sentie obligée de toujours faire le point pour retrouver le contexte dans lequel on se trouve (quelle famille, que lien les unis, etc.).

Quoi qu’il en soit, chacune de ces histoire nous conte la difficulté et le bonheur croisés d’être enfant d’immigré chinois aux Etats-Unis. La misère que ça implique pour voir peut-être ses enfants réussir…

Jenny Zhang, la jeune autrice du percutant roman Âpre coeur.

Des tranches de vies prises sur le vif

Comme une photographie de l’instant, les nouvelles sont très vivantes, on y croit immédiatement. Et pour cause, Jenny Zhang s’est nécessairement inspirée de son vécu et de son histoire familiale pour créer Âpre Coeur.

Voici la liste des nouvelles contenues dans l’ouvrage : Crispina, on t’aime, La vide le vide le vide, Nos mères avant eux, Mes jours et mes nuits de terreur, Pourquoi jetaient-t-ils des briques ?, Tu es tombée de la rivière et je t’ai sauvée !.

Parmi les histoires qui m’ont le plus marquée, la toute première m’a particulièrement touchée. Tous les sacrifices innombrables qu’ont fait ces parents pour que leur fille ait un avenir meilleur. La misère, les déménagement de trous pourris et insalubres en appartements délabrés, les collocations avec d’autres immigrés chinois fraîchement débarqués… La décision difficile de leurs parents pour offrir le meilleur à Christina, une fille sensible, bizarre et attachante. Elle souffre de démangeaisons atroces qui la font se gratter jusqu’au sang la nuit. Ils sont si pauvres qu’ils volent la poudre aromatisée des nouilles dans les magasins pour accommoder leurs restes…

« Après ma pneumonie, j’avais beaucoup de mal à ne pas régurgiter mes aliments, et parfois, mon papa ramassait à la cuillère ce que j’avais vomi et le mettait dans sa bouche pour ne pas gaspiller la moindre parcelle de nourriture […]« .

Autre nouvelle touchante et triste à la fois : Mes jours et mes nuits de terreur. L’histoire d’une jeune fille, Mandee, dont les parents ont tout le temps peur pour elle. Systématiquement. Comme elle ne ferme plus les yeux très fort quand elle a un vaccin, ses parent sont persuadés qu’elle se drogue… C’est à la fois drôle et tragique… Et quand on découvre que le prénom de cette jeune fille a été inspiré aux parents par un magasin de vêtements quand ils venaient d’arriver aux U.S.A., on ne peux s’empêcher de sourire de tristesse… Leur histoire concentre pour moi toute l’abnégation et la force de caractère de ces familles qui ont tout fait pour rester aux Etats-Unis, mais également le cruel manque de connaissances qui les ont empêché de s’intégrer pleinement malgré leurs efforts maladroits…

 » Tu devrais être dans la classe des surdoués. Tu devrais être avec les meilleurs. Ne pas échouer, ce n’est pas un exploit.

– Je suis désolée

– Ne sois pas désolée, sois meilleure « 

Certaines nouvelles oscillent entre la Chine d’il y a 20 ans et celle d’aujourd’hui. On comprend un peu mieux les raisons pour lesquelles ils sont partis en Amérique (dénonciations, climat de suspicion), pourquoi d’autres repartent malgré tout…  

 

La couverture en version originale d’Âpre coeur.

On comprend également ce besoin viscéral de réussite pour leur enfants (on surnomme ces femmes qui poussent leur enfants à tout faire dans l’excellence jusqu’à l’excès des mères tigre, elles souhaitent les élever à la dure pour qu’ils aient le meilleur avenir possible. On peut citer comme référence aux Etats-Unis l’ouvrage de Amy Chua, elle même enfant d’immigrés chinois aux États-Unis  : L’hymne de bataille de la mère tigre, gros succès Outre-Atlantique à sa sortie).

Assez inclassable mais malgré tout poignant, Âpre Coeur est un roman que l’on oublie pas car il contient quelques scènes mémorables. Mais c’est surtout l’humanité de ses personnages ainsi que leur passé et leur vie difficile que l’on retient…

L’ouvrage est en cour d’adaptation au cinéma, je me demande bien ce que cela pourra donner sur grand écran, car c’est un ouvrage fort difficile à mettre en image, ne serait-ce que pour sa narration tranchée, vive et parfois décousue.

Je conclurais avec une belle punchline que l’on peut trouver dans la nouvelle Mes jours et mes nuits de terreur :

« En cours d’algèbre, j’avais entendu dire qu’elle « bouffait de la chatte comme si la fin du monde était pour demain » « 

ou encore dans Pourquoi jetaient-ils des briques ?

« Je prie pour que des colibris me crèvent les yeux et laissent leurs excréments dans mes orbites vides plutôt que de revivre ce crève-cœur« .

Chronique jeunesse : Le bureau des fantômes – Tome 1 – Black Moor

Des spectres, des fantômes qui envahissent la terre, et des centaines de missions à accomplir pour les esprits qui souhaitent partir à l’aventure !

Black Moor est le nom du premier tome de la série jeunesse Le Bureau des Fantômes, qui vient tout juste de paraître aux éditions du Rocher.

Sous le nom méconnu de Fanny Gordon se cachent en réalité deux autrices jeunesse de renom : Pascale Perrier et Véronique Delamarre Bellégo.

Un lac aux esprits, et des âmes en partance…

Le Lac est l’endroit incontournable où passe tout individu venant de quitter la terre. Son esprit se dilue dans le Lac, lavé de tous ses souvenirs avant de partir vers le Pont… Que se passe-t-il après ? Nul ne le sait, car nous allons suivre deux spectrus : Tim et Mo. Ils viennent de mourir, mais ils ne sont pas entraînés vers le mystérieux Pont… et vont à la place intégrer le bureau des Fantômes.

Ils deviennent ainsi agents spectrus avec une mission simple : ramener les esprits des morts égarés sur terre pour les diriger vers le Lac afin qu’ils partent en paix. Mais les difficultés s’amoncellent, tout particulièrement en Ecosse où semble sévir un grand nombre de fantômes qui souhaitent tout sauf partir vers le Lac…

Une aventure qui tient la route et fonctionne même à merveille !

Parfait pour initier les jeunes lecteurs au fantastique et plus particulièrement à l’univers des esprits sans trop miser sur le côté effrayant, Le Bureau des fantômes s’adresse aux 9/11 ans. Ce premier tome se concentre avant tout sur le côté aventure et la façon ludique dont les missions de Tim et Mo sont résolues. Et ça fonctionne fort bien, puisque on a très envie de savoir comment fonctionne ce monde caché aux yeux des humains.

Le système de fonctionnement du bureau est simple, efficace et motive fortement ses spectrus (avec un système de points pour chaque esprit ramené au Lac). Plus les spectrus ont des points, plus ils récoltent des étoiles qui vont se placer… sur leur corps ! Quand un spectrus a beaucoup d’expérience, les étoiles forment une sorte de tatouage correspondant à la personnalité profonde du spectrus… Autant dire qu’on a hâte de voir se former les étoiles de Tim et Mo !

Enfin, l’histoire a beau posséder un déroulement très classique, elle nous réserve quelques belles petites surprises… notamment sur la fin qui laissera ses lecteurs très étonnés. Et surtout… ça donne fortement envie de découvrir la suite (qui n’est pas encore annoncée, donc patience…). On sent que Tim et Mo n’ont pas fini de dévoiler leurs atouts (qu’ils ignorent eux-mêmes) et qu’ils ont encore de belles aventures devant eux…

 

Ainsi ce début de série se présente sous les meilleurs auspices avec une intrigue accrocheuse, une aventure qui donne envie de s’y plonger immédiatement… Tout fonctionne à merveille, alors à quand la suite ?

Chronique : Mirage

Edogawa Ranpo ou le maître du roman d’horreur nippon, à découvrir d’urgence !

On le sait, les japonais sont extrêmement doués dès qu’il s’agit d’écrire dans le domaine du bizarre, de l’étrange, du malsain… Que ce soit au cinéma ou dans la littérature, ils excellent dans ce genre. Et dans le genre des récits angoissants purement japonais, Edogawa Ranpo est le maître. L’auteur nippon tire d’ailleurs son nom de celui qui l’a directement inspiré : Edgard Allan Poe, et oui, ça se ressemble beaucoup phonétiquement !

Parmi ses œuvres les plus connues ont peut citer Le lézard noir (dont un éditeur s’est d’ailleurs directement inspiré pour trouver son nom), La bête aveugle, L’Île panorama ou encore La chambre rouge, son œuvre est principalement éditée chez Picquier.

Deux nouvelles pour découvrir une œuvre atypique

Avec la lecture de Mirage, ce fut ma première incursion dans l’univers bizarre d’Edogawa Ranpo… Et je n’ai pas été déçue du voyage !

La première nouvelle donne son nom à ce court ouvrage, on y suit un homme qui en croise un autre dans le wagon vide d’un train… Ce dernier lui montre alors une peinture étrange qui va bouleverser sa vie.

Bien qu’étrange, cette nouvelle-ci n’est guère mémorable… par contre en ce qui concerne la seconde, c’est excellent !

Edogawa Ranpo, le maître du roman noir japonais. Si vous aimez ce qui est très sombre, brutal ou ultra glauque, son œuvre devrait vous plaire…

La seconde histoire s’intitule Vermine, et le titre est fort bien trouvé (il trouve son explication à la toute fin). Elle nous conte l’histoire d’un homme totalement agoraphobe qui rencontre par hasard un de ses amours d’enfance… Et à partir de ce moment là, il décide qu’il veut absolument vivre pleinement cet amour, même si il est à sens unique.

Peu à peu, on bascule lentement dans la folie de ce jeune homme, mais c’est si pernicieux qu’on ne se doute pas un instant à quel point on va tomber dans l’horreur… C’est d’un malsain comme rarement j’en ai lu, mais pour ceux qui aiment frissonner tout en restant à cent pour cent dans le roman réaliste, c’est l’histoire parfaite.

Pour moi, Vermine est de très loin la meilleure et la plus marquante des deux nouvelles de ce très court recueil (à peine 140 pages).

Ainsi, si vous êtes friand.e d’histoires effrayantes, Edogawa Ranpo pourrait bien être votre nouvelle référence de lecture dans ce genre si particulier (une véritable niche !). Je ne puis que vous le conseiller. Afin de poursuivre la découverte de l’œuvre de cet auteur majeur, je pense bientôt lire L’Île panorama ou Le lézard noir, ce sont ses romans les plus connus.

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Chronique : Arca

Un roman de sf français sympathique mais qui ne réussit pas à transformer entièrement l’essai…

Arca est un roman de science-fiction écrit par le français Romain Benassaya, il a été publié initialement par les éditions brestoises Critic avant de sortir chez Pocket. Arca est le premier roman de cet auteur. Depuis, il a écrit le roman Pyramides, toujours chez Critic.

Un roman dans le plus pur style du space-opera

L’Arca est le vaisseau spatial le plus ambitieux jamais construit de la main de l’homme. Il abrite plus de trois mille six-cent spationautes (ici nommés arconautes) qui se dirigent vers un avenir meilleur : La Griffe du Lion. Un avenir meilleur ? Du moins on l’espère, car il faudrait déjà que l’Arca atteigne l’exoplanète et survive au passage du « seuil », une vitesse dépassant la vitesse de la lumière et interdisant tout retour en arrière pour l’Arca…

Mais les guerres intestines grondent au sein du vaisseau malgré l’extrême précaution prise dans le recrutement de chaque passager…  

Des idées intéressantes, mais pas toujours bien développées…

Il y a déjà eu quantité de romans de science-fiction prenant place dans un huis-clos à l’échelle d’un vaisseau spatial (Le grand vaisseau, Tau Zéro… etc.), l’exercice nécessite donc un certain doigté. Et sur la première moitié du roman, Arca est fort bien réussit en mélangeant habillement présent et de nombreux flash-back. L’auteur arrive à garder une belle part de mystère, beaucoup de variables inconnues nous font nous prendre au jeu de l’intrigue.

Le vaisseau va-t-il résister au passage du Seuil ? (le potentiel dépassement de la vitesse de la lumière grâce à l’Artefact), si oui, les passagers ne vont-ils pas paniquer à l’idée d’un voyage sans retour avéré ? Quelle est donc cette nouvelle religion qui semble acquérir de nouveaux fidèles de façon exponentielle ? Quelle est l’origine réelle de l’Artefact, qui ne semble pas venir réellement d’Encelade ?

Les questions posées sont très intéressantes, mais quand le voile se lève dans la seconde partie du roman… c’est un peu la déception. Sur de nombreux points, j’aurais presque aimé en savoir moins, je pense que j’en aurais été moins désappointée.

Autre point noir : le personnage de Sorany, qui est beaucoup trop passif, de bout en bout du roman. Elle semble ne jamais savoir quoi faire, ne pas être passionnée le moins du monde par son travail, même quand elle occupe un haut poste avec de fabuleuses opportunités scientifiques… Cela m’a beaucoup agacée, je l’avoue.

Malgré toutes les nombreuses questions soulevées, tout trouve une réponse assez cohérente mais un peu trop attendue, cela laisse ainsi peu de place à la surprise, dommage.

 

Cependant, Arca est sympathique, même s’il contient les défauts d’un premier roman. Ceux qui lisent beaucoup de science-fiction ne seront guère surpris par cette lecture. Cependant, on ne peut que présager que du meilleur pour les prochaines œuvres de Romain Benassaya, en espérant qu’il aura gommé ses quelques faiblesses.

Couverture de l’édition originale, aux éditions brestoises Critic.

Chronique : Fières d’être sorcières !

Une sorte de version Harry Potter de l’ouvrage jeunesse Histoire du Soir pour filles rebelles… une jolie réussite !

A paraître le 24 octobre 2019 chez Gallimard Jeunesse, voici un album destiné aux fans absolu.e.s de la saga Harry Potter. Au programme, des portraits uniques de ces femmes sorcières qui ont transformé le monde magique, et parfois même celui des moldus et plus encore…

Un bel album documentaire dans le plus pur style Harrypotteresque

Si vous êtes un.e fan absolu.e de la saga Harry Potter, bien évidemment ce livre est fait pour vous ! Au programme, un développement approfondit de certains personnages parfois « oubliés » dans la saga, sans oublier également les plus connus.

Et chose intéressante, il n’est pas uniquement question des personnages « gentils » ici, et tout un pan de l’ouvrage est dédié aux personnages maléfiques avec notamment Vinda Rosier (que l’on voit dans Les Crimes de Grindevald) ou encore Nagini ou Pansy Parkinson, pour ne citer qu’elles.

Une pleine page pour le fascinant personnage qu’est Luna Lovegood.

Pour découvrir le reste de ce que cache cet ouvrage… le mieux est encore d’admirer les quelques photos qui en dévoilent un peu plus !

Et parmi certaines oubliées, Nagini n’est ici pas en reste !

Quoi qu’il en soit ce beau-livre de fin d’année est édité à un prix fort attractif, puisqu’il est à 13.90€. Pour ce que c’est, je trouve que c’est très honnête et je ne peux que vous le recommander chaudement ! C’est un cadeau de fin d’année facile à faire et un nouvel indispensable à tout fan de Harry Potter.

Une section est même réservée aux stars du monde des sorciers !

Chronique : La contre-nature des choses

Un roman post-apocalyptique fortement déstabilisant qui m’a laissée sur ma faim…

Paru dans la collection Exofictions (la collection dédiée à l’imaginaire d’Actes Sud), La contre-nature des choses est un roman écrit par Tony Burgess, un auteur canadien. Il s’agit du troisième roman de l’auteur à paraître en France, précédemment il y a eu Idaho Winter et Cashtown, tous deux chez Les Allusifs.

Le monde est mort, vive le monde !

Mourir à l’ancienne, sans bouger, sans rien faire d’autre qu’être un cadavre semble être devenu impossible dans ce futur. En effet, les morts sont morts, mais ils sont tous atteints de soubresauts incontrôlables qui les font bouger, et les déplacent même sur le long terme. On a bien essayé de les noyer, de les bruler, de les enterrer, mais les corps sont restés un problème longtemps insoluble… Jusqu’à ce qu’une société privée, Déchets & Co, propose une idée : les mettre en orbite autour de la Terre. Et si vous payez assez cher, vous pouvez même connaître la position exacte de vos proche dans l’Orbite des cadavres qui tourne à l’infini…

C’est dans ce monde que vit un homme à la mission simple mais difficile : traquer un certain Dixon. Un gourou qui passe de ville et ville et qui tue tout le monde et mutile les corps ensuite pour son bon plaisir…

Un roman difficilement compréhensible et même difficile à apprécier

Passée la première moitié du roman, je n’ai quasiment rien compris de ce que j’ai lu. C’est fort regrettable, j’en conviens… et j’ai pourtant fait l’effort de lire intégralement l’ouvrage. J’ai pourtant été fortement tentée d’abandonner.

Il avait cependant tout pour plaire : la quête mystérieuse d’un homme qui en chasse un autre dans un monde devenu sale et aux mains d’une énorme entreprise se faisant un pactole avec des cadavre de morts-vivants orbitant autour de la terre, c’était le résumé parfait pour m’attirer.

Sauf que non. La première partie est étrange mais se tient. On découvre peu à peu l’univers post-apocalyptique, les corps qui tressautent, l’apparition du Syndrome qui déforme et dénature les gens encore en vie pour toutes sortes de raisons. Il y a du sang, des œdèmes, des tumeurs et autres grosseurs qui parsèment les pages et les personnages.

La première moitié de l’ouvrage aurait d’ailleurs pu s’arrêter là et laisser le roman au stade de novella. L’auteur aurait tenu un superbe twist de fin…

Mais non, l’histoire continue et elle est à partir de ce stade très laborieuse… On assiste à des scènes de sexe totalement gratuites et inutiles, de la violence, de l’infantilisation dégueulasse à propos de la tête (uniquement) de notre narrateur, des suicides/meurtres collectifs. C’est aussi sale qu’inutile. Et plus on s’approche de la fin, plus j’ai eu le sentiment que le texte était précipité, bâclé.

C’est fort dommage, mais cette lecture fut pour moi une intense déception. Je n’avais pas placé des attentes folles dessus, mais découvrir que le texte a aussi peu d’intérêt m’a contrariée car le résumé était attrayant. La couverture choisie par Actes Sud, de même que le titre sont une réussite (titre en VO The n-body problem, mais le texte n’en valait pas la peine selon moi…

Très belle couverture également pour la version originale… dommage que le texte ne soit pas à la hauteur !

Chronique Jeunesse : L’anti-magicien – Tome 2 – L’Ombre au Noir

La suite des aventures que vivent les exilés Kelen, Rakis et Furia… pour le meilleur et pour le pire !

Sorti en France il y a maintenant plus d’un an, le second tome de l’Anti-magicien est paru aux éditions Gallimard Jeunesse sous le titre L’ombre au noir. Depuis, les tomes trois et quatre sont parus en librairie, et la saga n’est pas encore terminée…

Le moment de faire le point ?

Kelen a fuit sa patrie à la fin du premier tome, chose que nous n’aurions pas pu imaginer… Et maintenant que c’est chose faite, il faut à Kellen trouver un but à son existence tout en restant pour toujours un paria. Recherché par les plus puissants mages Jan’Tep, le jeune homme n’a pas fini de fuir les problèmes… et il en arrive de nouveaux durant son exil sous la forme d’une charmante jeune femme… 

Une saga aux personnages toujours aussi truculents

La qualité première de cette saga de fantasy atypique – outre son univers – ce sont ses personnages hauts en couleurs que l’on suivrait au bout du monde. En particulier Furia l’indépendante Argosi et Rakis le terrible chacureuil. Ce sont eux qui font l’âme de cette saga, plus encore que son héros, Kellen qui parfois suit simplement le mouvement.

La couverture française est très belle, mais celle en version originale n’a rien à lui envier…

Grâce à ce trio détonnant, on passe un merveilleux moment de lecture entre action, suspense et magie, sans oublier l’humour, pierre angulaire des romans de la saga. C’est ainsi que l’on découvre le nom véritable de Furia : Chemin de la Pâquerette Sauvage, ça en jette carrément… non ? Rakis n’a pas fini d’en rire en tout cas… 

L’intrigue est encore une fois parfaitement menée, nous entraînant sur des chemins insoupçonnés et intéressants pour la suite de l’histoire… dans une ville ou sévit une épidémie d’Ombre au noir (impossible d’en dire plus !). Sébastien De Castell semble savoir où il va et comment y aller, ce qui nous donne une intrigue de grande ampleur parfaitement cohérente. 

On en apprend un peu plus également sur ce que c’est qu’être un Argosi, sans pouvoir en dévoiler plus, leur rôle m’a fait penser à celui d’un personnage important dans l’Assassin Royal, une phrase en particulier notamment. 

De plus, il y a un soupçon de romance parfaitement dosé qui correspond parfaitement aux premiers émois amoureux… 

Mais ce que j’aime le plus dans cette saga, c’est que tous les codes sont cassés. Rarement un héros ado est autant malmené par son auteur, et c’est d’autant plus appréciable car on ne peux prédire la suite. Et c’est ce que l’on demande à un roman, non ? Nous transporter et nous surprendre…

Affaire à suivre de très près donc avec le troisième tome de la saga : L’ensorceleuse.

Chronique : La fille qui tressait les nuages

Un magnifique roman à l’univers extrêmement onirique où les corbeaux volent la tête en bas…

Second roman de l’autrice Céline Chevet, La fille qui tressait les nuages est paru aux éditions du Chat noir en été 2018. Entre douceur et tragédie, on y découvre l’histoire d’une famille marquée par les drames…

Un mystère qui demeure…

Julian est atterré par la mort de la sœur de son meilleur ami. En effet, elle est morte de façon abrupte, et il en était très amoureux… Malheureusement, cette histoire d’amour ne verra jamais le jour, et nous allons plutôt nous intéresser à ceux qui restent.
Julian, le bon ami de la famille, Souichiro, le frère de la défunte jeune fille, et Akiko, d’une discrétion maladive et camarade de classe des deux garçons. En plus d’être discrète, elle est également d’une curiosité maladive qui va la conduire à découvrir certains secrets de la famille de Souichiro… Pour le meilleur et pour le pire !

Une intrigue réussie et surtout, un bel univers narré avec talent

Plus que son histoire, c’est surtout le style de ce roman qui reste mémorable. Il a beau avoir été écrit par une autrice française, cette dernière a réussit à prendre à son compte le style d’écriture des romans nippons. A la fois pudique et parfois terrible, on navigue entre émerveillement et frissons dans cette histoire qui devient de plus en plus étrange au fil des découvertes d’Akiko.

On retrouve également l’importance pour les événements passés que revêt la culture japonaise. De même, Céline Chevet nous entraîne dans une intrigue mâtinée de légendes (inventées ou non) et d’obscurs secrets de famille… Impossible d’en dire plus, le reste serait trop facile à deviner, mais ce mélange entre fantastique et traditions est savamment mené.
De plus, tout au long de ce beau roman, vous aurez plusieurs révélations d’assez grande envergure, notamment une qui va radicalement changer votre façon de le lire! (et vous obligera peut-être à relire certains passages clés).

Enfin, la particularité de ce roman, c’est aussi ses petites touches d’onirisme bien disséminées. Avec ses avions en papier qui jamais ne touchent le sol et autres faits farfelus alors que tout le reste est normal, ça m’a fait penser au roman Les mots bleus de Félicie de Natalie Lloyd (éditions du Seuil Jeunesse).

Ainsi, ce roman est une très belle découverte. Je dirais même une double découverte car c’est un superbe roman et une autrice de qualité que j’ai ainsi découvert. J’ai hâte de lire d’autres romans de Céline Chevet, si ils sont aussi bons que La fille qui tressait les nuages, ça risque d’être génial !

Une des magnifiques illustrations de Mathew Meyer, un illustrateur de talent qui s’est spécialisé notamment dans les yôkai. (site ici : http://matthewmeyer.net). Je trouve que son univers colle parfaitement au roman de Céline Chevet.