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Chronique : Le meurtre du Commandeur tome 1 & 2

Une magnifique saga étrange et mémorable écrite par le grand auteur japonais Haruki Murakami

On ne présente plus Haruki Murakami, un auteur aussi prolifique que passionnant dont quantité d’ouvrages ont connu un beau succès.
Les chroniques de l’oiseau à ressort, Kafka sur le rivage, Le passage de la nuit… Il est également essayiste et traducteur. Il a également tenu pendant de nombreuses années un bar jazz, car c’est un mélomane passionné.

Le Meurtre du Commandeur est une série de deux volumes parue en 2018 aux éditions Belfond. Elle était très attendue en France et a remporté un énorme succès au Japon à sa parution (comme toujours avec une nouveauté de cet auteur).
Depuis, les deux tomes sont parus en poche chez 10/18.

Un artiste peintre qui vit reclus, concentré sur son art

Voici une histoire qui commence comme toujours dans un environnement normal, mais qui peu à peu va « glisser » vers autre chose…
On y découvre un peintre qui vit de son travail. Il est très peu productif, mais n’a pas besoin de beaucoup pour subvenir à ses besoins. Son œuvre est assez rare et recherchée par un petit cercle d’amateurs.

Mais un jour, son quotidien calme va être bousculé par une commande bien particulière. Un riche homme d’affaires nommé Wataru Menshiki veut que le narrateur fasse son portrait. Et depuis cette demande, il se passe des choses minuscules mais bien étranges dans son quotidien… A commencer par la découverte d’un tableau magnifique mais très étrange…

Du bizarre, de l’étrange… du grand Murakami !

« J’étais rassuré de voir que je n’étais pas fou et, en même temps, je ne pouvais nier que les mots de Menshiki avaient bel et bien transformé l’irréalité suggérée jusque-là comme possible en une réalité, provoquant par conséquent un léger décalage dans la jointure des mondes.« 

En cette seule phrase, on retrouve ce qui va caractériser l’entièreté de ces deux romans, et plus largement l’œuvre de Murakami dans son ensemble. Ce basculement lent mais certain vers autre chose… d’étrange et d’irréel.

J’ai adoré le premier des deux livres qui composent la saga car tant qu’on ne sait pas à quoi on à faire, c’est assez exaltant. Le bruit de cette clochette qui perturbe tous les soirs le narrateur, les découvertes étranges qu’il va faire…
Tout s’installe très lentement, mais jamais on ne s’ennuie, Murakami nous plongeant dans le monde de la peinture et de ses arcanes avec délices. On en apprend plus sur les différentes techniques utilisées par le narrateur, sur l’histoire de la peinture nippone et son importation en Europe et quantité d’autres choses.

Alors, qu’en est-il du second tome ? Étant donné la fin du premier, il est impossible de lâcher l’histoire en plein milieu, ce qu’il s’y passe est bien trop captivant. Mais on bascule dans quelque chose de totalement différent en terme de genre, de style. J’ai beaucoup pensé au mythe d’Orphée en lisant cette seconde partie. Une réécriture très libre et bien étrange, certes, mais assez flagrante selon moi.

Même si j’ai clairement préféré le premier tome, le second est indispensable à la résolution de cette histoire bien étrange. Et comme toujours, c’est un véritable régal de se plonger dans l’imaginaire de Murakami.

Je ne saurais que vivement vous conseiller de découvrir cette duologie qui mérite le détour pour son ambiance extraordinaire. Étrange et fascinante, elle plaira à tous types de lecteurs et saura en déstabiliser plus d’un !

Chronique : La vie inachevée d’Addison Stone

Un roman à la conception très originale : témoignages, articles de presse, peintures, photos, récits… Découvrez toutes les facettes d’Addison Stone pour comprendre sa disparition…

Adele Griffin est une auteure américaine. Deux de ses ouvrages sont parus en France, et tous deux tournent autour du monde si particulier de l’Art. Dans La vie inachevée d’Addison Stone, nous découvrons un roman aux allures de jeu de piste très particulier…

L’ouvrage est paru en France en 2015 dans une très belle version reliée à la couverture rigide éditée par Castelmore (le label pour ados des éditions Bragelonne).

Son autre roman s’intitule Les autres Shepard, il est paru chez Thierry Magnier en 2012. Lui aussi se passe à New York dans le milieu artistique.

Une vie décousue et mystérieuse

Couverture d’un magazine fictif où Addison est à la une.

Addison Stone est une adolescente qui n’a rien d’ordinaire. Dès ses jeunes années, des gens ont cru en elle et lui ont permis de s’épanouir… et ce n’étaient pas ses parents.

Addison Stone a toujours été dans son monde, dans son Art. Constamment en représentation, personne ne sait si elle a été réellement elle-même avec quelqu’un ou si elle a perpétuellement jouée son propre rôle… Elle est un mystère pour tous ceux qui l’ont côtoyée.

Peu à peu, elle a réussit à trouver sa voie artistique, ses tableaux se vendent des milliers de dollars. L’argent ne devient plus un problème pour sa famille et donc pour elle. Encore adolescente, elle quitte sa ville natale pour New York et ses folies nocturnes. Mais l’Art restera tout aussi important pour Addison.

Addison avait tout pour réussir, d’ailleurs elle avait réussit. Pourquoi parler d’Addison au passé ? Car elle est morte. Accident ? Meurtre ? Autre chose ? Le recoupement de tous les articles de presse, témoignages, photos vous aideront peut-être à y voir plus clair, pour enfin comprendre le mystère qu’était Addison Stone.

Un roman inclassable qui réussit à captiver

Sans introduction ni préparation, ce roman commence immédiatement par un article du Daily News, un journal New Yorkais et une photo pleine page d’Addison Stone. Déstabilisant ? Oui. Et ce n’est que le début.

Vous ne trouverez aucune partie romancée dans cet ouvrage. Uniquement des extraits, des citations, des témoignages, de nombreuses potos et coupures de presse. Une fois que vous aurez tout lu, vous connaitrez la vérité sur la fin d’Addison. Pourquoi elle est tombée alors qu’elle exposait à plusieurs mètres du sol en pleine nuit l’une de ses œuvres.

Une des nombreuses œuvres d’Addison Stone

On se demande comment une adolescente aux réactions parfois enfantines a pu devenir une personnalité aussi incontournable de la scène artistique. Mais au fil des pages, le portrait qui se profile devant nous explique comment Allison est devenue Addison. Ses erreurs de jugement, sa personnalité envahissante et parfois tyrannique avec ses proches… rien ne vous sera caché.

Ce roman est aussi original que très intéressant. Du début à la fin, on est captivé par le concept et la façon dont les éléments découlent les uns des autres. On découvre la vois de ses parents de son frère, de sa meilleure amie, de ses ex petits amis… Chacun d’entre eux dépeint une Addison différente, parfois inquiétante. La frontière entre le génie et la folie est parfois extrêmement poreuse…

Est-ce donc un bon roman ? Oui. Cependant, j’avoue que la conclusion m’a un peu déçue, je l’ai trouvé bien trop facile. C’est dommage car pour moi tout le reste collait à la perfection. Je garde cependant un excellent souvenir de cette lecture… A vous d’interpréter la fin comme vous le souhaitez.

Ainsi, ce roman est parfait à lire dès l’âge de 15 ans environ, ne serait-ce que par son traitement très original. On n’avait pas vu ça depuis Cathy’s Book ou encore L’Affaire Amanda (Bayard Jeunesse). Pour celles et ceux qui souhaitent lire un autre type de roman, ce sera l’idéal !

Chronique album jeunesse : La peinture d’Uchiki

Un album d’inspiration nippone qui nous fait découvrir une magnifique histoire dans l’univers de la peinture…

La peinture d’Uchiki est un album pour les enfants – dès 5/6 ans – aussi beau qu’original. Il est paru dans la petite maison d’éditions A pas de loups en mars 2017 et gagnerait à être connu…

Son illustratrice Xavière Broncard a déjà réalisé plusieurs albums jeunesse, de même que l’auteure avec qui elle travaille sur cet album, Isabelle Wlodarczyk.

L’histoire d’un peintre qui se mésestime

Uchiki est un homme solitaire qui ne vit que pour peindre ce qui l’entoure. Il trouve de la beauté en chaque chose qui croise son regard : un arbre, une montagne, un oiseau… Mais il n’arrive pas à peindre quelque chose de beau, de mémorable. Tout ce qu’il réalise, il le remise aussitôt dans un coin sans jamais le regarder à nouveau, jugeant que ça n’en vaut pas la peine.

C’est dans ce contexte qu’arrive un vieil homme censé livrer à un sage de la région (le vieux Tetsuchine) des dizaines de rouleaux. Ces rouleaux sont les œuvres que le sage doit découvrir absolument.  En effet,  tous les cents ans, est élu un peintre qui est félicité pour son œuvre par le conseil des sages.

Mais le vieil homme n’a plus la force d’aller livrer les œuvres au vieux sage, alors Uchiki se propose pour le soulager de sa charge de travail.

C’est ainsi qu’Uchiki gravit la montagne avec les œuvre des dizaines de peintres… et devient tenté de les admirer lui aussi. Une en particulier va retenir son admiration, occuper ses nuits… pour finalement le rendre malade de jalousie… Que va donc faire Uchiki ?

….

Une belle histoire fort bien pensée et illustrée

La lecture de cet album fut un véritable coup de cœur. De l’histoire en passant par les dessins, il y a quelque chose dans ce livre qui le dote d’une âme. L’ambiance, le graphisme choisit avec soin par Xavière Broncard, tout participe à nous offrir une histoire belle et mémorable.

Suivre l’histoire d’Uchiki et son cheminement est très intéressant. Que l’on soit adulte ou enfant, on meurt d’envie de savoir comment se conclura cette histoire pour le moins originale.

Je ne vous en dis pas plus sur le fin mot de cette histoire qui donne à réfléchir, mais j’ai adoré !

……

J’espère maintenant que ce bel album aura pleinement sa chance en librairie car sa diffusion étant très restreinte ce n’est pas évident… Cependant, même si votre libraire ne l’a pas, il pourra très bien vous le commander !

Je vous le promets, c’est un bel album, une belle histoire, et c’est dès l’âge de 6 ans dans l’idéal et 5 ans au grand minium.

Petit plus : Vous découvrirez à la fin de l’album un petit glossaire vous expliquant quelques termes. Quelle est la différence entre peintre et calligraphe à l’époque au Japon, que sont les emaki ou encore de quel peintre ayant réellement existé se sont inspirées les auteures (il s’agit de En-I).

 

Chronique : La végétarienne

la-vegetarienne-pocheUn roman coréen étrange, mystique et particulier à la frontière des genres.

Han Kang est une auteur sud coréenne. Très peu connue en France, elle a cependant quatre romans déjà parus chez nous : Celui qui revient (au Serpent à plumes), Pars, le vent se lève (chez DeCrescenzo).

Il y a quelques moi de cela, Han Kang a remporté le Man Booker Prize 2016 pour La Végétarienne. Il s’agit d’un des prix littéraire les plus prestigieux au niveau international, il récompense un roman et non pas un œuvre dans son ensemble.

Une étrange lubie se transformant en obsession puis en… autre chose

Yǒnghye est une femme étrange. En pleine nuit, elle se réveillera et videra son réfrigérateur de toute la viande qu’il contient. Plus jamais la jeune femme ne mangera de viande, mais plus encore, son obsession pour le végétal va mettre en péril son mariage, le bien-être de sa famille et même son intégrité. Jusqu’où Yǒnghye est-elle prête à aller pour atteindre son besoin d’absolu et de végétal ?

la-vegetarienneUn roman en trois parties très différentes et pourtant très complémentaires

La Végétarienne se découpe en trois chapitres que l’on peut assimiler à de longues nouvelles. Chacune des trois parties peut presque se lire indépendamment. Chacune a un thème un sens particulier, plus ou moins évident, c’est selon.

La plus belle de ces trois parties est selon moi la seconde. Elle est d’une telle poésie, d’un tel onirisme qu’elle en devient hypnotique, fascinante, belle… Elle a un goût d’interdit très profond. Totalement subversive et unique, c’est aussi la plus poignante partie du roman.

Voir cette femme accepter les demandes de plus en plus étranges de son beau-frère car il lui permet d’atteindre une beauté éphémère organique est incroyable. On monte en étrangeté, en bizarreries, mais également en splendeur…

Cette seconde partie est tout simplement percutante. Elle ne mettra pas nécessairement à l’aise le lecteur, et pourtant… On comprend presque le besoin vital qu’a Yǒnghye de faire ce qu’elle fait. De même, peu à peu, les motivations malsaines de son beau-frère sont si bien exprimées par Han Kang que l’on épouse sans mal son étrange point de vue.

La troisième partie est quant à elle la plus difficile, et cela sur plusieurs niveaux : que ce soit la compréhension du texte, mais aussi sa dureté, l’immersion est très difficile… On se retrouve dans un asile de fous en assistant à la lente déchéance de l’un des personnages. C’est très dur, et la fin nous laisse un sentiment d’inachevé et de déchéance terrible.

J’avoue ne pas avoir vraiment compris le but final de Han Kang au travers de La Végétarienne, mais cela ne m’a pas empêchée de l’apprécier. On retrouve dans ce roman quelques éléments typiques de la littérature coréenne : une poésie mâtinée de sordide, une beauté cachée où on l’attend le moins. …..

Etrange et beau à la fois, La Végétarienne est un roman dur, impossible à nier. Mais c’est également un texte magique qui fait l’ode de la beauté et de l’étrange… Le tout magnifiquement écrit, et traduit par Jeong Eun-Jin et Jacques Batilliot. A lire pour découvrir un autre genre de littérature. Pour ceux qui ont aimé par exemple La vie rêvée des plantes, c’est le roman parfait à lire après. D’om vient cet amour des auteurs coréens pour la condition végétale ? Aucune idée, mais c’est sublime…

AUTEUR :
TRANCHE d´ÂGE :

Chronique Album Jeunesse : Toile de dragon

Toile de dragonUne belle histoire ayant pour toile de fond l’Art dans sa plus grande pureté

Magnifique album jeunesse paru aux éditions Philippe Picquier en octobre 2014, Toile de dragon est écrit par Muriel Zürcher et dessiné par Qu Lan.

L’histoire est celle d’un jeune garçon passionné par le dessin… à tel point que même quand il n’a pas de papier, il se sert de supports très originaux.

Le nom de Muriel Zürcher vous dit peut-être quelque chose et c’est bien normal : il s’agit de l’auteur de la trilogie Le Tourneur de Page aux éditions Eveil et Découvertes.

L’illustratrice Qu Lan est d’origine chinoise et a déjà quelques ouvrages à son actif. On lui doit Aquarelles de Chine ainsi que l’album jeunesse Le chat bonheur.

Toile de dragon (3)Une passion du dessin hors du commun

Thong-Li est un petit garçon comme les autres à une exception près : il adore le dessin à un tel point qu’il dessine partout. Dans la poussière par exemple, il fait vivre tout un paysage grâce à sa passion qui le pousse à l’exercer partout.

Mais le jour où le jeune garçon reçoit en cadeau un bâton d’encre, une pierre pour l’écraser et un pinceau fin, sa vie va être bouleversée. Lui qui n’a jamais eu de papier va se servir de son coffret de dessin sur l’un des seuls supports qu’il a à disposition chez lui : les toiles d’araignées.

C’est ainsi qu’un jour l’Empereur entend parler de ce fameux garçon dessinant de magnifiques dragons sur les toiles d’araignées et décide de le faire venir à la demeure impériale. Il lui fixe alors un objectif presque impossible : dessiner dans chacune des milles pièces qui composent le palais un dragon par jour sur une toile d’araignée…

Si Thong-Li réussi, il sera couvert de richesses… sinon c’est la mort qui l’attend. L’empereur ne faisant pas dans la demi-mesure.

Toile de dragon (2)Une histoire mélancolique sublimée par des dessins de toute beauté

L’histoire de Toile de Dragon fait penser aux contes de fées, avec leurs héros auxquels ont donne des objectifs impossibles. Ici, le défi de peindre quotidiennement un dragon toujours plus beau que celui de la veille épuise Thong-Li que l’on voit perdre sa joie de peindre au fur et à mesure de l’histoire.

Pour nous narrer ce conte contemporain aux élans asiatiques, les illustrations de Qu Lan sont parfaites et prennent le pas sur l’histoire elle-même. Douces et fines, continuellement teintées de chagrin, on peut les scruter longtemps pour s’imprégner de leur beauté. Je pense en particulier à l’image représentant Thong-Li agenouillé avec déférence devant toute la majesté de l’Empereur, ou encore à l’ultime œuvre du garçon…

 ….

En conclusion, cet album jeunesse d’une beauté triste mérite d’être lu et contemplé. Il laisse une impression douce-amère après la lecture, et donne l’opportunité de réfléchir, d’y repenser… tout en douceur. Un bel ouvrage à ne pas louper que l’on soit parent ou enfant. Les adeptes de l’Asie sous toutes ses formes (livre, roman, documentaire…) y trouveront également leur compte. Dès l’âge de 6 ans environ.

Toile de dragon (1)

Chronique : Nina Volkovitch – tome 1 – La lignée

Nina Volkovitch 01Le souffle froid et vivifiant de la Russie souffle sur la littérature pour ados !

La lignée est le premier tome de la trilogie Nina Volkovitch, paru aux éditions Gulf Stream en septembre dernier. On y découvre la Russie du milieu de XXème  siècle (du temps de Staline) à travers une héroïne à l’histoire difficile et au caractère fort : Nina Volkovitch.

Pour poser le décor, l’auteure, Carole Trébor est la mieux placée, en effet, historienne de métier, elle a réalisé sa thèse de doctorat autour des échanges artistiques entre la France et l’URSS (1945-1985), dont son roman est très fortement inspiré. Mais en plus d’une forte influence historique et artistique, la série voit peu à peu le fantastique s’insinuer dans l’intrigue…

Une chose est certaine, la Russie est un pays peu exploité dans la littérature jeunesse et ado, et c’est avec émerveillement et délice que l’on découvre une nouvelle culture…Nina nous voilà !

Moscou, 1948

Les deux parents sont des ennemis de la Patrie : d’oabord son père, qui a disparu depuis de nombreuses années vers la France mais dont elle n’a plus de nouvelles ; puis sa mère, accusée de propagande antisoviétique pour avoir défendu des artistes occidentaux.

C’est ainsi que Nina est envoyée dans un orphelinat avec d’autres enfants dans le même cas qu’elle, issus d’ennemis du Parti. Elle va y apprendre à apprécier son pays à sa juste valeur et à porter les convictions du Parti… on du moins faire semblant.

En effet, peu avant son envoi dans l’orphelinat, la mère de Nina lui a laissé certains indices la poussant à se rebeller discrètement contre ce que l’on lui inculque de force : la bravoure de Staline, surnommé le Petit père peuples, des pans d’histoire entiers effacés car ils ne conviennent pas au Parti, etc.…

Le but de Nina devient vite clair : s’échapper au plus vite de l’orphelinat pour retrouver la trace de sa famille éparpillée, et enfin découvrir ses mystérieuses origines la rendant si particulière…

Une histoire rapidement captivante à l’univers culturel riche

L’histoire de Nina Volkovitch, commence de façon assez « traditionnelle », avec un orphelinat, une héroïne quelque peu rebelle cherchant à retrouver la trace de ses parents, etc. Mais le roman possède deux points forts : premièrement le lieu où il se déroule et son époque : la culture que l’on découvre ici est extrêmement peu traitée pour le lectorat jeunesse et adolescent. Ainsi découvrons-nous des traditions, mais surtout la politique terriblement oppressive du pays : une partie de l’Histoire qui mérite que l’on s’y attarde.

Second point fort, l’ambiance qui imprègne l’orphelinat, oppressante pour Nina (qui a quinze ans, mais qui parait toujours cinq de moins) qui a un grand mal à s’intégrer, le fait pour elle de toujours avoir sa poupée à son âge n’aidant en rien…

Le jeu de piste qui se dessine au fil des chapitres dans la première partie du livre est tout simplement très bien écrite et surtout prenante, donnant envie de sauter d’indices en clins d’œil (la plupart faisant référence à des œuvres, décryptées par l’auteure).

Mais quelle place au fantastique dans tout ça ? Vous ne le rencontrerez qu’à la seconde partie du roman, et cela de façon très ténue, mais suffisante pour un roman introductif.

En effet, il se passe tant de choses dans ce premier tome qu’il aurait été dommage d’y incorporer du fantastique en masse dès le début. Son installation est donc lente mais bien présente et nous amène vers le second tome, que l’on pressent initiatique, et beaucoup plus imprégné d’imaginaire.

En conclusion, Nina Volkovitch est une très belle découverte littéraire, à conseiller dès 14 ans. Bien écrit, sans fioritures, Carole Trébor mène son lecteur de main de maître. A découvrir pour s’émerveiller et découvrir un nouvel univers : celui de la Russie ainsi que la passion de la peinture le tout avec un soupçon de magie…

La suite des aventures de Nina vient d’ailleurs de paraître le 10 janvier dernier sous le titre : Le Souffle. Le troisième tome est quand à lui prévu pour mai 2013.

Nina intégrale trilogie

Chronique : Doregon – Tome 2 – La guerre de l’ombre

Doregon 02Et maintenant, l’affrontement…

Second tome de la trilogie des Portes de Doregon, La guerre de l’ombre nous offre enfin la rencontre magistrale et tant attendue entre Mia et ses plus grandes peurs : la perte de l’être aimé et la confrontation avec son demi-frère Moone. Un second tome aussi fascinant que le précédent et qui annonce de belles surprises…

De retour en Doregon

Du temps a passé depuis que Mia a découvert pour la première fois Doregon. Elle sait maintenant se servir un peu mieux de ses pouvoirs et connaît les responsabilités et les sacrifices qu’implique le fait d’être le gardien de ce monde-portail.

Mais le plus dur reste à faire pour Mia : elle va devoir affronter Moone, dont la soif de pouvoir et de beauté menace de détruire Doregon et tous les mondes qui y sont entreposés.

« Ce qui va se passer…maintenant que les lignes du temps ont été modifiées »

Encore une fois, les jeux dans les passés et futurs possibles sont très présents, et il vous faudra avoir un minimum de concentration pour bien suivre le fil de l’histoire qui se corse un tantinet.

On en apprend encore un peu plus sur les mystérieux mondes de Doregon ainsi que la façon dont ils sont créés et comment faire pour les protéger d’une possible invasion ennemie. C’est là que l’on commence à apercevoir toute l’étendue de cet univers unique qui n’a pas fini de nous étonner.

Des moments complices, de l’humour, La guerre de l’ombre n’en est pas dépourvue, car elle nous permet de voir sous un nouvel angle la relation fusionnelle qu’entretient Mia avec Josh, mais aussi celle beaucoup plus malsaine, de Moone avec sa « sœur ».

Le début d’une guerre âpre s’annonce, et nous lecteurs, en sommes les spectateurs fascinés et impuissants. Tout se précipite dans ce second tome, on passe de révélations en surprises sans discontinuer.

La guerre de l’ombre, est donc une très bonne suite, elle ravira certainement tous ceux qui auront l’envie de tenter l’avenure, toujours dès l’âge de treize ans jusqu’à beaucoup plus grand. Vivement le troisième et dernier tome : les cracheurs de lumière, à paraître au printemps 2012.

Cette chronique a été rédigée pour le site ActuSF.

Chronique : Doregon – Tome 1 – Les portes de Doregon

Doregon 01A la découverte d’un univers unique, fascinant, envoûtant.

Carina Rozenfeld est une auteur de fantastique de nationalité française. Elle a notamment écrit la série La quête des Livre-monde, paru chez Intervista qui a rencontré un beau succès (et qui devrait bientôt être réédité), Les clefs de Babel paru chez Soon (la collection SF ado de Nathan) qui a remporté de nombreux prix, ou encore Lucille et les dragons sourds chez Kryos.

Doregon, le monde imaginé et peint par une artiste

Mia est une jeune femme passionnée par la peinture. Elle suit des cours au Beaux-Arts ; son frère Moone quand à lui est un artiste-photographe réputé et reconnu, et sa mère disparue depuis longtemps a su elle aussi à sa façon lui transmettre cette passion.

Et la soirée de vernissage à laquelle on assiste nous lecteur, est déterminante : pour Mia, pour Moone, pour Josh, mais aussi pour Doregon… mais qu’est Doregon ? C’est simple, c’est le monde que Mia a inventé, dessiné et peint. Mais c’est en fait bien plus que l’univers qui sort de la tête d’une artiste de talent… Doregon existe et existait bien avant que Mia ne l’imagine, et ses tableaux sont en réalité des passerelles pour se rendre en Doregon…

Une intrigue fascinante, des personnages mémorables

Les portes de Doregon est un roman surprenant par bien des aspects : non contente de se réapproprier le genre fantastique, Carina Rozenfeld créé ici un univers tout à fait original.

Les mondes-passerelles ne sont pas nouveaux en soi, mais l’utilisation que l’auteur en fait, et l’explication du monde et de son agencement nous poussent à y voir un monde fouillé, très détaillé et totalement enchanteur.

Et même si au début du roman le lecteur a un peu de mal à se situer d’un point de vue chronologique, l’horreur de la situation ne tarde pas à être révélée. Car en plus de voyager entre les mondes, le temps est lui aussi une donnée malléable, d’ailleurs, les différentes parties sont distinguées selon leur chronologie : Partie 1 : Ce qui se passe, Partie 2 : Ce qui aurait dû se passer

En plus de cela, les personnages sont peu nombreux mais extrêmements fascinants, leur psychologie étant très « complexe » (quand je dis complexe, entendez très creusée et non pas compliquée).

Ainsi vous avez le personnage central, Mia, héroïne et victime à la fois. Josh, le petit ami de Mia, mais aussi bien plus que cela. Moone, le demi-frère de Mia, qui est à la fois la source de beaucoup de joies et de malheurs pour Mia de par ses ambiguïtés, c’est aussi le personnage le plus intéressant dans sa personnalité. Enfin, il y a Garmon, sorte de maître spirituel pour Mia, c’est lui qui fera son apprentissage du monde de Doregon.

Voilà pour les personnages humains, il reste juste une espèce dont nous n’avons pas encore parlé : les lymbiotes (terme créé par l’auteur, mélange du mot lynx et symbiote). Ces créatures étranges et uniques ont un don très spécial et peuvent se lier par l’esprit pour la vie avec un humain, et un seul, mais rares sont les élus à avoir cette chances.

L’univers quand à lui nécessiterai bien plus qu’une simple chronique pour le décrire et l’expliquer clairement, aussi je vous recommande plutôt de vous précipiter sur cet ouvrage qui mérite d’être connu, et qui se dévore littéralement. Bien que publié chez l’Atalante jeunesse, ce livre s’adresse à un public âgé d’au moins treize ans et plaira tout autant aux adultes.

Prochaine chronique sur la suite des portes de Doregon : La guerre de l’ombre ; quand au troisième tome : Les cracheurs de lumière, il devrait sortir au printemps 2012.

9.5/10

Chronique : La prochaine Fois

la prochaine foisOui, je sais, certains adorent Marc Levy, d’autres trouvent que ça n’est pas de la littérature mais plutôt du genre Harlequin… les deux avis sont facilement adoptables il est vrai, mais Marc Levy a un petit quelque chose qui fait que personnellement, j’adore ses débuts de roman mais suis ensuite énormément déçue par ses fins. La question est donc : Avez-vous aimé ou au moins apprécié La Prochaine Fois ? Étant donné que vous ne pouvez pas me répondre directement (mais vous êtes bien sûr invités à laisser votre avis par le biais des commentaires) je vais donner mon avis : oui mais… non !

Eh oui réponse mitigée, désolée. En effet, je dois avouer avoir adoré le cadre et l’ambiance du livre : le lieu (où se déroule la majorité de l’œuvre) Londres, recèle un charme certain, et la clé de voute de l’œuvre, son thème : la peinture. C’est une plongée vertigineuse dans un monde très fermé que celui de l’art qui nous est offert à travers une quête de tableaux, et une quête de l’amour par la même occasion, ne l’oublions pas.

Il faut avouer que pendant les trois quarts du roman j’étais vraiment dedans, mais vers la dernière partie, Marc Levy a réussi à se saboter tout seul. Je ne vous en dit pas plus, mais je trouve cette fin beaucoup trop tirée par les cheveux et surtout trop niaise… et le dernier chapitre aurait pu ne pas exister, cela aurait été tout aussi bien je trouve.

Pour conclure, ce Marc Levy se lit bien, et même très bien, mais on reste déçu par un manque de nouveauté dans les idées de l’auteur…

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Chronique : La jeune fille à la perle

jeune fille perleUn très beau roman qui nous entrouvre les portes du monde feutré et fascinant des peintres flamands….

Vous connaissez sans doute la célèbre tableau de Jan Vermeer représentant une jeune fille aux grands yeux, parée d’un turban bleu et jaune.

Et bien ce que nous offre ici Tracy Chevalier, c’est l’histoire romancée derrière le tableau. Plongés dans une ville de Delft magique par son réalisme, c’est avec un plaisir sans bornes que l’on suit au fil des pages Griet, la nouvelle servante des Vermeer.

L’ambiance est vraiment telle que l’on peut l’imaginer à l’époque : l’univers dur des servantes avec leur dures corvées et leur statut peu élevé au sein de la société…cela additionné à un mépris, voir une haine, comme c’est le cas pour la maîtresse de maison qui hait Griet.

De plus, Tracy Chevalier a une écriture des plus sublimes, elle arrive à parler du peintre sans jamais écrire son nom, on le devine par sa plume subtile. Le voile est à peine levé sur la peinture et ses mystères, de même que sur les émotions des personnages…rendant l’atmosphère tendue et la lecture encore plus attrayante. Les références sont nombreuses sur les autres tableaux de Vermeer, on entend ainsi parler entre autres de « La laitière » et de sa création. Vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé cet ouvrage, son réalisme, sa beauté…

Merci beaucoup à Tracy Chevalier pour ce voyage dans le temps et dans l’art secret de la peinture.

10/10

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