Il y a la PAL (ou pile à lire), il y a la wish-list (qui regroupe tous les livres que vous voudriez lire un jour…) et puis il y a la PAC. Et bien oui, la pile à chroniquer ! Et parfois, il arrive que l’inspiration ne vienne pas, qu’elle tarde… ce qui fait que les livres s’accumulent jusqu’à former un nid de livres à chroniquer. Pour certains, la flamme n’est jamais venue, et les années se sont écoulées… Pour d’autres, ils sont récents et ont même été des coups de cœur… mais je ne me voyais pas faire une chronique entière. Et comme se sont tout de même des ouvrages que j’ai lu dans leur intégralité et apprécié, il est impossible pour moi de ne pas en parler !
Shanghai Baby – Weihui – Picquier Poche
Lors de sa
parution en 1999 en Chine et en 2001 en France, Shanghai Baby a été
immédiatement un phénomène éditorial. Pourquoi ? Car c’est l’un des
romans/récits emblématiques de l’après Révolution Culturelle. Il est totalement
libéré, parle de sexualité, qui plus est avec un étranger – un Allemand ! –
c’est l’un des premiers ouvrages à être transgressif sur tous les plans. Dans
le même genre, il y a eu Bonbons Chinois, de Mian Mian, lui
aussi très médiatisé à l’époque pour les mêmes raisons…
Dans Shanghai
Baby, on suit une femme libre, sans complexes, qui fait ce qu’elle
désire réellement de sa vie. Dans ce contexte social fort, on comprend pourquoi
l’ouvrage a été un phénomène. Car en ce qui concerne le roman lui-même, il est
intéressant et nous fait découvrir un Shanghai nocturne inconnu, mais ne fait
pas non plus rêver…
Là est
peut-être la limite du livre-phénomène, il n’en est un que parce que le
contexte passé le rendait exceptionnel. De nos jours, la lecture d’un Shanghai
Baby, qui plus est en occident, n’a plus rien d’exceptionnel ni de
transgressif.
C’est donc
un ouvrage intéressant à lire si l’on se recontextualise dans la société
chinoise des années 90/2000. Mais pour ses qualités intrinsèques de roman, Shanghai
Baby est très dispensable…
La Rouille – Eric Richer – éditions de l’Ogre
Si vous cherchez
un roman initiatique violent comme il faut, La Rouille sera parfait.
Sorti relativement inaperçu à sa sortie lors de la Rentrée Littéraire 2018,
l’ouvrage mérite pourtant le détour. Avec une plume qui percute, souvent
abrupte, parfois lugubre mais toujours superbe, Eric Richer nous emmène dans un
pays qui ressemble beaucoup à une Russie post-apocalyptique. Ou à une Russie
d’aujourd’hui désœuvrée qui a besoin de ses traditions éculées pour survivre.
Nous sommes
dans la petite ville d’Ilyviesk, que rien ne différencie des autres bleds
paumés de la région. Il y a la violence, la pauvreté, la survie et… le
Kännöst. Tradition purement masculine et totalement brutale à laquelle le jeune
Nói ne pourra pas couper. Jeune, mais déjà
terriblement lucide sur sa vie, son « avenir » et ce qu’il ne souhaite
pas en faire.
Pour oublier, il se défonce avec
ce qu’il trouve, souvent des solvants et détergents qui lui défoncent le
cerveau et lui permettent de voir le requin. Forme magnifique qui flotte dans
les méandres de sa conscience explosée… et qui l’aide à oublier la perte de
son frère, la disparition de sa mère… Il n’y a d’ailleurs pas que sa mère qui
a disparu, quasiment toutes les femmes ont déserté, elles sont devenues très
rares. On parle même de no woman’s land
pour désigner la région tant les traditions pèsent sur elles. Elles ont toutes
fuit ou presque. Pour illustrer toute la violence poétique contenue dans ce
roman, cette phrase me semble parfaite :
« Le
soir venu les libellules copulent, et un pare-chocs les encule…«
La
rouille n’est pas un roman qui conviendra à tout le monde.
Mais il est d’une beauté lourde, pesante. On ne peux pas oublier facilement ce
genre de lecture. Et je ne le souhaite tout simplement pas.
L’insomnie – Tahar Ben Jelloun – Gallimard
J’ai rarement lu un livre aussi
ennuyeux… pourtant l’argumentaire était extrêmement tentant. Un homme qui a
besoin de tuer quelqu’un pour trouver le sommeil… Il commence par sa mère, et
se rend compte qu’il peut à nouveau dormir paisiblement pendant plus d’un an…
Avant que l’insomnie de reprenne le dessus. Il va donc devoir tuer à nouveau si
il veut retrouver un sommeil paisible. Et c’est là que ça dérape. Pour dormir,
il va donc devoir abattre beaucoup de gens et de travail si il veut retrouver
des nuits paisibles… Il va d’ailleurs tellement en tuer pour dormir (plus il
tue, moins il récupère de temps de sommeil) qu’il va commencer à créer une
sorte de système de points. Il appelle cela des « crédits sommeil »,
chaque personne en fonction de son passé lui fournissant un montant différent
quand il les tue…
Mais comment une telle histoire peut-elle se terminer ? Et bien de façon totalement hasardeuse et ratée… Bref, passez votre chemin, j’ai perdu mon temps pour ne pas que vous perdiez le votre.
Sukkwan island – David Vann – Gallmeister ou Folio
Je vais être
concise sur cet excellent roman : un père divorcé décide d’emmener son fils sur
un île sauvage en Alaska pour renouer avec lui. Le but est simple, ils emmènent
du matériel de pêche, le strict minimum pour survivre là-bas et devront ensuite
se débrouiller par eux-mêmes. Sauf que bien entendu, rien ne va se dérouler
comme prévu…
Je ne peux
RIEN vous dire d’autre sur ce roman hormis qu’il faut le lire pour en découvrir
toute la teneur, l’atmosphère. Si vous aimez les intrigues se déroulant en
milieu sauvage et faisant appel à une psychologie des personnages fouillée, ce
roman est fait pour vous. Si vous aimez être surpris/scotché par un livre, il
est fait pour vous. Si vous voulez une histoire mémorable, ce livre est fait
pour vous.
On oublie pas Sukkwan island. Jamais.