Archives du mot-clé meurtre

Chronique : Meurtres à la pause-déjeuner

Un roman policier à la façon italienne… bourré de suspense, sans oublier une bonne dose d’ironie !

Viola Veloce est une auteure italienne et… c’est absolument tout ce que l’on sait d’elle. En effet, elle écrit sous pseudonyme, on sait seulement que comme son héroïne, elle travaille dans une grande entreprise italienne.

Meurtres à la pause-déjeuner est son seul roman paru en France, il est édité aux éditions Liana Levi, dans la collection Piccolo.

Il était une fois… sérial killer en entreprise…

Des pieds qui dépassent dans les toilettes d’une grande entreprise, voici la terrible vision qui accueille Francesca. L’une de ses collègues vient d’être étranglée, nul ne sait par qui ni pourquoi, mais le tueur qui sévit dans l’entreprise n’en est qu’à sa première victime…

Qui peut bien en vouloir aux salariés du service de planification de cette grande entreprise milanaise ? Quel avenir attend les salariés « survivants » ? Comment Francesca va-t-elle faire face à ce terrible coup du sort, elle qui vient de subir une rupture violente et qui subit également l’inquiétude constante de ses parents ? En plus de se gérer elle-même, ce sont également les espoirs et les craintes de son entourage étouffant qu’elle doit tenir éloignés d’elle… au risque de devenir folle !

Caustique, drôle, mordant… et bien mené

Si vous recherchez un bon roman à la fois bien écrit, inclassable et très distrayant, vous êtes au bon endroit !

Meurtres à la pause déjeuner est un livre que j’ai vraiment aimé, malgré quelques petits passages à vide. Entre le roman humoristique et le genre policier, l’auteure n’a pas su choisir, mais qu’importe, au contraire. Ça donne justement à ce livre une saveur à nulle autre pareille.

On y découvre ainsi le monde « fabuleux » des grandes entreprises avec leurs syndicats, leurs mises au placard, leurs coup de pression, les suspicions entre collègues. Bref, c’est génial et très réaliste.

Au passage, c’est le personnage de Francesca que nous allons voir sous différents jours. Celui de l’entreprise, oui, mais également celui de la vie personnelle, et même sentimentale. Le choc culturel entre elle et ses parents est d’une telle violence qu’il en devient drôle. D’ailleurs, la façon dont elle se dépatouille de leurs tentatives pour lui trouver un fiancé est très amusante !

Le seul petit défaut que l’on pourrait reprocher à ce roman, c’est qu’il tourne parfois en rond. Il y a un passage à vide au niveau des trois quarts du roman qui pourrait décourager un peu. Mais tenez jusqu’au bout, car la fin vaut le détour. Vous saurez qui a tué et pourquoi, et ça, il faut avouer que c’était une idée créative.

…..

Alors, si vous voulez découvrir un roman original Meurtres à la pause déjeuner est absolument parfait. Décalé, mais pas trop. Bien écrit et traduit, les éditions Liana Lévi ont fait un beau travail dessus. En plus, c’est l’occasion de découvrir un peu plus la littérature italienne !

PS : Je trouve que la couverture colle parfaitement à l’ambiance du livre… Cette femme à son bureau, le regard dans le vague, entourée de couleurs un peu fades et tristes. C’est le visuel parfait.

AUTEUR :
EDITEUR : ,
TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : La trilogie des ténèbres – Tome 1 – L’évangile des ténèbres

Un roman qui nous montre au travers d’un polar ce qui se passe en Corée du Nord…il faut le lire pour le croire !

Peut-être connaissez-vous déjà Jean-Luc Bizien, c’est un auteur reconnu dans de nombreux domaines. Polars, jeunesse, fantasy… il s’essaye à tous les genres.

Dans L’évangile des ténèbres, il nous fait découvrir la Corée du Nord à travers le « jeu de piste » fomenté par un tueur en série… Et si vous pensez que l’auteur a une imagination débordante, c’est effectivement le cas, mais sachez qu’il a fait appel à une très solide documentation avant de ce lancer dans l’écriture de ce roman.

L’évangile des ténèbres est le premier tome de la Trilogie des ténèbres, il peut malgré tout se lire indépendamment si vous le souhaitez. Le second tome s’intitule Le berceau des ténèbres et le troisième La frontière des ténèbres.

Un prédateur sévit en Corée du Nord

En Corée de Nord, tout le monde est parfait. C’est-à-dire qu’il n’y a pas de « détraqués ». Pas de personnes handicapées, pas de malades, pas de nains, pas d’êtres faibles… En réalité, bien sûr que si, il y en a, mais ils sont soigneusement « écartés ». Alors, quand un tueur en série sévit dans les rues de Pyongyang, c’est le pays entier qui est mis en danger. Enormément d’enjeux sont sur la sellette, et arrêter ce tueur devient vite une priorité d’ordre national…

Car un meurtrier n’est rien d’autre qu’un détraqué de plus, or la Corée du Nord ne produit que l’élite de l’humanité, c’est bien connu. Ajoutez à cela un jeune journaliste occidental infiltré au Nord et vous aurez une petite idée du tableau qui vous attend.

Un roman sous haute-tension qui fonctionne à merveille

Pour ceux qui aimeraient un roman noir et corsé avec pour toile de fond le pays le plus secret au monde, c’est parfait !

L’évangile des ténèbres a en effet le mérite de traiter de sujets brulants et malheureusement toujours d’actualité en Corée du Nord : malnutrition de la population, délation pour le moindre regard de travers…

L’intrigue a beau être assez simple dans l’idée, son déroulement reste fascinant pour beaucoup de raisons. Tout d’abord, la découverte totale du monde de la Corée du Nord, ses traditions, sa propagande, ses moyens de pression, son fonctionnement. On en apprend énormément sur les différentes strates de cette société à nulle autre pareille.

Saviez-vous par exemple que les coréens du Nord sont plus petits que ceux du Sud ? La cause : la malnutrition. Que l’on peut être dénoncé par son voisin pour un simple regard de travers ? Que toute personne jugée « non conforme » au régime est envoyée dans des camps de travail, ou pire : fusillé.

Outre donc l’intrigue qui se tient bien, nous avons des personnages pour lui donner corps. Mais certains m’ont beaucoup moins convaincue, du moins ceux qui viennent des États-Unis. L’un des personnages phare du roman, c’est Seth Ballahan, un journaliste américain. Mais pour moi, c’est un concentré de stéréotypes, et même si c’est voulu par l’auteur, il est très vite détestable. Imbu de lui-même, toujours pressé, blasé, égoïste… Il est pour moi loin d’être un atout pour cette histoire.

Mais en ce qui concerne les personnages Nord-Coréens, ils sont extraordinaires ! Alors, ça vaut bien ce petit désagrément.

…..

Conclusion ? L’évangile des ténèbres est un bon polar qui vous dépaysera à tous points de vue. Une fois dedans, vous serez pris dans les filets de cette histoire qui s’inspire à 100% de faits réels se déroulant encore (ou ayant eu lieu) en Corée du Nord de nos jours.

 

Chronique : Le cœur du problème

Un roman étrange qui joue avec l’absurde tout en étant captivant

Christian Oster est un écrivain français qui œuvre aussi bien dans le domaine de la jeunesse que de la littérature avec un grand L. Tous lectorats confondus, il a ainsi plus d’une vingtaine d’ouvrages à son actif !

Avec Le cœur du problème, paru chez Points, c’est dans le domaine de la littérature que nous le découvrons avec une histoire qui commence de façon complètement folle et improbable : un homme découvre un cadavre chez lui. Que va-t-il bien pouvoir en faire ?

Un homme mort dans le salon… et alors ?

Tout débute avec le cadavre d’un homme mort dans le salon. Notre narrateur est pour le moins déstabilisé, d’autant que cela n’a pas l’air de préoccuper sa femme, qui prend tranquillement un bain… Et cela ne va pas aller en s’arrangeant quand il comprends qu’elle n’a aucune envie d’assumer ce qu’il s’est passé et fuit les responsabilités… le laissant avec une myriade de question, et un mort.

L’absurde poussé à l’extrême

La lecture de ce roman vous obligera à au moins une chose: lâcher prise. Vous n’aurez pas les réponses à toutes les questions qui vous taraudent, certains personnages risquent de vous agacer sérieusement… et pourtant, à sa manière, ça fonctionne.

La première partie du roman est selon moi la meilleure. On ne sait pas encore tout des circonstances qui ont amené ce cadavre dans le salon, mais on « savoure » les mauvaises idées qu’a le narrateur pour s’en débarrasser. Surtout quand il décide d’acheter des pains de glace par kilos et de s’aider de Google pour cacher le cadavre indésirable… C’est à mourir de rire tant ça va loin dans l’absurde !

Cependant, j’avoue que le traitement de la psychologie des personnages m’a parfois laissée perplexe par leur manque de crédibilité et/ou de logique. Mais je pense que c’est totalement voulu, et que le but et de savourer l’entremêlement dans lequel est le narrateur, sans personne pour l’aider.

…..

Christian Oster nous offre ici un guide des mille mauvaises manières de se débarrasser d’un cadavre, puis d’un policier un peu trop curieux. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’un roman policier, mais d’un roman sous forme de récit. Malgré un suspense qui nous tient jusqu’au bout, c’est surtout un humour détaché et féroce qui nous est ici offert, avant toute idée d’intrigue policière.

Si vous aimez les histoires étranges et drôles, Le cœur du problème vous fera passer un excellent moment !

EDITEUR :
TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : En ce lieu enchanté

Un récit original et touchant… dans le couloir de la mort d’une prison des Etats-Unis

Paru en France en 2014 chez Fleuve éditions, En ce lieu enchanté est un roman de l’américaine Rene Denfeld. Il s’agit de son premier (et seul) roman paru en France.

Un condamné qui refuse d’être sauvé

Un homme (le narrateur), muet, attend. Il attend la fin, qu’il espère proche. Il a commis des choses atroces, et maintenant, il est dans le couloir de la mort. Attendant. Son seul espoir réside dans une mort imminente… Mais c’est sans compter sur la dame, une femme qui fait tout pour sauver les pires criminels de la condamnation à mort, souhaitant leur offrir la vie, même si elle est derrière les barreaux.

Notre terrible criminel ne souhaite qu’une seule chose : que la dame échoue dans sa louable entreprise pour enfin en finir avec ce qu’il est…

Un roman d’une beauté et d’une tristesse infinie…

Si vous cherchez un roman qui respire la joie de vivre, vous pouvez passer votre chemin. Ici, vous aurez rendez-vous avec la violence (parfois latente), la saleté, le désespoir… Et malgré tout ces adjectifs peu reluisants, En ce lieu enchanté est un magnifique roman.

Ce roman, c’est une sublime et terrible incursion dans la misère sociale, celle des Etats-Unis profonds. Avec son lot d’alcooliques, de chômeurs, de familles en perdition… Et le résultat en devient parfois atroce, en la personne de ce criminel que nous suivons tout au long du roman. Mais il n’y a pas que lui qui a des choses à se reprocher, le mal se trouve également à d’autres endroits…

Mais la dame, cette sauveuse qui parcoure avec aisance le couloir de la mort va tout faire pour aider notre criminel de narrateur. Fouillant son passé (parfois sans son accord), refaisant l’enquête en totalité, rencontrant le peu de membres restants de sa famille… Elle récolte ça et là de maigres indices qui peut-être pourront le sauver. Malgré lui ? Toute la question est là…

….

Difficile de développer plus sur ce roman, que dire sinon qu’il est magnifique et dur à la fois. Si vous souhaitez découvrir un texte différent et d’une délicatesse rare, En ce lieu enchanté sera parfait. Il n’est pas des plus évident à découvrir, mais il en vaut la peine.

AUTEUR :
TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : Hugo de la Nuit

Un roman curieux et étrange qui sait captiver par son originalité et son écriture mordante…

Si le nom de Bertrand Santini ne vous dit rien, c’est l’occasion de découvrir un auteur, mais également une plume à la verve lyrique ! En tout cas, dans Hugo de la Nuit, c’est tout à fait le cas, mais l’auteur est également connu pour une autre œuvre, beaucoup plus enfantine : Le journal de Gurty.

Paru chez Grasset Jeunesse en avril 2016, Hugo de la nuit est un roman assez difficile à classer en termes d’âge du lectorat, mais une chose est certaine, c’est un beau roman ponctué d’audace à classer dans un univers gothique à la Tim Burton mais aussi inspiré de Shakespeare… et d’une foule d’autres choses ! Dans le même style, mais pour un public plus jeune, l’auteur a écrit L’étrange réveillon chez Grasset Jeunesse.

La mort signe-t-elle le début d’une toute nouvelle vie ?

Incroyable mais vrai, le héros de cette histoire commence par mourir avant que nous en fassions pleinement la connaissance. Les circonstances de son trépas restant très étranges et obscures… Tout ce que l’on sait, c’est qu’Hugo vient de mourir, mais qu’il n’a pas fini d’influer sur le monde des vivants : la propriété de ses parents est en danger, mais il n’y a pas que cela… ce qui se trouve sur la propriété elle-même est un danger…

Une histoire de fantômes, de famille et de trahisons

A découvrir dès l’âge de 13 ans environ, Hugo de la nuit est un roman que l’on peut qualifier d’atypique pour de nombreuses raisons : son écriture mordante qui ne laisse aucun répit au lecteur. Son vocabulaire plus travaillé que sur certains ouvrages destinés au même âge (et ça fait du bien diantre !), son univers très sombre assumé (on y parle meurtre, zombies, héritage et complot et autres choses bien sombres et tristes en toute impunité).

Au niveau de l’histoire, le lecteur sera forcément surpris car il y a peu de productions pour la  jeunesse qui proposent des romans autant hors des sentiers battus.

C’est sombre, très sombre, mais ça ne manque toutefois pas d’humour, même si celui-ci est parfois morbide à souhaits. C’est en cela que l’âge du lectorat est difficile à cerner. Je trouve que 12 ans, comme suggéré par l’éditeur, c’est un peu trop tôt. Alors que pour 14 ans, l’ouvrage commence à être trop « jeunesse », je le trouve donc idéal pour 13 ans environ, mais chaque lecteur est différent, il faut donc faire au cas par cas.

« Dors bien, jus de fœtus caillé ! »

Voilà un petit aperçu des réparties bien senties qui fusent tout au long du livre. Personnellement, j’ai trouvé ça drôle, car totalement inattendu, et une histoire sortant des clichés fait toujours du bien, mais ce n’est pas facile à conseiller en librairie.

…..

Pour conclure, Hugo de la nuit est un roman à part dans le panel que nous offre la production jeunesse. On y trouve un terrible complot familial, des fantômes sympathiques et désuets, des zombies bien flippants, mais également une créativité qui fait du bien ! C’est sombre, parfois lugubre, et alors ? L’écriture pleine de vie de Bertrand Santini contrebalance ce sentiment, nous offrant une comédie à la fois terrible et unique !

Chronique : Les Décharnés – Une lueur au crépuscule

Ou comment une invasion de morts-vivants éveillera le meilleur (et surtout le pire) chez l’être humain…

Paul Clément est un jeune auteur français qui peu à peu creuse son trou dans le monde du roman fantastique, plus particulièrement dans la branche zombie. Pour le moment, il a deux romans à son actif, Les Décharnés et Creuse la mort, tous deux chez Post apo éditions.

Avec Les Décharnés, Paul Clément signe un roman efficace et très crédible sur le point humain… à faire froid dans le dos !

Une journée tranquille et ensoleillée en Provence…

…avant le bain de sang. Patrick, vieil agriculteur de métier et misanthrope par principe va assister à une scène aussi terrible qu’incroyable. Un immense carambolage mettant à feu et à sang la route passant près de sa propriété. Seul « bémol », les gens victimes de cet accident hors-norme n’en ont pas fini avec la vie et sont devenus des zombies assoiffés de sang…

La cause ? Nous l’ignorons, tout ce que l’on sait, c’est que Patrick est censé survivre dans sa petite maison de Provence alors qu’elle est entourée de plusieurs centaines de zombies. Mais il n’a pas que sa simple carcasse à sauver des dents pourries des zombies, il doit également protéger la fillette qu’il vient d’arracher à une mort certaine… Comment peuvent-ils s’en sortir ?

Efficace et happant !

Je dois avouer avoir eu du mal à rentrer dans le roman au niveau des 60 premières pages. Le huis-clos avec les zombies me semblait très long… limite insoutenable, mais on peut y voir la volonté de l’auteur. Donc, en cela c’est réussit.

Mais le plus intéressant survient après. Quand Patrick et la petite fille qu’il a sauvée réussissent à s’enfuir de la ferme. L’interaction avec d’autres êtres humains est inévitable… et dangereuse.

C’est surtout dans les relations et la psychologie humaine que Paul Clément révèle tout son talent. Voir Patrick se confronter à tout un panel d’hommes et de femmes a quelque chose de stimulant et de très intéressant. Quelles seront les réactions d’untel face à une remarque ? Qui représente la loi et l’ordre dans ce genre de situation où tout semble partir en lambeaux ? Qui résistera à la tentation de faire absolument tout ce qu’il veut ?

Pour l’écriture, j’avoue ne pas franchement aimer la façon dont parle Patrick. La narration étant à la première personne, c’est Patrick qui narre au lecteur ses aventures post-apocalyptiques. Alors, certes, c’est un homme qui commence à avoir de la bouteille, son langage est familier donc sa façon de parler/écrire est tout à fait logique, il s’agit juste d’une question de goût pour ma part.

Mais on peut facilement passer outre l’écriture car elle est surpassée sans problème par l’intrigue. C’est nerveux, sous tension, et on ne sait jamais comment chacun va réagir et quand la mort frappera… ni sous quelle forme. Les Décharnés a beau être violent et empli d’hémoglobine – roman de survie post-apo oblige – vous y trouerez également de beaux sentiments : l’amour, le courage existent encore, même si ils sont devenus extrêmement rares. Les sentiments humains sont au premier plan dans ce roman qui devrait plaire à tout amateur de roman impliquant une invasion zombie.

……

Bref, une fois l’histoire lancée, ça ne s’arrête plus ! Si vous aimez les romans qui se dévorent (comme un cerveau !), les intrigues bien ficelées et même parfois cruelles, vous êtes au bon endroit. Les récits de ce genre sont habituellement l’apanage des auteurs américains, mais Paul Clément réussit à relever le défit avec adresse, et même mieux que certains. Bravo à lui !

Chronique : L’hiver dernier je me suis séparé de toi

Un polar bien retors et sombre, comme les japonais ont le secret…

Peut-être le nom de Fuminori Nakamura vous évoquera-t-il quelque chose ? L’auteur avait attiré mon intérêt il ya quelques années pour son roman Pickpocket. Ce sont maintenant trois ouvrages de cet auteur qui sont disponibles en France avec Revolver et son tout dernier paru en février 2017 : L’hiver dernier, je me suis séparé de toi. Ils sont tous disponibles aux éditions Philippe Picquier.

Un photographe aux goûts artistiques étranges… et mortellement dangereux

Un journaliste est chargé d’écrire un livre sur l’un des meurtriers les plus étranges du moment au Japon. Ses crimes sont si étranges et hors-norme, si malsains et inexpliqués que son profil fascine. C’est ainsi qu’il se retrouve mandaté pour écrire son histoire, ses motivations, ses pensées les plus obscures…

Mais cette plongée intime dans l’âme d’un meurtrier en quête de l’Art absolu est-elle sans danger ? Bien sûr que non… Jusqu’où peut-on fouiller dans le passé sans être soi-même influé par autant de mal ?

Un roman intimiste, sombre et étrange

Comme une grande majorité de romans policiers nippons, vous aurez droit ici à une intrigue à nulle autre pareille. Si vous recherchez quelque chose de classique ou de familier, ce n’est pas avec ce genre de roman que vous le trouverez. Non, L’hiver dernier, je me suis séparé de toi est un roman noir japonais qui va assez loin dans le genre tortueux.

Il s’agit d’une histoire de vengeance, d’esprit tourné et retourné en tout sens, d’amour aux (res)sentiments complexes et d’art où la perfection doit être atteinte, rien de moins. Le meurtrier de cette histoire est un photographe, et pour parvenir au cliché qui marquera les esprits à jamais, ce dernier est prêt à aller très loin… Trop loin.

Mais ce n’est pas le seul élément de l’intrigue qui comporte un réel intérêt. En effet, l’homme qui mène l’enquête pour écrire la biographie du meurtrier est également très intéressant. Peu à peu, on sent que son point de vue, ses pensées évoluent vers… autre chose. Quoi donc ? Impossible de vous le dire, mais les surprises sont de taille et s’enchaînent très vite en fin d’ouvrage !

D’ailleurs, si vous n’êtes pas familier des noms et prénoms d’origine japonaise, n’hésitez pas à noter qui est qui, car la fin du roman se densifie de telle façon qu’il vaut mieux reconnaitre chacun des personnages.

….

Quoi qu’il en soit, l’intrigue est passionnante, les révélations fascinantes et menées avec art. Même pour les plus férus de littérature policière, impossible de deviner le fin mot de l’histoire ! Mais tout se tient parfaitement du début à la fin… c’est un régal.

L’écriture de Fumonori Nakamura participe à ce sentiment d’accomplissement. Les chapitres sont très courts, le ton est factuel, efficace, presque clinique. Tout concoure à nous offrir un roman policier original et inclassable comme seuls les japonais en ont le secret.

Alors, si vous aimez les histoires sombres qui peuvent aller loin dans la créativité et la férocité, ce roman est fait pour vous. Attention, c’est aussi retors et malsain que délectable !

Chronique : Miso Soup

Rarement j’ai lu un roman japonais aussi génial, étrange et malsain…

Ryû Murakami (à ne pas confondre avec Haruki Murakami), est un auteur japonais très prolifique. En France, plus d’une vingtaine de ses livres sont publiés, tous aux éditions Picquier. Parmi ses titres les plus réputés, on peut citer Les bébés de la consigne automatique ou encore Bleu presque transparent.

Son style est toujours assez hard, il traite de tous les sujets, y compris les plus sordides : la prostitution des lycéennes dans Love & Pop par exemple, ou encore le thème du tueur en série avec Miso Soup. Et justement, Miso Soup est un roman fort étrange et fascinant à la fois…

A la découverte des quartiers chauds de Tokyo

Kenji est un jeune homme qui guide les touristes étrangers dans les ruelles les plus à vif de la capitale japonaise : Kabukichô. Bar à hôtesses, peep-show, rencontres et plus si affinité… C’est le paradis de la débauche version japonaise ! Alors, quand Kenji est contacté par un touriste américain nommé Frank pour visiter les coins les plus torrides du quartier, c’est avec plaisir qu’il accepte l’arrangement. Mais au fil des heures qui s’écoulent, les mimiques et les réactions de Frank travaillent beaucoup Kenji… Il est instable, a des réflexions malsaines, étranges. Au point que le jeune japonais se demande si son client n’aurait pas un lien avec le cadavre d’une jeune femme retrouvé la veille au soir dans des poubelles… Est-ce bien le cas ou le fruit d’une imagination débordante de la part de Kenji ?

Miso Soup, ou comment revisiter le thème du tueur en série

Rarement j’ai lu un roman aussi magnifiquement plongé dans l’ambiance sombre d’un autre Japon, celui de la nuit et des plaisirs. Tout en bizarreries, c’est la culture d’un monde différent et fascinant qui s’ouvre à nous : love hôtels, bars à hôtesses, etc., c’est une découverte totale.

Pour ceux qui aiment les romans sombres et très noirs, Miso Soup est fait pour vous. Il s’y trouve des scènes absolument mémorables. La façon dont la psychologie des deux personnages est mise en place par l’auteur est superbe. Et diabolique. Difficile de savoir qui affabule et qui franchi la ligne rouge… C’est construit de telle façon que l’ambigüité autour de Frank suscite de très nombreuses interrogations, aussi bien par Kenji que par nous lecteurs !

Ce roman est tout simplement génial et marquant. Certaines scènes vous resterons à jamais gravé dans la mémoire tant elles sont choquantes/malsaines/horribles (rayez la mention inutile). Et c’est justement cela que j’ai adoré. J’ai enfin trouvé un auteur qui va assez loin dans mes désirs de littérature. On découvre un univers fascinant et sombre totalement assumé. Ryû Murakami ne s’arrête jamais dans son obsession d’aller plus loin. Il nous pousse dans nos retranchements et nous interroge jusqu’aux ultimes pages…

………..

C’est une superbe réussite dans le domaine du roman noir asiatique. C’est magnifique de perversité, c’est glauque et ça tient bien la route… Au point que c’en est terrifiant.  Âmes sensibles, attention à vous toutefois !

Si vous tombez sur cet ouvrage, il vous faut donc vous le procurer absolument ! L’ouvrage est actuellement épuisé, mais il n’est pas difficile à trouver dans des magasins qui font du livre d’occasion. J’espère de tout cœur pouvoir le vendre à nouveau en librairie un jour : l’histoire, la couverture, tout es parfait.

Chronique : Rendez-vous dans le noir

Un polar ficelé à la façon nippone. Délectable, noir et extrêmement humain à la fois…

De son vrai nom Adachi Hirotaka, Otsuichi est un auteur japonais. Son roman Rendez-vous dans le noir est le seul paru en France. Il est sorti en 2014 aux éditions Picquier. Otsuichi a également participé à la création de nombreux mangas.

L’étrange relation entre une aveugle et un meurtrier se cachant dans sa maison

Un homme vient d’être mortellement poussé sous un train. Un autre part en courant suite à ce terrible événement, et se cache dans une maison toute proche de la gare. Il est recherché pour avoir poussé l’homme décédé brutalement. Il n’a pas le choix, il doit donc se cacher, et quoi de mieux que la maison d’une aveugle pour se faire ?

C’est alors qu’une chose étrange et indicible s’installe : un relationnel muet entre cette femme aveugle et le meurtrier de sang-froid… A quoi cela peut-il mener ? Les non-dits, les silences et l’atmosphère accablante vont se charger de nous le raconter…

Un roman minimaliste qui fonctionne à merveille

Difficile de faire un décor plus réduit : deux personnages qui accaparent quasiment toute la trame de l’histoire et une simple maison comme théâtre.

Et pourtant, on ne s’ennuie pas une seule seconde tant Otsuichi plante parfaitement bien l’ambiance. Sombre mais pas glauque, stressant mais pas flippant, tout y est savamment dosé pour donner une intrigue efficace.

Les chapitres alternent entre le point de vue des deux protagonistes, mais toujours d’un œil extérieur. Les phrases sont courtes, laissant la place au silence et à l’imagination qui font tout l’attrait de ce roman.

Une grande place est faite aux rituels du quotidien, ils sont simples mais extrêmement présents car la moitié du roman au moins est conté du point de vue de Michiru, la jeune femme aveugle. La façon dont sa vision des choses est narrée est extrêmement parlante.

Le moindre changement de place d’un objet pour elle est source d’une angoisse incommensurable. Et peu à peu, on se rend compte des enjeux de taille que doit surmonter son habitant clandestin. Pas un bruit, pas un seul objet à déplacer, il doit se fondre parmi les ombres…

Sous couvert de nous offrir un roman policier, l’auteur nous parle du mal-être qu’on certains dans le monde de l’entreprise. En effet, il est tout aussi cruel (voir plus) au Japon, qu’ailleurs. C’est intéressant de voir comment se créé un bouc-émissaire. Comment de petites piques ou remarques se transforment peu à peu en harcèlement… Et vous risquerez d’être surpris par la conclusion de l’histoire !

….

Loin d’être un roman à suspense classique, Rendez-vous dans le noir vous offrira une vision très différente de ce que peut-être un roman noir. L’ambiance y est incroyable, on retient notre souffle avec délectation par moments… C’est un roman qui gagnerait à être connu !

Chronique : La compagnie des menteurs

La compagnie des menteursUn roman historique sombre, haletant et aussi obscur que les âges dont il traite…

Karen Maitland fait partie de ces auteurs qui gagneraient à être connus. Son univers est aussi obscur que saisissant et sa plume absolument efficace ! De nationalité anglaise, sa spécialité est le roman historique sur fond de policier. Avec il y a toujours un ou deux cadavres derrière l’étable, et une quantité de suspects tous plus crédibles les uns que les autres.

En France, nous avons la chance d’avoir trois de ses ouvrages publiés : La compagnie des menteurs (le plus connu d’entre tous), Les âges sombres et La malédiction du Norfolk. Bienvenue dans un univers historique à nul autre pareil…

Un petit groupe d’itinérants qui grossit, grossit…

1348 – Tout commence avec un maître et son apprenti qui traversent l’Angleterre à la recherche de travail tout en fuyant les ports et les grandes villes, où sévit la peste. Puis, la petite compagnie se retrouve à être rejointe par un couple qui attend un enfant, dont le passé reste mystérieux, puis c’est au tour d’un marchand taciturne, etc.

Mais cette petite troupe itinérante fuyant la peste est loin de se douter à quel point elle va devoir lutter pour sa survie ! La maladie est une chose, mais les croyances populaires et les ont-dits sont parfois aussi mortels et autrement plus pernicieux…

Bienvenue dans un pays où les légendes se bâtissent sur rien, où on marie de force des infirmes entre eux pour conjurer le sort d’un village et où la superstition règne en maître… avec la saleté et la maladie…

Grandiose et captivant

Quand on est parti dans ce genre d’ambiance à la fois dure et sordide, on sait que l’on va passer un excellent moment de lecture. Cela peut paraître paradoxal pour certains, mais c’est le sentiment que j’ai quand un roman prend au tripes en passant par tous les stades de l’horreur, de la lâchetés, de la haine, des croyances…

On le devine assez rapidement, chaque personnage de la petite compagnie itinérante à un secret plus ou moins lourd à cacher, parfois même plusieurs ! Mais ce n’est pas le seul intérêt pour lire ce livre. On plonge avec délectation dans une Angleterre où l’ambiance est si magnifiquement retranscrite et où les personnages sont si creusés que l’on s’attache vite au moindre d’entre eux. Ici, point d’action à n’en plus finir, mais plutôt un rythme lent, lancinant, où chacun attend son heure, ce qui créé une atmosphère pour le moins mortifère et sur le fil… Délectable.

.Ici, on nage entre le roman historique, tout en empruntant les codes de l’imaginaire et des contes populaires, sans oublier le côté sanglant et cru des polars. Bref, c’est le mélange de genres ultime, parfait (selon moi). Karen Maitland vous tiens ici avec son histoire, et elle ne vous lâchera pas de sitôt. Même après la lecture, vous y repenserez (les dernières phrases de ce roman tournent encore dans ma tête tant tout est maîtrisé).

Il faut également saluer le travail de traduction assuré par Fabrice Pointeau, car c’est également grâce à lui que l’on se retrouve avec un ouvrage si travaillé et brillamment écrit.

J’espère avoir su vous convaincre avec cette chronique : cet ouvrage laisse un souvenir durable et plaisant. Sa lecture est profonde, captivante et surtout incontournable. Régalez-vous avec ce livre passionnant ! Et puis, la bonne nouvelle, c’est qu’il y en a d’autres… (MAJ 11/2023 – Malheureusement La malédiction du Norfolk et Les âges sombres sont épuisés, mais vous pourrez toujours les trouver d’occasion !).

J’ai lu La compagnie des menteurs sur les très bons conseils d’une amie, il y a presque dix ans maintenant… Et j’ai vendu plus de 500 exemplaires de ce roman tellement je l’ai adoré !