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Chronique cinéma : Alita Battle Angel, l’adaptation de Gunnm vaut-elle le détour ?

Gunnm, manga en neuf tomes créé par Yukito Kishiro est devenu un classique parmi les classiques. A la fois meccha, post-apocalyptique, philosophique, visionnaire, Gunnm est tout simplement un monument, tous genres confondus. Il a durablement marqué des générations entières de lecteurs.rices (moi comprise). Vous pouvez d’ailleurs retrouver la chronique du premier tome ici pour vous faire une idée de l’intrigue générale.

Ne passons pas par quatre chemins pour ceux qui ne souhaitent pas lire la totalité de l’article : la réponse est oui, cette adaptation vaut le coup, elle est même bluffante.

Une véritable claque

Cela faisait une dizaine d’années que j’attendais cette adaptation, alors autant dire que la barre était extrêmement haute. J’avais peur d’être déçue, j’y allais même avec appréhension… Voir la version cinématographique d’une œuvre qu’on a lue et relue pendant des années est forcément un moment que l’on attend… et que l’on redoute.

Et pourtant, dès les premières minutes, on sent que ce film a une âme, qu’il a été peaufiné, pensé dans ses moindres détails. L’esthétique de l’univers est très fidèle à celle qu’avait initialement créé Yukito Kishiro, et avec les effets spéciaux d’aujourd’hui, la ville de Zalem et la Décharge, au dessous, n’en sont que plus belles.

Et surtout, le Motorball a une place de choix dans le film ! C’étaient les scènes que j’attendais avec le plus d’impatience. Pour ceux qui ne connaissent pas le sport élevé au rang de culte dans Gunnm, le Motorball est une sorte de roller derby amélioré, et mortel. D’une violence extrême, tous les coups et toutes les armes y sont permis…

Et même si les bandes-annonces montrent des personnages assez manichéens, l’intrigue est bien plus subtile qu’il n’y paraît. Mais pour apprécier en totalité l’œuvre, il vous faudra à la fois découvrir le film et lire les mangas. Car bien entendu, en deux heures, il est impossible d’adapter les 9 tomes qui composent Gunnm.

Ido, dans le manga original.

En ce qui concerne le choix des acteurs, le casting est parfaitement réussi. Notamment en ce qui concerne le personnage d’Ido, celui qui récupère et protège Alita. Christoph Waltz campe parfaitement ce rôle, aussi bien dans son jeu, que physiquement, c’est impressionnant.

Pour Alita (ou Gally pour les intimes), le choix de Rosa Salazar est assez cohérent, et surtout, le réalisateur a eu l’idée de lui faire de grands yeux comme dans le manga. Ce choix aurait pu être catastrophique ou mal interprété, mais ils ont réussi à éviter tous les écueils que comportait ce choix. Ce qui nous donne une Alita parfaitement crédible, belle et combative comme dans le manga !

Ido, dans Alita Battle Angel. Il est ressemblant, non ?

D’ailleurs, parlons de mes deux points de frustration en ce qui concerne cette adaptation. Premièrement, la bande-son, qui n’a pas de réelle influence ni d’harmonie avec les images. A aucun moment, vous ne trouverez une fusion totale entre l’image et le son. Là où Nolan et Hans Zimmer, ou encore Danny Elfmann et Tim Burton arrivent à créer des moments uniques où son et image atteignent la perfection, ici, vous n’aurez « que » des images parfaites. Il y a des moments de beauté et d’esthétique extraordinaires, dans les combats, les mouvements d’Alita, mais jamais ils ne sont accompagnés d’un son mémorable qui les rendraient mythiques. C’est mon seul regret…

Ma seconde remarque est à propos de la fin du film. Le moment qu’ils ont décidé de couper est tout simplement terriblement frustrant. C’est justement là où l’on était pris dans la spirale des intrigues créé par Zalem, au moment où tout prend sens et devient exaltant… et bien c’est fini.

Mais soyons honnêtes, il fallait bien finir, sinon on partait sur un film d’une durée de trois heures minimum… Mais cette fin appelle une suite. Suite qui dépendra du nombre d’entrées en salles pour ce premier opus de Alita Battle Angel !

Allez donc voir Alita Battle Angel, vous passerez un excellent moment. A la croisée des chemins entre action, combats de toute beauté et intrigue savamment menée… C’est un véritable coup de cœur. Que vous soyez fan ou non du manga, vous pourrez tomber amoureux.se de Gally (ou Alita) au bout de quelques minutes, c’est certain.

Chronique Jeunesse : Les Royaumes de Feu – Tome 1 – La prophétie

Une nouvelle saga de fantasy pour la jeunesse très ambitieuse mettant en scène différentes peuplades de dragons autour d’une étrange prophétie !

Les Royaumes de Feu est une saga dont le premier tome de la série est paru en janvier 2015 chez Gallimard Jeunesse. Depuis, nous en sommes déjà au septième tome en France et le succès ne se dément pas !

Tui T. Sutherland est une auteure d’origine américaine, elle écrit sous de très nombreux noms de plume. Elle est notamment l’une des deux auteurs de la série à succès La guerre des clans (grande série de fantasy animalière mettant en scène des chats).

Cinq dragons, une prophétie

Un jour viendra, les Dragonnets du destin décideront de l’avenir de Pyrrhia, le royaume des dragons. Actuellement, l’empire est totalement déchiré. Depuis le décès de la reine des Ailes de Sable, la succession se passe mal. Les trois sœurs héritières s’arrachent le trône du royaume de sable, chacune usant de tous ses pouvoirs pour se l’octroyer…

Le problème, c’est que leur lutte de pouvoir n’est pas intestine et met à feu et à sang toutes les peuplades de dragons… Comment cinq dragons à peine sortis de l’adolescence pourraient-ils changer la donne ? Ils sont l’objet d’une prophétie mais ne savent même pas ce qu’ils sont censés faire…

Un début de saga ambitieux…

Quand on sait que la saga compte actuellement dix tomes aux Etats-Unis, on peut qualifier la série de très audacieuse ! Reste à savoir si elle tiendra sur la durée, quoi qu’il en soit le premier tome nous transporte facilement…

Dans ce premier tome, on découvre le quotidien âpre des dragonnets de la prophétie. Enfermés dans une grotte avant même que leurs œufs aient éclos, ils ne savent rien de l’extérieur… Ils n’ont même jamais senti le souffle de l’air sous leurs ailes ! Mais tout cela va brutalement changer. Et c’est ainsi que commence la saga, qui démarre au quart de tour.

Si vous recherchez pour des enfants de 9/11 ans une série de romans denses, remplis d’aventure et d’imagination, Les Royaumes de Feu sera idéal. Difficile d’en dire plus sur le contenu de ce premier tome, mais outre le démarrage rapide, l’intrigue prend vite de l’ampleur.

On en profite pour découvrir tout particulièrement deux types de dragons dans ce tome-ci : les Ailes du Ciel et les Ailes de Boue. Chaque espèce est extrêmement différente, aussi bien au niveau de leurs aptitudes que de leur culture et leurs habitudes vis-à-vis des autres dragons.

C’est absolument passionnant, et on brûle d’en savoir plus sur les autres, car on se doute bien que ce n’est que le début…

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En somme, ce premier tome d’une longue série rempli parfaitement son office, et même plus. La Prophétie use de ficelles habituelles, mais c’est si bien réalisé qu’on en redemande. Tui T. Sutherland sait surprendre ses lecteurs avec de bonnes révélations !

Affaire à suivre avec le second tome : La princesse disparue, qui nous fera découvrir le monde feutré des Ailes de Mer…

Chronique : U4 – Stéphane

Voici l’aventure de Stéphane, une adolescente courageuse qui va tout faire pour survivre dans une France post-apocalyptique.

La série U4 a été un énorme succès de librairie à sa sortie en août 2015. Pour rappel, il s’agit d’une série pour ados écrite par quatre auteurs français différents. Chacun d’entre eux devait donc faire évoluer son héros ou son héroïne dans une France post-apo… Les quatre histoires sont toutes indépendantes mais se recoupent (voir dans cet article dédié pour les explications plus approfondies).

Vous n’avez pas d’ordre à respecter pour lire U4. Vous pouvez lire un seul livre, ou deux ou tous, peu importe vous aurez une histoire complète. Si vous voulez en savoir plus sur le fonctionnement de la saga, n’hésitez pas à consulter cet article spécialement rédigé pour l’occasion.

Comment survivre dans cette nouvelle version de notre monde ?

Stéphane est une adolescente qui vit à Lyon. Enfin… depuis le mystérieux et terrible virus qui a tué 90% de la population, on peut plutôt parler de survie. Fille d’un grand épidémiologiste, elle a un peu plus de connaissances sur le virus U4 que les autres, mais pas assez pour savoir ce qu’il s’est passé.

Ce qu’elle espère de tout cœur, c’est que son père va revenir la chercher. En attendant, la jeune femme est livrée à elle-même, se rationne, et sort le moins possible de leur appartement… Mais le danger rôde partout, même dans des visages amis. Que va bien pouvoir faire Stéphane si son père ne vient pas la chercher ? Et que cache cette mystérieuse réunion dont elle a eu vent, à Paris ? Et n’est-ce pas un voyage qui pourrait s’avérer mortel ?

Un roman post-apo terriblement efficace !

Vincent Villeminot est un auteur à la plume dynamique, acérée, et avec cet opus de la saga U4 on sent qu’il est parfaitement à l’aise. Toujours sous tension, le danger rôdant en permanence, on évolue avec précaution dans cet univers dont on ne connaît pas les codes. Tout ce que l’on sait, c’est que Stéphane va être amenée à rencontrer Jules, Yannis et Koridwen et qu’à eux quatre, ils peuvent changer les choses.

Mais comment ? Quelle fin peut être possible pour Stéphane ? Car il y a une chose essentielle à retenir : chaque fin est différente dans U4, et c’est justement ce qui en fait toute la saveur. Les quatre personnages principaux sont liés, mais pas dépendants les uns des autres au point de vivre la même fin ! (Pour ceux qui auraient lu la fin de Koridwen, que je trouve la meilleure de toutes, ils comprendront).

Ainsi, entre road-trip et roman post-apo 100% survivaliste, on se plonge sans réserve dans l’univers âpre et cruel de U4. Stéphane y est un personnage intéressant car très indépendant mais fragile, sans jamais le montrer à quiconque.

Enfin, le fait qu’elle ai une vision différente des autres sur le virus nous fait découvrir des pistes de réflexions intéressantes !

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En somme, l’histoire de Stéphane est très intéressante. Pleine d’action, de moments parfois durs (j’ai vraiment eu peur pour elle à certains passages…) et cruels, on découvre une héroïne simple mais forte, crédible. Même si j’avoue avoir préféré l’histoire de Koridwen, j’ai beaucoup aimé la partie de Stéphane. Il est certain que je lirais les autres aventures de la saga U4, il me reste Jules et Yannis.

Chronique jeunesse : Robot Sauvage – Tome 1

Voici l’histoire d’un robot qui échoue par accident sur une île inhabitée… mais c’est sans compter sur les très nombreux animaux qui y vivent !

Paru en juin 2017 aux éditions Gallimard Jeunesse, Robot Sauvage est le premier tome des aventures de Roz, un robot à l’adaptabilité phénoménale.

Il s’agit du premier roman de son auteur ET illustrateur, Peter Brown. En France, certains de ses albums pour les enfants sont déjà parus : Menace Orange, Menace Verte, M. Tigre se déchaine ou encore Ma maitresse est un monstre !

Un cargo transportant des centaines de robot s’échoue…

Une île inhabitée. Un cargo qui perd ses containers et voit s’échouer un peu partout sur l’île des robots. Tous abîmés et éteints. Sauf un. Roz. Ou plutôt : Rozzoum unité 7134 au début de ce roman. Un robot tout neuf qui débarque en plein milieu d’une île sauvage, autant dire que le temps d’adaptation va être long… si Roz arrive à s’adapter à la vie sauvage…

Considérée comme un monstre de fer par tous les animaux qu’elle croise, ne comprenant pas leurs dialectes, le robot semble mal parti… Mais Roz est un robot plein de ressources insoupçonnées !

Une histoire agréable à lire mais pas mémorable

Les chapitres de Robot Sauvage sont extrêmement courts : pas plus de deux ou trois pages maximum. Quand on a l’âge du lectorat visé, soit entre 9 et 10 ans, c’est parfait. Ça se lit vite, les personnages sont vivants, aisément reconnaissables et les dessins de Peter Brown sont délicats. Très graphiques et reconnaissables, on appréciera son trait fin et anguleux.

En ce qui concerne l’histoire en elle-même, je la trouve un peu trop naïve. Cela ne vient évidemment pas du fait qu’il s’agisse d’un roman jeunesse mais plus de ses personnages. L’histoire a beau changer des histoires proposées habituellement, il n’y a pas de réel rythme et on n’est guère captivé.

En dehors du personnage de Roz et de l’oison qu’elle décide prendre « sous son aile », les autres animaux ne sont guère marquants. Il y a un bien un castor, et un renard du nom d’Escobar, mais on ne les voit pas assez pour les trouver attachants. Pas de réel affect donc, au fil des pages malgré certaines scènes touchantes et parfois même tristes…

Cependant, le message de Robot Sauvage est intéressant, et sa forme est originale. Dans notre monde abreuvé de technologie, l’histoire de ce robot qui découvre la nature sauvage et décide d’y rester coûte que coûte est plaisante.

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C’est donc une histoire instructive et qui sort des sentiers battus qui sera parfaite pour les enfants dès l’âge de 9/10 ans, même si elle manque parfois de consistance. L’histoire pourrait presque se suffire à elle-même, mais la conclusion déchirante obligera le lecteur à vouloir lire la suite des aventures de Roz…

Dommage que Gallimard ne mette nulle part sur l’ouvrage qu’il s’agit d’un premier tome ! Quoi qu’il en soit, le second opus est déjà sorti en VO : The Wild Robot escapes.

Chronique Jeunesse : Les intraterrestres

Ils sont mignons/laids, ils ont un langage incompréhensible/génial et adorent les chaussettes qui puent/sentent la fleur…

Manu Causse est un auteur français qui écrit aussi bien pour la jeunesse que pour les adultes. Il a déjà écrit (pour ne citer qu’eux) : Le pire concert de l’histoire du rock, Les fils de George, L’eau des rêves

Avec Les Intraterrestres, Manu Causse fait son entrée dans la super collection jeunesse de Talents Hauts : Zazou !

Enfermé dans les vestiaires la veille des vacances !

Titouan est un garçon intelligent, doué, passionné par la saga de bd Junior Jones de l’espace. Pendant la période scolaire, il est dans un pensionnat à l’allure affreuse. Les gens qui s’en occupent font tout pour réduire les coûts, ils n’aiment même pas les enfants et font tout pour en faire le moins possible…

S’il n’y avait que cela, le quotidien serait à peu près supportable pour Titouan. Mais il est un véritable souffre-douleur pour l’un de ses « camarades » : Cédric Ceinture… Après s’être fait volé sa collection complète des Junior Jones, voici que Cédric l’enferme volontairement dans les vestiaires puants de l’école ! Et cela, juste avant les vacances de Noël… Comment va-t-il faire pour manger ? Pour tenir par ce froid pendant deux semaines ?

C’est là que Titouan va découvrir une chose merveilleuse et insoupçonnée dans les vestiaires, plus particulièrement dans le coin des chaussettes sales… un passage mécanogalactique ! Mais il va également faire la rencontre des terribles petits intraterrestres !

Un roman jeunesse efficace et plaisant

Pour les jeunes lecteurs dès l’âge de 8/9 ans, Les intraterrestres devrait tenir toutes ses promesses !

Ces étranges petits monstres, bien qu’assez inquiétants, sont également très drôles. Leur langage n’est d’ailleurs pas sans faire penser à celui des minions ! Des phrases hachées, des mots collés, des sonorités bien spéciales. Je vous laisse juge, mais j’ai trouvé cela très bien fait, on ne tombe pas du tout dans l’imitation. Manu Causse a su créer ses propres petits monstres, et ils sont réussis :

  • Antandukékchoz, Cruz !
  • Antanduhossi, Purux !
  • Z’onfilondécamp’, Crux ?
  • Passur, Purux.
  • Z’onfilondécamp’fissa. Vienzavecmoi !

L’aventure que va vivre Titouan est ainsi drôle et prenante. On se laisse facilement entrainer dans l’étrange trou mécanogalactique et l’univers des intraterrestres. Ils sont amusants, attachants malgré leurs intentions belliqueuses et marquent par leurs drôles de manies. Ils détestent les choses qui fonctionnent par paires et les choses qui sentent bon, par exemple.

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En somme, Les intraterrestres est un bon roman jeunesse, peut-être un tout petit peu trop introductif ? Une suite est d’ailleurs sortie et s’intitule Les intraterrestres – La Venzanche pour ceux qui voudraient creuser l’univers des auteurs !

Chronique : Dans les angles morts

Un roman d’ambiance dense et prenant aux allures de polar…

Premier roman d’Elizabeth Brundage à paraître en France, Dans les angles morts est un livre à part. Paru en janvier 2018 chez Quai Voltaire, l’ouvrage est à la fois un roman noir, un polar à haute teneur psychologique et un magnifique portrait de l’Amérique rurale des années 70/80. Bienvenue donc dans la petite ville de Chosen…

Un terrible meurtre à la hache 

Tout débute avec un mari paniqué qui vient de découvrir le cadavre de sa femme dans son lit, une hache en pleine tête. Qui a bien pu commettre un crime aussi terrible et violent ? Pour quels motifs ? Et dire que leur fille Franny est restée pendant des heures dans la chambre d’à côté, si proche du cadavre de sa mère…

C’est ainsi que l’on part à la découverte du couple que formaient Catherine et George, des relations qu’ils avaient avec leurs proches, leurs collègues… et comment un tel drame a pu se nouer. Hautement psychologique, regorgeant de portraits humains fascinants, Dans les angles morts est un roman parfait et captivant…

Bienvenue dans la petite ville de Chosen…

Chosen : cette ville, Catherine n’a jamais désiré y vivre, et encore moins habiter dans la maison que George leur a trouvée pour eux et leur fille Franny. Surtout quand on connaît le terrible passif de la famille qui y a vécu avant eux. Comme si le malheur était attiré par cette vieille ferme solide mais singulière…

On commence donc à découvrir Chosen, ses habitants, le couple George/Catherine, les mécanismes qui constituaient leur quotidien, leurs habitudes… et leurs travers.

Dans cet ouvrage, que l’on peut assimiler à du roman noir (pas franchement du polar ni du policier), la psychologie des personnages est absolument primordiale. Ils sont d’une profondeur insondable, complexes… vivants. On découvre leurs aspirations, leurs regrets, leurs rancœurs… et peu à peu, un portrait se brosse.

On navigue alors entre le monde professoral et artistique de George et celui beaucoup plus terre à terre de Catherine, qui gère le plan domestique. On alterne également entre l’année 1978, où les Hale habitaient encore leur ferme laitière avant de faire faillite et 1979, quand les Clare se sont installés.

L’un des points les plus positifs de ce roman dense mais fluide, ce sont ses personnages. Ils sont extrêmement précis et clairs dans notre esprit quand on lit leurs descriptions, leurs perceptions… Chacun est minutieusement décrit, chacune de leur pensée décryptée, expliquée, ce qui les rend terriblement réalistes. Parmi les plus touchants, on peut citer la fragile Willis, le charismatique Eddy, et la petite Franny… Ils sont uniques et terriblement touchants.

Et sans parler d’attachement, la complexité de ce qu’il se passe dans la tête de George et de Catherine est également magnifiquement bien pensé. On monte crescendo en puissance, avec de petits détails, puis peu à peu d’autres choses sont amenées et on en vient presque à trouver tout ce que nous écrit Elizabeth Brundage « normal » et logique… malgré tous ses aspects terrifiants.

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Pour ceux qui aiment les romans d’ambiance où l’on peut se faire hypnotiser par certains personnages (je pense aux superbes frères Clare en écrivant ces lignes…), Dans les angles morts est pour vous. Mélange de genres, flirtant parfois avec l’étrange (quelques lignes à peine sur 530 pages !).

C’est une très belle escapade dans l’Amérique profonde et rurale des années 70 qui ne vous laissera pas indifférent.

Chronique : Douze ans sept mois et onze jours

Un très bon roman à destination de la jeunesse qui mélange nature writing, et aventure mâtiné de suspense… 

Vous qui aimez la jeunesse et la littérature ado, vous devez déjà connaître le très prolifique auteur français Lorris Murail. On lui doit une quantité impressionnante de romans, tous particuliers et mémorables, chacun à sa façon. On peut ainsi citer : GOLEM (PKJ), Les cornes d’ivoire (PKJ), Shanoé (Scrinéo), L’horloge de l’apocalypse (PKJ), L’expérienceur (École des Loisirs).

Dans ce roman paru il y a maintenant 4 ans, Lorris Murail nous offre un mélange surprenant d’action, de suspense tout en nous proposant de (re)découvrir la nature d’un autre œil…

Abandonné au fin fond d’une forêt, dans le Maine…

Une cabane spartiate, une carabine, un livre de Thoreau, quelques conserves… C’est tout ce que possède maintenant Walden, dont le père l’a abandonné ici sans autre forme de procès. C’est un violent apprentissage de la vie auquel est confronté le jeune homme…

Que va-t-il faire pour s’en sortir ? Pourquoi son père lui fait-il traverser une épreuve aussi terrible ?

Entre le récit d’apprentissage et le thriller psychologique, Lorris Murail nous ballade de fausse-piste en traquenard…

Un roman qui détonne dans son style unique

Si vous souhaitez découvrir ou faire découvrir dès l’âge de 13 ans un livre qui sort vraiment des sentiers battus, celui-ci sera parfait !

Plusieurs genres littéraires sont mélangés avec talent par Lorris Murail : le fameux nature writing (faisant l’éloge de la beauté de la nature à chaque instant), le thriller avec le jeune Walden se démenant corps et âme pour survivre et peut-être un jour comprendre le geste cruel de son père… Tout cela étant mis au service d’un roman dit « pour ados » très efficace. Mais, personnellement je le conseille également aux adultes.

De plus, si vous êtes friands de twists et autres apparences trompeuses, vous en aurez tout votre content. Tout cela sans oublier les personnages : ils sont peu nombreux, mais très intéressants. Il y a le père de Walden, bien sûr, mais également cette mystérieuse femme… dont je ne dirais rien de plus, mais qui m’a fascinée.

……..

Le style incisif, sans artifices de Lorris Murail s’adresse ainsi à tous, sans exceptions. Pour ceux qui aiment les histoires qui ont du sens, de la profondeur, un message derrière la lecture-plaisir, c’est l’ouvrage parfait. Et ce retour aux sources bien que violent pour le héros de cette histoire n’est pas sans nous procurer un dépaysement plaisant…

Chronique jeunesse : Où sont les filles ?

Un nouveau Pépix surnaturel… et si les filles avaient TOTALEMENT disparu de notre planète ? Comment serait le monde ? Et à cause de qui une telle chose deviendrait possible ?

Claire Renaud est une autrice française qui a déjà à son compte aussi bien des romans jeunesse, que pour ados ou adultes. Elle a ainsi écrit chez Sarbacane dans la collection Exprim’ Les Quatre Gars. Pour les adultes, on lui doit Nous aurons des lits pleins d’odeurs légères (Les Escales) ou encore Déboutonnage (Stock). Où sont les filles ? est son premier Pépix, il est paru en janvier 2018.

Comment comprendre les garçons quand on est entouré de filles à la maison ?

Ondine est une jeune fille normale : école, maison, dodo. Tout roule. Elle vit avec sa soeur Marine, sa mère Océane et sa grand-mère Pélagie.

Mais un beau jour, à l’école, Ondine croise un jeune garçon de son âge qui lui plaît beaucoup. Beaucoup. Mais elle ne sait pas quoi faire pour l’aborder ou tout simplement qu’il s’intéresse à elle… C’est ainsi qu’elle formule à haute voix un souhait saugrenu : celui d’être entourée de garçons qui lui expliqueraient comment ça fonctionne dans leur tête.

Le seul problème, c’est que son fameux souhait va se réaliser… mais pas seulement à l’échelle de sa petite maison, mais dans le monde entier ! Ondine est la SEULE et unique fille de la terre ! Comment inverser la vapeur ? A quoi est due cette magie ?

Distrayant, sympathique, et un peu fou !

J’ai passé un agréable moment avec ce Pépix à l’idée de base originale, il faut l’avouer. Comme tous les titres de la collection, il sera parfait à découvrir dès 9 ans environ.

L’histoire se déroule à merveille, Ondine est une héroïne forte, et têtue (heureusement pour elle et l’humanité d’ailleurs !) et on prend plaisir à découvrir son histoire. Même si ce Pépix n’est pas dans mes préférés, il reste toutefois très bien.

En fait, ce qui m’a un peu déplu, c’est le magicien Misteress Smith, celui par qui tous les problèmes arrivent. Il n’explique au final pas réellement pourquoi il exauce le souhait d’Ondine en particulier. On comprend qu’il est totalement mégalo et imbu de sa personne, mais ça sonne malgré tout un peu creux tout ça… Il aurait fallu (selon moi) étoffer le personnage de Misteress Smith. Il est chaotique, ne fait que ce qu’il veut, mais il lui manque un petit quelque chose qui le rendrait crédible.

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En dehors de cela, rien à signaler. C’est drôle, toujours original, décalé et très prenant. En bref, les jeunes lecteurs seront ravis de découvrir Ondine et ses tentatives de sauvetage du monde !

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Chronique : Ann Radcliffe contre les vampires

Un classique de la littérature gothique réédité !

Vous connaissez certainement l’auteur Paul Féval (1816-1887), dont l’œuvre la plus connue à ce jour est et restera certainement Le Bossu (d’ailleurs adapté plusieurs fois au cinéma). Les éditions des Moutons Electriques ont eu la bonne idée de rééditer l’un de ses textes dans leur collection originale, Les Saisons de l’ Étrange.

Avant de s’intituler Ann Radcliffe contre les vampires et de mettre en scène l’une des mères du roman gothique, l’ouvrage avait pour titre original La ville-vampire.

Une course contre la montre et un jeu de dupe

Au début du roman, nous découvrons une ancienne amie d’Ann Radcliffe. Cette dernière voudrait partager avec ses interlocuteurs l’une des histoires les plus incroyables qu’a vécu son amie à l’époque. Il y est question de mariage intriguant, de vampires et même d’une ville entièrement peuplée de ces derniers…

La jeune qu’était Ann Radcliffe n’avait pas froid aux yeux et décida de tout faire pour sauver son amie des griffes de ces monstres voulant faire main basse sur sa fortune, son statut, et sa santé mentale.

Un roman à l’ambiance inimitable, mais qui garde une petite couche de poussière…

Ce roman a beau avoir été écrit par un grand romancier, il reste assez lourd à digérer. Aucun découpage en chapitres (rendant le tout très dense), histoire remplie de rebondissements tels qu’il faut bien s’accrocher… C’est dommage, tous les ingrédients sont là, mais ça ne prend pas. Trop de longueurs, de personnages dont on ne comprend pas clairement le but ou les enjeux.

Il faut bien avouer cependant que l’écriture de Paul Féval est assez drôle, voir même grinçante par certains moments. Il se joue avec brio de la langue française et sait amuser son public, même dans le drame d’une course-poursuite mettant plusieurs vies en jeu.

Et l’idée de mettre en scène une auteure ayant réellement existé rend le tout plus prégnant, plus réel que si cela avait un personnage quelconque. Paul Féval base son intrigue sur le fait que l’imagination débordante d’Ann Radcliffe tient plus de son passif avec l’étrange que de son imagination pure, et ça c’est une idée de génie pour l’époque !

Autre chose intéressante, Paul Féval nous propose une toute autre mythologie du vampire que celle que l’on connait. Il change de forme, créé des entités jumelles, a les yeux qui brillent d’une étrange lueur, rend fou les gens dont il s’alimente pendant de très longs mois…

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Mais au final, pourquoi ça ne prend pas totalement ? Peut-être parce que le texte est trop ancien, ou tout simplement qu’il ne s’agit pas du meilleur texte de Paul Féval ? C’est dommage car la collection des Saisons de L’Étrange sait toujours donner envie, et ne pas aimer un de leur titre est déjà une déception en soi…

Mini-chroniques #1 : Des oiseaux qui tombent de nulle part, la Grosse Pomme, une rébellion silencieuse et un monstre qui décime des armées.

Alors, il y a la PAL (ou pile à lire), il y a la wish-list (qui regroupe tous les livres que vous voudriez lire un jour…) et puis il y a la PAC. Et bien oui, la pile à chroniquer ! Et parfois, il arrive que l’inspiration ne vienne pas, qu’elle tarde… ce qui fait que les livres s’accumulent jusqu’à former un nid de livres à chroniquer. Pour certains, la flamme n’est jamais venue, et les années se sont écoulées… Et comme se sont tout de même des ouvrages que j’ai lu dans leur intégralité et apprécié, il est impossible pour moi de ne pas en parler !

Voici donc une nouvelle catégorie d’articles : Ces livres que j’ai lu il y a tellement longtemps que je ne peux plus en faire une chronique entière. Je vais vous en parler de telle façon que j’espère vous donner envie de les lire.

Il pleuvait des oiseaux – Jocelyne Saucier – Denoël

C’était un roman aussi étrange que magnifique. Je l’ai lu il y a plus de cinq ans maintenant alors le souvenir de cette lecture est un peu flou. Je me souviens d’une forêt profonde, de personnes âgées voulant un véritable retour aux sources. Et pour se faire, ce n’est pas dans un mouroir aux allures de maison de retraire que cela est possible.

Non, ces trois octogénaires que sont les personnages principaux de cette histoire sont touchants et décident d’être les maître de la fin de leur vie. C’est aussi beau que triste, mais c’est le genre de roman dont les idées perdurent, longtemps après la lecture… J’en ai donc gardé un sentiment de grandeur et de beauté qui m’avait fait forte impression.

Parmi les dix milliers de choses – Julia Pierpont – 10/18

Une histoire de plein pied dans la vie new-yorkaise avait d’emblée tout pour me plaire… Et pourtant, j’ai eu beaucoup de mal à lire et apprécier ce roman.

L’histoire est celle d’une famille aisée, certes, mais tout ce qu’il y a de plus normal dans l’ensemble… Jusqu’à ce que la maîtresse du mari décide de se rappeler à son bon souvenir en envoyant un colis avec tous leurs échanges imprimés. On se dit qu’il va se passer quelque chose, que les personnages vont sortir de leur vie bien rangée, de leur personnalité étriquée… et bien non. Rien. Une histoire banale sans une once d’originalité au final, vous ne manquerez rien.

Le regard des princes à minuit – Erik L’Homme – Gallimard Jeunesse

Voici un recueil de nouvelles tout à fait étranges. Liées sans l’être totalement, chaque nouvelle a des allures de récit initiatique. On y découvre des adolescents confrontés au changement, à la possibilité de faire une révolution silencieuse dans les heures les plus sombres de la nuit. On y parle de consumérisme à l’excès (est-ce vraiment bien nécessaire ?), de sabotages de générateurs, d’abnégation, de liberté…

J’ai aimé le sens général des propos de ce livre, qui permet de réfléchir et de se concentrer sur ce que l’on veux vraiment pour nous et pour notre société, notre planète. Mais j’ai trouvé parfois la mise en forme maladroite, pas toujours très claire.

Le message cependant reste important et nous fait nous sentir petit face aux enjeux et à l’immensité de notre planète. Le regard des princes à minuit est donc un recueil qui pousse ses lecteurs à se remettre en question, à ne pas nécessairement respecter systématiquement l’ordre établi, et à être humble… Un ouvrage qui ouvre des portes intéressantes. Dès 14/15 ans.

Zalim – Tome 1 – Carina Rozenfeld – Editions Scrinéo

Si vous suivez le blog depuis un moment, vous savez que j’aime tout particulièrement les romans de Carina Rozenfeld. Autrice française de romans fantastiques, sa plume fait toujours des merveilles…

Avec Zalim, c’est un excellent moment de lecture qui nous est ici offert ! Comme je n’avais pas pris le temps précédemment de faire une chronique digne de ce nom, cette rubrique est parfaite pour vous le présenter succinctement tout en vous donnant (je l’espère) envie.

L’histoire de Zalim est simple, mais très efficace : on y suit deux royaumes qui s’affrontent depuis longtemps… L’un d’eux possède une arme de destruction terrible, un monstre qui habite un homme ou une femme au hasard parmi la population. Et si il est réveillé, c’est un véritable carnage dans les deux camps, mais cela assure au royaume qui possède le monstre la victoire malgré tout… Impossible de savoir qui est le réceptacle du monstre… mais il y a de grandes chances qu’il se réveille prochainement et déchaine toute sa sauvagerie.

Série en deux tomes très efficace, Zalim conviendra parfaitement aux ados dès l’âge de 13/14 ans qui aiment une fantasy originale. Ici, point de dragons ou de nains, juste deux royaumes qui s’affrontent, une écriture aisée, fluide, et des personnages vifs et attachants. Et une question qui perdure tout le long du roman… qui donc est l’hôte involontaire de Zalim ?