Un classique oublié de la littérature britannique jeunesse à découvrir (avec un peu de recul) pour améliorer sa connaissance du fonds et de la jeunesse !
Lynne Reid Banks est une autrice britannique qui a écrit plus d’une cinquantaine d’ouvrages, tous âges confondus. Son ouvrage L’indien du placard a connu un succès phénoménal, avec plus de 15 millions d’exemplaires vendus dans le monde. Le livre a d’ailleurs bénéficié d’une adaptation cinématographique qui a concouru à son succès.
L’indien du placard est le premier tome d’une pentalogie, mais la suite n’est jamais parue en France et l’ouvrage se suffit à lui-même. Il mélange tout ce qui fait un bon roman jeunesse : un mystère, de l’aventure et du fantastique, le tout savamment dosé.
Un cadeau extraordinaire et insoupçonné
Omri est un jeune garçon gâté : il s’est vu offrir pour son anniversaire une énième figurine pour jouer. Un Indien en plastique. Sauf qu’il en possède déjà beaucoup et que cet Indien n’a rien de spécial… Mais Omri a également eu comme cadeau un petit placard en métal, et il a réussi à trouver une clé qui va avec. Et c’est là que bascule la réalité : le petit placard est magique ! Il donne vie à ce que l’on enferme dedans avec un tour de clé. C’est ainsi qu’Omri se retrouve avec un vrai Indien – minuscule – chez lui. Ce secret est incroyable, et presque trop grand pour lui malgré la petitesse des choses qu’il anime…
Quand l’étrange s’invite dans le quotidien de l’enfance
Ce que j’adore avec les classiques de la littératures jeunesse fantastique, c’est qu’ils ont toujours une façon bien particulière de s’immiscer dans le quotidien. Un petit élément suffit à faire basculer les jeunes héros : une armoire magique (Le Monde de Narnia), un plateau de jeu aux règles étranges (Jumanji) un compas singulier et un couteau qui l’est plus encore (Les Royaumes du Nord), un talent trop prononcé pour le dessin (La Quête d’Ewilan)…
C’est dans la façon que ce basculement se fait que selon moi on reconnaît un bon roman jeunesse. Et je comprends pourquoi L’Indien du placard a eu du succès. Il mélange problématiques du quotidien (amitié, secrets, danger du monde des adultes) avec le fantastique, qui doit rester à tout prix protégé. Je pense aussi que beaucoup d’enfants ont ensuite rêvé posséder leur propre petit placard avec sa clé magique !
Par contre, en lisant L’Indien du placard, on découvre aussi une ancienne façon d’écrire et de traduire… en adéquation avec son temps. L’ouvrage a été écrit en 1981, et le personnage de L’Indien est un pur stéréotype de ce qu’on été les indiens d’Amérique. De plus, il a une façon de parler très minimaliste, ne conjuguant pas les verbes et parlant assez mal. On peut y voir la barrière des langues… ou autre chose. Donc si vous lisez (ou un enfant) cet ouvrage, il faut le faire avec du recul et un accompagnant adulte qui explique le contexte, dans l’idéal.
De même, la scène ou Omri demande à Petit Taureau (c’est son nom d’Indien…) s’il souhaite un compagnon et que ce dernier lui « commande » une femme est assez dérangeant. Qui dit que la femme commandée voudra de Petit Taureau ? C’est mon regard d’adulte qui tente de se détacher de tout racisme et stéréotype qui a vu cette facette de l’ouvrage. Alors, oui, c’est daté, mais si un jour L’école des Loisirs souhaite rééditer cet ouvrage, il faudrait y mettre soit un avertissement pour expliquer que ce texte est le reflet d’une époque et empli de stéréotypes ou alors retraduire le texte sans le dénaturer (plus délicat).
Pour ce qui est de l’intrigue pure, j’ai beaucoup aimé. Cette aventure va forcer Omri à grandir et à se responsabiliser. Car oui, posséder des humains miniatures, ça a l’air cool quand on a dix ans, mais on déchante vite quand il faut les nourrir et ne pas se faire repérer par les parents. Beaucoup de stress pour le garçon, d’autant que garder un secret aussi « gros » lui donne des tracas et des insomnies.
Ainsi, ce roman pour la jeunesse est devenu un classique, et on comprend aisément pourquoi. Tout se déroule avec efficacité, les dangers et les enjeux sont clairs, captivants, tout fonctionne ! S’il fallait le relire aujourd’hui, soit quarante ans après son écriture, il faudra toutefois y apporter un certain esprit critique.
Voici quatre romans jeunesse que j’ai pu découvrir il y a quelque temps, ils ne sont pas tous bons ni même originaux, mais certains feront passer un bon moments aux enfants ! Pour les autres, passez votre chemin…
Kid Normal – Tome 1 – Greg James & Chris Smith – Poulpe Fiction
Kid Normal est l’histoire d’un jeune homme extraordinaire par sa… normalité. Pourquoi un tel surnom ? Tout simplement parce que Murph, le fameux garçon dont il est question dans cette histoire a intégré une école bien spéciale. Sur un terrible malentendu, sa mère a réussit à l’inscrire dans une école qui forme les futurs supers-héros. Sauf que Murph n’a aucune cape (nom des super-pouvoirs) et ne va pas faire illusion bien longtemps… En parallèle à son histoire, nous allons faire la connaissance d’un homme malfaisant qui va faire une grande et terrible avancée scientifique…
Ce premier tome de Kid Normal est bien sympathique, j’ai tout particulièrement apprécié la première partie du roman. Ensuite, c’est beaucoup plus prévisible mais ça reste agréable à lire. Mais l’idée de base du roman est très plaisante et c’est fort dommage d’ailleurs que les éditions Poulpe Fiction n’aient pas publié la suite de la série en France… Cela n’a pas du fonctionner assez pour la sortir, à tel point d’ailleurs que ce premier tome lui-même est épuisé. Vous ne le trouverez que d’occasion. C’est fort dommage, pour une fois qu’il y a une série jeunesse qui sort un peu du lot à mes yeux… La surproduction est telle qu’il y a beaucoup d’histoires qui se ressemblent, celle-ci avait le mérite de détonner légèrement. Si vous avez l’occasion de tomber dessus, c’est adapté dès l’âge de 9/10 ans environ.
Le power contrôler – David Baddiel – Seuil Jeunesse
Et si une manette de jeux-vidéo permettait de contrôler totalement quelqu’un de le rendre super doué en combat ou en foot ? C’est le cas du mystérieux Power contrôleur, que Fred et Ellie vont recevoir chez eux. Ils découvrent rapidement tous les pouvoirs qu’elle peut leur octroyer et décident de changer ce qui leur déplaît chez eux… Mais jusqu’à quel point ? Et est-ce encore eux une fois qu’ils sont « upgradés » par le power contrôleur ?
J’aurais pu classer cet ouvrage dans le mini-article dédié aux enfants impertinents, mais je me suis finalement ravisée. En effet, ils sont d’une familiarité terrible avec leurs parents, j’ai trouvé ça assez dérangeant. Ils leurs parlent mal, et surtout, ne les appellent que par leurs prénom. Jamais de « papa » ou de « maman », et je trouve ça franchement bizarre et déplaisant. Je n’ai toutefois pas mis ce roman dans la thématique enfants impertinents car ils n’ont qu’assez peu d’interactions avec leurs parents. Le roman est surtout concentré sur leur scolarité, leurs amis, leurs ennemis et les problématiques que l’on rencontre à cet âge. Ce n’est donc qu’un petit aspect de l’ouvrage qui les rend impertinents.
L’aventure que vivent Ellie et Fred est sympathique et à le mérite de montrer une jeune fille qui aime les jeux-vidéos et qui y excelle, et ça fait plaisir. C’est Ellie qui est au commande car elle est bien meilleure que son frère dans la maîtrise de la manette ! L’idée de la manette pour contrôler les gens (avec leur accord) est sympathique, mais l’auteur n’a pas su la transformer en quelque chose de captivant. Ainsi, l’histoire est des plus classiques et un brin trop manichéenne… C’est dommage, car ça partait plutôt bien ! Encore un livre qui densifie l’offre sans rien lui apporter réellement. Dès 10 ans.
Le creux des maths – Christine Avel – L’école des Loisirs, collection Neuf
Paru en 2012, Le creux des maths est un court roman très attendrissant et original. On y suit le jeune Abel, qui contrairement à tous les membres de sa famille n’aime pas les mathématiques. Pire, il n’y comprend rien. Sa mère vient d’avoir la médaille Fields (sorte de Prix Nobel de mathématiques décerné tous les quatre ans – pour information, il n’existe pas de Prix Nobel dans les sciences mathématiques), ses frères sont des génies des maths alors qu’ils sont plus petits que lui… D’ailleurs, en parlant de ses frères, c’est grâce (ou à cause, tout dépend) à eux qu’Abel va avoir le droit de voyager une semaine entière en Finlande. Il va avoir l’opportunité d’échanger avec l’un des plus grand mathématiciens au monde. Bonne chance à lui pour donner le change… Il fait semblant d’être abonné au magazine Tangente, fait croire au scientifique qu’il est extrêmement au fait des mathématiques, mais il devient difficile de donner le change.
J’ai beaucoup aimé ce très court roman destiné aux 9/10 ans. Il est à la fois amusant et assez original. On y découvre la Finlande et ses nombreux attraits au travers des yeux d’un enfant. Et surtout… cette histoire est assez surprenante, on ne sait quel tournant l’autrice va faire prendre à son roman, et c’est très bien trouvé ! Mais d’où vient donc cet étrange et joli titre ? Là où toute la famille d’Abel a la bosse des maths, le jeune homme a tellement peu de capacités dans cette matière qu’ils disent qu’il a un creux des maths. Bien trouvé, n’est-ce pas ?
Je vous conseille donc vivement ce roman, parfait pour découvrir une histoire d’amitié improbable et qui fait comprendre qu’il est nécessaire de trouver sa propre voie. Et pas celle que les autres voudraient que vous empruntiez… !
Wondercat – Tome 1 – Un chat bleu très très spécial – Audren – Albin Michel
Voici l’histoire d’un chat bleu qui a élu domicile dans une famille qui ne se lasse pas de ses nombreuses particularités… Outre son étrange couleur qui semble ne pas vouloir partir malgré de nombreux bains, il semblerait que ce chat aie des pouvoirs. C’est ainsi que le nom de Wondercat lui est donné ! Mais quels sont ses pouvoirs ? Si je vous dis qu’il peux envoyer des sms par la pensée vous y croyez ?
Wondercat est le premier tome d’une petite série jeunesse parue il y a de nombreuses années chez Albin Michel Jeunesse. Je dois avouer ne pas avoir été particulièrement touchée ni intéressée par les aventures de ce « super chat ». L’écriture ne m’a pas emballée, et surtout, ce chat est assez agaçant et loin d’être attachant pour moi. Malgré son côté petit dictateur, la famille qui s’en occupe l’adore et va vivre un folle aventure pour le garder ! Personnellement, ça n’a pas pris du tout, que ce soit au niveau de l’histoire ou du style, les aventures de Wondercat n’ont tout simplement pas su me plaire… Dès 8 ans.
Un ouvrage de fonds à découvrir absolument ! Entre roman historique et récit d’aventure, découvrez le cheminement risqué d’une jeune fille au 17ème siècle qui tente de s’émanciper alors que tout ce qui est différent est apparenté au diable.
Celia Rees est une autrice anglaise qui a connu un succès incroyable avec son roman Journal d’une sorcière, paru en 2002 en France. Cet ouvrage est d’ailleurs le seul d’elle qui soit encore disponible et commandable en librairie (nous sommes en juillet 2023 lorsque j’écris ces lignes). Elle a par ailleurs écrit d’autres romans historiques : La balade de Sovay, Vies de sorcières ou encore Illyria (tous parus au Seuil Jeunesse).
Fuir à tout prix un destin funeste
La jeune Mary vient de voir sa grand-mère exécutée presque sous ses yeux pour sorcellerie. Bien qu’elle ne soit pas en danger immédiats, il est clair que la vindicte populaire s’en prendra certainement à elle avec le temps… C’est ainsi que Mary, aidée d’amies de sa défunte grand-mère va trouver place à bord d’un bateau en partance pour le Nouveau-Monde. Mais là où l’on pourrait croire que tous les possibles s’ouvrent à Mary en quittant l’Angleterre puritaine, il n’en est rien. Dès qu’elle pose un pied à bord du navire, elle sait qu’elle devra rester méfiante durant toute la traversée… et au-delà.
Un magnifique portrait de jeune fille combative et libre
Malgré un titre très « magique », il n’est pas réellement question de sorcières et de formules étranges. Non, Journal d’une sorcière est un texte qui dénonce la bien-pensance religieuse ainsi que la persécution subie par de nombreuses femmes au 17ème siècle (mais pas seulement). En effet, toute femme qui était un peu trop libre, qui se baladait en forêt, ou encore qui n’avait pas de mari devait forcément folâtrer avec le Diable en personne. C’est ainsi que Mary, en ne se faisant pas les bonnes relations ou en montrant simplement son désaccord par moments risque sa vie. Cela peut sembler totalement disproportionné, mais c’est pourtant vrai, et d’autant plus à l’époque où évolue la jeune fille.
Ce roman est d’une intelligence rare, il décrit avec subtilité les conditions très coercitives dans lesquelles vivent les femmes jugées trop libres. Mais il dénonce également comment les Anglais qui arrivent dans le Nouveau Monde se sont peu à peu approprié les terres des natifs, les indiens. Refoulés de leurs propres terres, mis à la marge et jugés durement puis tués, voilà le destin de ceux qui ont aidés les colons à s’installer.
Tout cela, Celia Rees le décrit à la perfection dans son roman aux allures de journal intime. Le ton n’est jamais accusateur, Mary n’étant pas non plus dans une posture victimaire. La jeune fille tente de trouver sa voie au travers de tous les écueils que l’on dresse sur son chemin. Même si cela n’est jamais dit, c’est le statut de femme libre qui fait peur aux hommes, se servant de la religion comme prétexte pour les ostraciser et/ou les éliminer.
Journal d’une sorcière est si bien fait que l’on croirait réellement tenir entre les mains le témoignage d’une jeune fille tentant de survivre de ce monde pieux. Pour ajouter à la confusion, l’autrice a eu l’idée géniale de mentionner que ce journal a été trouvé, caché dans une couverture en patchwork datant de l’époque coloniale. Et à la fin de l’ouvrage, elle ajoute le doute en enjoignant les lecteurs à la contacter s’ils ont plus d’information sur la narratrice de ces feuillets : Mary Newburn. Il y a même une adresse mél !
Après lecture, je comprends pourquoi Journal d’une sorcière est devenu un livre de fonds en librairie (bien qu’oublié de nos jours). Il a toutes les qualités d’un grand classique : ingénieux, poussant à la réflexion ceux qui le lirons, et documenté, le tout avec une narration captivante ! A découvrir dès l’âge de 13 ans environ. Parfait pour celles et ceux qui aiment les romans historiques plus vrais que nature.
Complètement déluré et osé, voici le nouveau roman Pépix d’Emilie Chazerand ! Si tous les orphelinats religieux étaient comme le sien, jamais un enfant ne serait adopté !
Emilie Chazerand est une autrice pour la jeunesse qui a déjà montré tout son talent à travers plusieurs romans : Falalalalalalaaa (Exprim’, Sarbacane) ou encore La fourmi rouge (Exprim’ aussi) ou encore La petite sirène à l’huile ou Le génie de la lampe de poche (Pépix, Sarbacane). Elle écrit aussi bien pour les adolescents que pour les enfants dès 9/10 ans. Son nouvel ouvrage s’adresse d’ailleurs à un jeune lectorat bien qu’on y parle grossesse de femme de foi, extraterrestres lézard et de Dieu qui veux bien s’offrir un jour de congé ! Oui, c’est barré, c’est pour cela qu’on l’aime…
Shirley Banana, orpheline mais relativement heureuse
Oui, son nom est étrange, mais il a un rapport avec un célèbre couple d’humoristes qui jouaient Au plus grand cabaret du monde… Oui, elle est orpheline, mais elle le vit relativement bien car elle est bien entourée, et chacun.e de ses ami.es est pathétique d’une manière attachante et chouette. Que pourrait donc bien vouloir de plus Shirley Banana, orpheline relativement heureuse qui n’a pas franchement envie d’être adoptée ? Et bien justement, elle aimerais bien éviter une punition (justifiée) par exemple. Alors, rien de tel que d’émettre des doutes sur l’existence de Dieu pour… que l’impossible arrive !
Encore plus fou que d’habitude
Je ne pensais pas pouvoir dire ça après avoir lu plusieurs romans d’Émilie Chazerand, mais elle a fait extrêmement fort avec ce texte-ci ! Tout est à la fois génial, osé et burlesque. C’es totalement inclassable, complètement barré et je ne sais même pas si en tant que libraire j’oserais le conseiller. Je pense plutôt mettre un coup de cœur dessus en le laissant se vendre. Mais à l’oral, je pense que c’est assez casse-figure à proposer à des grands-parents qui cherchent des romans de la Comtesse de Ségur…
« Alors, c’est l’histoire d’une gamine orpheline qui fait partie du clan des Malbouffe parce que chacun à un nom associé à une nourriture assez mauvaise pour la santé. Un jour, l’orphelinat religieux qui les élève va devoir fermer ses portes, alors la mère supérieur organise une sorte de grande braderie pour faire vite adopter tous les enfants… Mais ça ne se passe pas comme prévu car Shirley n’a vraiment aucune envie d’être adoptée et tient trop à ses amis pour les quitter. »
Il faut avouer que ça part plutôt mal pour un conseil. Mais je fais le pari que ce roman plaira aux enfants si on le laisse traîner sous leurs yeux et que le petit mot du libraire est assez enthousiaste et explicite.
Alors, ai-je aimé les aventures folles de cette fameuse Shirley Banana ? Oui. Est-ce que je me suis gaussée ? Oui. Est-ce que je le recommande ? OUI ! Mais oubliez tout ce que vous connaissez des traditionnels romans jeunesse. Ici, on a du drôle, du bizarre, de l’irrévérencieux à foison (signature Pépix oblige). C’est un inclassable qui se joue beaucoup de la culture populaire, des jeux de mots et qui offre de nombreuses double-lectures.
En clair, c’est le genre de roman parfait à lire à haute voix car les adultes s’amuseront de découvrir des références leur étant destinées, les enfants quant à eux se régalerons de l’univers complètement fou de l’autrice. En comme, tout le monde a de grandes chances de s’amuser en lisant ce roman, et c’est bien ce qu’on lui demande ! Dès 9/10 ans.
Paru en 2019 aux éditions Sarbacane, Violette Hurlevent est un beau petit pavé de plus de quatre-cent pages qui nous plonge dans un univers onirique. Pas toujours facile d’accès, mais très beau, Violette Hurlevent s’adresse aussi bien aux adultes qu’à un public plus « jeunesse ». Il s’agit du premier ouvrage créé conjointement par Paul Martin et J-B Bourgois, et il est de toute beauté.
Dans un jardin aux propriétés magiques pour fuir la dureté du quotidien
La jeune Violette Hurlevent vit dans une maison dotée d’un grand jardin. Un immense jardin. Tellement grand qu’il est un monde à lui tout seul… Et une fois qu’elle va y plonger, c’est une quête gigantesque qui va tomber sur ses frêles épaules…
Une quête aux allures de légende.
Un roman dense et beau qui est cependant difficile à classer
J’ai beaucoup aimé l’ambiance de ce roman atypique tant par son fond que par sa forme. Les auteurs puisent dans quantité d’œuvres de tous types et de tous genres, c’est un plaisir de repérer les nombreux clin-d’oeil. Princesse Mononoké, Alice au pays des merveilles, Max et les Maximonstres, Les Hauts de… Hurlevent pour les plus évidents. Mais il y a encore quantité d’autres références faites tout au long de l’ouvrage…
L’histoire de Juliette et de son récit initiatique (pour fuir une dure réalité) est très belle. On plonge entre onirisme et fantastique en découvrant une mythologie créée de toutes pièces par les auteurs. Les créatures, les légendes, les lieux… tout est inventé par le duo d’auteurs, et c’est extrêmement dense.
Malgré cet univers riche et une histoire très belle, j’ai parfois eu du mal avec les aventure de la jeune Violette car on se perd parfois dans un trop-plein. Trop d’histoires gigognes (des histoires dans une histoire), trop de possibilités explorées mais pas toutes traitées à fond (et c’est normal, il y en a tant !), trop d’enchaînement d’aventures que ça en devient peu digeste… Le dernier tiers fut pour moi assez long à lire et je pense que l’histoire aurait gagné à être légèrement plus concentrée. Mais l’onirisme ne va pas sans une partie contemplative, c’est un difficile équilibre.
De plus, je me pose sincèrement la question du lectorat. C’est en effet lisible par de jeunes lecteurs, mais pas aussi jeunes que ce que souhaiterais l’éditeur. En effet, l’ouvrage est très hybride et il est difficile d’en déterminer vraiment la cible selon moi. En tant que libraire et lectrice, je le positionne pour les 12/13 ans minimum. Mais dans son aspect, il fait plus « jeunesse » et je pense qu’il peut y avoir confusion quant au lectorat qui pourrait faire penser que ce texte est accessible dès 10 ans par exemple.
C’est pourquoi je suis assez dubitative sur l’ouvrage en tant que libraire (pas en tant que lectrice !) : l’ouvrage fait trop jeunesse pour les lecteurs de 12/13 ans et il est trop complexe pour ceux qui auraient un intérêt pour le lire… Donc pour moi, il y a paradoxe.
Ainsi Violette Hurlevent est un très bel ouvrage à tous points de vue (fabrication, mise en page, texte, message…), mais il est parfois un peu difficile à appréhender. Et surtout, il n’est pas évident de cerner à qui il saura plaire car il y a un réel écart entre son esthétique et le public potentiel de l’ouvrage…
Pour moi, c’est l’ouvrage idéal à découvrir quand on est un adulte passionné par la culture jeunesse sous toutes ses formes.
Le second tome des aventures de Violette Hurlevent
Une trilogie de romans noirs pour la jeunesse, Nils & Zéna sont dans la place !
Parue en 2017, la série de romans jeunesse Nils & Zéna est sortie chez Pépix. Il s’agit d’une trilogie de romans policiers qui font partie de la très réduite collection Pépix Noir.
Un duo improbable et atypique
Nils est un crack en informatique, très renfermé sur lui-même, sa rencontre avec Zéna va le changer. Zéna est une adolescente très vive d’esprit dotée d’une mémoire photographique elle a pour animal de compagnie un corbeau acariâtre. A eux deux, ils peuvent tout faire ou presque ! Et justement, leur quartier va bientôt avoir besoin de leur courage et de leur vivacité d’esprit. Il semblerait que quelque chose se trame dans leur ville, mais impossible d’en savoir plus… tout ce que l’on sait, c’est que le manoir abandonné du coin vient mystérieusement d’accueillir un nouveau propriétaire…
Sympathique pour qui souhaite découvrir le genre policier
Nils & Zéna, c’est le genre de série idéale pour faire découvrir un genre pas si usité que cela en jeunesse : le policier pur. Oui, il y a quantité de romans qui mélangent enquête et mystères dans une ambiance relativement familière, rassurante. Ici cependant, on est dans du vrai premier polar avec une histoire relativement réaliste (ou presque) et assez sombre, ce qui est rare en jeunesse pour les 9/11 ans.
Il est ici question de harcèlement, de menaces, de pauvreté (Nils est issu d’une famille qui n’a quasiment aucun moyens financiers), de différence et de dealers (de vêtements !) qui effrayent le quartier. On est donc bien loin d’une ambiance Club des Cinq ou Alice Détective ! Le tout se déroule dans une atmosphère très urbaine, entre résidence pavillonnaire un peu à l’écart et grandes barres d’immeubles. D’où le fait que je pense que ce genre de roman noir est assez rare en littérature jeunesse. Il fallait essayer, mais je ne suis pas certaine que cela ait fonctionné car la collection Pépix Noir référence très peu d’ouvrages.
Personnellement, j’ai trouvé ces deux premier tomes intéressants, mais je n’ai pas été prise par l’élan général de l’intrigue. En effet, je trouve qu’il y a un écart très creusé entre l’âge ciblé et les thématiques. Nils & Zéna est relativement violent, avec des scènes parfois un peu brutales (enlèvement, séquestration, menaces, animal tué…) qui créent un décalage entre le contenu et l’âge ciblé. D’où peut-être le fait que la série n’ai pas pas franchement trouvé son public ? (je n’ai aucun chiffre de vente, c’est uniquement une supposition et un ressenti de lectrice). Je comprends que l’autrice et l’éditeur aient eu envie de proposer autre chose, un texte plus sombre, plus mature que ce que l’on voit en jeunesse habituellement. Une idée louable, mais il semblerait que cet essai ne soit pas concluant.
Ainsi, Nils et Zéna est une série qui se lit vite et qui se veut efficace, ce qu’elle est. Cependant, je n’ai pas réussit à franchement apprécier l’intrigue et je m’arrête à la lecture des deux premiers tomes sur trois. Les romans font passer un bon moment de lecture, mais sans éclat, mais il n’est pas facile de sortir du lot tant la production est titanesque chez les 8/11 ans !
Une série de romans pour la jeunesse qui se propose de faire découvrir le Japon autrement
La série des Karasu Kids est parue chez Larousse en juin 2022. Son but ? Faire découvrir la culture nippone aux plus jeunes au travers des aventures d’un groupe d’enfants. Cela commence comme une enquête et se transforme en quête pour empêcher l’éveil de monstres mythiques et millénaires…
Aymeric Jeanson est l’auteur de cette petite série de romans. Il également éditeur et se passionne également pour la bd, ce qui explique les quelques planches de type manga que l’on retrouve dans les romans Karasu Kids.
Auren, l’illustrateur, est nourri depuis toujours par la pop culture japonaise, et cela se voit dans son œuvre. C’est lui qui a créé tout l’univers graphique des Karasu Kids.
Tout commence à Hokkaido
Bienvenue sur l’île d’Hokkaido, où vont se dérouler d’étranges événements qui vont bouleverser la vie de quatre enfants. Mais au début de cette histoire, ils ne se connaissent pas vraiment, et pour d’autres ne s’apprécient guère. Mais par la force des choses, la petite équipe va devenir Les Karasu Kids, un quatuor d’enfants qui vont tenter de sauver la vie qu’ils connaissent. En effet, des esprits ancestraux sont à l’œuvre, et ils sont fort mécontents. Ce que l’on pense être une catastrophe écologique est en réalité la manifestation de ces créatures millénaires. C’est là qu’interviennent les Karasu Kids !
Une lecture qui m’a peu emballée
J’ai lu premier tome de la saga avec une légère curiosité, mais je demandais clairement à être convaincue. Moi qui adore le Japon et sa culture et qui suis libraire jeunesse, cette série avait tout sur le papier pour m’emballer. Et pourtant, ça n’a pas pris. J’ai insisté en lisant entièrement le second tome, qui ne m’a pas plus séduite. J’ai alors entamé le troisième opus, et me suis arrêtée au premier tiers du roman : à quoi bon acharner si l’on n’aime pas ?
Mais alors, qu’est-ce qui pour moi a pêché dans cette nouvelle série de romans ? J’ai du mal à le définir précisément. Il y a de l’aventure, on en apprend (un peu) sur le Japon et sa culture, en particulier sur ses mythes et créatures issues de l’imaginaire. Les chapitres sont courts, il y a quelques illustrations, ce qui est parfait pour les 9/10 ans.
J’ai eu un mal fou à m’attacher aux personnages et à les apprécier, d’ailleurs je n’ai jamais vraiment réussit, sinon je n’aurais pas abandonné ce troisième tome. J’ai trouvé leurs dialogues parfois trop « scolaires », répondants à une problématique, mais sans qu’on croie en l’existence de ces personnages. En un mot, pour moi, ils manquaient d’âme. C’est d’autant plus dommage quand on voit que le duo qui a créé la série et passionnée par le Japon. Mais pour moi, il manque un liant, un élément qui aurait fait basculer l’histoire vers quelque chose de plus vivant, plus entrainant.
L’idée d’insérer quelques pages de type manga dans les romans est très sympathique, à tel point que je trouve dommage qu’il n’y ait pas eu plus de planches. On en retrouve entre six et sept par roman alors que ça aurait pu être un vrai argument si il y en avait eu plus.
L’une des choses qui m’a plus cependant, c’est ce mélange entre fantastique et écologie. Je m’explique, les créatures ancestrales qui sont réveillées le sont par des perturbations d’ordre écologique. Ainsi, Les Karasu Kids deviennent des protecteurs de l’environnement en luttant contre les méfaits de ces créatures (qui ne sont pas nécessairement mauvaises et qui subissent l’activité humaine). Cet aspect de la série et bien amené et m’a bien plu.
Ainsi, je ne saurais pas dire exactement ce qui m’a déplu personnellement dans cette saga, mais elle est pour moi totalement dispensable. Cela ne remet pas en question le travail et la passion des auteurs pour le Japon, bien entendu. C’est simplement que je n’y ait pas trouvé mon compte et que je trouve qu’il y a mieux pour cette tranche d’âge. sur la même thématique : Yôkai de Thibault Vermot chez Sarbacane, par exemple. Ou encore Le jeu d’Hiroki d’Eric Senabre chez Didier Jeunesse sont des romans parfaits pour découvrir de façon distrayante le Japon et sa culture incroyablement dense.
Une magnifique histoire d’amitié entre un jeune garçon et un lion blanc comme neige…
Réédité en 2020, Le lion blanc est un texte de Michael Morpurgo qui date de 1998. Je ne l’ai découvert que tout récemment, et comme souvent avec cet auteur, c’est une belle et touchante histoire qui mélange destin d’animaux et faits d’Histoire véridiques.
Une fuite précipitée d’un pensionnat guindé…
Une jeune garçon décide de fuir l’institut dans lequel il est pour ne plus être victime de harcèlement. L’un de ses camarades le moleste très régulièrement, et pour lui la vie au pensionnat est devenue intenable… Mais à peine a-t-il quitté les murs de l’école et franchi la barrière qu’il fait la rencontre d’une dame âgée. Cette dernière lui propose de boire le thé chez lui et lui raconte l’histoire de Bertie, un ami d’enfance à elle. Bertie a lui aussi étudié dans l’institut que le jeune homme vient de fuir… et son histoire est incroyable. Elle est liée au continent africain et à l’existence d’un lion blanc.
Une histoire touchante qui saura atteindre le cœur des jeunes lecteurs
Le lion blanc est une magnifique histoire. A la fois originale et emplie d’humanité, cette amitié improbable d’un petit garçon et d’un lionceau blanc a de quoi émerveiller. J »ai beaucoup aimé le mélange des temporalités entre l’histoire de ce jeune garçon qui fuit l’institut et celle de Bertie, il y a plusieurs décennies. Elles ne sont pas liées directement, mais l’auteur dissémine quelques jolis points communs entre les deux jeunes hommes.
Mais surtout, ce que j’ai le plus apprécié, c’est l’histoire de Bertie sur le continent Africain. Son attrait démesuré pour la savane, qu’il n’a pas le droit de parcourir, même accompagné de son père. Il vit dans un immense domaine en plein milieu de la savane avec sa mère, aussi douce que très mélancolique. L’arrivée dans leur vie de ce lion blanc va tout bouleverser pour eux. On est tout de suite plongé dans l’histoire peu commune de Bertie et de cette amitié hors du commun.
Je suis persuadée que les jeunes lecteurs et lectrices d’environ 9 ans apprécierons grandement cette histoire. Elle est belle, a su me toucher tout en traitant de sujets très différents : la nature et sa beauté, la guerre et la dureté de la séparation… Les thématiques sont parfois très adultes, mais Morpurgo sait y faire pour créer un roman abordable, compréhensible et loin d’être bête.
Mon édition est assez ancienne et regroupe les illustrations de Jean-Michel Payet. Elles sont très douces et collent à merveille à l’histoire. La nouvelle version parue en 2020 a changé et propose cette fois-ci des illustrations de François Place et j’avoue qu’elles sont magnifiques ! Je crois que je les préfère encore à celles d’avant… elles sont tout aussi douces, aux couleurs pastels avec quantité de détails.
Conclusion, Le lion blanc est un classique de la littérature jeunesse qui a peut-être été oublié avec le temps. Sa réédition récente est l’opportunité de le (re)découvrir car il vaut le détour !
Une série de romans qui propose de découvrir l’histoire des méchants Disney. Car au début, ils n’étaient ceux que l’on connaît et avaient même de la bonté en eux… du moins pour certains…
Vous connaissez tous Maléfique, La Bête ou encore Ursula ? La série des Vilains se propose de découvrir le passé de chacun de ces méchants emblématiques des dessins animés Disney. La saga des Vilains est composée de six tomes distincts qui se concentrent chacun que un personnage. Mais il y a en plus un trio de sorcières qui lie le tout et dont vous ferez la connaissance…
La novellisation est assurée par l’autrice américaine Serena Valentino, qui a connu un succès fulgurant grâce à cette série.
Miroir Miroir : Tout débute avec l’histoire d’une fille de miroitier. Elle est belle mais semble l’ignorer, tant son père lui fait des réflexions acerbes et terribles sur son physique. Il la trouve laide, mais surtout, il lui en veut d’être née, sa femme étant morte en lui donnant naissance. Mais un jour, un roi envoûté par sa beauté va se marier avec elle. Ce roi a déjà une fille, d’une précédente union. Son prénom : Blanche. Elle est douce, belle et d’une gentillesse incroyable. La nouvelle reine l’aime instantanément et a enfin trouvé une famille aimante. Mais alors qu’a-t-il bien pu se passer pour que tout se transforme en cauchemar ?
L’histoire de la Bête : Le prince qu’était avant la bête n’était pas une personne recommandable. Avec son meilleur ami Gaston, ils séduisent les belles jeunes femmes, adorent chasser et plient le monde à leur volonté. Alors, quand le prince décide qu’il est temps pour lui de se marier, il recherche une femme belle et sans répartie. En fait, il recherche une personne qu’il peut facilement maîtriser et qui a le moins de cervelle possible, un joli faire-valoir en somme. Il pense avoir trouvé l’amour, mais il n’est en réalité pas capable d’un tel sentiment tant il est égoïste. S’ensuit la malédiction que l’on connaît tous…
Maîtresse de tous maux : Maléfique est une sorcière, certes nous le savons tous. Mais ce que l’on sait moins c’est qu’elle est à l’origine une fée qui n’a jamais acceptée à cause de son apparence. Ses longues cornes ont toujours fait peur à ses semblables, de même que ses talents pour la magie dans tous les domaines. Les gens ont peur de ce qu’ils ne comprennent pas et, Maléfique est en effet totalement incomprise. Une seule personne avait confiance en sa capacité à faire le bien… mais ce n’était pas suffisant.
Des romans intrinsèquement liés
Même si chaque conte est indépendant, il y a un fil rouge dans ces six tomes en la personne des étranges sœurs. C’est à cause d’elles que les choses deviennent biscornues, malsaines, étranges… Elles poussent parfois seulement une pichenette pour faire basculer vers le mal nos vilains. Mais pour d’autres, elles se sont acharnées afin de les transformer en individus mauvais…
Ce fameux fil rouge n’empêche pas de lire le livre que l’on souhaite si l’on a pas envie de lire toute la saga. Personnellement j’ai commencé par L’histoire de la Bête (qui est le tome 2) car il n’est marqué nul part sur la couverture qu’il y a une tomaison. C’est sur l’un des rabats intérieurs que je m’en suis rendu compte. Ce n’est point grave, j’ai enchainé avec Miroir, Miroir, qui est le premier tome de la saga. Puis, n’ayant pas le tome trois, j’ai lu le quatrième volume, centré quant à lui sur Maléfice.
Et à chaque fois, on retrouve les étranges sœurs et leurs obscurs plans qui semblent remonter à des siècles. Je n’ai donc pas lu le troisième tome, qui se concentre sur le personnage d’Ursula, avide de pouvoir. Mais Serena Valentino a pensé à tout et fait une sorte de résumé de ce qu’il s’est passé dans le tome consacré à Maléfique. Car plus on avance, et plus les histoires se mêlent et les personnages se croisent. Ainsi le premier amour de la Bête, Circé, est également dans le troisième tome et citée régulièrement dans le quatrième. Les passifs imaginés par l’autrice pour chacun des personnages fonctionnent assez bien. Elle se réapproprie les histoires Disney tout en conservant l’essence des histoires que l’on connaît. L’exercice ne doit pas être évident, mais elle y parvient assez bien je trouve.
Cependant, cela n’est pas suffisant, loin de là. J’ai eu beaucoup de mal à m’intéresser vraiment au destin de chaque personnage car même si l’autrice modifie les trames, ce sont des univers très (trop ?) familiers. Cela n’a pas été assez créatif pour moi, et j’avoue que les descriptions m’ont quelque peu lassée par moment, à tel point que je les sautait pour ne lire que les dialogues.
L’idée d’ajouter des personnages malfaisants récurrents qui tirent toutes les ficèles est excellente, mais peut-être n’aurait-il pas fallu faire un tome par personnage. Cela dilue beaucoup trop l’intrigue et donne un sentiment d’ennui assez vite présent. J’ai surtout au ça pour L’histoire de la Bête, qui est pour moi le moins bien réussit des trois que j’ai lu dans la série. Le meilleur étant pour moi l’histoire de Maléfique, car elle commence a regrouper tout ce qu’il s’est passé avant et faire des ponts intéressants avec les précédents tomes. Mais cela arrive trop tard…
Je comprends que d’un point de vue marketing on ait voulu faire un tome pour chaque conte, mais d’un point de vue narratif, c’est beaucoup trop long. Quel dommage, l’essence même de la série des Vilains est intéressante. Mais c’est beaucoup trop long à lire, il y a trop de descriptions inintéressantes et de passages totalement dispensables. C’est donc une saga qu’il faut réserver je pense aux fans absolus de l’univers Disney, ils seront peut-être moins déçus que ceux qui aiment de façon raisonnable l’univers.
Aparté : Mais pourquoi donc refaire la traduction ?
Je souhaitais revenir sur un point important, la traduction. Au début de la sortie de la série des Vilains, Hachette Romans avait fait le choix plutôt logique de reprendre les couvertures américaines (qui sont d’ailleurs les même dans presque tous les pays où ils ont été traduits). Elles sont très sombres, sobres, et on sait immédiatement de quoi ça parle. Mais au bout de quelques titres parus avec cet charte graphique sombre et minimaliste, Hachette Romans a décidé de changer la charte visuelle de la collection avec un graphisme beaucoup plus coloré, et je pense beaucoup plus adapté au public français. D’ailleurs, le succès fut au rendez-vous !
Mais pourquoi donc avoir au passage changé la traduction ? Les lecteurs français n’ont-ils pas le niveau pour comprendre certains mots de vocabulaire ? Faut-il que les choses soient faciles pour vendre mieux ? La traduction initiale de L’histoire de la Bête est assurée par Caroline Minic, mais la nouvelle est Alice Gallori. Et l’on constate très rapidement la différence de vocabulaire. J’ai eu les deux versions dans ma bibliothèque, j’ai donc pu comparer.
Traduction de Caroline Minic : Chapitre II : La rebuffade.
« La Bête soupira lourdement et se laissa choir sur le banc en pierre, sous l’aile persécutrice des statue.« __ « Alors que le carrosse de la princesse Tulipe Morningstar se rapprochait du château de son fiancé, la jeune femme fut éblouie par le paysage. Il n’y avait pas peinture plus belle au monde que celle de la demeure du Prince en en saison des frimas, cette grande bâtisse revêtue d’un épais manteau blanc et illuminée pour les lumières du solstice d’hiver. »
Traduction d’Alice Gallori : Chapitre II : Le refus.
« La Bête poussa un soupir et se laissa lourdement tomber sur un banc de pierre. » __ « Lorsque son carrosse s’engagea sur le pont menant au château, Tulipe Morningstar se dit que le palais de son fiancé était tout simplement exceptionnel. Le royaume de son père était remarquable, certes, mais il ne soutenait pas la comparaison avec celui du prince, surtout lorsqu’il était recouvert d’un manteau de neige étincelant et richement décoré pour le solstice. Les murs étaient inondés de lumière dans la sombre nuit d’hiver. »
Voilà qui donne déjà matière à constater la différence. Le mot rebuffade est-il trop complexe ? Cela fera-t-il fuir les lecteurs.ices potentiels ? De même que le verbe choir… trop difficile à comprendre ? Alors mettons tomber à la place. De même que le mot frimas a disparu dans la seconde traduction.
J’avoue ne comprendre cette simplification à l’extrême avec des mots basiques, et une absence de style. On voit même que certaines phrases sont tout bonnement supprimées pour simplifier le tout ! Pourquoi cette volonté de simplifier par l’éditeur ? Car il y a là une volonté éditoriale, ce n’est pas uniquement le fait de la traductrice. Je sais que je n’aurais pas la réponse à cette question, de même que je n’ai pas accès aux textes en langue originale pour comparer, mais je trouve décevant de niveler par le bas le vocabulaire… Et comme il s’agit de la même maison d’édition qui a simplifié le vocabulaire de la série Le Club des Cinq, je me dis qu’il y a ici un lien entre appauvrissement du niveau de vocabulaire et choix éditorial/mercantile. Après tout, le passé simple a quasiment disparu des romans jeunesse pour la même raison !
Si un texte est difficile à lire, on aura peut-être moins envie de lire la suite… alors pour vendre, il faut que ce soit facile, immédiat, quitte à dénaturer le texte original ? Question ouverte, mais vous connaissez déjà mon point de vue sur la question.
Écrit neuf ans avant Harry Potter, cette duologie recèle tous les ingrédients qui ont très certainement inspiré J.K. Rowling pour les aventures de son célèbre jeune sorcier ! Un classique moins connu que Harry Potter à découvrir, plus sombre, plus osé et très créatif… découvrez les aventures de David Eliot !
Anthony Horrowitz est un auteur anglais à l’œuvre très importante. Ses ouvrages sont très régulièrement prescrits dans les écoles : L’île du crâne, La photo qui tue ou encore Le faucon malté étant devenus des classiques.
Pour ce qui est de L’île du crâne, il s’agit du premier tome de la série des David Eliot, qui en comprend deux au total. Cette courte série mélange magie noire, école aux moeurs étranges et professeurs qui le sont tout autant…
Encore renvoyé !
Le jeune David Eliot n’est pas dans une bonne situation quand nous faisons sa connaissance dans le premier tome. Il vient tout juste d’être renvoyé de sa dernière école en date, ses parents ne savent plus quoi faire de lui… Mais ils viennent de recevoir une mystérieuse lettre provenant d’une école dont ils n’ont jamais entendu l’existence : Groosham Grange. L’établissement se propose de prendre David comme élève, le tout avec des cours adaptés à un élève aussi indomptable et difficile que lui. Ainsi commence l’étrange aventure de David Eliot, septième fils d’un septième fils…
Entre similitudes et originalité
Quand j’ai lu les deux tomes de la série David Eliot, je n’ai pas pu m’empêcher de relever les très nombreuses similitudes entre ces romans et l’univers de Harry Potter. On ne peux pas parler de copie, ni d’hommage mais il est certain que J.K. Rowling a lu les romans d’Anthony Horrowitz.
Comment expliquer sinon cette école étrange et isolée qui donne des cours très mystérieux ? Voici une petite liste non exhaustive de tout ce que j’ai vu de similaire entre les deux univers, tout en sachant que les David Heliot sont paru neuf ans avant le premier tome de Harry Potter
Une lettre mystérieuse qui arrive de l’école
Un établissement étrange et isolé de tout et invisible de tous
Des parents atroces (oncle Vernon et tante Pétunia pour Potter)
Une tante qui se met à gonfler et grossir
Un professeur lycanthrope
Un membre du corps enseignant qui possède deux têtes pour un seul corps
Une plume pour écrire qui n’a pas besoin d’encre mais plutôt de sang
Un trio d’amis qui se serrent les coudes (une fille deux garçons)
Un système de point distingue les élèves pour leurs actions, comme avec les maisons chez Poudlard, mais à l’échelle individuelle.
Voilà pour les plus gros points communs entre les deux sagas. Lire David Eliot, c’est découvrir un univers bien plus sombre que celui de Harry Potter, mais aussi des personnages plus ambivalents et étranges. J’ai beaucoup aimé ce mystère qui plane autour de l’école tout au long du roman. Même si l’on se doute de quoi il est question, ce n’est que dans les vingt dernières pages que le héros découvre ce qu’est exactement Groosham Grange et ce qu’on y apprend réellement.
Dans le second tome, David est pleinement intégré et fait même partie des meilleurs élèves de l’établissement. Bientôt, nous saurons qui remportera le Graal Maudit, la plus haute distinction de l’école. Mais quelque chose se trame et tente de faire saboter la remise du prix….
J’ai énormément aimé l’esprit de cette série fantastique. Elle est vraiment sombre et ose des choses que je n’aurais pas cru lire en jeunesse que ce soit dans l’intrigue ou les dialogues. C’est savoureux d’humour noir, l’intrigue est bien construite et surtout l’ambiance est parfaite ! Très inquiétante dans le premier tome, elle réussit à changer peu à peu, se réchauffe tout en gardant une part menaçante… Impossible à décrire, mais c’est savoureux !
Je ne puis que vous conseiller de découvrir cette courte série pour quantité de raisons. Vous aurez à découvrir un imaginaire atypique et bien dosé qui sait appuyer sur la fibre effrayante quand il le faut. Les dialogues sont excellents, la dynamique de l’histoire parfaite pour que ça se dévore… Et surtout, ça étoffe la culture générale et fait réfléchir aux sources (nombreuses) de l’inspiration de J.K. Rowling : Poudlard et Grossham Grange sont très certainement des établissements magiques cousins, l’un étant beaucoup plus tordu et étrange que l’autre, mais cousins tout de même. Dès 10 ans.