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Chronique : Hunger Games – Tome 1

hunger games 1Une dystopie cruellement efficace

Suzanne Collins est une auteur d’origine américaine, Hunger Games est son premir ouvrage traduit en France, mais elle en a écrit d’autres, dont notamment The Underland Chronicles (série en cinq tomes). Sa trilogie, parue chez Pocket Jeunesse est un succès mondial et va bientôt être adaptée au cinéma en mars 2012.

Sur les ruines des Etats-Unis s’est développé…Panem

Comme chaque année depuis 74 ans, les Hunger Games ont lieu ; il s’agit d’un jeu télévisé organisé par le Capitole comme moyen de répression sur le peuple. Le Capitole – état situé sur les ruines d’un pays nommé avant les Etats-Unis – est composé de 12 districts chacun spécialisé dans un domaine spécial (le premier district est par exemple spécialisé dans l’industrie de luxe, le onzième dans l’agriculture, etc…).

Les Hunger Games – véritable punition pour le peuple – sont en fait l’héritage laissé par les  rébellions qui ont remué le Capitole par le passé.

Le principe des Jeux est simple : un garçon et une fille de chaque district qui ont entre 12 et 18 ans sont tirés au sort pour participer à un combat à mort sur un terrain choisi et aménagé par le Capitole. Il n’y a qu’un seul gagnant possible. Ainsi, c’est 24 participants au total qui sont amenés à jouer leur vie pour l’honneur de leur district, et surtout pour sauver leur peau.

Pour la victoire, chaque élément est important : l’apparence, le bluff, le charisme et autres moyens de pressions sur les autres « joueurs » sont déterminants pour la victoire.

Parmis les « chanceux » sélectionnés il y a Katniss, une jeune fille qui vit dans le 12ème District de Panem et elle va participer aux Hunger Games.

Un roman haletant, incisif et fascinant

Le roman de Suzanne Collins est fascinant par bien des aspects. Outre le développement très fouillé de ce monde post-apocalyptique et de son fonctionnement politique, la dimension psychologique y tient une très grande place.

Mais plus encore que la forte présence de la politique sous toutes ses formes dans l’œuvre, la dystopie de Suzan Collins nous fait nous poser bon nombre questions. En effet, pourquoi les Etats-Unis ont-ils disparu et ont étés remplacés par le Capitole ? En quelle année sommes-nous ? Que s’est-il passé pour que le monde tel qu’on le connaissait ait été transformé en une société aussi cruelle ?

Loin du roman moraliste, Hunger Games nous montre le pire de l’âme humaine, mais paradoxalement aussi, le meilleur. Chaque once d’humanité devient précieuse à côté de toute cette cruauté étalée au grand jour.

Une anticipation sur nos inquiétudes actuelles

Hunger Games n’est pas le premier ouvrage à se poser la question : Et si notre futur était gouverné par un état totalitaire qui ferait pression sur le peuple pour arranger les plus hauts placés au pouvoir ? Ce scénario n’est pas sans faire penser au livre de Koushun Takami édité en 1999 au Japon : Battle Royale. L’intrigue se déroule dans un pays asiatique jamais nommé existe un programme gouvernemental nommé Battle Royal. Son but, sélectionner au hasard une classe de lycée dans le pays et l’envoyer sur une île afin qu’ils s’entretuent, le jeu se termine quand il reste un seul survivant. Cette opération permet au gouvernement de maintenir la population afin qu’elle « reste dans le rang ». Les données de chaque opération sont ensuite exploitées par le gouvernement.

Comme vous pouvez le constater, les deux scénarios sur le principe sont assez similaire. Mais il y a une grosse différence entre les deux histoires. Hunger Games est médiatisé, voire surmédiatisé par le gouvernement contrairement au programme de Battle Royale qui est strictement confiné et réservé aux organisateurs eux-mêmes.

Ainsi, Battle Royale, bien qu’étant une œuvre ayant clairement inspiré Suzanne Collins  n’est pas une copie de l’œuvre. Elle a su s’en détacher et créer son propre univers parfois même plus cruel que l’original par son côté populaire.

Mais une des choses les plus importantes concernant Hunger Games, c’est qu’il s’agit d’une œuvre qui fait se poser de vraies questions sur les inégalités sociales. Interrogations qui ne sont qu’esquissées dans ce premier opus mais qui seront creusées dans les deux tomes suivant.

Pour conclure sur ce premier tome explosif, Hunger Games est un très bon roman à faire lire dès l’âge de 13 ans environ. A la fois psychologique, empli d’action et de sentiments exacerbés. Rendez-vous bientôt pour la chronique du second tome de la série : L’embrasement.

9.5/10

Chronique : Qu’a-t-elle vu, la femme de Loth ?

Qu'a t-elle vu la femme de Loth 00Inattendu et inclassable de bout en bout

Premier roman paru en France de l’auteure grecque Ioànna Bourazopoùlou paru aux éditions Ginkgo en juin dernier, Qu’a-t-elle vu la femme de Loth ? est un roman post-apocalyptique qui nous fait le portrait d’un monde complètement défiguré. L’Europe du Sud et le Proche-Orient ont étés engloutis, et la ville de Paris est devenu un port méditerranéen…

Selon la Bible, la femme de Loth aurait désobéit au commandement de Dieu, qui lui aurait demandé de ne pas se retourner lors de la destruction de la ville de Sodome, mais cette dernière n’a pas pu résister à sa curiosité, et pour cela, Dieu l’a punie en la changeant en statue de sel. Cette référence religieuse est utilisée tout le long du livre par la Compagnie comme outil publicitaire pour vendre son sel violet, mais cette référence culturelle ne nécessite pas une culture religieuse particulière.

Une terre dévastée et une société basée sur le commerce du sel violet

Depuis le cataclysme ayant inondé une grande partie de la terre, un sel violet aux propriétés étranges jaillit de la terre, faisant la richesse d’une société toute-puissante et mystérieuse : Les Soixante-Quinze. Les propriétés de ce sel violet rendent très dépendant, le rendant indispensable à tout être vivant dans cette société aux allures de fin du monde.

Dans un endroit inconnu, se trouve la Colonie, lieu où est exploité le sel violet. Toutes les personnes qui y vivent sont des salariés de la Compagnie (les Soixante-Quinze). Dans la Colonie, l’utilisation de l’essence est prohibée, détériorant la qualité du sel. Les habitants ont les poumons remplis de sel et de sable et son souvent malades ; aucune plante n’arrive à survivre dans cette atmosphère saline et aucun couple n’arrive à avoir d’enfant. Des conditions de travail atroces, une lumière du jour cachée sous une brume permanente, bienvenue.

Mais parmi ces salariés-habitants, il y en quelques-uns qui sont vitaux à la Colonie : le Gouverneur, censé représenter la Compagnie, et ses « étoiles pourpres », habitants qui le servent et que l’on peu assimiler à des ministres… mais la machine tyrannique et totalitaire de la Colonie va s’éroder et transformer ce roman post-apocalyptique en polar machiavélique.

Et pendant ce temps, loin de la Colonie se trame une lutte psychologique sans merci entre un homme et la Compagnie…

Une intrigue fort bien construite

Sans vous compter les enjeux forts nombreux et complexes, ce qu’on peut dire de cet ouvrage c’est qu’il est inattendu sur de nombreux aspects.

Les mobiles bien flous de certains personnages prennent tout leur sens une fois la lumière faite à partir d’un autre angle. Ce qui nous paraissait inutile ou simple fioriture était en fait un élément vital dans la compréhension de l’histoire et dans son appréciation. Et c’est ce qui fait le génie de cette histoire : des révélations en chaînes qui nous obligent parfois à relire des passages d’un point de vue complètement différent et génial.

Alors, pour ces belles surprises, pour cet univers post-apocalyptique si étrange et si bien imaginé et décrit : bravo.

Sublime, bien écrit, incroyablement ficelé, Qu’a-t-elle vu la femme de Loth ? est un roman hors-norme et inclassable qui ne laissera pas indifférent.

8/10

EDITEUR :
TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : La cité de l’ombre – Tome 4 – Le diamant des ténèbres

la cité de l'ombre 04 - le diamant des ténèbresRemember, the city of Ember…

Quatrième et dernier tome de la série de Jeanne DuPrau paru en juin dernier aux éditions Folio Junior, le Diamant des ténèbres nous emmène à nouveau sur les traces de Doon et Lisa, quelques mois après le peuple d’en haut. Cette fois encore, les deux jeunes gens partent en quête de réponses sur leur monde, son passé et surtout son devenir.

Un manuscrit étrange

Tout commence avec une itinérante de passage dans la ville de Sparks : miséreuse et sans presque rien à échanger, son étal est triste à voir, elle possède si peu de choses qu’elle se voit obligée d’écourter la vente. Mais Doon aperçois un livre dans la carriole de l’itinérante et demande quel est son prix, cette dernière le lui cède pour bien peu au vu de sa valeur. Le titre de ce mystérieux livre : Pour les habitants d’Ember. Doon va alors tout faire pour déchiffrer le livre, ou plutôt ce qu’il en reste, c’est-à-dire moins d’une dizaine de pages.

De retour dans la ville souterraine

Il devient clair que le livre découvert par Doon oblige à retourner dans l’ancienne citée, mais comment y retourner sans alerter les adultes ? Doon fait part à Lisa de sa découverte et la convainc de l’accompagner à Ember, pour le meilleur et pour le pire. Mais évidemment, la quête ne va pas se dérouler sans anicroches et Ember a bien changé en quelques semaines sans lumières…

Une intrigue un peu trop redondante ?

Comparé aux tomes précédents, Le diamant des ténèbres possède une intrigue moins intéressante. On retrouve les mêmes mécanismes qui avaient fonctionnés avec la Cité de l’ombre sans quasiment aucune nouveauté, c’est dommage. Bien sûr il y a de nouveaux personnages qui apportent un petit plus à l’intrigue, mais rien de franchement nouveau ne survient dans l’histoire en général. On a même parfois affaire à des passages un peu longs qui cassent le rythme du livre.

Autre petit point noir dans ce roman, le ton un peu trop positiviste et plein de bons sentiments poussés parfois jusqu’à l’extrême pour certains personnages.

Mais ce dernier tome ne nous laisse tout de même pas en reste au niveau des révélations, car on saura enfin ce qu’a découvert Monsieur McCoy, un personnage du troisième livre, l’oracle de Yonwood, ou encore quel est ce mystérieux diamant des ténèbres, et enfin quelle est donc cette ville magnifique que voit Lisa en rêve depuis des années… et quelques autres choses encore.

Ce dernier tome est donc assez inégal, il est à lire pour avoir le fin mot de l’histoire, et non pas pour son intrigue qui est assez légère.

En conclusion, la quadrilogie post-apocalyptique de Jeanne DuPrau vaut le détour, c’est un énorme coup de cœur, en ce qui concerne les trois premiers tomes, complètement immersifs. Il n’y a plus qu’à espérer que d’autres ouvrages de l’auteure verront le jour en France, c’est tout le mal que l’on lui souhaite !

Chronique Jeunesse : La cité de l’ombre – Tome 3 – L’oracle de Yonwood

la cité de l'ombre 03 - L'oracle de YonwoodRetour vers le passé

Après la Cité de l’ombre et Le peuple d’en haut, la série de Jeanne DuPrau continue avec l’oracle de Yonwood, troisième tome de la série. Mais cette fois ci, ce n’est pas Doon et Lisa (les héros précédents) que nous croiseront car l’auteur nous emmène des centaines d’années précédant les deux tomes et avant le « Grand Bouleversement ».

Dans la petite bourgade tranquille de Yonwood…

Yonwood est une petite ville des Etats-Unis sans prétention aucune. Elle possède son église, son école, son quartier pavillonnaire… et son oracle. En effet, depuis quelques mois déjà, une femme a des visions de fin du monde. Beaucoup des habitants de Yonwood croient que ce qu’elle voit est l’avenir et suivent à la lettre les « instructions » de l’oracle pour éviter que ses visions d’apocalypse ne deviennent réalité.

Et pour cause, le climat du monde actuel est tout sauf rassurant : on parle d’une possible guerre contre la Phallange, un mystérieux réseau de groupes faisant pression sur les gouvernements du monde entier…

De plus en plus d’avions de combats sillonnent le ciel en prévision d’un affrontement, le climat est à la méfiance ; même les connaissances les plus proches suscitent le doute.

C’est dans ce climat de tension que débarque la jeune Nickie dont la tante va vendre la maison familiale située à Yonwood suite au décès de sa grand-mère. Mais la jeune fille ne l’entend pas de cette oreille ; elle veut tout tenter pour faire changer d’avis sa mère et sa tante pour ne pas vendre la maison de famille, et pourquoi pas, y vivre.

Un huis clos à la dimension d’une ville

En arrivant à Yonwood, Nickie s’est fixé trois buts dans la vie :

  • –          Garder à tout prix la maison familiale.
  • –          Trouver le grand Amour.
  • –          Faire quelque chose de bien pour l’humanité.

Trois objectifs et peu d’occasions d’en réaliser ne serait-ce qu’un seul. Au fil des jours Yonwood est une ville qui se replie de plus en plus sur elle-même : les « étrangers » à la ville sont soupçonnés des moindres maux, et ceux qui en font déjà partie font tout pour rester « dans le rang », c’est-à-dire à écouter les étranges instructions de l’Oracle, interprétée par la très religieuse Mme Beeson qui participe activement à l’accomplissement des demandes de l’Oracle.

Une dimension psychologique à grande échelle encore très présente dans ce tome, et ce pour le plus grand plaisir des méninges du lecteur qui lui aussi se monte des hypothèses plein la tête.

Le fait d’avoir fait un roman se déroulant quelques centaines d’années avant l’époque de Doon et Lisa apporte de nouveaux éclaircissements à l’intrigue générale de la série. Certains débuts de réponses apparaissent… et beaucoup de nouvelles questions aussi.

Une chronologie originale faisant de ce roman un des meilleurs de la série, aussi bien pour ses révélations que pour son atmosphère magnifiquement retranscrite.

Le dernier tome, Le diamant des ténèbres, nous fera retrouver Doon et Lisa et bouclera la série.

9/10

Chronique : Eternelle Jeunesse

Eternelle JeunesseRecueil de nouvelles publié aux éditions Asgard, Eternelle Jeunesse regroupe une dizaine d’auteurs français de l’imaginaire prometteurs ou confirmés : ils avaient tous le même et unique thème à traiter, l’immortalité.

Cet assemblage de douze nouvelles très diverses nous fait croiser aussi bien de la fantasy que de l’anticipation ou encore du fantastique et de la mythologie.

Des univers riches et multiples

Difficile de parler d’un recueil de nouvelles quand il s’agit d’auteurs différents aux imaginaires qui le sont tout autant. Chaque nouvelle ayant son univers et son intérêt propre, nous ne parleront ici que de quelques-unes.

Parmi les nouvelles marquantes, on peu citer L’illusion noire qui se classe dans la catégorie de l’anticipation. Il y est question de notre société dans un avenir très proche, un homme aurait trouvé le moyen de sauvegarder informatiquement tout nos fais et gestes, notre façon d’être, nous rendant immortel… sur un ordinateur. Cette nouvelle est en fait un dialogue entre la petite-fille du créateur de ce système et la sauvegarde de son grand-père. Intelligente, incisive, et très critique, cette nouvelle critique une société qui commercialise le deuil ou l’absence de deuil. Son auteure, Julie Blanc, n’a que dix-sept ans et déjà beaucoup d’inspiration.

Avec la nouvelle Y a-t-il une vie après le lycée ?, on est confronté au fantastique avec deux adolescents qui se rejouent années après années les meilleures et pires scènes de leur vie. Touchante et terrible à la fois, il est difficile d’en raconter plus sans en raconter trop.

Une autre nouvelle qui laisse une impression durable, c’est celle du Livre du Musicien, où l’on a cette fois affaire de la plus pure fantasy. L’histoire est celle d’un jeune homme qui montre des aptitudes à la magie et qui va devenir l’apprenti d’un très grand magicien… mais ce dernier ne lui apprend quasiment rien, et son élève décide d’acquérir du pourvoir par ses propres moyens… Un très bon récit où l’on sent qu’à partir d’un certain moment tout bascule. Une intrigue qui monte crescendo jusqu’à son apogée, superbe. Son auteur, Julien d’Hem est en passe de finaliser son tout premier roman.

Eternelle jeunesse recèle donc de nouvelles de qualités que nous ne pouvons pas toutes raconter ici, mais parmi les nouvelles marquante on peut aussi citer : Sue 3 de Elodie Meste, ou encore Issu de la glaise de Jean Millemann.

Eternelle Jeunesse est donc un très bon recueil sur une thématique très intéressante, pourvu qu’il y en ait d’autres ! Cet article a été rédigé pour le site ActuSF.

EDITEUR :
TRANCHE d´ÂGE : ,

Chronique : La cité de l’ombre – tome 2 – Le peuple d’en haut

la cité de l'ombre 02 - Peuple d'en hautMais qu’y a t-il après la cité d’Ember ?

Suite de la cité de l’ombre parue aux éditions Folio Junior, ce second volume de la quadrilogie post-apocalyptique de Jeanne DuPrau nous fait retrouver avec plaisir Doon et Lisa, et d’autres habitants de la ville d’Ember; mais aussi et surtout, une foule de nouveaux personnages.

Un monde de lumière

Les Emberiens viennent de découvrir qu’ils n’étaient pas seuls au monde, que leur ancienne cité était cachée des kilomètres sous terre. Pourquoi était-elle dissimulée ? Quel était le but des Bâtisseurs quand ils ont construits Ember ? Beaucoup de questions qui resterons pour le moment sans réponses, car les habitants d’Ember on tout quitté pour aller à la surface, mais ils ne sont guère préparés à ce monde nouveau et hostile par bien des aspects.

Bienvenue dans la ville de Sparks

Le peuple d’en Haut est un livre en deux parties : il parle tout d’abord de la découverte de « la surface » par les habitants d’Ember. Eux qui n’ont connu que leur ville souterraine découvrent le vent, les arbres, les animaux, la pluie, et surtout : une autre ville avec d’autres personnes ; Sparks.

La seconde partie est en quelque sorte le revers de la médaille : comment une petite ville comme Sparks pourrai-t-elle nourrir plus du double de bouches du jour au lendemain ?

Car les Emberiens ne savent rien faire de leur mains : dans leur ville sous terre ils avaient tout ou presque : entrepôts de nourriture, réserves de produits de nécessité… ils ne savent donc pas jardiner, ni même poser une clôture, autant de choses que les habitants de Sparks vont devoir leur enseigner s’ils veulent voir les Emberiens s’autonomiser et partir le plus rapidement possible. En attendant, les Sparkiens partagent leurs denrées avec eux.

Mais la question de la nourriture reste la même : à ce problème, diverses réactions surviennent et certains se prennent à penser que les Emberiens feraient mieux de retourner dans leur cité mourante. Le peuple d’en haut ne vit pas avec autant de confort que les Emberiens avant qu’ils ne quittent leur ville. Ils ne connaissent pas l’électricité, qui a pour eux des allures de légende. Ainsi dès qu’il fait nuit, il n’y a plus rien à faire, les bougies sont rares et précieuses. Le troc reste encore le meilleur moyen de subvenir à ses besoins, surtout quand des itinérants s’arrêtent en ville pour y échanger leur trouvailles dans les anciennes villes.

La palette des sentiments humains exploitée au maximum

Quand la survie est en jeu, c’est souvent le pire de l’homme qui transparaît, c’est ici ce que Jeanne DuPrau veut mettre en avant dans son roman. Et nous, que ferions-nous si notre vie était en jeu pour cause de manque de nourriture ?

La peur de l’étranger est aussi très présente : tous les a priori que l’on peut avoir dans notre vie courante sont ici illustrés dans un monde aux allures d’apocalypse.

Le mystère du passé

Ce second tome permet d’en savoir aussi un peu plus sur ce qui aurait pu se passer il y a quelques centaines d’années sur terre. Il y est question du « Grand Bouleversement », et même si on n’en sait guère plus, on peu bâtir de nombreuses hypothèses sur les villes en ruines et le désert omniprésent. Quoi qu’il en soit, ce qui a causé la quasi extinction de la race humaine devait être terrible…

Ce second opus nous en apprend donc un peu plus sur le pourquoi de l’existence des Emberriens, tout en laissant le mystère s’épaissir.

Encore une fois, Jeanne DuPrau met en avant des êtres avant tout, avec leurs lots de bons et de mauvais sentiments. Cette romance autour de la psychologie humaine fait de ce roman une leçon de vie qui sans être moraliste, invite au questionnement sur ce qui fait de nous des êtres bons ou non. Un bon livre donc, à lire tout de suite après avoir dévoré la Cité de l’ombre si ce n’est déjà fait.

Chronique : La cité de l’ombre – Tome 1

la cité de l'ombre 01Et si tout ce que vous connaissiez du monde était une ville souterraine ?

Jeanne DuPrau est une auteure américaine de fantastique très prolifique, les quatre livres constituant la série de la Cité de l’ombre sont les seuls de l’auteure à être publiés en France pour le moment. Le premier roman de la quadrilogie a été adapté au cinéma en 2008 sous le même titre.

Dans la cité souterraine d’Ember

A peine commencé, le lecteur se retrouve plongé dans la ville de Doon et Lisa, deux jeunes gens qui vont bientôt commencer à entrer dans la vie active grâce à la cérémonie des Attributions, le métier de chacun est attribué par tirage au sort d’un petit papier, selon les besoins de la ville, les attributions changent chaque année.

Parallèlement à ces deux nouvelles vies qui commencent, celle de la ville elle, s’essouffle : les matières premières viennent à manquer et pire que tout ; la cité est en proie à des pannes d’électricité, son générateur peine de plus en plus à satisfaire les besoins des habitants.

C’est donc une ville mourante à laquelle on est confronté, mais personne n’a l’air de s’en inquiéter au point de faire bouger les choses… personne sauf Doon.

Une quête… mais vers quoi ?

La cité de l’ombre est un roman jeunesse assez simple dans sa construction, mais très riche dans ses idées. On ne sait pas directement quelle est la « quête » à accomplir par nos deux héros car eux-mêmes ignorent ce qu’ils cherchent, ni même si elle est matérielle ou spirituelle, le mystère est bien gardé et les lecteurs dès l’âge de 11 ans s’épanouirons dans cette lecture remplie d’aventures et de secrets bien gardés.

Amitiés naissantes, d’autres brisées, le tout sur fond de manigances obscures, Ember est une ville pleine de secrets.

Un mode de vie très différent et organisé très intelligemment.

Le charme de l’œuvre réside dans la découverte pour le lecteur d’une nouvelle forme d’organisation. En effet, la ville d’Ember est très différente de ce que l’on pourrait connaître : personne ne choisi son métier, il est défini selon les besoins de la ville, et si au bout de quelques années quelqu’un n’est pas efficace dans la branche qu’on lui a définie, on l’en change jusqu’à trouver la bonne pour lui et pour la ville.

Tous les objets de la vie courante non fabriqués par Ember sont entreposés dans de gigantesques entrepôts, et chacun doit faire une demande pour obtenir ce qu’il désire, que ce soit des conserves, des chaussettes ou encore des ampoules ; tout est rationné. Cette logistique entraîne parfois certaines dissensions au sein de la ville, certains ayant obtenu ce qu’ils souhaitaient alors que d’autres n’ont rien, c’est injuste mais c’est la loi d’Ember.

En conclusion, la cité de l’ombre est un très bon premier tome très axé « social » dans son exploitation des facettes humaines sur fond de fin du monde. Riche en découvertes et rebondissements, il séduira tous les amateurs d’aventures et les autres aussi.

Site officiel de Jeanne DuPrau.

Chronique bd : Un amour de Marmelade

un amour de marmeladeUne histoire basique, mais qui sait séduire le lecteur par son univers original.

Un amour de Marmelade est une bande-dessinée en one-shot qui se déroule dans un univers onirique que l’on peut qualifier de steampunk. Son auteur, Supiot, a déjà bon nombre de bd à son actif dont la série Marie Frisson chez Glénat, ou encore Les aventures oubliées du baron de Münchhausen chez Vent d’Ouest.

Dans la ville sombre et brumeuse de Lutecia…

Lutecia, une ville qui n’est plus que l’ombre d’elle-même suite aux nombreux bouleversements passés. Les habitants y sont tristes et gris, sans aucune volonté. Mais parmi eux, caché dans les égouts de la ville se cache le célèbre et très recherché Marmelade.
Cette homme (ou autre choses ?) est recherché par toute la police de la ville pour nombres de crimes… mais Marmelade dément toutes ces accusations : son unique but est de retrouver son amour perdu depuis des années, sa femme Mathilde.

Mais qui est Marmelade ?

Vous l’aurez très certainement compris, l’étrange personnage vert en couverture n’est autre que Marmelade, mais qu’est-il réellement ? Il ne ressemble à rien d’humain et pourtant il agi comme n’importe lequel d’entre nous.
Marmelade est donc un être étrange dans un monde qui l’est tout autant, mais il ne sera bientôt plus seul dans sa quête de la vérité, car une jeune femme prénommée Blanche va l’aider dans son entreprise. Car Marmelade n’a pas toujours été ma créature que beaucoup jugent monstrueuse… c’était avant tout un homme, un scientifique apprécié et renommé, qui plus est, et Blanche n’est autre qu’une de ses plus grandes admiratrices.

un amour-marmelade-planche-supiot-400x571Un graphisme original et des personnages très attachants

La jeune Blanche est un des personnages les plus intéressants de l’histoire avec une personnalité plus complexe qu’il n’y parait. Marmelade quand à lui trouve sa force de caractère dans son apparence et son graphisme des plus atypique ; le plus curieux étant sa quasi-absence d’expressions faciales, car il n’est doté que d’une bouche. Mais ces éléments manquants sont d’autant plus parlants car on devine aisément ses expressions.

Entre le roman graphique et la bd, cette œuvre a le mérite d’avoir un réel univers. Parfois très esthétique, notamment lorsqu’on navigue à travers des chefs d’œuvres de la peinture (Monet, Manet…) et d’autre fois atroce. L’histoire est découpée en chapitres dont la page de garde est tout simplement magnifique, on tombe aussi sur quelques coupures de journaux sublimes dans le réalisme et le détail. Le dessin est à l’image de son histoire, parfois drôle, burlesque, triste ou encore violent. Supiot n’a pas toujours une patte esthétique, mais toujours à fleur de peau.

Un amour de Marmelade est donc un très beau livre-objet que les amateurs du genre steampunk pourront sans doute apprécier. On regrettera toutefois une intrigue un peu trop légère et facile, mais c’est le risque quand on a affaire à un one-shot.

6.5/10

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Chronique : Maul

MaulL’homme est-il indispensable à l’avenir de la femme ?

Publié aux éditions du Diable Vauvert en mars dernier, Maul est le premier roman de Tricia Sullivan traduit en France. Son auteure, d’origine américaine, a écrit une petite dizaine de romans SF. Elle a aussi participé à l’écriture d’autres ouvrages, notamment dans la série La Compagnie des Glaces sous le pseudonyme de Valery Leith.

Un mal fatal qui ne touche que les hommes…

Les pestes Y on éradiqué presque totalement les mâles humains de la planète, la société qui en a resurgi est donc presque exclusivement féminine. Avec de nouvelles préoccupations, les femmes sont devenues « les reines » de ce nouveau monde.

Mais avec aussi peu de mâles humains sur Terre, rares sont les élues à pouvoir prétendre à la procréation, qui coûte maintenant extrêmement cher et qui nécessite un rang social très élevé.

C’est dans ce monde cruel et parfois superficiel qu’évoluent deux femmes radicalement différentes : Sun Katz, une adolescente au caractère plus que bien trempé qui voue une adoration totale aux gangs de guerrières qu’elle voit sur le Net, aspirant elle-même à en faire partie ; de l’autre côté, le Docteur Baldino, éminente scientifique qui cherche un moyen de comprendre les pestes Y depuis des années sur un sujet mâle encore vivant : Meniscus.

Jamais amenées à se croiser, ces deux tranches de vies, ainsi que d’autres qui s’ajoutent au fil des pages, vont chacune avoir leur importance sur la vision globale à apporter à cette nouvelle société exclusivement féminine qui n’est pas devenue plus douce pour autant.

Au carrefour des genres…

Comme esquissé par la couverture avec sa bottine à talon aiguille sur fond de câblages, Maul est un roman qui traite à la fois du consumérisme (et du sur-consumérisme), de sexe, de manipulations d’ordre politique et de hautes technologies entre autres choses.

On retrouve cette orientation « porno-chic » dans l’écriture de Tricia Sullivan, très crue dans certaines scènes (trop peut-être ?) ainsi que dans la psychologie de tous ses personnages : le sexe faisait tourner le monde avant les pestes Y et c’est toujours le cas, voire plus, après la quasi-extinction des hommes.

Toujours balloté entre rêve et réalité, attention au lecteur de ne pas se perdre dans les méandres du Maul. Difficile d’en dire plus sur le roman, qui fait partie de ces livres dont il ne faut pas trop parler sous peine d’en dévoiler plus que de raison.

Maul n’est pas un livre que l’on peut qualifier d’abordable, mais si l’on se laisse porter par cette histoire originale, même si parfois très décousue, on peut vite devenir curieux de savoir ce qui va suivre. Personnellement, ça ne pas fonctionné… Cette chronique a été réalisée pour le site ActuSF

TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : Idlewild – Tome 1

idlewild 1Un univers déroutant qui ne convainc qu’à moitié…

Idlewild est le premier tome d’une trilogie parue dans la récente collection Nouveaux Millénaires des éditions J’ai Lu, qui réunira ses publications SF grand format. La suite de la série est prévue pour la fin de l’année, puis début 2012 pour le troisième tome. Son auteur, Nick Sagan n’est autre que le fils de Carl Sagan, l’éminent scientifique qui a initié le programme SETI consistant à rechercher de possibles vies extraterrestres et qui était également l’auteur de nombreux ouvrages, dont Contact, qui a inspiré le film éponyme.


Un début d’histoire franchement étrange

Tout commence dans un champ de citrouilles. Un jeune homme y est allongé. Il ne se souvient plus de rien sauf de trois choses : on a essayé de le tuer, que Lazare est mort et qu’il a tué Lazare. À partir de ces faits, le personnage part en quête de son « moi », de ses souvenirs.

Mais le personnage principal n’est pas seul, il vit avec neuf autres adolescents de son âge. Leur présence, que l’on pourrait croire capable d’aider l’amnésique, est tout le contraire. Plus il en apprend, moins les réponses sont évidentes.

Ce début d’histoire est hautement captivant, mais la suite devient beaucoup trop décousue et déconcertante. On passe parfois du coq à l’âne sans grande logique, et même si certains éléments sont expliqués dans la suite des événements, le lecteur est trop balloté d’événements inexpliqués en situations bizarres.

Des mystères qui s’imbriquent dans un univers virtuel…

Difficile d’en dire plus sur l’intrigue sans en révéler trop, mais le livre fourmille de bonnes idées plus ou moins bien exploitées.
Les personnages sont traités avec efficacité et profondeur, mais ça ne suffit pas à rehausser la qualité du roman. Trop d’éléments sont insérés au décor sans justifications. Les amateurs de cyberpunk s’y retrouveront sans peine mais pour les autres, il restera difficile d’appréhender un univers aussi foisonnant et heurté.
Autre élément dérangeant : l’écriture. Trop « jeune », elle donne l’impression de vouloir séduire un lectorat adolescent, sans y réussir. On a donc parfois affaire à de la vulgarité un peu trop facile qui tombe dans les clichés de « l’adolescent rebelle » envoyant tout valser et qui refuse toute forme d’autorité.

Où s’arrête le virtuel ? Où commence le réel ?

Le fond de l’histoire est bel est bien la quête de réponses sur la réalité. Où commence-t-elle dans ce monde si étrange, surréaliste ? En ce sens, le roman fait beaucoup penser aux œuvres de Philip K. Dick qui avaient elles aussi pour fond la frontière entre réalité et virtuel, là où commencent les hallucinations. Car on ne sait pas toujours à quoi Nick Sagan nous confronte : folie ? rêves ? spéculations du personnage ? certitudes ? paranoïa ?
L’intrigue de base est donc bien plus compliquée qu’il n’y paraît. C’est d’ailleurs la force de l’histoire. Le chevauchement des faits et des éléments permettent d’entrevoir toute l’horreur d’une situation obscure mais encore très nébuleuse par bien des aspects.

En somme Idlewild est un roman intriguant, déroutant. Trop peut-être. Il laisse un goût amer en guise de conclusion. Quoi qu’il en soit, le roman, sans être extraordinaire, donne tout de même envie de connaître sa suite, Edenborn, à paraître en novembre. Cette chronique a été rédigée pour le site ActuSF