Archives de l’auteur : Laura

Chronique YA : Ma réputation

Gaël Aymon est un auteur français qui écrit majoritairement pour la jeunesse et les ados. On lui doit l’un de mes romans favoris : Et ta vie m’appartiendra (Nathan) qui est une réécriture contemporaine de La peau de chagrin de Balzac. Il également écrit Grim, fils du marais (Nathan), Contes d’un autre genre (Talents Hauts) et plus récemment Ma réputation (Actes Sud Junior, puis Pôle Fiction).

Dans Ma réputation, on parle amitié, confiance et… forcément réseaux sociaux, pour le meilleur, mais aussi et surtout le pire…

Laura, 15 ans, s’entend mieux avec les mecs qu’avec les filles

Pour Laura, ça a toujours été une évidence, ce n’est pas qu’elle se sente supérieure aux autres, mais elle n’aime pas la compagnie des autres filles, trop d’histoires. Celle des garçons est simple, ils ne se prennent pas la tête, ont les mêmes délires et il n’y a jamais eu d’ambiguïté. Enfin, jamais jusqu’à ce Sofiane, l’un de ses potes de toujours tente de l’embrasser. Laura le repousse, Sofiane fait la tronche, et leur groupe d’amis va en être bouleverser.
Avoir repoussé les avances de Sofiane l’exclu, ils ne veulent plus avoir à faire à elle, Laura est seule. Elle qui n’a toujours eu que ce groupe de garçons comme amis se retrouve du jour au lendemain sans personne à qui parler. C’est dur, la chute est brutale, et surtout, elle ne fait que commencer… Elle ne penser pas que repousser les avances d’un ami l’exposerait à autant de violence dans la vie et sur les réseaux.

Un roman en forme de leçon

J’ai dévoré ce roman, fébrile à l’idée de savoir ce qui allait arriver à Laura, que j’ai trouvé très courageuse pour affronter tous les problèmes qui lui tombent dessus peu à peu. Mais, le petit repproche que je pourrais faire à ce roman, c’est qu’il est un peu trop moralisateur. Je m’explique.
Ce roman ressemble un peu à un cas de figure type du harcèlement en ligne et au lycée, avec les « bonnes pratiques » à adopter et « les mauvaises praitques » à éviter. Ce n’est pas dit comme cela dans l’ouvrage bien entendu, mais ça donne une impression didactique trop forte. J’avais parfois plus l’impression de lire un ouvrage commandé par l’éductation Nationale qu’un roman. Il manque une flamme vive à cet ouvrage pour qu’il soit vraiment bien.

J’ai trouvé toutefois le développement de l’histoire passionnant car très réaliste. L’auteur sait entrer dans la tête des jeunes, connaît leurs fonctionnements et les dynamiques de groupe amitié/mésamour etc. En cela, c’est extrêmement réussit. C’est surtout quand on passe à la phase des « résolutions de problèmes » que j’ai trouvé l’ouvrage un peu donneur de leçon. Bien sur, il est important de montrer les différentes portes de sorties qui permettent de quitter le cercle vicieux du harcèlement, mais la façon de les montrer n’était selon moi pas la bonne.

En dehors de cela, Ma réputation est un ouvrage qui se dévore. L’auteur comprend les jeunes et leurs nombreuses problématiques (bien plus nombreuses à l’ère des réseaux qu’il y a quinze ans où c’était encore les balbutiements), sait les décrire et créer des personnages crédibles. Il n’y a que la fin qui est un peu trop « scolaire » dans sa façon d’être exposée dirons nous.
Si vous cherchez un livre au sujet du harcèlement en ligne ou sur les groupes d’amis qui se font et se défont au détriment de certains ados, c’est l’ouvrage parfait. Il illustre avec justesse ce que vivent des milliers de jeunes : le mal-être, le stress d’avoir une mauvaise réputation, le moindre bégayement ou la moindre hésitation moquée immédiatement, le fait d’être constamment scruté en attente de la prochaine « erreur »…
Un ouvrage qui pourrait servir d’outil de prévention. A découvrir dès l’âge de 14/15 ans.

Chronique YA : Vortex – Tome 1 – Le jour où le monde s’est déchiré

Il est paru lors de la rentrée littéraire ado, en août 2022, et gageons qu’il reste longtemps dans les rayonnages des librairies. Voici le premier roman d’Anna Benning à paraître en France. Lors de sa sortie allemande, l’ouvrage s’est vendu à plus 100 000 exemplaires en quelques semaines. Certes, les ventes ne sont pas gage de qualité, mais c’est tout de même révélateur d’un intérêt certain de la part des lecteurs.ices ! Et ce succès est-il mérité ? La suite dans cet article !

De multiples déchirures dans le monde

Le monde tel qu’on le connaît n’existe plus depuis des décennies, plus précisément depuis le Grand Amalgame et la survenue des Vortex. Ces portails apparus mystérieusement permettent de voyager à travers le monde instantanément. Mais se placer à travers les vortex n’est pas donné à tout le monde et ceux qui s’y risquent ont eu une formation très spéciale. Et même parmi les plus entrainés, il y a des disparitions, des blessés et des morts. Les voyages en vortex sont donc très risqués et nécessitent une maîtrise de tous les instants.
C’est dans ce monde que vit Elaine, 14 ans et bientôt participante à la grande Course de Vortex. Son classement déterminera son avenir dans cette société très hiérarchisée et qui fait la chasse aux Amalgamés (aussi nommés Splits). Qui sont-ils ? Des êtres humains dangereux qui lors du Grand Amalgame ont fusionné avec la nature : la Terre, l’Eau ou encore le Feu. Les Vortex sont la seule façon de les poursuivre efficacement. Il faut donc qu’Elaine soit dans les premiers si elle veut devenir une coureuse de vortex et venger la mort de sa mère, tuée par des Splits.

Addictif en peu de pages

En quelques courts chapitres, on plonge dans l’intrigue originale et maline de l’autrice. Au premier abord, on peut la trouver assez classique (ce qui est le cas), mais très vite il n’est plus seulement question de vortex qui déplacent d’un point A à un point B, et ça devient autrement plus captivant, pour ne pas dire renversant par moments.

Dès lors que l’on voyage en quatre dimensions, c’est une lecture assez exaltante qui sait surprendre son lectoat même si certains éceuils ne sont pas évités. Ce n’est pas gênant en soi car l’autrice a su créer son propre style et univers. Parmi ses nombreuses bonnes idées, je retiens surtout celle de la ville de Sanctum. Magnifique de beauté et sylvestre dans chaque aspect de son existence. C’est beau, et les images qu’on se fait à cette lecture sont tout simplement magiques.

Il y a quelques bonnes révélations bien efficaces qui sont savament disséminées et bien dosée, ce qui rend l’intrigue de plus en plus dingue au fil des chapitres. Mais à aucun moment on a un sentiment de précipitation comme dans certains romans dits haletants où tout est balancé en fin d’ouvrages. Ici, Anna Benning pose quelques petites « bombes » qui rendent l’intrigue à la fois surprenante et surtout durable. On ne sait pas toujours quand ça va nous tomber dessus, et rien que pour cela c’est agréable.

La notion de bien est de mal semble par ailleurs très claire dans Vortex, qui est écrit entièrement du point de vue d’Elaine. Mais peu à peu, les questionnements vont affluer, aussi bien pour elle que pour nous lecteurs, qui avons une vision très partiale de son univers. Quoi qu’il en soit, ça fonctionne à merveille !

A découvrir dès l’âge de 14 ans, pour ceux qui aiment les dystopies à la façon de Divergente et La Faucheuse ! On y retrouve le côté addictif de ces deux séries emblématiques du genre. A confirmer avec le second tome, mais le premier est pour le moins très prometteur.

Chronique ado : L’affaire Jennifer Jones

Grand classique contemporain de la littérature ado, ce roman a de quoi intriguer, voir choquer. Son histoire ? Celle d’un groupe de petites filles parties s’amuser au bord d’un lac, mais à leur retour, il y en avait une en moins…


L’affaire Jennifer Jones est paru aux éditions Milan dans la percutante collection Macadam en 2006. Dès sa parution, il est devenu un indispensable de tout rayon ado.

Comment de (ré)adapter à un monde dont on ignore tout ?

Jennifer Jones est une jeune femme qui découvre le monde extérieur avec curiosité et appréhension. Elle a purgé sa peine pour meurtre, car oui, c’est elle qui a tué sa camarade alors qu’elle avait à peine une dizaine d’années. Une enfant qui a tué une autre enfant, ça paraît incroyable, et pourtant c’est arrivé.


Mais même les pires crimes méritent d’être lavés si la peine a été purgée. C’est le cas de Jennifer Jones qui découvre la vie en société. Sa remise en liberté va défrayer la chronique et les journalistes vont tout faire pour la retrouver et avoir l’exclusivité… Mais Jennifer Jones n’existe plus, car avec sa peine, la jeune femme a droit à une nouvelle vie, une nouvelle identité et un nouveau départ. Mais y a-t-elle vraiment droit ? L’opinion publique va-t-elle juger bon de laisser Jennifer vivre sa vie, elle qui a brusquement stoppé celle d’une fillette de son âge ?

Un roman social noir et passionnant

L’ouvrage a beau être référencé en littérature ado, il peut se lire parfaitement par des adultes. C’est un très bon thriller psychologique qui nous raconte la vie d’une meurtrière après qu’elle ait purgé sa peine. On y parle réinsertion, seconde chance (et l’idée d’une seconde chance existe-elle aux yeux du tribunal de la bien-pensance ?), fuite en avant et droit au bonheur.

Jennifer Jones et son lourd passif sont passionnants. Vous aurez également le droit aux explications de ce qu’il s’est passé autour du fameux lac. Mais plus qu’un bon roman noir à suspense, L’affaire Jennifer Jones est un fabuleux roman social. Par de nombreux aspects, il m’a fait penser à l’oeuvre réaliste et documentée de Kerry Hudson. La pauvreté, le fait de devoir survivre aux échecs répétés de ses parents, la mère toxique, manipulatrice, qui traine son enfant dans de nouvelles « maisons » à chaque nouveau petit copain…

J’ai trouvé qu’il y avait un réel écho entre le roman d’Anne Cassidy et le travail de Kerry Hudson. Avant même que ce roman soit un thriller ou un polar, c’est avant tout un terrible portrait de l’Angleterre et de ses laissés pour compte. Pour Kerry Hudson, c’était plus précisément dans l’Ecosse des années 80. On y retrouve les même luttes, les mêmes thématiques et des personnages ballotés et malmenés par la vie. A plus d’un titre, Jennifer Jones est en fait tout autant bourreau que victime…

Mais je m’égare, et il est temps pour moi de laisser se terminer cette chronique. Il n’y a que deux choses à retenir : c’est un roman marquant et fulgurant. Et c’est bien plus qu’un « simple » polar, ce roman est une véritable analyse de la société et de ses dysfonctionnements.


A quand une sortie poche chez les adultes pour ce titre ? Je suis certaine qu’il trouverait son public et irait parfaitement à côté des romans sociétaux de Kerry Hudson par exemple.

Chronique Fantasy : La Guerre du pavot – Tome 1

Rebecca F. Kuang est une autrice américaine d’origine chinoise. Elle a fait ses études à Cambridge, et elle a par ailleurs fait sa thèse sur la littérature de propagande en Chine durant la seconde guerre sino-japonaise. Et justement, on a beau être dans un univers de fantasy, l’autrice s’inspire énormément de l’histoire de la Chine et du Japon au travers d’un prisme guerrier. Accrochez-vous, c’est le genre de roman qui marque et qui réussit à surprendre ses lecteurs.ices.

Une héroïne d’une force mentale rare

Rin est une jeune femme qui en a bavé depuis sa plus tendre enfance. Elle vit avec son oncle et sa tante depuis presque toujours, maltraitée, parfois affamée par ces derniers. Son rêve : intégrer la prestigieuse école de guerre du pays, Sinegard. Mais pour cela il faut beaucoup d’argent ou alors des compétences et un savoir exceptionnel. Savoir qui justement ne peux s’obtenir qu’en ayant les plus coûteux précepteurs… et donc il faut de l’argent.
Comment Rin va-t-elle pouvoir amasser autant de connaissance en travaillant jour et nuit pour son oncle qui l’exploite ? Tout cela sans parler du fait qu’elle est sans le sou…

C’est ainsi que l’on découvre une héroïne qui part de rien et qui va tout dévaster sur son passage… pour notre plus grand plaisir.

Un roman flamboyant et incroyable

Dès les premières pages, on sent que l’on trempe dans un roman à la fois sombre et cru. L’écriture de R.F. Kuang (et l’excellente traduction de Yannis Urano) ne nous épargne aucun détail sale de la guerre ni tous les sacrifices que va consentir Rin (bienvenue dans la grimdark fantasy). Rien que la scène d’ouverture vous donnera un bon aperçu de la teneur du roman : brutal, magnifique et incroyable.

Si vous avez envie d’épique, de batailles et de magie (latente, étrange et incontrôlable) c’est le roman parfait. Bien que l’ouvrage s’intitule La guerre du Pavot, cette dernière n’a lieu qu’à partir de la seconde moitié de l’ouvrage. Les trois cent premières pages étant dédiées à la formation de Rin ainsi qu’à celle de ses camarades.

L’autrice a fait preuve d’une incroyable créativité dans son histoire, ce qui réussit à la rendre vraiment unique. Dans la première partie de l’ouvrage, vous avez toute la cession « formation » des élèves. Les entrainements, l’intégration (ou non) de Rin parmi les autres, l’apprentissage difficile et injuste qui mène à l’art de la guerre… Et seulement ensuite, vient la fameuse guerre du pavot.

J’ai adoré les deux parties du roman, même si j’ai toujours eu une préférence pour les phases d’apprentissage et de transmission (que ce soit dans les romans ou dans les films). Mais ici, même la partie martiale du roman m’a plu. On y parle stratégie, manipulation, coups de génie, horreurs de la guerre…
L’autrice s’étant directement inspiré de l’histoire de la Chine et du Japon pour son roman. Nous sommes cependant bien dans un monde créé de toute pièce, le royaume de Rin étant le Nikara et le pays de l’ennemi se nommant Mugen (il s’agit d’une petite île face aux grandes terres du Nikara).

L’ouvrage fait presque six cent pages, mais il se dévore à une vitesse ahurissante. D’ailleurs, c’était une si bonne lecture que j’ai vraiment tout fait pour en ralentir le rythme… je ne voulais pas quitter Rin et ses coups de folie bravaches, ni même sa verve et son panache. J’ai vraiment tout aimé dans ce premier tome très complet et magnifique…

Je ne puis que vous conseiller de lire ce premier tome de la trilogie de la Guerre du Pavot. L’ouvrage a paru en 2020 en grand format, et est depuis disponible en poche chez Babel, la collection de poches d’Actes Sud. Cependant, une ombre plane sur ce magnifique roman… l’éditeur n’a toujours pas annoncé la publication de la suite. Alors, Actes Sud Exofictions a-t-il toujours les droits pour sortir la suite de la saga ? Rien n’est moins sûr… (MAJ les livres ne sont plus dispos chez Actes Sud, qui a perdu les droits d’exploitation. Réédition du premier tome en mai 2025 chez De Saxus)
Une chose est certaine cependant, c’est que l’ouvrage n’a pas nécessairement rencontré un public aussi large qu’il aurait dû. Cette couverture n’est pas inesthétique, mais elle ne donne pas non plus envie de se précipiter sur le roman. Je la trouve trop sombre, pas assez épique comparé au contenu de l’ouvrage. Actes Sud n’est clairement pas un éditeur pour ce type d’ouvrage, ou alors ils auraient dû « casser » cette image élitiste qu’on associe immédiatement à la maison d’édition…

Ainsi donc, la suite possible en France de La guerre du pavot reste pour le moment en suspend… Peut-être pourrait on espérer qu’une autre maison d’édition se penche sur le sujet ? Après tout, R.F. Kuang va bientôt être publiée chez De Saxus pour son roman Babel. On peux toujours rêver d’une reprise et d’un redémarrage de sa trilogie chez eux (MAJ bis, cette chronique écrite en mai 2024 était prémonitoire). Clairement, cette saga mérite d’avoir une seconde chance en France, elle est trop exceptionnelle pour être abandonnée !

La magnifique couverture de la réédition du premier tome de La Guerre du Pavot prévue pour mai 2025 chez De Saxus. Cette publication va être épique : en plus de la quantité limitée, le papier sera de qualité supérieure et la couverture a été choisie par l’autrice elle-même comme étant sa favorite parmi toutes les publications qu’a connu ce titre.
AUTEUR :
TRANCHE d´ÂGE :

Chronique SF : Rama tome 1 & 2 – Rendez-vous avec Rama et Rama II

On peut résumer Rama à une question essentielle : la curiosité est-elle un vilain défaut quand on sait qu’elle est inhérente à l’espèce humaine ?

Qui n’a jamais lu ce grand classique de la sf ? Moi, mais peu à peu je me rattrape et découvre des pépites. Est-ce que Rama est à lire ? Je dirais oui pour le premier tome, dont la conclusion vertigineuse (et un peu frustrante ?) se suffit à elle-même. Se plonger dans Rama, c’est découvrir un auteur, mais aussi un univers où la science explique tout. Arthur C. Clarke a écrit plusieurs œuvres absolument fondatrices dans la SF. Le premier tome de Rama en fait partie. De même que 2001 L’odyssée de l’espace ou encore Les enfants d’Icare.
Rama fut ainsi pour moi une double découverte : celle d’un classique de la hard-sf et celle d’un auteur.

Un objet spatial non identifié

Rama, pour faire très simple, c’est l’histoire d’un vaisseau qui traverse notre système solaire à une vitesse folle et qui apparaît dans les radars du jour au lendemain. La Terre entière est en émoi, tout particulièrement la communauté scientifique qui voit là enfin le moyen de répondre à quantité de questions que se pose l’être humain depuis la nuit des temps. La première a en tout cas trouvé un réponse : sommes nous seuls dans l’univers ? Il semblerait que non.

Mais ce mystérieux vaisseau va soulever beaucoup plus de questions que de réponses quand une équipe d’expédition est dépêchée le plus vite possible à un point précis du système solaire pour l' »intercepter ».

J’ai beaucoup aimé l’atmosphère de ce premier tome. Le rythme est très lent, mais tout ce mystère, cette touffeur étrange n’est pas rassurante. Ce n’est pas non plus à proprement parler angoissant, mais une chose est sûre, Rama met mal à l’aise ceux qui l’explorent. Il y a peu de personnages et c’est ce qui fait la force narrative de la petite équipée improvisée pour l’exploration. les dynamiques entre les personnages sont assez basiques, mais ça fonctionne très bien. Soyons clair, le plus intéressant c’est de savoir ce qu’il y a DANS le vaisseau, le reste passe au second plan.
Et comme les curiosités et les mystères s’accumulent au fil des pages, c’est assez hypnotique. A chaque fois que l’on pense avoir enfin une réponse claire, il en vient une bizarre, tordue, et qui n’aide pas du tout à y voir mieux. Imaginez la frustration du lecteur !

Ce premier tome de Rama se suffit pour moi parfaitement à lui-même. L’ouvrage est simple, factuel, il ne s’y passe guère de choses, et en même temps j’ai tellement aimé le final que pour moi il n’y a pas besoin de plus. Pourquoi vouloir à tout prix des réponses ?
Si j’avais su que la suite était très différente du premier opus, je ne me serais pas lancé dans sa lecture…

Rama II

Cette fois-ci, Arthur C.Clarke n’est pas tout seul et écrit à quatre mains avec Gentry Lee, ingénieur de métier. Et franchement, en peu de pages, on s’y perd. On navigue de pays en pays, de personnages en personnages, les intrigues politiques et autres manœuvres sont nombreuses pour savoir qui va pouvoir aller dans ce nouveau vaisseau nommé Rama II. Il y a tellement de personnages avec chacun sa problématique que l’on s’y perd… Si bien que le vaisseau en partance pour croiser la route de Rama II ne décolle pas avant plus d’une centaines de pages et que cela n’apporte rien à l’histoire. Dialogues creux, beaucoup moins factuel et efficace que le premier tome, c’est très fouillis et assez indigeste…

J’ai cependant aimé une chose : l’idée que dans le futur, c’est l’homme qui assume la charge de la contraception. Pour le coup c’est aussi novateur que très intéressant (et même logique, quand on sait que l’homme est fertile 100% du temps alors qu’une femme ne l’est que quelques jours par mois).

Ainsi, j’ai persévéré jusqu’à la moitié de l’ouvrage avant de lâchement abandonner. Je n’ai pas réussi à surmonter le surnombre de personnages, leurs problématiques et interactions. Il y avait trop de scènes courtes qui naviguent d’un lieu à un autre, on a plus l’impression de lire un film qu’autre chose… Ce qui rend le tout extrêmement illisible.

Ceci est mon point de vue tout personnel sur Rama, que j’ai donc décidé d’abandonner à la moitié du second tome sur les quatre que compte la série au total. Pour les curieux, tentez le premier tome, vraiment bien et très largement suffisant. Mais encore vous faudra-t-il aimer une sf où il ne se passe guère de choses et qui est assez philosophique.

Pour information : L’intégrale 1 contient Rendez-vous avec Rama et Rama 2 et L’intégrale 2 contient Les jardins de Rama et Rama révélé.

TRANCHE d´ÂGE :

Chronique ado : Ma part de l’ours

Un roman survivaliste aux allures de retour à l’état sauvage…

Second roman de Marine Veith, Ma part de l’ours est paru chez Sarbacane en novembre 2022. Son précédent ouvrage était également paru chez Sarbacane, dans la collection Exprim’. Il s’agissait d’un ouvrage sur la migration : Ceux qui traversent la mer reviennent toujours à pied, paru en 2020.

Réunion familiale au sommet

Nous sommes sur une route escarpée, dans les Pyrénées. Nous découvrons Tim, 13 ans et Aurore, 20 ans. Ils sont sur la route pour rejoindre leur mère. Elle ne vit pas avec eux car elle est internée depuis la disparition de leur père. Ainsi, c’est Aurore qui gère tous les aspects de leur vie au quotidien, la charge mentale, les difficultés financières, la crise d’adolescence de son petit frère… Aurore gère tout et plus encore.
Mais lorsque leur voiture se retrouve prise au piège en pleine montagne sans aucune possibilité de faire demi-tour, la vie d’Aurore et Tim va basculer. Ils vont faire une première rencontre stimulante, puis une autre, encore plus incroyable qui va leur donner confiance en l’avenir… Mais qu’elle est cette rencontre ?

Un roman aux allures de récit initiatique

L’idée d’un roman formateur qui va forger deux antihéros un peu perdus me plaisait beaucoup. Alors, quand en plus il est question de nature et de liberté, j’ai été encore plus emballée par l’histoire. Malheureusement, j’ai attendu tout au long de l’histoire un événement qui n’est jamais vraiment arrivé. Je ne sais pourquoi, mais j’attendais un point de bascule. Pas nécessairement une révélation fracassante, mais quelque chose qui bouleverse à jamais nos héros. En un sens, c’est effectivement le cas, mais cela à manqué d’envergure pour moi.

Cependant, la révolution pour les personnages est bien là, bien que trop lattente à mon goût. Je ne puis bien évidemment pas vous en dire plus, mais il est clairement ici question de révolution silencieuse. D’ailleurs, il y a toute une partie anti-système et hors des conventions qui m’a séduite, même si je trouvais que l’on allait au final pas assez loin.
Ce qui m’a déplu en réalité c’est que l’on se retrouve dans un entre deux jamais clairement défini. Certes il y a du changement dans la psychologie des personnages, ainsi que dans leur façon de voir le monde, mais ce ne fut pas suffisant à mon goût.

En somme, Ma part de l’ours fut pour moi une lecture décevante. Ce n’est pas à cause du texte selon moi, mais plus à cause des attentes que j’avais. J’avais une image plus « thriller » de ce roman, ce qui n’est absolument pas le cas. Si vous êtes cependant à la recherche d’un roman proche de la nature et qui questionne sur notre place dans la société, vous êtes au bon endroit. Dès 14 ans.

Chronique YA : Sombres citrouilles

Un roman noir et très sombre qui dénonce les secrets de famille qui pourrissent durant des décennies…

Dans le monde de la littérature jeunesse, Malika Ferdjoukh est une figure incontournable. Elle écrit aussi bien pour les primaires que pour les adolescents (ses romans ados se lisent aussi avec plaisir quand on est grand !).
C’est une autrice que j’ai découvert sur le tard, mais dont je dévore gentiment l’oeuvre petit à petit. Ici, avec Sombres citrouilles, je ne savais pas à quoi m’attendre, ce roman a de quoi surprendre à tous points de vue.

Si vous ne connaissez pas encore ou très peu les romans de Malika Ferdjoukh, laissez vous tenter par Le club de la pluie ou encore Les quatre soeurs pour commencer doucettement. Une fois que vous êtes ferré, Sombres citrouilles sera tout indiqué.

Un anniversaire à ne pas louper

Aujourd’hui, c’est la l’anniversaire du grand-père, figure emblématique et patriarcale de la famille Coudrier. Impossible et interdit de manquer l’événnement sous peine de représailles, notamment de la part de Mamigrand. C’est ainsi que peu à peu, tous les membres de la famille Coudrier arrivent sur le domaine, les enfants, les petits-enfants… tous forment une famille éclectique et étrange, déjà fortement marquée par le deuil. Plus encore qu’il n’y paraît.
Alors quand un corps est retrouvé parmi les cirtrouilles du jardin par les marmots, c’est le début d’un mystère qui va aller en s’épaississant…

Sombre à souhait, noir comme rarement

J’ai adoré ce roman polyphonique et happant mettant en scène des enfants issus d’une famille bourgeoise rurale. On y découvre l’ambiance si particulière et délétère des secrets de famille, des choses inavouables, des petits arrangements… et quantité d’autre choses.
Au travers du rages d’Hermès, Madeleine, d’Annette, Colin-Six ans, et quantité d’autres personnages qui gravitent, vous allez découvrir la véritable histoire. Celle que la famille Coudrier ne voudrait pas que vous connaissiez. Celle que les petits-enfants eux-mêmes ignorent, mais que vous lecteurs vous allez découvrir.

C’est extrêmement sombre, j’insiste sur ce point car au travers de ce polar intimiste et famillial, Malika Ferdjoukh dénonce. Elle dénonce la bien-pensance, l’amour sacrifié sur l’autel du qu’en diras-t-on, le racisme de ces bonnes familles rurales blanches et qui entendent bien le rester. C’est terrible de cruauté tout en étant pour moi extrêmement réaliste.

L’autrice a su dépeindre avec talent les portraits de ces deux grand-parents taiseux aux nombreux secrets. Et l’image de la grand-mère affectueuse va vite se fissurer, de même que celle du grand-père gentil et discret…

Lire Sombres citrouilles, c’est être à l’image de ces enfants et voir nos certitudes voler en éclats.

Ainsi, pour ceux et celles qui aiment les romans noirs, les mystère insolubles en apparence et les personnages incroyables de réalisme, vous êtes à la bonne porte. Entrez donc dans le cercle restreint des Coudrier, en tentez de vous y faire accepter, pour le meilleur et pour le pire… Dès 14/15 ans.

Chronique roman graphique : La vie rêvée de Willow

Un roman graphique au début engageant mais qui ne réussit pas à transformer l’essai

Paru début 2023 dans la nouvelle collection Hachette Romans Graphiques, La vie renversée de Willow est un one-shot. On y suit le destin de Willow qui va se retrouvé chamboulé par la découverte d’un étrange livre…
Les dessins et le texte sont réalisés par Tara O’connor

Une vie normale chamboulée

Willow Sparks est une adolescente qui n’est pas très à l’aise dans sa peau. Elle ne se sent pas à sa place, a très peu d’amis, et subit des moqueries de la part de certains. Mais un jour, elle découvre à la suite d’un énième harcèlement une pièce secrète dans la bibliothèque où elle travaille… et dedans, un livre qui va bouleverser sa vie.

Une histoire totalement oubliable et dispensable

J’ai lu ce roman graphique il y a moins d’un mois et pourtant, je n’en ai gardé quasiment aucun souvenir. La jeune Willow est un personnage intéressant bien que peu attachant, de même que les autres personnages qui font cette intrigue. Tout est traité en surface, et comme c’est un one-shot, on a peu de temps pour apprendre à les aimer suffisamment avec leurs failles et leur détresse. Pour moi, ce fut en tout cas une lecture sans affect malgré le sujet délicat du harcèlement.

Que dire de plus ? En ce qui concerne la partie fantastique de l’ouvrage, elle est assez commune. Nombreuses sont les intrigues où un personnage se voit offrir la possibilité de changer son existence pour quelque chose de meilleur (en apparence). Mais ici, rien de bien marquant ni de captivant. De plus, les dessins de Tara O’connor ne sont pas non plus à mon goût, ce qui n’aide pas à apprécier cet ouvrage.

La vie renversée de Willow est donc un roman graphique qui m’a beaucoup déçue. Je lis très peu de bd et autres formats illustrés, et j’avoue être très difficile. Alors les ouvrages passables, très peu pour moi. Ne perdez pas non plus votre temps avec cet ouvrage !
Âge du lectorat : dès 14 ans.

Chronique YA : Les royaumes immobiles tome 1 – La princesse sans visage

Vous aimez les ambiances de cours royales et de trahisons ? Vous avez aimé Le prince cruel et ses faes ? Vous aimerez à coup sûr La princesse sans visage et sa compétition mortelle de feys à la Hunger Games !

Premier tome d’une saga de fantasy mettant en scènes des feys (cruelles, cela va sans dire), La princesse sans visage est paru chez Slalom en avril 2022 avec une sublime et intriguante couverture… J’ai immédiatement eu envie de découvrir l’univers et l’histoire de cette jeune femme qui ne doit jamais tomber le masque au sens propre comme au figuré.

Ariel Holzl est un auteur français qui écrit des romans pour la jeunesse et les ados. Son travail a déjà été remarqué et distingué de nombreuses fois, on peut ainsi citer : Peine-ombre (404 édtions), Temps Mort (Slalom éditions), Les soeurs carmines (Les moutons électriques, trilogie) et Bpocalypse à L’école des Loisirs. Et pour chacune de ses parutions, l’auteur sait sortir du lot et se faire remarquer.

Pour moi, il s’agit de ma première lecture de cet auteur, mais je suis intriguée par son œuvre depuis des années. Il était donc temps de rattraper ce manquement !

Une jeune fille cachée aux yeux de tous depuis sa plus tendre enfance…

Ivy est une jeune fey qui ne le sait pas encore, mais qui va concourir au trône vaccant des Royaumes Immobiles. Comment ? Pourquoi ? Elle n’a aucune idée des enjeux ni des épreuves qui l’attendent, mais elle sait que sa vie est menacée… qu’elle perde ou qu’elle gagne. Imaginer une sorte de Hunger Games version feys avec des épreuves pernicieuses et dangereuses à souhait ! Vous aurez une légère idée de ce qui attend la jeune et encore innocente Ivy dans ce monde de pouvoir et de manipulation…

Un premier tome passionnant à l’univers riche

Rien que par la richesse de son univers, ce premier tome est pour moi une réussite. La magie cruelle des feys, l’univers des Royaumes Immobiles, les constantes références au Songe d’une nuit d’été de Shakespeare, la culture étendue de l’auteur sur les différentes espèces de fées et autres créatures… On sent que l’auteur s’est renseigné du mieux possible pour nous déployer un univers cohérent basé sur de nombreux mythes (peu de gens connaissent les Phooka par exemple !). L’idée du marbre-bois, sorte de matière solide comme la pierre mais qui grandit comme une plante est aussi poétique que merveilleuse… Rien qu’avec cet élément, j’ai été séduite. Et voir ensuite comment a été développé l’univers qui fourmille de détails fut pour moi un réel plaisir.

L’intrigue quant à elle est efficace, on se plonge dedans en quelques pages à peine, l’aventure et le danger tirant la jeune Ivy de son manoir abandonné. La danse des personnages est elle aussi bien menée, on ne sait pas qui pourrait trahir de qui est une véritable alliée pour Ivy. Difficile de s’y retrouver dans ce monde hostile pour la jeune femme… et c’est bien normal !

Je mets toutefois une petite réserve sur le rythme du roman dans ca dernière moitié. En effet, j’ai trouvé le rythme un peu trop lent alors que tout se précipite avec moult surprises coup sur coup à la fin ! Et quelle fin ! C’est dommage, j’aurais aimé que cela soit un peu plus équilibré car j’avoue avoir eu une baisse d’intérêt durant l’épreuve dans la forêt. Je n’ai retrouvé mon élan de lecture que vers les cinquante dernières pages. Ce passage à vide est un peu dommage car l’univers est excellent, l’intrigue bien mené, c’est juste une question de rythme. Mais malgré ce bémol, La princesse sans visage reste pour moi un très bon premier tome.

En conclusion, si vous aimez les ambiance de cours royales, de trahisons, et de compétitions mortelles, La princesse sans visage est fait pour vous ! C’est un fabuleux mélange à classer entre Le prince cruel de Holly Black et Hunger Games de Suzanne Collins ! Et c’est français, s’il était besoin de prouver que nous sommes tout à fait capables d’écrire des romans ambitieux et magiques…

Chronique : Les archives des collines chantantes – Tome 1 – L’impératrice du sel et de la fortune

Une superbe novella de fantasy asiatique qui nous conte l’Histoire et le destin d’un royaume au travers de ses objets. Epuré, stratège et surprenant, ce premier opus séduit en quelques pages à peine…

L’ouvrage avait remporté le Prix Hugo du meilleur roman court en 2021, le voici enfin en France sous le beau et mystérieux titre L’impératrice du Sel et de la Fortune. Son autrice, Nghi Vo, est américaine, il s’agit de son premier ouvrage publié en France.
A l’occasion de la parution de cette nouveauté, L’Atalante a mis les petits plats dans les grands en proposant deux versions différentes de l’ouvrage : une normale, et une autre collector avec couverture reliée, texture peau de pêche et signet en tissu inséré dans la reliure. Un écrin tout à fait à la hauteur du contenu.

Le destin d’une impératrice venue d’ailleurs

Au travers d’un dialogue entre deux personnages que rien ne lie, nous découvrons peu à peu la vie et le destin de l’impératrice du Sel et de la Fortune. Chaque chapitre s’ouvre à nous lors de la présentation d’un objet particulier qui apporte son lot d’histoire et de révélations sur qui était l’impératrice et les sacrifices qu’elle a fait pour son peuple. Mais au fil des chapitres, on sent se profiler autre chose que l’histoire officielle…

Tout en subtilité et en beauté

Voilà longtemps que je n’avais pas lu un texte aussi atypique et beau tout à la fois. C’est le genre d’ouvrage que l’on commence sans réellement savoir où il va nous mener, mais qu’une fois fini, on veut relire encore et encore. Sa mythologie semble simple en apparence, mais il n’en est rien, de même pour les très nombreux enjeux et symboles sous-jacents. Chaque mot est pesé, chaque objet choisi avec soin. Tout n’est pas dit, il vous faudra vous approprier cette lecture et mener de vous-même votre propre investigation… Et encore, il ne s’agit que du premier tome. Je gage que les titres suivants seront au moins aussi captivants et oniriques que ce premier opus !

Et que dire des nombreuses scènes marquantes et touchantes de cet ouvrage ? Elles sont nombreuses, et c’est en cela que je trouve cet ouvrage remarquable. Le texte fait à peine plus de cent pages, et pourtant il a réussit à m’entraîner dans des légendes créées de toutes pièces que j’avais envie d’écouter, de découvrir et même de m’y abreuver. Je voulais percer les mystères de cette impératrice maline et secrète qui n’est pas ce qu’elle semble être.

Impossible d’en dire plus car c’est le genre d’ouvrage qui se découvre réellement par la lecture, avec un univers qui s’infuse lentement. Ce premier tome est ainsi une vraie belle découverte et j’ose espérer que les suites arriverons relativement rapidement ! Au total, ce sont cinq tomes qui sont prévus, avec des couvertures tout aussi magnifiques que ce premier opus, toutes signées Alyssa Winans.

AUTEUR :
GENRE : Fantasy, LGBTQIA+
EDITEUR :
TRANCHE d´ÂGE :