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Chronique : Les Chiens

Un roman haletant et terrifiant de réalisme

Récit à connotation hautement autobiographique, Les Chiens nous conte l’histoire d’un jeune homme et de sa mère qui fuient un père/mari violent faisant tout pour les retrouver… Angoissant et captivant, bienvenue dans l’univers d’Allan Stratton. Outre le réalisme profond de l’histoire, vous trouverez également une partie fantastique pour corser le tout… Ce roman est d’ailleurs si ancré dans le passé traumatisé de l’auteur qu’il l’a dédié à Alex, son beau-père, qu’il nomme « le meilleur papa du monde ». Allan Stratton a précédemment écrit un autre roman : Le Secret de Chanda.

Un quotidien crispant et constamment sur le fil…

Pour Cameron et sa mère, il n’y a aucun endroit sûr où que ce soit dans le pays. Ils fuient de ville en ville, jamais assez longtemps pour s’attacher… Se fixer, c’est se mettre en danger, et ça, Cameron et sa mère l’ont bien compris. Mais il se pourrait que cette course-poursuite prenne fin grâce à la bourgade du Creux du Loup… L’endroit est si paumé qu’il est impossible d’être suivi jusqu’ici, même quand on est un psychopathe violent et insatiable comme le père de Cameron… Serait-ce le début d’un renouveau pour la petite famille qu’ils composent à eux deux ?

Mais il semblerait que le Creux du loup recèle d’autres dangers pour Cameron et sa mère… la maison dans laquelle ils vivent donne des sortes d’hallucinations visuelles et auditives à Cameron… Et cerise sur le gâteau, son intégration au collège de la ville ne se passe pas très bien… Que se passe-t-il dans l’étrange et branlante maison ? Cameron a-t-il des hallucinations ou autres chose ? Et qu’est-ce que le voisin, Mr Sinclair cache-t-il ?

Efficace et crispant comme il faut

Peut-être cela tient-il au fait que l’auteur a vécu une partie de ce qu’il écrit, quoi qu’il en soit, son écriture et son histoire sont captivants. Les phrases sont très courtes, incisives, directes. Les descriptions très factuelles, voir cinématographique. On est immédiatement dans l’ambiance, et on voit très bien ce que veut die Cameron quand il décrit la maison dans laquelle ils vivent comme étant tout droit sorti d’un film d’horreur.

Outre l’ambiance mortifère voir carrément flippante de son nouveau lieu de vie, Cameron cogite toujours à cent à l’heure à propos d’une foule de choses : son intégration dans la nouvelle ville, son père qui use de toutes les astuces pour les retrouver (Facebook, bouche à oreille, anciens amis et écoles…).

L’emprise psychologique qu’a le lieu sur Cameron se raffermis au fil des chapitres à un point tel que l’on se met à douter de tout et de tout le monde. Le voisin étrange, le camarade de classe harceleur et un peu violent, le nouveau copain de sa mère… tout participe à sa sensation d’enfermement. Et nous devenons peu à peu aussi paranos que notre jeune narrateur.

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Si vous êtes à la recherche d’un bon thriller fantastique/psychologique adapté dès l’âge de 15 ans, ne passez pas à côté des Chiens. Âmes sensibles, s’abstenir, certaines scènes sont terrifiantes de réalisme, et c’est peut-être ça, le plus inquiétant. Non pas les éléments fantastiques, mais le réalisme poussif du récit par certains aspects.

Avec ce titre, la collection Macadam confirme qu’elle est toujours dans la course et continue à surprendre par des publications efficaces et originales.

Chronique : Les évadés du bocal

Un roman absolument fou… où l’on suit une petite troupe d’évadés de l’asile psychiatrique qui décide de mettre à jour le complot d’ordre mondial qu’ils ont découvert ! Mais qui les croira et y arriveront-ils seulement ?

Bruno Lonchampt est un auteur français qui a déjà quelques ouvrage son actif, notamment un chez Sarbacane : Bloc de haine (en 2014).

Avec Les évadés du bocal paru en septembre 2016, on plonge dans un monde totalement fou… et c’est vraiment le cas de le dire !

Une évasion totalement improbable…

Tout débute lorsqu’on fait la connaissance de Sandro, Yves et Lisa. Tout barrés à leur manière, ils sont persuadés qu’il y a quelque chose de louche qui se trame dans leur hôpital… En effet, de nombreux patients on mystérieusement disparut et il semblerait qu’il y ait tout un système bien monté derrière tout cela. Ainsi, ils sont bien décidés à le prouver coûte que coûte ! Commence alors une escapade étrange, loufoque et totalement imprévisible…

Un récit trop décousu pour moi mais parfois très drôle

Les évadés du bocal ne sera pas forcément un texte évident à lire pour des ados avant l’âge de 15 ans (ou les autres d’ailleurs). Il faut suivre le fil (très décousu), comprendre les enjeux de chacun des personnages, et les problèmes particuliers que chacun rencontre dans sa petite tête !

En cela, la folie de chacun est d’ailleurs très bien exprimée.

Pour l’intrigue, le plus amusant est de voir l’histoire se dérouler jusqu’à ce que… l’on sache si le complot imaginé par nous trois fous est bien réel ou s’il s’agit une belle hallucination collective. On assiste par ailleurs à des scènes géniales, notamment celle où un chauffeur de taxi se prend de sacrées claques sur la tronche car… Sandro a une peur panique des chauves !

Pour le reste, je suis plus réservée sur cette lecture. J’ai passé un bon moment, c’est certain, mais pas au point de conseiller ce roman. En effet, après lecture, il me reste un sentiment très diffus où tout se mélange. C’est trop décalé et trop rapide pour moi, je n’ai pas su garder en tête précisément l’intrigue afin de vous en reparler dans cette chronique. Ce qui est dommage.

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Les évadés du bocal n’est pas un livre déplaisant, loin de là. Mais il est si fidèle à ses personnages qu’il est comme eux : fou, totalement décalé et hors-normes. A conseiller à des lecteurs avisés qui sont prêts à sortir totalement des sentiers battus ! Dès 15 ans.

PS : Mention spéciale à la couverture hyper flashy et magnifique ! Elle détonne, tout comme le texte dont elle s’inspire.

Chronique Jeunesse : Théo chasseur de baignoires en Laponie

Un roman fantaisiste aussi drôle que bourré d’imagination où les baignoires peuvent vite mal tourner et revenir à l’état sauvage !

Auteur pour la jeunesse, Pascal Prévot n’en est pas à son premier roman. On lui doit notamment Rien ne presse, majesté (Rouergue), La communauté de l’œuf dur (Milan), Le plus vieux meurtre du monde (Milan) et dernièrement, en juin 2016 : Théo chasseur de baignoires en Laponie.

Le roman a par ailleurs remporté le très prestigieux prix Gulli en 2016 !

Un métier aussi original que dangereux : chasseur de baingoires

Que se passe-t-il quand on s’occupe peu ou pas assez de sa baignoire ? Et bien, elle peut lentement retourner à son état le plus primitif et redevenir sauvage. Elle peut même aller jusqu’à avaler son propriétaire durant son bain ! Mais le métier de chasseur de baignoire est loin d’être répandu, et c’est toujours au père de Théo que l’on demande de régler ce genre de situation périlleuse lorsqu’un cas de baignoire sauvage survient. Chine, Afrique, Grand Nord… il traverse le monde entier pour résoudre ces affaires délicates. Dans cette aventure, nous suivons Théo et son père dans le Grand Nord, plus précisément dans un château où il semblerait que tout ne tourne pas rond…

Une lecture vivante, sympathique et complètement déjantée

Pour avoir l’idée de créer une histoire tournant autour de baignoires meurtrières, il faut déjà avoir une imagination fort débridée ! Et pour développer tout une technicité autour de la chasse à la baignoire (capteurs d’humidité, études comportementale de la robinetterie, etc.), il faut être encore plus imaginatif. Et c’est bien ce que nous propose ici Pascal Prévot : un roman fourni, très bien construit et dont l’univers tien bien la route.

On passe un bon moment de lecture, mais il faut rester bien accroché, car les digressions sur la robinetterie sont nombreuses ! On appréciera également l’amitié qui se créée entre Théo et la jeune fille vivant dans le domaine de Kreujilweck-Potam, Elisa.

A découvrir pour son univers fouillé et totalement unique, mais également pour ses personnages et son intrigue haute en couleurs. Si vous cherchez un récit original et inclassable tout en étant bien écrit, c’est donc ici que ça se passe. C’est une lecture qui demandera un peu plus d’effort que d’habitude à son lectorat, mais ça n’est pas un mal en soi, bien au contraire.

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Ce roman est donc parfait pour des lecteurs dès l’âge de 9/10 ans qui aiment déjà bien la lecture. Je crains que l’ouvrage soit un peu trop débridé pour des lecteurs qui n’aiment pas déjà lire. C’est un bon roman à découvrir, et s’il y a un jour une suite (l’auteur se garde une ouverture à cet effet), je la lirais avec plaisir et curiosité !

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Chronique : Les fausses bonnes questions de Lemony Snicket – Tome 2 – Quand l’avez-vous vue pour la dernière fois ?

Un second tout aussi captivant et accrocheur… qui nous laisse planer dans une ambiance sombre et étrange, celle de la ville désertée de Salencres-sur-mer…

Voici le second tome des Fausses bonnes questions de Lemony Snicket : Quand l’avez-vous vue  pour la dernière fois ? Mais, ce titre de livre sous forme interrogative n’est que l’introduction d’une longue série de très mauvaises questions… qui amèneront Lemony aux mauvaises réponses…

Lemony Snicket, ce n’est pas uniquement le nom du héros de cette série en quatre tomes, c’est également le nom de l’auteur, ou du moins son pseudonyme. Lemony Snicket est avant tout très connu pour sa saga en treize tomes Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire… Les illustrations aussi uniques que reconnaissables sont toutes signées Seth.

Une suite qui ne manque pas de piquant… et de questions en cascade !

Nous avions laissé notre jeune Lemony en prise avec de nombreuses interrogations, et cela ne va pas aller en s’améliorant. Après le mystère d’une disparition et du vol d’une statuette très convoitée, les choses sont loin de s’améliorer.

Une jeune et célèbre chimiste qui fait tout pour sauver la ville de Salencres-sur-mer grâce à ses compétences disparaît elle aussi. Et c’était peut-être bien la seule à pouvoir rendre à la ville sa splendeur d’antan… Qui souhaite voir la ville péricliter jusqu’à disparaître ? Qui donc aurait un intérêt à tuer l’industrie de l’encre ? Que de nouvelles questions et très peu de réponses…

Toujours aussi savoureux et passionnant !

Si il vous fallait une chronique de confirmation pour vous plonger dans cette série policière pour la jeunesse, la voici. Je ne tarirais pas d’éloges pour cette saga inattendue et géniale menée avec brio et malice. On se délecte à chaque page des nouveaux mystères qui font surface, on s’interroge, on essaye de comprendre… et comme Lemony, on piétine ! Mais loin d’être frustrante, cette intrigue est passionnante.

Alors que l’on pense commencer à percevoir des révélations, de nouveaux éléments entrent en ligne de compte et tout s’écroule, c’est brillant.

On appréciera tout particulièrement l’écriture très décalée de Lemony Snicket : à la fois humoristique et pleine de jeux de mots, de remarques incongrues (et géniales !). Le relationnel du jeune enquêteur avec sa responsable est toujours très houleux, rien à faire de ce côté-là. Mais on appréciera le fait que Lemony réussi peu à peu à se créer un réseau fiable entre le bibliothécaire de la ville, Jake le jeune barman et les deux frères qui gèrent le seul taxi encore en exercice de la ville…

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Pour ce second tome (sur quatre), c’est encore une réussite. Vous découvrirez enfin un nom à mettre sur la mystérieuse force qui tire vers le fond la ville de Salencres-sur-mer. Vous vous poserez certainement des questions sur les mystérieux têtards qui ont mordu Lemony, mais la réponse n’est pas pour tout de suite… Mais rien n’est oublié par l’auteur, il en reparlera, soyez en sûr ! Intrigue à suivre de près avec le troisième tome de la série : Ne devriez-vous pas être en classe ?

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Chronique : Le cœur du problème

Un roman étrange qui joue avec l’absurde tout en étant captivant

Christian Oster est un écrivain français qui œuvre aussi bien dans le domaine de la jeunesse que de la littérature avec un grand L. Tous lectorats confondus, il a ainsi plus d’une vingtaine d’ouvrages à son actif !

Avec Le cœur du problème, paru chez Points, c’est dans le domaine de la littérature que nous le découvrons avec une histoire qui commence de façon complètement folle et improbable : un homme découvre un cadavre chez lui. Que va-t-il bien pouvoir en faire ?

Un homme mort dans le salon… et alors ?

Tout débute avec le cadavre d’un homme mort dans le salon. Notre narrateur est pour le moins déstabilisé, d’autant que cela n’a pas l’air de préoccuper sa femme, qui prend tranquillement un bain… Et cela ne va pas aller en s’arrangeant quand il comprends qu’elle n’a aucune envie d’assumer ce qu’il s’est passé et fuit les responsabilités… le laissant avec une myriade de question, et un mort.

L’absurde poussé à l’extrême

La lecture de ce roman vous obligera à au moins une chose: lâcher prise. Vous n’aurez pas les réponses à toutes les questions qui vous taraudent, certains personnages risquent de vous agacer sérieusement… et pourtant, à sa manière, ça fonctionne.

La première partie du roman est selon moi la meilleure. On ne sait pas encore tout des circonstances qui ont amené ce cadavre dans le salon, mais on « savoure » les mauvaises idées qu’a le narrateur pour s’en débarrasser. Surtout quand il décide d’acheter des pains de glace par kilos et de s’aider de Google pour cacher le cadavre indésirable… C’est à mourir de rire tant ça va loin dans l’absurde !

Cependant, j’avoue que le traitement de la psychologie des personnages m’a parfois laissée perplexe par leur manque de crédibilité et/ou de logique. Mais je pense que c’est totalement voulu, et que le but et de savourer l’entremêlement dans lequel est le narrateur, sans personne pour l’aider.

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Christian Oster nous offre ici un guide des mille mauvaises manières de se débarrasser d’un cadavre, puis d’un policier un peu trop curieux. Il ne s’agit d’ailleurs pas d’un roman policier, mais d’un roman sous forme de récit. Malgré un suspense qui nous tient jusqu’au bout, c’est surtout un humour détaché et féroce qui nous est ici offert, avant toute idée d’intrigue policière.

Si vous aimez les histoires étranges et drôles, Le cœur du problème vous fera passer un excellent moment !

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Interview de Julien Messemackers pour son roman Ceux qui savent

Rencontre avec Julien Messemackers, l’auteur du thriller paru le 1er juin aux éditions Anne Carrière : Ceux qui savent, qui fut un coup de cœur ! (la chronique est ici !)

La Bibliothèque de Glow : Pouvez-vous conter votre parcours aux lecteurs ?

Julien Messemackers : J’ai l’impression d’avoir fait tout ce dont je n’étais pas fait pour : j’ai réalisé des courts-métrages plutôt ratés puis j’ai été le pire stagiaire régie qu’on ait vu et enfin, j’ai longtemps travaillé chez les agents où j’ai fait toutes les plus grosses bourdes! Depuis quelques années, mon alimentaire se consacre à trouver des romans adaptables à l’écran et je m’y reconnais un peu plus.  A coté de cela, je n’ai jamais arrêté d’écrire et c’est ce cheminement de longue haleine – et plus introspectif – que je considère comme mon vrai parcours.

La Bibliothèque de Glow : Comment en êtes-vous venu à l’écriture de ce premier roman ?

Julien Messemackers : Avant ce roman, j’ai énormément écrit le soir en rentrant chez moi durant mes longues années dans ma peau de “salary man”; j’ai pondu des nouvelles, des synopsis, imaginé la bible d’une série sur les agents artistiques et d’autres projets qui n’ont jamais vu le jour. Puis il arrive un moment où ce que l’on a à faire sortir de soi devient une urgence intérieure. C’est dans cet état d’esprit que j’en suis venu à ce roman.

La Bibliothèque de Glow : Y a-t-il eu un déclic qui vous a donné l’idée de cette histoire ?

Julien Messemackers : Le fameux déclic… L’”insight” comme disent les anglo-saxons. C’est un livre qui me l’a donné : à la recherche de bouquins à adapter pour un réalisateur, je m’étais laissé égarer dans la S-F de Michael Marshall Smith et en lisant l’un de ces romans, j’ai eu la vision d’un personnage, puis d’une situation. Je tenais mon histoire. Mais je cherche toujours un livre à adapter pour le réalisateur en question… Des idées?

La Bibliothèque de Glow : En combien de temps avez-vous écrit Ceux qui savent ?

Julien Messemackers : Le premier jet, en trois mois (j’avais déjà une trame), puis il y a eu plusieurs réécritures étalées sur un an.

La Bibliothèque de Glow : Pourquoi avoir choisi le thème de la génétique pour votre thriller ?

Julien Messemackers : Le thème s’est imposé de lui-même, avec ce que je voyais à en tirer : de façon détournée, je l’utilise pour parler de la notion de différence, par exemple. D’un point de vue dramaturgique et romanesque, la génétique est un matériau inépuisable et fascinant. Cela peut rebuter car on pense manipulation médicale, etc. mais au travers de ce prisme, il y a tout à re-raconter de l’être humain.

La Bibliothèque de Glow : Avez-vous dû faire beaucoup de recherches ?

Julien Messemackers : Beaucoup mais en fin de compte, les recherches n’ont pour but que de rendre l’action vraisemblable. Créer un univers romanesque – ou scénaristique – crédible dans un domaine que l’on ne connait pas demande un gros travail en amont, et ce n’est pas forcément la partie la plus agréable de l’écriture.

La Bibliothèque de Glow : Est-ce que votre roman à pour vocation de « dénoncer » les manipulations génétiques et autres dérives ?

Julien Messemackers : Je trouve que plus un livre cherche à dénoncer, moins ça marche… En allant le plus loin possible dans sa représentation, le roman met en scène un cauchemar puis c’est à chaque lecteur de se faire sa propre opinion sur les idées qu’il développe.

La Bibliothèque de Glow : Ce qui arrive dans votre roman n’est pas encore arrivé… mais pensez-vous que ce sera le cas très bientôt ?

Julien Messemackers : Qui sait si ce n’est pas déjà le cas? Seuls ceux qui savent le savent.

La Bibliothèque de Glow : Même question pour le hacking, comment avez-vous mis à jour cet univers secret ?

Julien Messemackers : Ça s’est nourri au fur et à mesure et jusqu’aux dernières épreuves, j’ai fait des ajouts en glanant de nouveaux éléments. Un nombre incalculable de petites choses accumulées se retrouvent disséminées dans le récit pour lui donner la texture de la réalité, mais il fallait que ça reste fluide et ne pas trop en faire pour trouver le juste équilibre entre réel et fiction.

La Bibliothèque de Glow : Avez-vous des titres de référence sur la génétique à nous conseiller ?

Julien Messemackers : Quitte à vous décevoir, aucun… J’ai nourri mes recherches autrement que par les livres sur le sujet. Je ne voulais pas faire un thriller scientifique. Je ne compte pas les articles scientifiques, études, mémoires universitaires et émissions débusqués sur Internet ou à la télévision pour façonner des pans entiers de l’histoire. A titre d’exemple, je me suis intéressé à l’étude de Dunedin en Nouvelle-Zélande. Ce qui m’intéresse en premier lieu, ce sont les enjeux humains.

La Bibliothèque de Glow : La maladie orpheline dont souffre Hélène existe-t-elle réellement ?

Julien Messemackers : A vous de le découvrir… Où est le vrai, où est le faux, c’est l’une des clés de lecture de ce roman.

La Bibliothèque de Glow : Y a-t-il un personnage en particulier que vous affectionnez ?

Julien Messemackers : Un bon méchant, c’est important et j’espère lui avoir accordé toute l’affection qu’il mérite mais je suis attaché à chacun des personnages.

La Bibliothèque de Glow : La fin de votre roman est terrible ! Avez-vous prévu une suite ? Ou préférez-vous laisser le lecteur cogiter sur cette belle conclusion ?

Julien Messemackers : Que ce soit dans un film, un livre ou une série, je suis toujours déçu par les fins qui n’en sont pas vraiment alors j’ai conçu le roman comme un one-shot avec un vrai dénouement qui apporte les réponses. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Une fois que la boite de Pandore est ouverte, on ne peut plus la refermer et le destin de l’un des protagonistes qui s’apprête à basculer, pourrait bien tous nous précipiter dans l’abime.

Julien Messemackers sera par ailleurs en signature à la Librairie Royaumes (paris 13ème) le vendredi 30 juin prochain, dès 19h00, à l’ocasion du Pari des libraires.

Chronique : Marquise

Un roman bien mystérieux qui aurait pu être génial, mais dont la conclusion n’a pas su être pleinement à la hauteur des attentes que j’ai placées en lui…

Joanne Richoux vient de débarquer dans la collection Exprim’ (Sarbacane) en mars 2017 avec Marquise. Il ne s’agit pas de son premier roman, mais je la découvre à travers cette nouveauté. Marquise, c’est l’histoire de deux jeunes paumés à qui la vie n’a pas décidé de sourire et qui décident de rebattre les cartes… mais est-ce pour un mieux ?

Une session de recrutement très étrange

Entre Charlotte et Billy, ça a toujours été une évidence. Ils ont toujours voulu s’évader de leur petite ville étriquée, de leur vie tristoune et déprimante… Non, ce qu’ils veulent, c’est vivre vraiment. Et c’est ainsi qu’ils s’en vont un jour, sans demander leur reste, abandonnant leurs familles respectives.

Le but ? Rejoindre Paris pour y passer un casting très spécial réservé uniquement à ceux qui en ont entendu parler par le bouche à oreille… Et manque de pot, ils réussissent toutes les étapes, jusqu’à être parmi les 8 gagnants qui ont le droit d’aller vivre avec Le Marquis, sur son île personnelle en Écosse.

Qu’est-ce donc que cet étrange mode de vie où tout le monde vit comme à l’époque du Roi Soleil ? Une secte ? Quel est le but réel du Marquis ? D’où lui vient une telle fortune pour faire vivre autant de gens à sa charge ?

Tout cela a beau être fort étrange, Charlotte et Billy plongent à corps perdu dans cette affaire un peu bizarre et carrément louche. Mais jusqu’où iront-ils pour plaire au fameux Marquis ?

Une accroche géniale mais dont le développement final n’a pas su me séduire

L’idée de départ de Marquise est génial : une société secrète qui recrute des gens selon des critères connus d’eux seuls. Cela à tout pour plaire : une bonne dose de mystère, une ambiance désuète due à l’époque chérie par Le Marquis… C’est tout de suite captivant.

Jusqu’à la conclusion. En effet, c’est la fin du roman qui m’a déplu et qui fait que je n’ai que moyennement apprécié l’ensemble. Tout est très bien décrit et campé dans ce roman, mais quand on découvre le pot aux roses, je m’attendais à quelque chose de beaucoup surprenant. La fin du roman a malheureusement un gout de déjà vu… Sans en dire plus (impossible, ce serait tout vous gâcher !), j’ai trouvé la fin trop rapide et quelque peu bâclée.

En effet, malgré l’écriture vive et accrocheuse, certains personnages sont trop stéréotypés, et même si l’issue n’est pas évidente au premier abord, elle n’en est pas pour autant surprenante.

J’ai particulièrement eu du mal avec l’héroïne, Charlotte. Beaucoup trop tête brulée à mon goût, toujours de mauvais poil, rebelle (même quand ce n’est pas nécessaire), elle manque beaucoup trop de sang froid. A tel point qu’elle en devient agaçante. Là où elle pourrait choisir le dialogue, elle choisi la confrontation ou un mur de silence. Systématiquement. Elle est trop indépendante pour moi, même si cela est également a force pour affronter ce qui l’attend.

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En somme, Marquise est un roman ado qui faisait de très belles promesses. Elles sont en partie tenues, mais la conclusion ne reste pas au niveau de l’histoire dans son ensemble ! C’est donc une réussite partielle, gageons que l’auteure nous fera découvrir son univers au travers d’autres romans puisque Marquise est son tout premier. Il faut bien débuter quelque part !

Chronique : Valet de Pique

Un roman noir sur le thème de l’écrivain qui se laisse entraîner par sa part de noirceur. Littérairement parlant, mais aussi littéralement. Du grand Joyce Carol Oates… impossible à lâcher !

On ne présente plus la grande, la très prolifique auteure américaine Joyce Carol Oates. Elle a écrit une quantité folle de romans, s’est essayé à un nombre incroyable de styles et de genres différents… C’est l’auteure à lire/découvrir au moins une fois dans sa vie !

Valet de Pique est son tout dernier ouvrage en date en France, il est paru en mars 2017 aux éditions Philip Rey avec une très belle et sobre couverture. Cette fois-ci, Oates nous entraine dans le relationnel qui lie un auteur à ses œuvres… y compris les plus inavouables.

Andrew J. Rush est le Valet de Pique

Grande star sur la scène du polar, Andrew J. Rush s’ennuie ferme. Sa production actuelle ne le satisfait pas (il me fait penser à James Patterson, est-ce voulu ?), il trouve ses propres écrits à succès passables, mais ne fait pas vraiment ce qu’il aime… Ainsi est né le Valet de Pique.

Un étrange pseudonyme derrière lequel il se cache pour écrire les récits qui l’habitent réellement. Sales, misogynes, sanglants et même vulgaires, les romans du Valet de Pique révèlent une face sombre d’Andrew J. Rush. Il ne trouve du plaisir qu’en écrivant ces romans qu’il cache soigneusement à son entourage, n’assumant pas du tout cette part de lui-même autonome et glauque.

Jusqu’au jour où tout bascule, et où le Valet de Pique prend de l’ampleur dans la vie normalisée de Rush…

Un roman noir qui se dévore d’une traite

Le thème de la dualité qui anime un auteur et ses créations est ici magnifiquement retranscrit par Joyce Carol Oates. Et qui mieux qu’elle peut en parler ? Elle qui possède de nombreux noms de plume quand elle écrit des polars : Rosamond Smith ou Lauren Kelly, et peut-être même d’autres pour ce qu’on en sait !

Ainsi dans ce roman, l’intrigue est aussi simple qu’immédiatement captivante. On entre dans le vif du sujet sans fioritures et ça se dévore ainsi… jusqu’à la fin ! J’adore les romans à l’ambiance noire et sombre, alors avec Valet de pique, j’ai été parfaitement servie. On appréciera la douce perfidie qui monte progressivement au fil des interrogations d’Andrew J. Rush. On aimera l’ambiance feutrée des larcins que nous découvrirons peu à peu… C’est un véritable régal livresque, tant au niveau de l’écriture que de la traduction.

Autre élément très plaisant, le personnage d’Andrew J. Rush écrit à Stephen King sous le nom du Valet de Pique. J’ai adoré le fait que Oates mélange fiction et réalité pour apporter encore plus de prégnance à son roman. Cela m’a d’ailleurs fait penser à un autre livre que j’ai adoré pour son ambiance ancrée dans le monde de l’écriture : Le contrat Salinger.

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Je ne vous en dirais pas plus sur ce roman, sous peine de trop en dévoiler. Sachez simplement que Valet de Pique est un roman noir, et un très bon. Qu’il se lit très vite, qu’il captive, et qu’il nous entraîne avec lui dans ses méandres… Saisissant.

Chronique jeunesse : Le hibou n’est pas manchot

Quatre histoires policière bourrées d’humour et d’oiseaux, à découvrir dès l’âge de 9-10 ans !

Souvenez-vous, nous avions déjà parlé du roman La carotte se prend le chou, du même auteur, aux éditions Nathan. Emmanuel Trédez revient avec le même concept : 4 histoires déjantées, mais cette fois-ci on quitte le monde des légumes pour celui des… volatiles !
Alors, est-ce que ça marche toujours aussi bien ? Oui !

Archie Duc, un enquêteur à la pointe de l’observation

Dans ce nouveau petit recueil de nouvelles policières, vous ferez la connaissance qu’est le fin limier Archie Duc. Aidé en cela par un apprenti poussin perspicace, et toute une petite équipe efficace, Archie Duc va mettre à mal les meurtriers et voleurs dans les différentes affaires qui lui tomberont sur le coin du bec !

« Au nom de l’oie, je vous arrête ! »

Comme le titre de cette seconde partie de chronique vous l’illustre bien, Le hibou n’est pas manchot est encore une fois un roman où les jeux de mots fleurissent. Les jeunes lecteurs vont devoir s’accrocher pour suivre, et c’est tant mieux ! Il ne faudrait pas que tout leur tombe tout cuit dans le bec non plus, si ?

Une lecture dynamique, enlevée et maligne, voici donc les maître mots de ce petit ouvrage de presque 150 pages. Le tout est parsemé de quelques illustrations très parlantes (et souvent comiques) qui animeront à merveille le tout.

On retrouve les mêmes ressorts comiques que dans le roman précédent (il n’y a pas d’ordre à respecter, les personnages sont d’ailleurs tous différents). De même, les intrigues, sont aussi simples qu’efficaces.
Bref, c’est le genre de roman parfait pour les enfants qui aiment peut-être déjà lire (ou non !), et qui souhaitent d’essayer à quelque chose de différent et d’un peu inclassable. A découvrir dès l’âge de 9 ans minimum, ce sera parfait.

Espérons maintenant que les éditions Nathan rééditeront les autres romans qu’avait écrits Emmanuel Trédez dans la même veine, je suis très curieuse de les découvrir…

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Chronique : Miso Soup

Rarement j’ai lu un roman japonais aussi génial, étrange et malsain…

Ryû Murakami (à ne pas confondre avec Haruki Murakami), est un auteur japonais très prolifique. En France, plus d’une vingtaine de ses livres sont publiés, tous aux éditions Picquier. Parmi ses titres les plus réputés, on peut citer Les bébés de la consigne automatique ou encore Bleu presque transparent.

Son style est toujours assez hard, il traite de tous les sujets, y compris les plus sordides : la prostitution des lycéennes dans Love & Pop par exemple, ou encore le thème du tueur en série avec Miso Soup. Et justement, Miso Soup est un roman fort étrange et fascinant à la fois…

A la découverte des quartiers chauds de Tokyo

Kenji est un jeune homme qui guide les touristes étrangers dans les ruelles les plus à vif de la capitale japonaise : Kabukichô. Bar à hôtesses, peep-show, rencontres et plus si affinité… C’est le paradis de la débauche version japonaise ! Alors, quand Kenji est contacté par un touriste américain nommé Frank pour visiter les coins les plus torrides du quartier, c’est avec plaisir qu’il accepte l’arrangement. Mais au fil des heures qui s’écoulent, les mimiques et les réactions de Frank travaillent beaucoup Kenji… Il est instable, a des réflexions malsaines, étranges. Au point que le jeune japonais se demande si son client n’aurait pas un lien avec le cadavre d’une jeune femme retrouvé la veille au soir dans des poubelles… Est-ce bien le cas ou le fruit d’une imagination débordante de la part de Kenji ?

Miso Soup, ou comment revisiter le thème du tueur en série

Rarement j’ai lu un roman aussi magnifiquement plongé dans l’ambiance sombre d’un autre Japon, celui de la nuit et des plaisirs. Tout en bizarreries, c’est la culture d’un monde différent et fascinant qui s’ouvre à nous : love hôtels, bars à hôtesses, etc., c’est une découverte totale.

Pour ceux qui aiment les romans sombres et très noirs, Miso Soup est fait pour vous. Il s’y trouve des scènes absolument mémorables. La façon dont la psychologie des deux personnages est mise en place par l’auteur est superbe. Et diabolique. Difficile de savoir qui affabule et qui franchi la ligne rouge… C’est construit de telle façon que l’ambigüité autour de Frank suscite de très nombreuses interrogations, aussi bien par Kenji que par nous lecteurs !

Ce roman est tout simplement génial et marquant. Certaines scènes vous resterons à jamais gravé dans la mémoire tant elles sont choquantes/malsaines/horribles (rayez la mention inutile). Et c’est justement cela que j’ai adoré. J’ai enfin trouvé un auteur qui va assez loin dans mes désirs de littérature. On découvre un univers fascinant et sombre totalement assumé. Ryû Murakami ne s’arrête jamais dans son obsession d’aller plus loin. Il nous pousse dans nos retranchements et nous interroge jusqu’aux ultimes pages…

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C’est une superbe réussite dans le domaine du roman noir asiatique. C’est magnifique de perversité, c’est glauque et ça tient bien la route… Au point que c’en est terrifiant.  Âmes sensibles, attention à vous toutefois !

Si vous tombez sur cet ouvrage, il vous faut donc vous le procurer absolument ! L’ouvrage est actuellement épuisé, mais il n’est pas difficile à trouver dans des magasins qui font du livre d’occasion. J’espère de tout cœur pouvoir le vendre à nouveau en librairie un jour : l’histoire, la couverture, tout es parfait.