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Chronique essai : Tokyo Crush

Un témoignage passionnant sur le Japon vu par une française au travers des applis de rencontre !

Vanessa Montalbano est partie au Japon avec un visa vacances/travail. Quand elle a débarqué là-bas, elle ne parlait pas un mot de japonais ! Mais peu à peu, elle a appris la langue, la culture, les myriades de nuances dans la façon de s’exprimer, les goûts étranges de certains japonais et tant d’autres choses passionnantes. Tokyo Crush est à la fois un essai sur la société nippone au travers de ses amours, mais également un témoignage passionnant d’une expatriée curieuse.

Le Japon comme on ne l’a jamais lu

Je ne vais pas vous faire une chronique traditionnelle avec un tel livre. Je vais plutôt vous parler des passages qui m’ont le plus intéressée ou plu.

Par exemple, saviez vous qu’au Japon (et dans d’autres pays d’Asie), il n’est pas rare que dans les premières questions, celle du groupe sanguin soit demandée ? En effet, le groupe sanguin d’une personne est très importante pour nombre de japonais, il permet de connaître le caractère d’une personne (un peu comme les signes astrologiques chez nous). L’information du groupe sanguin est même publique quand il s’agit de personnalité politique ou de personnages publics.

Autre fait incroyable, les fantasmes de certains sont très spécifiques. Je savais déjà que l’on pouvait acheter des petites culottes portée par des femmes (ou même se les faire voler sur son balcon), mais je ne savais pas qu’il y avait un nom pour certains fétichismes bien précis !


Par exemple, connaissez-vous le zettai ryōiki ? Il s’agit de la partie des cuisses nue entre une jupe et des bas. Ou encore le paislash ? Il s’agit d’avoir la poitrine divisée par la lanière d’un sac en bandoulière.
Il faut également savoir qu’il est tout à fait légal au Japon (et facile de les trouver) de lire des mangas pornographiques mettant en scène des enfants. Ahurissant n’est-ce pas ?

Comme de nombreux romans nippons le prouvent, le Japon est une société profondément sexiste. C’est ainsi que j’ai appris qu’il y avait eu un scandale des écoles de médecine là-bas. Les résultats avaient été truqués durant des années pour favoriser les hommes au concours d’entrée en médecine. La raison ? Les femmes arrêteraient de pratiquer la médecine au bout de quelque temps ou travailleraient moins une fois qu’elles seraient mariées et mères…

Bon, je viens de vous mentionner les pires choses incroyables que j’ai lues dans cet ouvrage sur le Japon. Mais Vanessa Montalbana raconte des expériences très diverses et passionnantes. Par exemple, fait amusant, beaucoup de japonais avec qui elle a eu une aventure d’un soir s’excusaient de la taille de leur pénis… Ils en étaient extrêmement complexés.

Elle nous explique aussi à quel point la culture japonaise est codifiée. On le sait, dans une moindre mesure, mais elle l’a expérimenté en étant notamment serveuse : servir les personnes les plus importantes du groupe en premier, poser le plat dans le bon sens (oui, il y a un sens !, etc.). Il y a une quantité de petites bévues à ne pas faire, de non-dits lourds de sens qui peuvent mettre mal à l’aise la personne en face si l’on a pas les codes… Ce qui est arrivé de nombreuses fois à l’autrice.

Autre fait surprenant et vraiment chouette pour le coup, les baignoires japonaises ont une option pour conserver chaude l’eau du bain ou la réchauffer pour se baigner à nouveau le lendemain. Je trouve ça génial !

Toutes ces petites choses et quantité d’autres encore, font que le Japon est un pays fascinant, étrange et même impressionnant pour qui n’en possède par les nuances. Vanessa Montalbano a mis des années à les apprécier, les comprendre, et nous offre dans cet ouvrage un aperçu des nombreuses épreuves qu’elle a surmonté pour en embrasser toute la complexité. Un ouvrage indispensable à tous les amoureux de Japon qui veulent en savoir encore et toujours plus sur cet incroyable pays aux paradoxes toujours plus surprenants.

Chronique YA : No sex club

Un roman totalement d’actualité et nécessaire qui parle sans complexes de sexualité, d’aromance et d’asexualité ! Le roman que tout adolescent.e d’aujourd’hui a besoin de lire pour mieux se comprendre et accepter les autres.

Betty Piccioli est une autrice française, elle écrit aussi bien pour les ados que les adultes. No Sex Club n’est pas son premier roman, loin de là. Avant cela, elle a écrit notamment : Robustia (Scrinéo), Chromatopia (Scrinéo), Urbex mortel (Rageot), ou encore Les demoiselles d’honneur préfèrent les kilts (auto-édité). En regardant ses romans, on peut voir qu’elle s’adonne à beaucoup de genres différents : romance, roman pour adultes, fantasy, roman ado réaliste, thriller…

No Sex Club est un roman paru chez Slalom paru en juin 2023.

Un club pour réunir celleux qui n’ont pas encore sauté le pas

Quand on est au lycée, le sujet du sexe est récurrent pour ne pas dire omniprésent. Tout ce que l’on dit, fait, pense, est scruté, décortiqué jusqu »à la lie. Mais au final, il n’y a que deux camp : ceux qui l’on déjà fait, ceux qui savent, et les autres, qui sont vierges par choix ou par défaut. Cela est assez binaire et ne prend pas en compte – entre autres – celleux qui n’ont tout simplement pas de désir sexuel ou qui ne sont pas attirés par une quelconque histoire d’amour.

C’est dans ce contexte très ancré dans les problématiques quotidienne des lycéens que se déroule No Sex Club. On y suit Alan, gay et vierge, ainsi que Tilda, vierge, et Acérola qui s’affiche clairement comme asexuée. Les trois amis vont créer un peu malgré eux un club destiné à affirmer sa sexualité… ou son absence de sexualité. Et oui, pourquoi serait-il indispensable d’avoir couché pour être accepté ou être populaire ? Est-ce que faire l’amour nous rend vraiment différent aux yeux des autres ?

Ils ne le savent pas encore, mais ce petit club qui ne réunit qu’eux trois au début va vite prendre une ampleur qui les dépasse… Surtout quand les préjugés et la jalousie s’en mêle, le tout sur fond de réseaux sociaux.

Le drapeau pansexuel, fièrement arboré sur un badge par Acérola

Un roman utile, nécessaire et à diffuser

Nous vivons une époque où la parole se libère sur les différentes façons de vivre sa sexualité (ou son absence), de même que le sujet du genre est de plus en plus traité et expliqué. Mais pour beaucoup – moi comprise – tout n’est pas toujours clair, d’autant qu’il y a mille et une manières de vivre sa sexualité. No Sex Club est là pour vous aiguiller et mieux comprendre certaines orientations sexuelles, tout cela sans faire culpabiliser, à aucun moment.
C’est clairement le genre d’ouvrage parfait à découvrir quand on entre au lycée et qu’on se pose des questions sur soi-même et ce qui nous entoure. En fait, tout ado un peu curieux de soi et des autres y trouvera son compte.

Ne vous méprenez pas sur le titre de l’ouvrage. Au début, en voyant ce titre d’ouvrage dessiné en gros à la craie, j’ai cru que le sujet de l’ouvrage était sur l’abstinence. Je pensais qu’il était question de virginité, de sexualité uniquement après mariage et de sacro-sainte abstinence. Il n’en est rien. Malgré le titre qui peut sembler très puritain, No Sex Club prône la liberté de ne pas vouloir coucher et non pas la virginité. Cet amalgame que j’ai fait, de nombreux personnages du roman vont d’ailleurs le faire, mettant à mal l’existence même du club.

Certains passages sont légèrement didactiques, ce qui manque parfois un peu de fluidité, mais la lecture de No Sex Club reste très agréable. Par contre je trouve qu’une double-page en couleur expliquant les différents codes graphique de chaque drapeau LBTQIA+ aurait été bienvenue. Il y a tellement de couleurs et de symboliques différentes qu’il est dur de s’y retrouver dans toutes les variations possibles de la sexualité !

J’ai beaucoup aimé ce roman ado pour de nombreuses raisons. Tout d’abord pour ses valeurs saines qui poussent les lecteurs.ices à s’interroger sur leurs propres motivations. Ensuite, pour son inclusivité et sa pédagogie. Enfin, pour ses personnages crédibles qui font des erreurs mais qui se relèvent après chacune d’elle. Ils sont vrais, crédibles et on a envie de les suivre dans leur démarche de légitimer le fait de ne pas vouloir faire l’amour pour s’intégrer, mais quand on se sent prêt.

Ainsi, ce roman inclusif et réaliste saura ravir celleux qui se cherchent ou tout simplement qui ont envie d’une bonne histoire dans la vibe de Sex Education ! Frais et divertissant tout en étant instructif. Il serait parfait en complément d’un cours d’éducation sexuelle !

PS : On appréciera également les nombreuses références cinématographiques et littéraires qui parsèment le roman. Grâce à ce roman, j’ai vu Lady Bird (que j’ai adoré) et j’ai rajouté à ma liste Loveless d’Alice Oseman.

Chronique ado : Ni prince ni charmant

Un roman percutant sur le consentement et comment faire tomber ses biais, même quand cela concerne son meilleur ami…

Nouveauté parue dans la percutante et efficace collection La brève chez Magnard, Ni prince ni charmant est le dernier roman en date de Florence Medina. On y parle sexualité, consentement et réseaux sociaux… Et ce n’est pas joli à voir, forcément quand on mélange tout ça. L’ouvrage est paru en mars 2022 en librairie.

Des messages d’alerte sur les réseaux

Tout commence par une jeune femme qui en prévient une autre en MP qu’un de ses contact a un « comportement problématique » avec les filles. C’est ainsi que la soeur de Tristan lui apprend que c’est l’un de ses meilleurs amis qui est mis en cause… Le jeune homme refuse cet état des choses, et il demande des preuves.

Mais il n’y a que des ont-dit… du moins au début. Peu à peu Tristan se pose des questions et va interroger son entourage, puis son ami lui-même… Ce qui amène Tristan à se poser également des questions sur ses propres comportements.

Prévenir avant que le pire n’arrive

Ce roman court et ultra percutant a un côté très dérangeant, sciemment, mais c’est flippant. La perception des choses que Tristan a entre le début du roman et sa fin est très bien menée. Comment passe-t-on d’un point de vue passif sur ses propres actes à une réflexion active ? En s’interrogeant sur notre entourage, nos motivations, notre confort…

La démarche de vérité de Tristan est difficile à mener, mais il va réussir à braver de nombreux obstacles, en premier lieu celui de l’image idéalisée qu’il a de son ami. Puis, arrivent les questions.

Je pense que c’est le genre d’ouvrage absolument nécessaire à faire lire aux ados, filles comme garçons. Afin de désamorcer l’idée que quand quelqu’un dit non, c’est juste qu’il faut insister un peu. Non en fait. Non c’est toujours non, quelle que soit la question. A faire découvrir dès 14 ans et même après !

CHRONIQUE : Le bleu ne va pas à tous les garçons

Paru en juin 2021 aux éditions De Saxus, cet ouvrage est un témoignage encore rare d’un africain-amériquain queer. Sa démarche est simple : ouvrir la voix aux jeunes queers comme lui, mais également à tous les autres. Tous les membres de la communauté LGBTQIAP+ pourrons être intéressés par cet ouvrage, mais pas seulement.
En effet, en tant que lectrice cisgenre blanche, j’ai également trouvé de quoi apprendre et mieux comprendre tout un cheminement que certain.e.s ont dû traverser. En somme, il n’y a pas besoin d’être concerné directement pour s’intéresser au sujet et lire ce livre.

Une vie à la frontière des genres

George M. Johnson a eu de la chance et il le dit constamment dans son ouvrage : il a été entouré d’énormément d’amour. Constamment, indéfectiblement, inconditionnellement. Et c’est assez rare pour le souligner quand on sait que quantité d’enfants avouant leur différence sexuelle à leurs parents sont rejetés, parfois même mis à la rue.

Son histoire est double : c’est celle d’un petit garçon noir aux États-Unis et celle d’un queer qui ne sait pas encore mettre des mots sur ce qu’il est, mais qui sait qu’il est différent. On le lui rappelle déjà trop souvent : il se déhanche trop, ne devrait pas s’intéresser à la corde à sauter, ne devrait pas non plus rechercher la compagnie des filles plutôt que celle des garçons… etc.

Mais la résilience de George M. Johnson semble infinie grâce à cet entourage précieux qui le protège tout en sachant qu’il est différent. Ou plutôt, iel est différent, l’auteurice souhaitant être désigné sous les pronoms iel et ellui.

Une histoire des Etats-Unis différentes de celle que les jeunes américain.es apprennent

Lire Le bleu ne va pas à tous les garçons c’est balayer au passage tout ce que l’on pense connaître de l’histoire des États-Unis et de ses « héros ». Je pense notamment au chapitre « Honest Abe » m’a menti, Honest Abe étant le surnom donné à Abraham Lincoln. Ce dernier est représenté comme le symbole de l’abolitionnisme alors qu’il n’était pas aussi égalitaire que cela. La preuve ? Certaines des citations de Lincoln que l’auteur nous propose dans son ouvrage :

« Attendu qu’elles ne puissent vivre ainsi, et tant qu’elles restent jointes, il doit exister une position supérieure et inférieure. Et moi, comme tout autre homme, je soutiens que la race blanche soit en position supérieure ».

Abraham Lincoln

Ou encore…

« Je n’ai pas l’objectif, ni direct ni indirect, d’intervenir au sujet de l’institution de l’esclavage dans les états où elle existe. A mon sens, je n’en ai ni le droit légal ni le désir ».

Abraham Lincoln

Avouez que ça calme de découvrir cela. Personnellement, j’ignorais ce pan de la personnalité de Lincoln et par extension de l’histoire des États-Unis. Manque de culture de ma part ? Certainement, mais il faut également souligner que cette facette de l’ancien président des États-Unis est totalement occultée. En effet, l’auteur nous explique que cette facette de l’histoire n’était pas dans ses manuels. Il a découvert cela plus tard, au collège, dans une école où les élèves étaient majoritairement Noirs. Avant cela, il était dans une école où les blancs étaient majoritaires et c’est une tout autre Histoire qui lui avait été contée…

Ces découvertes de la vérité ont concouru à construire la personnalité de George M. Johnson, à affiner son esprit critique et à poser des questions autour de lui. Il incite à toujours creuser la question quelle qu’elle soit quand on relève une curiosité, une incohérence dans un discours ou autre.

Ce témoignage n’est pas un manuel de survie pour les LGBTQUIAP+, mais plus un guide de cheminement qui mène toujours à la même chose au final : l’amour. L’auteur a traversé quantité d’épreuves (dont il parle assez peu finalement, préférant se concentrer sur le positif et n’étant jamais misérabiliste) : microagressions en quantité, agressions véritables, deuil, humiliations… Mais il réussit à trouver sa voix et à s’imposer avec brio. Il va même devenir président de sa fraternité étudiante : Alpha Phi Alpha.

J’aurais aimé découvrir plus d’épreuves qu’il a traversées car elles ont l’air d’être beaucoup plus nombreuses que ce qu’il mentionne. Mais ce mélange d’Histoire occultée, de remarques désagréables, de mises à l’écart, de recherche de soi quand les cours d’éducation sexuelle ne parlent que d’abstinence pour les hétéros, voilà ce qu’est cet ouvrage.

Ce livre est donc nécessaire, utile et indispensable. Espérons qu’il aidera à faire bouger les lignes encore très rigides de notre société sur l’aspect du genre. C’est également l’occasion de découvrir un pan de la culture africaine-américaine. Je n’ai qu’une envie : en découvrir plus.
Mon seul regret concerne seulement certains passages du livre, où l’auteur aurait pu développer plus amplement. Notamment concernant ses études et sa fraternité (mais il y a le sceau du secret j’imagine…).

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Chonique : Je ne pense qu’à ça

je ne pense qu'a çaJe ne pense qu’à ça : au titre on se dit, que c’est un livre sur le sexe pour les ados, eh bien oui…et non. Avant de parler de sexe, ce livre parle d’identité, d’intégration, en particulier pour les homosexuels (homme ou femme, comme vous le verrez). Je trouve d’ailleurs très bien qu’un livre pour la jeunesse (dès 11-12 ans) soit sorti sur ce thème délicat dans les écoles entre élèves (dont la violence des paroles peut en marquer certains à vie).

C’est ainsi que l’on suit le parcours d’Ismaïl, aussi bien dans sa tête que dans son corps, il évolue : mais vers quoi ? il ne le sait pas lui-même. Tout ce qu’il sait, c’est qu’un des garçons de sa classe le traite de pédé à tout bout de champs, alors forcément Ismaïl se pose des questions, doute de lui-même… une vraie torture pour un ado, qui se cherche déjà à la puberté.

Heureusement, il sera aidé par ses parents, mais aussi par une de ses profs à affronter le problème, même si les obstacles sont nombreux sur son chemin…

En conclusion, je trouve parfait ce livre pour tout ado qui se poserait des questions, ou qui se sent mal dans sa peau par rapport à sa sexualité encore non définie. Le thème abordé est difficile, mais les mots écrits par Karim Ressouni-Demigneux coulent de source, sans choquer, et son réconfortants, rassurant. Pour ce qui est de la taille du texte, rassurez-vous, un enfant de 11 ans n’aura aucun mal à lire le livre, le texte est écrit très gros, et une page sur deux est illustrée par Monike Czamecki, qui fait des choses très contemporaines, mais qui collent parfaitement au livre en mélangeant dessins simples et symboliques et collages.

8/10