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Chronique : Parce que je déteste la Corée

Que faire lorsque le pays d’où nous venons nous semble invivable ? Si il ne nous offrait aucune perspective d’avenir ?

Fraichement paru lors de la fameuse rentrée littéraire 2017, voici le premier roman du coréen Chang Kang-myoung à paraître en France. Ce sont les éditions Philippe Picquier qui nous offrent l’opportunité de découvrir d’une autre façon la culture littéraire coréenne… et ça détonne !

Parce que je déteste la Corée est un roman vibrant, vrai et qui questionne sur la position que peut trouver la nouvelle génération coréenne au sein de son propre pays…

Kyena, 27 ans, et un certain malaise…

Elle est jeune, travaille dans une grande banque, a un petit ami… La vie semble sourire à Kyena. Ou du moins elle n’est pas censée être malheureuse. Et pourtant… le mode de vie Coréen lui pèse de plus en plus pour de nombreuses raisons.

Elle n’aime pas ce travail qu’elle a dans une banque, son petit copain veut s’engager auprès d’elle mais sa belle-famille est loin de l’accueillir à bras ouverts. Et surtout, Kyena ne se voit pas avoir un avenir en Corée. Trop d’exigences, de confrontation entre ses rêves et la réalité… C’est ainsi, qu’elle décide de quitter amoureux, travail et famille pour l’Australie ! C’est un peu fou, mais Kyena ne manque pas de volonté et va tout faire pour que sa vie devienne se dont elle a toujours rêvé, sans pressions d’aucune sorte.

Un roman qui déborde de vie !

Le premier adjectif que je retiens pour qualifier ce roman atypique, c’est vivant. Parce que je déteste la Corée est un roman, certes, mais j’ai réellement cru en cette héroïne ordinaire qui se sentait piégée par les normes de son pays.

Kyena m’a fait rêver grâce à ses rêves de liberté plus grands qu’elle. Elle a beau trimer, se planter lamentablement parfois, faire d’énormes bêtises… elle se relève. Toujours prête à travailler dur pour atteindre ses objectifs. Et à force, qui sait… peut-être y arrivera-t-elle ? (vous n’avez qu’à lire le livre pour le savoir !).

Je l’ai comprise quand elle s’est retrouvée enfermée par une norme à laquelle elle ne voulait pas appartenir. J’ai vécu avec elle se sentiment d’injustice profond qu’elle a ressenti lorsque le fossé des inégalités sociales s’est rappelé à elle…

Chang Kang-myoung a un talent fou : il nous fait vivre non pas à côté, mais avec ses personnages. Quand j’ai lu ce roman, j’ai cru à un vrai témoignage tant c’était vibrant, véritable et touchant (et parfois dramatique).

Je ne peux que vous conseiller de lire ce livre pour mille et une raisons :

  • Il vous fera découvrir le fonctionnement de la Corée avec un œil nouveau
  • Il déborde d’énergie, comme sa narratrice, Kyena
  • Il vous dépaysera car on voyage constamment entre la Corée et l’Australie
  • Il vous donnera de la volonté, de la force, de l’espoir
  • Il vous permettra peut-être de remettre en question votre vie et vos souhaits

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Si ces raisons ne vous suffisent pas, je ne sais plus quoi dire pour vous convaincre. Je peux insister en vous disant que c’est mon premier coup de cœur de la rentrée littéraire 2017. Qu’il ma fallut lire beaucoup de romans inintéressants avec de tomber sur cette pépite. Alors, maintenant que j’ai déblayé la surproduction qu’est la rentrée littéraire, qu’attendez-vous pour en savourer l’essence même ?

Chronique : Comme un poison entre nous

Ou comment un voisinage peut devenir peu à peu toxique et dangereux…

Paru aux éditions Scrinéo en février 2016, voici le tout premier roman de Monica Rattazzi. Entre roman policier et suspense domestique, découvrez une vie de famille normale et bien sous tout rapport… Jusqu’à ce qu’insidieusement, le mal s’installe.

Un couple qui bat de l’aile et une vie de famille à assurer

Vu de loin, vous admirez un tableau idéal : une petite vie famille heureuse, un petit pavillon dans la banlieue… le bonheur parfait. Mais, le verni semble se craqueler depuis un moment, et peut-être qu’il suffit d’une pichenette pour que tout bascule… A moins que tout allait mal avant ?

Et si, Hadrien, le fils de la voisine était l’élément déclencheur qui allait tout compliquer ?

Un thriller diaboliquement efficace et lancinant

Ce roman a beau débuter lentement, peu à peu la tension monte. Pour les adeptes de thrillers domestiques, ce sera absolument parfait. Le délitement du couple que forment Pierre et Julie semble inévitable… Et au fil des pages, on ne peut s’empêcher d’être frustré face aux réactions de Pierre, qui semble constamment fermer les yeux sur ce qui l’entoure.

En quoi Hadrien, le fils de cette voisine est-il si dangereux ? Au début, rien ne laisse présager du danger qu’il représente pour la petite famille. Sa mère travaille comme infirmière, elle est souvent absente ou débordée. Pierre aime bien prendre Hadrien sous son aile et l’invite régulièrement à la maison. Parfois sans demander son avis à Julie… Mais rien de bien grave en soi. Cependant, Hadrien est parfois bizarre et vicieux malgré sa jeunesse. Mais ne serait-ce pas Julie qui se fait des idées ? Elle qui a du mal à s’entendre avec Pierre depuis quelques mois déjà, peut-être qu’Hadrien n’est qu’un prétexte pour se quereller avec lui ?

La mise en doute est constante dans ce roman. Parfois, on ce dit que c’est peut-être nous qui voyons le mal partout, que notre réalité est biaisée par ce que pense Julie. Mais est-ce elle le problème ? Son mari Pierre ? Ou le fameux garçon, Hadrien ? Difficile de savoir réellement… jusqu’au dernier tiers du roman, qui commence à révéler sa teneur !

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En somme, Comme un poison entre nous (dont le titre est absolument parfait) est un thriller psychologique brillamment mené. Ceux qui aiment le suspense et les histoires sous tension qui se déroulent à l’échelle de quelques personnages devraient apprécier. C’est simple, diabolique, efficace. Saurez-vous deviner l’issue de cette histoire qui s’obscurcit de plus en plus vite au fil des pages ?

Personnellement, je ne suis pas habituée à ce genre de lecture, mais j’ai lu ce roman à une telle vitesse qu’il est impossible de nier son efficacité ! A réserver toutefois aux fans du genre, je pense.

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TRANCHE d´ÂGE :

Chronique jeunesse : Big Nate – Tome 1 – Le champion de l’école

Un début de série amusant, drôle, et prometteur !

Vous ne connaissez peut-être pas encore Lincol Peirce, mais il pourrait être l’un des nouveaux auteurs favoris de vos enfants ! Dans la lignée de Tom Gates, Zarf le troll ou du Journal d’un dégonflé, Big Nate est une série de romans humoristiques à classer entre le roman et la bd. A découvrir dès l’âge de 8 ou 9 ans.

Champion… oui ! Mais de quoi ?

Big Nate est un garçon comme les autres, ni bon ni mauvais en quoi que ce soit. Il aime s’amuser et avoir le dernier mot avec ses copains, rire, se divertir… Mais Nate aimerait bon dans quelque chose, n’importe quel domaine ferait l’affaire !

Et ça tombe bien, il semblerait qu’aujourd’hui, ce soit SON jour. C’est un biscuit chinois qui le lui a dit : « Aujourd’hui, vous surpasserez tous les autres ». Mais dans quelle matière ? En maths ? En sport ? Autre chose ?

Une lecture très divertissante qui devrait plaire

Pile entre la bande-dessinée et le roman, Big Nate est une série jeunesse qui devrait plaire à de nombreux lecteurs potentiels. Pour ceux qui ne veulent pas encore lire des livres peu ou pas illustrés mais qui doivent tout de même passer à l’étape roman, c’est le bon compromis. Les parents seront ravis de voir leurs enfants lire, et les enfants seront heureux de lire par eux-mêmes un roman.

Les chapitres sont courts, efficaces, le bagou de Nate est aussi crédible que drôle… Bref, c’est un début de série qui fonctionne. C’est le genre roman-passerelle parfait pour ceux qui ont encore besoin d’assurance au niveau de la lecture avant de passer aux romans plus denses et moins illustrés.

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Pour ceux qui aiment lire mais qui ont encore besoin de beaucoup d’illustrations, Big Nate est une série parfaite. En plus, il y a déjà sept tomes de parus, ce sont donc de bons moments de lecture en perspective ! A découvrir dès l’âge de 8 ans.

Chronique : Que du bonheur !

Que du bonheur !Journal intime d’une ado qui passe une année franchement… moisie !

Rachel Corenblit est une auteur française très prolifique. Elle écrit aussi bien pour la jeunesse que pour les adultes et affectionne en particulier le registre de l’humour… Elle a notamment écrit : Quarante tentatives pour trouver l’homme de sa vie, La fantastique aventure de Woua-Woua le chihuahua ou encore Plié de rire, pour ne citer qu’eux.

Et cette nouveauté parue dans la collection DoAdo du Rouergue ne fait pas exception.

Journal intime en demi-teinte

Un chat mort, une trahison odieuse d’une soi-disant meilleure amie, les parents qui se séparent… et encore, ce n’est que le début des mésaventures d’Angela, narratrice et personnage principal de ce journal intime. Et encore, le revers de la médaille n’est même pas encore tombé sur le coin du nez de notre jeune héroïne !

Un récit aux chapitre courts, relativement drôle, mais pas mémorable…

Bienvenue dans la tête d’une ado tout à fait normale et donc un peu déjantée ! La jeune Angela commence effectivement l’année en fanfare… mais dans le mauvais sens du terme. Rien ne va plus dans sa vie, que ce soit au niveau des amitiés, des amours ou de la famille…

En ce qui concerne la narration d’Angela, elle est plutôt réaliste, mais je n’ai pas réussi à m’attacher à ce personnage… Elle enchaine les casseroles et les déconvenues, mais le tout sans être véritablement convaincante (selon moi).

Le quotidien de la jeune fille a beau être un peu drôle et loufoque, il ne sort pas franchement du lot, et il en faut beaucoup de nos jours pour faire un roman/journal intime d’ado convaincant. Ils sont très nombreux à s’y être essayés avec plus ou moins de succès : Le journal d’Aurélie Laflamme d’India Desjardin, Le Journal d’une princesse de Meg Cabot, la série 15 ans et 16 ans de Sue Limb.

Alors, certes, nous sommes dans un roman beaucoup moins fleur bleue et beaucoup plus réaliste que du Aurélie Laflamme ou du Meg Cabot, mais je trouve que le roman de Rachel Corenblit n’est pas à la auteur d’un des romans de Sue Limb, par exemple. Que du bonheur ! est le genre d’ouvrage que l’on lit sans déplaisir, mais qui ne laisse aucun souvenir une fois terminé.

De plus, les quelques illustrations, dessins et photos ajoutés pour donner plus de réalisme à l’ouvrage n’apportent que peu de choses et on même un côté « artificiel ». Ce qui donne l’effet contraire à celui voulu initialement…

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Au final, cette lecture m’a laissé assez indifférente, ce qui est très rare quand je lis un ouvrage paru chez Le Rouergue. C’est un éditeur pour lequel j’ai un affect tout particulier et dont je trouve les choix éditoriaux originaux et très souvent percutants et prégnants. Cette lecture n’a pas fait mouche, mais ça arrive, on ne peut pas tout aimer dans la vie comme dans nos lectures !

Chronique : L’âge des miracles

L'âge des miraclesUn roman d’anticipation qui imagine comment l’humanité s’adapterait  à un ralentissement constant de la rotation de la Terre… Un roman extrêmement réaliste dans son traitement, une petite merveille à découvrir d’urgence !

Premier et unique roman de Karen Thompson Walker à paraître en France, L’âge des miracles est paru premièrement aux Presses de la Cité avant de sortir en poche chez 10/18. Ce roman à la thématique unique nous dépeint notre société d’aujourd’hui qui doit faire face à un cataclysme lattent. La Terre ralenti sa révolution, les jours et les nuits s’allongent peu à peu. Comment l’homme va-t-il faire face à un tel chamboulement de son mode de vie ? Comment la nature va-t-elle s’adapter à un tel bouleversement ?

Vous découvrirez ici une superbe anticipation sociale explorant des possibilités extrêmement réalistes…

L'âge des miracles presses citéQuand les jours commencèrent à s’allonger

Tout le récit de L’âge des miracles nous est conté par la jeune Julia. Encore jeune fille, presque adolescente, c’est sa vision à elle qui prime, avec des problématiques oscillant entre le cataclysme et son impact, mais aussi très ancré dans le quotidien.

L’humanité s’adapte très bien au début, en rallongeant les heures d’une journée qui passe de 24h à un peu plus, puis encore un peu plus, et encore… Puis au fil du ralentissement de la rotation de notre planète, les choses se compliquent doucement à tous points de vue : économiques, sociaux, écologiques…

L’homme peut-il s’adapter et si oui comment ? Julia, à travers ses yeux encore parfois enfantins va nous conter l’histoire plausible d’une humanité qui se délite peu à peu tout en souhaitant garder au maximum sa normalité et son quotidien…

L'âge des miracles VOUn bel inclassable entre littérature et anticipation

Le point majeur à retenir de L’âge des miracles, c’est son réalisme éblouissant. La façon dont l’auteur a pensé à tous les pans du problème est impressionnant, d’autant qu’elle augmente la difficulté en écrivant son récit du point de vue d’une presque enfant. A la lecture de ce roman, on se dit que c’est exactement comme cela que l’homme réagirait si un tel cataclysme survenait.

Outre le traitement intelligent de la situation, l’auteur fait montre d’une sensibilité extraordinaire à travers le personnage de Julia. Cette jeune fille qui grandit sur fond de fin du monde et à la fois belle, fragile, sensible, attachante…

Elle se retrouve confrontée à tous les changements qui l’amènent doucement à l’adolescence, mais aussi à des problèmes d’ordre familiaux qui nous replongent dans le quotidien et nous font parfois oublier cette épée de Damoclès suspendue sur la Terre et ses habitants.

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L’âge des miracles est un roman aussi délicat que terriblement prenant. Hypnotique, lourd, latent, le temps s’étire à l’infini et cette atmosphère de fin du monde est aussi belle qu’effrayante. Ce récit nous propose une belle façon de voir notre civilisation, et peut-être d’apprécier tout simplement encore plus ce que nous avons… A destiner aux férus de romans d’anticipation réalistes, mais également à toute personne qui aime les bons livres, tout simplement.

Pour ceux qui aiment ce genre d’ambiance, n’hésitez pas à découvrir également des romans tels que Le testament de Jessie Lamb (l’humanité ne peut plus procréer), Days de James Lovegrove (l’humanité est devenue l’esclave de sa propre surconsommation), et une foule d’autres encore…

Chronique : Bienvenue

BienvenueL’un des meilleurs romans coréens que j’ai lu. Poignant et terrible, triste et empli de persévérance…

Bienvenue est un roman de Kim Yi-seol, une jeune auteure coréenne dont c’est le premier ouvrage à paraître en France. Son métier d’écrivain a pu débuter grâce à l’obtention en 2006 du prix Sinchunmunye pour sa nouvelle nommée Treize ans. En Corée, une voie toute tracée vous est destinée dès lors que vous avez publié une nouvelle et qu’elle est primée, c’est ce qui est ainsi advenu pour Kim Yi-seol.

Même si nous la découvrons pour la première fois en France, Bienvenue est le premier roman de cette auteur, il est paru en 2013 aux éditions Philippe Picquier.

Une vie ingrate, un quotidien de labeur, mais quelques perspectives d’avenir, un jour… peut-être

Bienvenue… dans le quotidien de Yunyeong, une jeune femme à la persévérance sans limites, à la motivation sans failles. Elle est prête à tout pour décrocher une vie meilleure, et si cela passe par le pire, elle est prête.

Elle trime plus de douze heures par jour dans un restaurant nommé Le Jardin des Jujubiers pour un salaire de misère… Mais son but n’est pas de travailler pour toujours dans ce restaurant qui ne sert pas que des plats. Il est nécessaire et impératif que ses serveuses donnent de leur personne… et puis, ça leur permet d’arrondir les fins de mois.

Non, le but de Yunyeong, c’est de permettre à son compagnon de poursuivre ses études en toute quiétude. Si elle s’échine autant à ramener de l’argent à la maison, c’est pour leur avenir. Il lui faut juste réussir son concours, et s’occuper depuis peu de leur fille, pour qui elle est prête à tous les sacrifices. Après, leur avenir sera forcément meilleur…

Une vie emplie de beaucoup de tristesse et de petites joies

Le quotidien de Yunyeong est aussi saisissant que terrible. Elle travaille tant, qu’elle ne voit jamais sa fille et son compagnon pour qui elle s’échine. Mais ça, c’est presque la partie positive de l’histoire… En effet, sa famille semble continuellement la tirer vers le fond, en particulier sa sœur qui lui « emprunte » sans cesse de l’argent… et si il n’y avait que cela…

L’éditeur nous présente ce roman comme la réalité quotidienne de toute une strate sociale de la Corée. La brutalité que subissent continuellement là-bas certaines femmes est très difficile à lire, et pourtant… on se laisse happer par ce roman extrêmement réaliste et terrible.

Le restaurant/maison de passe, les horaires de travail qui vous achèvent de fatigue, les hommes qui se fichent qu’une femme vient d’avorter et veulent juste avoir leur prestation avec la serveuse qu’ils ont choisie. Les brimades, la concurrence entre les serveuses/prostituées, le chemin pour rentrer de ce terrible travail… Voici un petit aperçu du quotidien de la jeune Yunyeong. En lisant ses lignes, on l’admire, on la plaint, on craint pour son avenir…

« Dans le pavillon, les choses s’étaient mal passées avec mon client. J’avais voulu manger un peu de soupe de poulet en lui expliquant que je n’avais pas encore déjeuné. J’avais trop faim pour écarter les cuisses, lui avais-je dit. Ce qui l’avait mit en colère. Il avait exigé d’être remboursé. Il avait au moins cinq ou six ans de moins que moi ».

Malgré la dureté continuelle du récit et ses nombreuses scènes crues et dénuées de morale, il est impossible de détourner le regard. On veut savoir ce qui arrive à Yunyeong, quel sera son avenir qu’elle forge à la sueur de son front, mais également de ses cuisses…

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Ce roman n’est pas à réserver aux âmes sensibles, mais je le trouve nécessaire pour comprendre un peu mieux ce pays si mystérieux qu’est la Corée pour nous, occidentaux. Il est captivant par de nombreux aspects. Yunyeong est pour moi une héroïne qui s’ignore, mais également un magnifique portrait de femme qui lutte, envers et contre tout.

Ce livre est une pépite, il se dévore et on y repense parfois en espérant que ce roman n’est que cela, et non pas un portrait d’une partie de la société coréenne, et pourtant… A lire absolument.

Espérons ainsi que d’autres romans de Kim Yi-seol verrons le jour en France !

Chronique : L’année solitaire

L'année solitaireLe premier roman d’une auteur de seulement 18 ans avec un ton étonnant pour son âge… mais qui n’échappe pas à de nombreux écueils…

Il est paru aux éditions Nathan en mai 2015, voici L’année Solitaire d’Alice Oseman, une jeune anglaise qui avait 18 ans quand elle a écrit ce roman.

Depuis, elle a sorti une nouvelle faisant office de préquelle à L’année Solitaire : This winter. Par ailleurs, Alice Oseman a un tout nouveau roman à paraître en Angleterre en février 2016 : Radio Silence.

Une adolescente blasée de tout que rien n’anime…

Tori n’aime rien ni personne à part peut-être sa famille, et encore. Tout l’ennuie et rien ne la motive. Évidemment l’adolescence est la période de nombreuses questions, mais Tori elle n’en a pas vraiment, au contraire, elle les élude.

Elle a peu d’amis et même ceux qu’elle arrive à garder commencent à en avoir assez d’elle et vice-versa.

Mais la donne va changer en la personne de Michael Holden, un nouvel élève qui se prend d’affection pour Tori et qui veut tout faire pour lui donner le goût des choses, au grand dam de cette dernière… Mais une personne aussi sombre et taciturne que Tori peut-elle réellement changer ? Va-t-elle voir un soupçon de positivité dans ce qui l’entoure ou le combat de Michael est-il perd d’avance ?

Ajoutez à ce nouvel élève un jeu de piste étrange qui se forme au fil des semaines au sein de l’établissement et vous aurez un tableau assez fidèle de ce début de roman.

Portrait d’une adolescence continuellement sceptique (mais est-ce vraiment réaliste ?)

Le portrait que dresse Alice Oseman de son héroïne est le stéréotype même de l’ado taciturne et continuellement contre tout. Heureusement, tous les ados ne sont pas comme cela ! On dirait que Tori ne vit que pour détester tout ce qui l’entoure : de sa meilleure amie, aux musiques qui passent à la radio et plus largement au monde entier. Son quotidien n’est certes pas facile d’un point de vue familial, mais il ne peut tout justifier… Et le comportement de Tori est parfois difficile à suivre tant elle fait peu appel à la logique et ne pense qu’à elle.

L’année Solitaire n’est pas franchement de ces récits qui redonnent le moral ou qui dépriment pour la simple et bonne raison que le message transmis n’est pas clair. On suit les journées de Tori qui se suivent et se ressemble, la seule chose évoluant étant le mystère autour de Solitaire, et encore ce secret ne se suffit pas à lui-même pour maintenir un semblant d’intrigue.

Qu’est-ce donc que Solitaire ? Direz-vous. Il s’agit d’un blog géré par une personne anonyme qui sème des indices et soulève de plus en plus de questionnements aussi bien chez Tori que tous ses camarades. Le lycée étant le lieu où sévit principalement le blog en se jouant de certaines personnes y étudiant ou y travaillant… Quel est le but de Solitaire ? Il n’est pas clair, ni avant… ni après malheureusement.

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C’est dommage, mais cette lecture n’éveille ni grand élan, ni bons sentiments comme certains récits pour adolescents savent si bien le faire. Ici, il reste une déception après la lecture. L’impression de ne pas avoir eu tous les tenants et aboutissants de ce roman, de ne pas être en corrélation une seule fois avec son héroïne, et c’est fort dommage.

Cela ne retire rien au fait qu’Alice Oseman ai du mérite d’avoir écrit et fait publié un roman aussi jeune, et il faut bien commencer un jour.

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Chronique : Le liseur du 6h27

Le liseur du 6h27Un court roman qui met à l’honneur de la littérature sous toutes ses formes, sans prétentions et sans complexes…

Paru en mai 2014 aux éditions au Diable Vauvert, Le liseur du 6h27 est le premier roman de Jean-Paul Didierlaurent. Sa sortie a été très médiatisée et a créée un véritable petit succès de librairie. Il s’agit du premier roman de l’auteur, mais se dernier a déjà vu une de ses nouvelles publiée.

Au service de l’horrible de Zerstor 500

Guylain Vignolles est un homme tout ce qu’il y a de plus commun, hormis peut-être son nom qui peut devenir une malheureuse anagramme. Il se lève très tôt le matin pour prendre son RER de 6h27 afin de se rendre à son travail où il broie des livres à longueur de journée…

Pour lui qui est amoureux des mots, il n’y a pas pire métier que de transformer des livres en pâte à papier. Et c’est là que Guylain Vignolles devient à nos yeux une personne beaucoup moins plate qu’il n’y paraît : il récupère les feuilles rescapées dans les entrailles de la Zerstor 500 (qu’il nettoie quotidiennement) et en fait la lecture à voix haute dans la rame du RER de 6h27. Les extraits n’ont aucun rapport entre eux, et c’est justement ça qui les rend intéressants, vifs, savoureux.

C’est devenu le rendez-vous quotidien de nombreux usagers du RER, leur petite touche de soleil dans le morne de leur journée grise. Ainsi commence l’histoire aussi incroyable qu’ordinaire de Guylain Vignolles.

Des morceaux de vie qui tournent autour de l’amour des lettres

De la petite vieille amoureuse des lectures de Guylain Vignolles dans le RER, en passant par Yvon, le collègue de Guylain fou de bon vers à déclamer sans oublier Giuseppe qui recherche ses jambes broyées  dans la Zerstor 500 en rachetant les livres issus de la pâte à papier qui contient ses deux membres… tout est écrit par et pour l’amour des livres.

L’histoire de Guylain est aussi belle que simple, on apprivoise facilement son univers quotidien et la façon qu’il a de fuir son travail de bourreau des livres.

Et si vous êtes romantique, vous aimerez certainement la tendre histoire d’amour qui se profile au milieu du roman en l’objet d’une toute petite clé USB.

En ce qui concerne l’écriture de Jean-Paul Didierlaurent, elle est facile mais pas simpliste. On est rapidement emporté par l’histoire de chacun des personnages aussi charismatiques que normaux de cette histoire. S’immerger dans cette petite bulle littéraire est aisé. Si vous êtes un amoureux des lettres sous toutes leurs formes, vous serez servis dans ce court roman où tout est une référence à nos classiques littéraires.

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A lire pour se faire plaisir, pour découvrir une nouvelle plume et voir une nouvelle façon de « vivre livre ». L’histoire de Guylain Vignolles donne envie d’aller dans le RER déclamer quelques pages au hasard le temps de quelques stations… Une jolie découverte qui se dévore !

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Chronique : Hell

Hell« En digne héritière de générations de femmes du monde, je passe plus de temps à me laquer les ongles, à me dorer la pilule au Comptoir du soleil, à rester le cul sur un fauteuil et la tête dans les mains d’Alexandre Zouari, à lécher les vitrines de la rue Faubourg-Saint-Honoré, que vous à travailler pour subvenir à vos petits besoins. »

Lolita Pille est une auteur française à la plume totalement désabusée. Elle n’a écrit que trois romans en 10 ans, le dernier – Crépuscule ville – datant de 2010, mais chacune de ses sorties est un petit événement dans la sphère littéraire. Avec Hell, son premier roman, Lolita Pille a mis un grand pavé dans la mare en décrivant la jeunesse dorée parisienne dans sa plus complète perdition… zoom sur une œuvre dérangeante qui fascine énormément.

Violence désabusée d’une fille des beaux quartiers

Hell (ou plutôt Ella) possède tout. Tout ce qui lui plait. Où elle veut et quand elle veut. Elle a d’ailleurs tellement, qu’elle n’a pas la notion d’argent, sauf pour nous dire à nous lecteurs que nous n’arriverons jamais au niveau du dessous de ses chaussures griffées.

A peine 17 printemps, elle connaît déjà tout de la vie et de sa laideur, peut-être même plus que nous, gens du commun. Est-ce pour cela qu’elle a une attitude si désinvolte en ce qui concerne sa santé et son bien-être ? Pour elle, rien ne vaut vraiment la peine que l’on s’y attarde : antipathique, hautaine, détestable… Hell réunit les pires adjectifs possibles.

Alors quand Hell rencontre Andrea, un adolescent aussi malade de la vie qu’elle, c’est le parfait coup de foudre. Mais vivre dans le bonheur n’est pas pour eux : ils ne savent pas faire simple, et vont donc se pourrir mutuellement la vie, et l’âme car ils ne connaissent que ça.

Un récit autodestructeur qui attriste et obsède

Dès les premières lignes, on ne ressent que de la haine pour Hell. Et pourtant, au fil du récit on se rend compte qu’il se peut qu’elle fasse au final preuve de plus d’humanité que bien du monde parmi ceux qui l’entourent. Issue de la jeunesse dorée, elle est libre d’aller où bon lui semble mais ce sent emprisonnée dans son rôle de jeune fille riche. Hell aura tout fait : consommation de drogue, coucheries sans lendemain… mais rien ne la rend heureuse.

Ce récit mérite le détour pour plusieurs raisons : avant tout pour sa narration violente et mémorable. On se sent exclu de cet univers du Tout-Paris mais avons toutefois envie d’en comprendre les arcanes. Ce paradoxe où le lecteur se sent exclu et où pourtant il est initié est intéressant. Une fois la découverte passée, c’est surtout de la tristesse et de la lassitude que nous ressentons pour Hell… allons-nous pouvoir la suivre dans ses nombreux déboires ? Sa romance avec Andrea sera-t-elle une rédemption sur le long terme ?

La seconde raison pour laquelle Hell mérite d’être lu est pour son univers. Lolita Pill a écrit un roman percutant et très autobiographique. Ces lieux dont elle parle (le Queen, le Cabaret et autres boîtes branchées), elle les a connus, cette désillusion aussi. C’est certainement pour cela qu’il y a autant de réalisme et caractère dans ce court récit. …..

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Alors est-ce un coup de cœur ? Oui. Mais pas parce que l’histoire est prenante ou exerce une fascination morbide. C’est avant tout car Hell est emprunte des paradoxes qui la rendent intéressante. Les chemins tortueux sont ses favoris, et on la suit avec crainte et curiosité. Hell est une fille bien plus cultivée que ce qu’elle laisse croire… à vous d’écarter les nombreux préjugés dont elle s’habille. Pour tous ceux qui aiment les récits coup de poing qui misent sur l’hyperréalisme.

Chronique : 15 ans, Welcome to England !

15 ans welcome to EnglandOu les joies d’avoir un correspondant étranger dont on ne comprend pas la langue…

Premier volume des aventures de la folle mais adorable anglaise Jess, nous voici plongés dans l’horrible situation d’un échange culturel entre notre héroïne et un français ! Écrit par Sue Limb, ce roman a beau être le premier paru, il n’est pas indispensable de les lire dans un ordre précis, chaque ouvrage traitant d’une histoire de façon indépendante.

Outre les aventures trépidantes de Jess, Sue Limb a également écrit la série Zoé et Chloé chez Folio Junior pour un lectorat de lectrices un peu plus jeunes. Elle est également l’auteur de la série de premières lectures Ruby Rogers chez Folio Cadet.

Ou comment un échange culturel peut se transformer en… cauchemar !

Le « drame » débute quand il est question de faire un échange culturel avec des français. Jess panique (et fantasme également) à l’idée d’avoir un beau jeune homme aux lèvres boudeuses. Mais avant sa venue, il faut tout d’abord correspondre avec lui, et c’est là que les choses commencent déjà à se gâter… Jess ne se trouvant pas assez jolie, elle demande à son meilleur ami Fred de modifier quelque peu son apparence sur Photoshop. Est-ce vraiment une bonne idée ? En tout cas au début, notre héroïne farfelue le pense…

Mais écrire une lettre n’est qu’un doux préambule à l’horreur que va devenir sa semaine d’échange avec con correspondant Édouard. Incompréhensions mutuelles, contresens linguistiques dangereux… rien ne va se passer comme prévu. Mais heureusement Jess a une qualité incroyable : l’autodérision. Ça n’a l’air de rien comme ça, mais aux vues des situations dans lesquelles elle s’embarque, c’est presque un super pouvoir !

Un livre drôle qui nous donne une image étrange de nous français

Stéréotypée volontairement et avec malice, l’image que donne Sue Limb des français est fort amusante. A priori, tous les garçons français seraient sexy, notre accent séduit les anglais et les fait tomber comme des mouches et nous mangeons bien évidemment des cuisses de grenouilles. En tout cas, c’est à peu près le portrait-type que Jess a d’un français, de même que toutes ses amies.

Et bien elles vont être fort déçues ces anglaises prêtes à se languir pour un français, à commencer par Jess. En effet, la rencontre avec Edouard sera une épreuve des plus dérangeantes et malaisée de sa vie : le jeune homme est tout sauf ce qu’elle espérait. Mutique, plus petit qu’un enfant en primaire et peureux comme pas possible, la socialisation s’annonce difficile des deux côtés de la Manche !

D’incompréhensions en maladresses linguistiques

Évidemment, le nerf de la guerre dans ce roman, c’est la confrontation de deux cultures et surtout deux langues très différentes le tout avec des ados soit très timides soit déjà amoureux de leur correspondant (ou de celui des autres…).

Sue Limb maîtrise à la perfection la création d’ambiances où le malaise règne en maître : une odeur bizarre qui flotte dans une voiture ou encore un camping complètement foutu pour cause de mélange linguistique poussif… tout est possible. On adorera encore une fois les répliques parfaitement créés pour l’occasion, les plus géniales étant encore celles échangée avec la mère de Jess ou encore avec Fred, son meilleur ami qui a toujours la réplique qui tue.

« – Ne me parle pas sur ce ton ! murmura sa mère en quittant le lycée. Il est très sensible au ton de la voix. Surtout la colère. Le pauvre petit est désemparé.

* On devrait lui attribuer un nom de code, dit Jess. Qu’est-ce que tu pense de « la reine » ?

* Excellente idée. Maintenant, essaye d’être gentille avec la reine. Elle a fait un voyage difficile. Offre-lui au moins un sourire. »

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En somme, encore une fois Sue Limb nous régale d’un récit simple mais d’une telle justesse que c’en est drôle. Elle est la reine pour créer des situations plus cocasses les unes que les autres à son héroïne et son entourage… pour le meilleur et pour le pire ! Et vive la Reine ! Si vous voulez vous tordre de rire et vous défouler sur un livre, 15 ans, Welcome to England sera parfait. Dès 14 ans environ, mais sans limite d’âge !

Si vous avez aimé, vous pouvez essayer :

15 ans charmante mais cingléejournal d'aurore 01