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Chronique : Dans les angles morts

Un roman d’ambiance dense et prenant aux allures de polar…

Premier roman d’Elizabeth Brundage à paraître en France, Dans les angles morts est un livre à part. Paru en janvier 2018 chez Quai Voltaire, l’ouvrage est à la fois un roman noir, un polar à haute teneur psychologique et un magnifique portrait de l’Amérique rurale des années 70/80. Bienvenue donc dans la petite ville de Chosen…

Un terrible meurtre à la hache 

Tout débute avec un mari paniqué qui vient de découvrir le cadavre de sa femme dans son lit, une hache en pleine tête. Qui a bien pu commettre un crime aussi terrible et violent ? Pour quels motifs ? Et dire que leur fille Franny est restée pendant des heures dans la chambre d’à côté, si proche du cadavre de sa mère…

C’est ainsi que l’on part à la découverte du couple que formaient Catherine et George, des relations qu’ils avaient avec leurs proches, leurs collègues… et comment un tel drame a pu se nouer. Hautement psychologique, regorgeant de portraits humains fascinants, Dans les angles morts est un roman parfait et captivant…

Bienvenue dans la petite ville de Chosen…

Chosen : cette ville, Catherine n’a jamais désiré y vivre, et encore moins habiter dans la maison que George leur a trouvée pour eux et leur fille Franny. Surtout quand on connaît le terrible passif de la famille qui y a vécu avant eux. Comme si le malheur était attiré par cette vieille ferme solide mais singulière…

On commence donc à découvrir Chosen, ses habitants, le couple George/Catherine, les mécanismes qui constituaient leur quotidien, leurs habitudes… et leurs travers.

Dans cet ouvrage, que l’on peut assimiler à du roman noir (pas franchement du polar ni du policier), la psychologie des personnages est absolument primordiale. Ils sont d’une profondeur insondable, complexes… vivants. On découvre leurs aspirations, leurs regrets, leurs rancœurs… et peu à peu, un portrait se brosse.

On navigue alors entre le monde professoral et artistique de George et celui beaucoup plus terre à terre de Catherine, qui gère le plan domestique. On alterne également entre l’année 1978, où les Hale habitaient encore leur ferme laitière avant de faire faillite et 1979, quand les Clare se sont installés.

L’un des points les plus positifs de ce roman dense mais fluide, ce sont ses personnages. Ils sont extrêmement précis et clairs dans notre esprit quand on lit leurs descriptions, leurs perceptions… Chacun est minutieusement décrit, chacune de leur pensée décryptée, expliquée, ce qui les rend terriblement réalistes. Parmi les plus touchants, on peut citer la fragile Willis, le charismatique Eddy, et la petite Franny… Ils sont uniques et terriblement touchants.

Et sans parler d’attachement, la complexité de ce qu’il se passe dans la tête de George et de Catherine est également magnifiquement bien pensé. On monte crescendo en puissance, avec de petits détails, puis peu à peu d’autres choses sont amenées et on en vient presque à trouver tout ce que nous écrit Elizabeth Brundage « normal » et logique… malgré tous ses aspects terrifiants.

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Pour ceux qui aiment les romans d’ambiance où l’on peut se faire hypnotiser par certains personnages (je pense aux superbes frères Clare en écrivant ces lignes…), Dans les angles morts est pour vous. Mélange de genres, flirtant parfois avec l’étrange (quelques lignes à peine sur 530 pages !).

C’est une très belle escapade dans l’Amérique profonde et rurale des années 70 qui ne vous laissera pas indifférent.

Chronique : Killarney Blues

Un roman social qui nous fait découvrir l’Irlande dans ce qu’elle a de plus simple et de plus beau… et dur. Une histoire âpre et réaliste qui frôle avec le roman noir…

Premier roman de Colin O’Sullivan à paraître en France, Killarney Blues est paru aux éditions Rivages lors de la rentrée littéraire 2017. L’auteur a d’ores et déjà écrit un autre roman, encore non traduit en France. Il vit au Japon où il enseigne l’anglais.

Un portrait de l’Irlande profonde

Bienvenue à Killarney, une très belle ville d’Irlande qui se situe au sud-ouest du pays, dans les terres, au bord d’un magnifique lac. La ville bénéficie du tourisme, ce qui fatigue autant les habitants que cela les fait vivre…

C’est ici que vit Bernard, un jeune homme un peu simple d’esprit, mais toujours prêt à aider son prochain. Il vit de son travail, avec son cheval Ninny qui conduit sa calèche pour les touristes. Bernard est « secrètement » amoureux d’une jeune femme de Killarney depuis des années : Marian. Mais la jeune femme ne regarde jamais Marian comme lui la regarde, et le jeune homme est souvent l’objet de moqueries… Tout cela sans oublier Jack, celui qui boit toujours trop, dont la violence sous-jacente vibre.

Bienvenue donc à Killarney, petit ville de 15 000 habitants où tout le monde est avide de commérages et où les non-dits et la misère frappent soudainement…

Un roman intéressant aux personnages très réalistes dans leur humanité

Lire Killarney Blues, c’est un peu comme avoir un petit bout d’Irlande sous le bras. Dans l’esprit, Colin O’Sullivan nous offre de magnifiques paysages, des personnages forts en caractère et en réalisme. Le rythme est lent, très lent, mais cela ne rend pas la lecture inintéressante, bien au contraire. On s’intéresse à chaque détail, chaque trait de caractère, tout prend peu à peu sens et monte en puissance… et dangerosité.

En effet, on est dans le roman noir, mais alors, dans le genre très doux. La quatrième de couverture laisse présager un roman policier et une enquête, ce qui n’est pas franchement le cas. Si on devait décrire rapidement Killarney Blues, on pourrait le qualifier de roman social noir, mais pas à proprement parler de roman noir.

On y lit la détresse, le dénuement financier, parfois intellectuel… Bernard est le personnage central de cette histoire que l’on n’imagine tourner mal… mais ce n’est pas vraiment le cas. La vie réserve des surprises, et elles ne sont pas nécessairement mauvaises.

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Alors, si vous recherchez un roman bien écrit, corsé, de qualité, et sauvage (avec de belles descriptions de la nature), Killarney Blues vous ravira. C’est un bon roman, mais il ne faut pas l’assimiler à un roman à suspense. Une fois ce fait intégré, vous passerez un excellent moment de lecture, à la fois nostalgique, triste, mais laissant un sentiment positif malgré tout.

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TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : Les mots bleus de Félicie

Les mots bleus de FélicieUn récit à la narration poétique et surprenante… étourdiffant !

Premier roman de la jeune auteur américaine Natalie Lloyd, Les mots bleus de Félicie est paru aux éditions du Seuil en juin dernier. L’ouvrage est paru  sous le titre A Snicker of Magic aux Etats-Unis. Très poétique, le récit mêle magie et amour des glaces sucrées… le tout avec pour fond une famille qui baroude de villes en villes.

Quand les mots du quotidien prennent vie

Félicie est une jeune fille à la famille spéciale : sa mère ne se sentant nulle part chez elle, cette dernière brinquebale la jeune fille et sa sœur de villes en villes sans jamais réellement se poser. Cette vie qui semble être une sorte de road-trip sans fin n’est cependant pas du goût de Félicie qui ne rêve que d’une chose : avoir un vrai chez-soi.

Alors quand la petite famille débarque à Midnight Gulch – la ville où est née la mère de Félicie – la jeune fille sent que cet endroit pourrait bien être celui ou tout le monde s’épanouirait… Mais sa mère a encore la bougeotte et il va être difficile de la convaincre de se poser définitivement, alors comment faire ?

Ah, et dernière chose et pas des moindres : Félicie voit les mots qui nous entourent et les collectionne. Elle garde dans son carnet les plus beaux mots qui l’entoure : devenant, été, curieuse, bulle…. Les mots sont vivants, et ils ont du pouvoir, en particulier grâce à Félicie. Et de la magie, il va y en avoir à Midnight Gulch !

« On dit que certains villageois pouvaient attraper des étoiles dans des bocaux à confiture : que d’autres chantaient jusqu’à déclencher un orage ou faisaient pousser des tournesols en dansant. Certains savaient incorporer la magie dans une tarte, faire qu’on tombe amoureux ou qu’on se souvienne d’une chose agréable, ou bien qu’on oublie une chose désagréable. Certains étaient des magiciens de la musique… »

Voici ce à quoi vous devez vous attendre : une prose poétique ou la magie flotte dans l’air !

Les mots bleus de Félicie vo A snicker of magicLa beauté des mots et l’amour des glaces à l’honneur

Inclassable : c’est le premier mot qui vient à l’esprit à la lecture de cet ouvrage. En effet, Les mots bleus de Félicie traite de beaucoup de choses, le tout dans une atmosphère emplie d’une douce magie.

Nous suivons le cheminement de Félicie à travers l’histoire de Midnight Gulch. Tous les secrets de l’endroit ainsi que ses mythes vont se révéler à elle, en particulier la légende des frères Loqueteux. Les deux frères et leur combat auraient causé la disparition de toute la magie au sein de la petite ville. Mais en quoi tout cela pourrait-il bien être lié au désir de Félicie d’avoir un vrai foyer ? La réponse est là, tout près, et elle est pleine de bon sens et de tendresse.

Le pouvoir des mots est la clé de ce récit : Félicie voit les perçoit comme personne : bondissants, dégoulinants, colorés, explosifs… chacun a des mots qui lui collent à la peau de façon différente. En quand on parle de pouvoir, c’est dans tous les sens du terme : magiques, mais aussi suggestifs.

Enfin, on appréciera grandement la partie merveilleuse et culinaire du récit avec les glaces magiques aux parfums poétiques. Fondant caramel à tomber de Virgile, Avocat a beurre de Bobby ou encore Assortiment au potiron de tante Ruth… Tous ces parfums ont étés créés par les habitants de Midnight Gulch et ont un reliquat de magie : certaines glaces permettent même de se souvenirs de certains épisodes de son passé.

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Pour conclure, ce titre est original et parfois même déstabilisant. Les mots de Félicie est beau et tendre à la fois. Etrange et merveilleux aussi… à lire comme une curieuse gourmandise littéraire et une expérience à tenter. Dès l’âge de 13 ans environ, pas avant car certains passages sont tout simplement trop abstraits.

Chronique : Vampire Kisses – Tome 1

Vampire Kisses 001Une histoire de vampires qui laisse un peu sur sa faim…

 Vampire Kisses est une série de romans publiée aux éditions Castelmore, trois tomes sont pour le moment sortis en France, mais la série en compte déjà huit outre-Atlantique. Son auteur, Ellen Schreiber, était actrice avant de devenir écrivain, elle est même passée par la Royal Academy of Dramatics Art de Londres.

Le succès de Vampire Kisses a été tel qu’elle s’est vue proposée une adaptation de ses romans en manga, ils sont disponibles en France aux éditions Soleil. Outre cette série vampirique, elle a également écrit une saga prénommé Once in a full moon, qui traite de loups-garous, mais qui n’a pas encore vu le jour en France.

Dullsville, capitale de la tranquillité…et de l’ennui.

Il ne se passe jamais rien à Dullsville. Absolument rien. Alors quand une nouvelle famille s’installe dans le manoir abandonné depuis des années, autant dire que ça fait beaucoup parler les curieux habitants. Surtout que cette famille a des allures quelque peu étranges… ils ne sortent quasiment jamais, et le peu que l’on sait d’eux fait froid dans le dos.

Et c’est à Dussville également que vit Raven, une adolescente qui s’habille dans le plus pur style gothique, ce qui n’est pas pour plaire franchement à ses parents. Et au lycée, son style fait d’elle une cible toute désignée aux moqueries, mais son esprit cynique et sa répartie cinglante ont tôt fait de faire reculer ses détracteurs, sauf les plus tenaces…

Alors quand Raven apprend qu’une nouvelle famille s’installe et que l’un des fils, Alexander Sterling a l’air d’avoir le même style qu’elle, elle décide d’aller faire un tour au manoir histoire de se renseigner et d’apaiser sa soif de curiosité. Et la rencontre risque d’être surprenante…

Une histoire qui fonctionne bien, mais dont le schéma est très classique.

Le reproche que l’on pourrait faire à ce premier tome est de rester dans les sentiers battus. Le personnage de Raven est très stéréotypé, et on tombe vraiment sur une adolescente gothique « de base » sans grande personnalité. De plus, sa fascination pour les vampires (pas toujours très saine) est vraiment excessive, la rendant vraiment très fleur bleue, pour ne pas dire naïve. Le personnage d’Alexander est lui beaucoup plus difficile à cerner, la preuve c’est que l’on ne sait pratiquement rien de lui du début à la fin, et ce côté mystérieux n’est pas gênant, au contraire il apporte une certaine fascination de l’inconnu qui doit parfaitement fonctionner sur un lectorat adolescent.

C’est pourquoi malgré un schéma assez basique, on se laisse facilement embringué par l’histoire qui pique tout de même notre curiosité. On se retrouve avec les tourments cruciaux d’une adolescente : choix d’une robe pour le bal, ou encore le classique problème du premier rendez-vous. Cette ambiance feutrée et mystérieuse n’est pas pour déplaire, on retrouve la noblesse qui faisait les romans de vampire d’avant. Car il n’y a que peu d’action au final, mais beaucoup d’interrogations et de non-dits. En particulier sur la fin, qui est très bien faite.

C’est un peu à contre-courant qu’est Ellen Schreiber avec ses vampires, bien loin de l’action effrénée des romans de vampires qui font la tendance actuelle. Et c’est un petit retour aux sources assez plaisant.

Vampire Kisses est donc un roman sympathique mais pas génialissime. Il conviendra parfaitement à des adolescentes qui veulent s’essayer à la bit-lit. On a malgré tout envie de savoir ce qu’il va se passer dans les tomes suivants, étant donné la fin de ce premier tome, affaire à suivre.

6.5/10

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TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : Les Tommyknockers

Les TommyknockersPour décrire de façon brève ce livre de Stephen King il y a un mot : déception. Ce livre n’est pas un échec cuisant, mais pas loin. Voici ma petite liste de tout ce qu’il y avait de décevant et de « gâché » dans ce livre…

Déception au niveau de l’écriture : Il faut avouer qu’habituellement, Stephen King est parmi les meilleurs pour nous « foutre les jetons » ; sauf que là il n’y avait rien ou presque (le seul passage terrifiant se trouve sur la fin, quand Gard entre dans le fameux Hangar de Boby), hormis cela c’est le néant le plus total… l’ennui est remplacé par la peur, dommage. De plus, les personnages, qui sont creusés (ce qui en soit est positif et intéressant) le deviennent trop parfois, je pense au personnage alcoolique de Jim Gardener, ou Gard où l’on a le droit à plus d’une centaine de pages sur sa dépravation… bof bof.

Déception au niveau du rythme : Même si l’évolution des Tommyknockers n’est pas très rapide, le rythme du livre est d’une lenteur exaspérante, à tel point que l’on est parfois tenté de sauter des pages (oh ! Sacrilège que je n’ai heureusement pas commis).

Déception au niveau de l’histoire : Eh oui… pauvre de moi, je me suis dit « Oh ! Du Stephen King dont le sujet traite d’une petite invasion extraterrestre dans une bourgade perdue du Maine. Ça peut être très intéressant, on échappera aux stéréotypes ! » Eh bien oui… et non. Il faut avouer que la façon dont le sujet est traité change des grandes guerres contres les martiens qui veulent conquérir notre planète de façon violente. Sauf que, même si la façon de procéder des Tommyknockers pour conquérir Haven, puis le monde est différente de d’habitude : insidieuse, sournoise, psychologique, Stephen King n’a pas su la mettre en valeur. Résultat on s’ennuie, et la fin est décevante…

Au final ce livre a très peu de rebondissements, même si l’on ne peu pas décrocher à certains passages, il reste truffé de longueurs. En somme, je vous déconseille de lire les Tommyknockers, surtout si vous n’avez jamais lu de Stephen King, ce livre pourrait vous rebuter. Je vous conseille de commencer par Christine par exemple, qui lui est génial !