Chronique : Sérotonine

Le nouveau Houellebecq est arrivé ! Pour les fans, c’est l’occasion de s’extasier sur son écriture et son style provocateur… pour d’autres, c’est un peu le désenchantement.

On ne présente plus Michel Houellebecq, auteur français qui a chaque nouveau livre créé l’événement dans les médias et l’affolement (merci à lui) dans les librairies. On se souvient tous de la sortie de Soumission et l’énorme polémique qui a suivi, car paru quasiment en même temps que le drame de Charlie Hebdo.

Houellebecq est effectivement un auteur qui provoque, mais qui questionne aussi. En tout cas, une chose est certaine, il ne laisse personne indifférent.

Un antihéros dépressif pour narrateur  

Si vous respirez la joie de vivre, Sérotonine devrait vous calmer pour un moment. On y suit un homme âgé d’environ une cinquantaine d’années, ingénieur agronome de son état, il fait le point sur sa vie. Il a toujours vécu dans l’opulence, gagnait un salaire confortable, vivait dans un très grand appartement tout près de la Motte Picquet Grenelle et donc de la Tour Eiffel. Il a vécu pendant des années avec une femme d’origine japonaise, Yuzu. Ils se sont quittés depuis peu, c’est ainsi que le narrateur fait le point sur sa vie, ses amours ratés, ses nombreuses conquêtes.

Il décide de refaire un dernier tour de ses femmes qui ont croisé son chemin, et pour certaines, la route de son cœur… Et pour aller mieux (ou moins bien, c’est selon), il prend un antidépresseur : le Captorix.

Et comme notre narrateur est en grande dépression, le tout respire à fond la joie de vivre.

Un roman certes, très bien écrit, mais dont le contenu est aussi déprimant que dérangeant

Quand on est un lecteur passionné, on est curieux. J’ai donc voulu tenter de lire pour la première fois un roman de Houellebecq. J’avais eu tellement d’échos différents depuis de nombreuses années qu’il était pour moi important de tester, de me forger ma propre opinion.

Ainsi, je trouve que Michel Houellebecq est un auteur intéressant, mais qu’il n’est pas fait pour moi. Son écriture est en effet faite de fulgurances intéressantes, il écrit bien, certes. Mais ça ne suffit pas, pour moi l’écriture ne doit pas remplacer l’histoire. Et d’histoire ici, il n’y en a guère. On passe d’amantes en amours perdus du narrateur (qui ressemble beaucoup à Houellebecq dans sa vision du monde, entre auteur et narrateur la ligne est très finie !).

Ce qui m’a vraiment déplu, ce n’est pas cette introspection et cette quête de soi, que j’ai trouvée intéressante, mais certaines, pour le moins choquante. Pêle-mêle, vous trouverez : de la zoophilie, des partouzes, de la pédophilie très suggérée, et les mots bite et chattes qui reviennent beaucoup trop souvent. Alors si le génie de l’écriture c’est ça, je passe mon chemin…

Seule chose réellement intéressante et touchante, Houellebecq a extrêmement bien parlé d’une chose : le malaise de nos agriculteurs.rices français.es. Leurs difficultés croissantes pour s’en sortir, leur envie d’en finir pour ne plus avoir à payer les traites, les taxes, les impôts. La pression des grands distributeurs pour brader leurs produits, bradant au passage leur qualité de vie ou leur vie tout court pour les cas les plus difficiles.

Il a su pressentir le mouvement qu’allait être celui des Gillets Jaunes. Cette scène où les agriculteurs commencent à bloquer des routes et des pompes à essence pour manifester leur raz le bol général face aux coups durs. Pour cela en effet, il est doué. Il sait capter l’essence de notre société pour anticiper certaines de ses réactions, et ça ce n’est pas donné à tout le monde.

Pour ceux qui s’interrogent sur ce qu’est la sérotonine, il s’agit d’un neurotransmetteur. Il semblerait qu’elle soit un facteur qui entre en jeu dans la dépression. Tout dépend de la quantité présente, mais elle influe directement sur notre état d’esprit, tout comme la dopamine.

Ainsi, Sérotonine est un roman intéressant, mais trop provocateur à mon goût. On appréciera toutefois l’analyse de l’auteur sur notre société française, notamment sur sa force agricole. Notre agriculture est une force… et nous sommes en train de la tuer à petit feu. Dommage qu’il y ait trop de digressions amoureuses, de déprime ambiante, et de scènes malsaines. En tout cas, l’expérience n’était pas inintéressante.

EDITEUR :
TRANCHE d´ÂGE :

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