
Un magnifique roman graphique sur le sujet délicat de la boulimie et de la santé mentale. Comment trouver un équilibre de vie entre ce que l’on attend de nous et ce que le souhaite pour soi ?
Victoria Ying est une illustratrice et bédéiste américaine, elle travaille notamment pour les studios Disney et Sony. En France, elle a déjà sorti plusieurs ouvrages : La cité des secrets et La cité des illusions chez Bande d’ados. Avec Hungry Ghost elle nous propose une oeuvre beaucoup plus personnelle et au graphisme très différent de ses précédents ouvrages.
Pour la petite anecdote, c’est aussi elle qui illustre une partie des petits livres marionnette qui sortent régulièrement chez Casterman : Bébé-T-rex, Bébé Dragon ou encore Bébé Yéti, c’est Victoria Ying !
Mince à tout prix
Valérie est une lycéenne gentille, discrète, qui fait tout ce que l’on attend d’elle, quitte à s’effacer peu à peu. Sa mère fait en particulier une fixation sur son poids. Tout ce qu’elle mange est ainsi scruté, surveillé, quantifié par la mère de Valérie. L’adolescente supporte de moins en moins cette pression et mène une double vie : celle où elle s’intègre socialement et mange avec ses amis, et celle plus sombre où elle s’éclipse pour purger le trop plein de nourriture qu’elle a ingéré. Mais jusqu’à quand Valérie va-t-elle tenir les deux facettes de sa personnalité avant de craquer ?

Image de soi et image des autres
Ce roman graphique est extrêmement percutant, que ce soit dans le fond, la forme ou encore les dialogues. Victoria Ying réussit la prouesse de nous offrir un one-shot cohérent, qui ne va pas trop vite dans le déroulement de l’introspection de Valérie. Le cheminement de la pensée de la jeune femme ne se fait pas en quelques pages, et tout n’est pas parfait à la fin, même si les choses s’améliorent sensiblement au niveau de sa santé mentale et physique.
Je trouve que ce genre d’ouvrage n’est pas seulemement utile mais nécessaire, car il remet à sa place le culte injuste du corps mince. Peu à peu, Valérie va s’accepter et surtout accepter que certains de ses proches, bien qu’en surpoids ne sont pas moins bien qu’elle. Mais à force de grandir dans l’idée que ce qui est gros est laid ou mauvais, il est dur d’oter ces mauvaises pensées…

L’autrice explique à la fin de l’ouvrage que Hungry Ghost est une oeuvre tout particulièrement personnelle : « Si Val n’est pas moi, j’ai été Val ». Plus qu’un roman graphique fort, c’est aussi un cheminement personnel et un partage d’expérience précieux que nous offre Victoria Ying. Rien que pour cela, cet ouvrage mérite d’être lu.
Je n’ai pas parlé du dessin, mais sachez que je le trouve parfait. Peu coloré, dans des nuances pastels de bleu et de rose, ça fonctionne à merveille. Et que dire de l’illustration de couverture si ce n’est qu’elle est SUBLIME ?
Hungry Ghost, c’est un ouvrage magnifique et touchant sur la famille et ses relations parfois toxiques, l’amitié qui dérive et se délite, l’acceptation de soi, le deuil, la souffrance, et… le renouveau, l’espoir et le courage de mettre des mots sur des choses parfois dures à expliciter. Dès 14 ans.
