Archives de l’auteur : Laura

Chronique jeunesse : Le renard de Morlange

Une  magnifique histoire au temps des comtes et du servage qui apprend aux plus grands l’humilité de façon… originale

Grand classique de la littérature jeunesse, Le renard de Morlange est un roman très régulièrement prescrit dans les écoles. Son histoire permet de découvrir une époque où les seigneurs dominaient leurs terres d’une main de fer.

Son auteur, Alain Surget à écrit quantité de romans pour la jeunesse. Le succès du Renard de Morlange est tel que les éditions Nathan l’ont édité avec une typographie pour les dyslexiques. C’est cette édition spéciale que j’ai découverte : écartement des lettres plus grand, typographie sans empattement, mots difficiles en couleur… tout est fait pour que la lecture ne soit plus un frein.

Un seigneur haïssable de tous…

Le comte de Morlange a tout pour lui, si l’on pense de façon matérialiste. Pour ce qui est du reste, il n’a aucune qualité humaine : il empêche sa femme de s’épanouir en l’enfermant, écrase les cultures de ses paysans, leur prélève un impôt d’une valeur injuste quitte à les affamer…

Tout cela perdure jusqu’au jour où le conte va faire une rencontre qu’il va amèrement regretter. Ayant malmené un druide dans « sa » forêt, ce dernier lui lance une malédiction : à chaque pleine lune, le seigneur se transformera en renard.

Et rien ne pourra changer cela, sauf s’il arrive à apprendre l’humilité et la noblesse d’esprit. Autant dire que rien n’est pas joué d’avance…

Une superbe histoire au message magnifique

Sous ses airs de fable moyenâgeuse, Le renard de Morlange nous conte une histoire où le grand peut devenir petit. Où le puissant peut se transformer en faible et où les cartes peuvent être redistribuées de façon surprenante.

Outre l’histoire, c’est également l’écriture qui participe pleinement à tenir le lecteur dans cette époque révolue. En effet, Alain Surget use de tout le vocabulaire nécessaire pour nous faire tomber en pâmoison devant son ouvrage. Et ça fonctionne.

C’est tout un vocabulaire bien spécifique qui s’ouvre aux jeunes lecteurs qui vont découvrir le roman : griserie, conter fleurette, pavane, mascarade, suzerain… Tous les mots sont expliqués en bas de page, de quoi enrichir leurs connaissances.

J’ai particulièrement apprécié les phases où le comte de Morlange est un renard. Les descriptions de la nature quand il découvre la vie qu’il y a dans la terre, l’humus… Son émerveillement face à ce corps vif et nerveux qu’il possède mais qu’il ne maitrise pas bien. Le comte devient peu à peu autre

Le renard de Morlange a beau être un roman à destination des enfants dès l’âge de 9 ans, son message ne laissera personne indifférent. Et il a plusieurs niveaux de lecture et même les adultes pourront l’apprécier. A la fois philosophique, historique, il force à la réflexion sur le caractère humain et ce qui peut le faire basculer du bon ou du mauvais côté…

Seul bémol, il est dommage que les éditions Nathan n’aient pas fait un petit dossier explicatif sur l’époque en fin d’ouvrage. Une petite page ou deux auraient suffit comme support… Mais peut-être ont-ils fait un document pédagogique pour les professeurs uniquement ? Quoi qu’il en soit je suis certaine que ça aurait aussi intéressé les jeunes lecteurs pour mieux comprendre l’époque.

Chronique Jeunesse : Cassidy Blake – Tome 1 – Chasseuse de fantômes

Une nouvelle série fantastique à destination des jeunes lecteurs férus de légendes et de mystères… sans oublier une bonne dose de frissons !

Premier tome d’une trilogie, Cassidy Blake chasseuse de fantômes est paru en début d’année 2020 aux éditions Lumen.

C’est l’occasion pour les plus jeunes de découvrir son autrice talentueuse : Victoria Schwab. Elle a écrit pour les plus grands la trilogie Shades of Magic (excellente), ainsi que la série en deux tomes Vicious. Tous ses ouvrages sont disponibles chez Lumen.

Les éditions Lumen avaient d’ailleurs réalisé un magnifique kit de presse pour le lancement de cette nouvelle saga fantastique : kit à découvrir ICI.

Ne jamais traverser le voile…

Cassidy a une particularité, depuis qu’elle a failli se noyer elle voit des choses que personne d’autre qu’elle ne remarque. Et surtout… son presque passage vers l’autre monde lui a fait gagner un ami en la personne de Jacob. Personne ne le voit, il semble être une sorte d’esprit ou de fantôme qui ne lâche pas Cassidy d’une seule semaine.

Elle ne croise jamais d’autres esprits à hormis Jacob… jusqu’au jour où le travail de ses parents les oblignet à déménager au pays des fantômes : L’Ecosse !

Voici venu le temps des questionnements et des dangers pour Cassidy et Jacob. Le voile entre les mondes semble être beaucoup plus fin dans cette région du monde…

Efficace bien que fort classique

Ce premier tome de série est fort sympathique et regorge de bonnes idées. L’action est rapide, les mystères s’épaississent assez rapidement pour ne pas laisser le jeune lecteur s’ennuyer… Et le tout fonctionne à la perfection.

Et surtout, on en apprend beaucoup sur l’Écosse et ses nombreuses légendes… plus certaines créées par Victoria Schwab, comme la Corneille Ecarlate (pour en savoir plus rendez-vous sur l’article dédié à l’univers du roman).

Ainsi, le tout fonctionne parfaitement, même si c’est un peu trop classique. Le déroulé en devient par certains aspects assez mécanique. Victoria Schwab réussit toutefois à tirer son épingle du jeu, mais je la trouve bien meilleure sur la tranche d’âge des 14/16 ans que sur celle des 11/13 ans.

Malgré tout, ce premier tome m’a plu, et quand j’ai vu que le second opus se déroulerait à Paris, j’avoue avoir eu très envie de le lire !

C’est donc avec curiosité mais sans impatience que j’attends de lire le second tome des aventures de Cassidy Blake. En espérant que l’autrice saura s’approprier un peu plus cet univers entre fantômes et magie obscure… Si elle réussit, cela ne sera plus juste une saga sympathique, mais bien plus !

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Actualité éditoriale : Coup de foudre pour les images de l’album jeunesse Le supplice de la banane et autres histoires horribles

Angoissantes et sublimes, voilà comment on peut qualifier les illustrations de la polonaise Emilia Dziubak.

L’ouvrage paraît le 30 septembre aux éditions Albin Michel Jeunesse, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est aussi beau qu’atypique. C’est le genre d’univers glauque que l’on ne peut pas s’empêcher de regarder avec fascination… Une incursion dans les contes, l’étrange et la beauté…

Emilia Dziubak a déjà publié des ouvrages en France par le passé, mais rien d’aussi bizarre (et génial), la plupart sont édités aux éditions Kimane. Il y a notamment Fais-moi un câlin, Amis pour toujours, ou encore Qui a peur du grand méchant tigre ? Des histoires très classiques, rassurantes, mignonnes… tout l’opposé du fameux Supplice de la banane et autres histoires horribles.

Je pense que c’est typiquement un album jeunesse à destination des adultes, comme les sont souvent les ouvrages de Benjamin Lacombe ou de Bertrand Santini (ses albums, pas ses romans) . Aussi bien par leur thématique souvent sombre, que par leur graphisme qui l’est tout autant.

Cet album a tout l’air d’être un petit bijou… j’ai hâte de le découvrir en vrai, mais en attendant je partage ses magnifiques illustrations qui font rêver…

Belle découverte à vous !

Chronique Jeunesse : Allô sorcières – Tome 1 – Viser la lune

Le premier tome d’une série jeunesse extrêmement engagée et tout en subtilité !

Premier tome de la série Allo Sorcières, Viser la lune est un roman jeunesse féministe comme il y en a peu pour les enfants de 9 ans. Intelligent, vif, résolument engagé mais tout en douceur… c’est une alliance difficile mais qui est ici pleinement réussie !  

Un concours de construction de fusée…

Aliénor vit à Kourou, en Guyane, là où on lance quantité de fusées. Et la jeune fille est passionnée de sciences… alors quand elle a vent d’un concours de fabrication de fusées, elle fonce !

Et Aliénor n’est pas la seule passionnée de cette histoire, parmi ses amies, il y a Itaï, à fond sur League of Legends et reine des tutos beauté ; Maria, grande connaisseuse de séries très introvertie mais emplie de bonnes idées ; et Azza, super joueuse de handball et super douée pour dévorer des cookies !

Et chose absolument géniale grâce à internet et aux réseaux sociaux, elles sont sur quatre continents différents ! Aliénor est en Guyane, Itaï vit en Nouvelle-Calédonie, Maria habite au Canada et Azza est en France.

Et grâce à leur amitié, elles vont tenter à leur échelle, de tordre le cou aux idées reçues et au sexisme… C’est d’ailleurs ce qui les a cellé leur amitié, un commentaire gratuit et sexiste. C’est ainsi que tout en nuances et avec intelligence les quatre comparses vont lutter pour leurs droits !

Résolument positif et malin

Il n’est pas toujours facile de parler d’un livre que l’on a beaucoup aimé… Et c’est pour moi le cas ici. J’ai tellement apprécié la façon qu’a Anne-Fleur Multon de présenter les choses, d’amener tout en subtilité des idées qui devraient être normales mais qui ne le sont pas encore la plupart du temps…

Je pense notamment à l’exemple du jeu-vidéo League of Legends, un jeu sur PC que je connais extrêmement bien puisque j’y joue depuis presque 10 ans maintenant. Et c’est dans ce roman que j’ai découvert qu’il y avait un mondial… féminin. Dans le roman, Itaï est une excellente joueuse de Lol, mais elle va se casser les dents sur le sexisme dans les jeux-vidéos…

Alors que le mondial (masculin donc) est promu à grand renfort de teasing, de chansons spécialement créés pour l’événement et autres festivités, le mondial féminin n’a lui le droit à rien. A peine existe-t-il aux yeux des fans… La preuve, moi qui suis une joueuse de LoL depuis si longtemps, je n’en avais JAMAIS entendu parler. Et est-il normal que pour un jeu-vidéo il y ait une équipe féminine et une autre équipe masculine ? Je ne le pense pas.

Le monde du jeu-vidéo a encore beaucoup à apprendre et rien ne saurait justifier une quelconque différence de traitement de ses joueurs et joueuses… Et quand on regarde les classements ou la communication, ce sont uniquement des joueurs masculins qui sont cités et plébiscités… dommage pour un jeu que j’aime tant… Mais il y a encore beaucoup de travail !

Et je rappelle au passage qu’être féministe c’est vouloir l’égalité entre les femmes et les hommes et non pas un déséquilibre à l’avantage des femmes.

Alors, à quand une équipe mixte de LoL ? (lire l’article du monde Une coupe du monde féminine de « League of Legends » pour quoi faire ?) Il y a quantité de joueuses qui ont un aussi bon niveau que les joueurs, alors qu’est-ce qui bloque ? Les habitudes ont la vie très dure…

Et ceci n’est qu’un exemple des nombreux autres préjugés que les quatre jeunes filles vont rencontrer au cours de ce roman. Et c’est pour cela que j’ai adoré, car il est ancré dans la réalité des faits, sans aucun misérabilisme. Uniquement de la combativité, de l’amour et une belle amitié…

Le message est clair, il faut rester positive contre l’adversité, et l’amitié est l’une des solutions à beaucoup de problèmes. De plus, on ne parle uniquement du statut des femmes dans la société, mais plus largement de quête d’identité, de racisme, d’acceptation. Ce roman a mille facettes toutes plus intéressantes les unes que les autres. Et il réussit à merveille le difficile exercice du roman jeunesse : nous offrir des portrait d’enfants réalistes et non artificiels.

Ainsi, je vous conseille sans réserve ce premier tome de la série Allo Sorcières ! Le second est déjà paru, et j’espère de tout cœur qu’il y en aura d’autres encore…

Le tome deux de la série. Le troisième s’intitulera Un peu plus près des étoiles.

Chronique : La papeterie Tsubaki – Tome 2 – La république du bonheur

Un livre qui nous transporte dans une bulle de douceur et de beauté ou l’amour et le partage sont essentiels. Mémorable et touchant comme savent l’être de façon unique les romans de Ito Ogawa.

La république du bonheur fait partie d’ores et déjà des futurs succès de la rentrée littéraire 2020. L’ouvrage est la suite directe de La papeterie Tsubaki, paru il y a deux ans en France.

Pour ceux qui ne connaissent pas encore Ito Ogawa, elle est l’autrice du Restaurant de l’amour retrouvé (son plus grand succès, adapté au cinéma au Japon), Le Jardin arc-en-ciel ou encore Le ruban. Tous sont édités chez Picquier.

Retour à la simplicité merveilleuse de Kamakura

L’histoire reprend presque où nous l’avions laissée, et nous retrouvons avec un plaisir sans bornes Hatoko et sa petite papeterie. Mais surtout, on découvre de nouvelles tranches de vie grâce à son passionnant et délicat métier d’écrivain public…

Et d’un point de vue personnel, Hatoko vient tout juste de convoler en noces avec Mitsurô, elle est désormais la belle-mère de la jeune PQ.

En somme, le quotidien est doux, et Hatoko va tout faire pour que développer ce bonheur naissant par de nombreux actes d’amour envers ceux qui lui sont chers.

De l’amour et beaucoup de nourriture

C’est un peu comme cela que l’on peu résumer La république du bonheur. Dès qu’il y a quelque chose qui ne va pas, ou qu’il y a un événement à fêter, la nourriture fait office de réconfort. Et rien qu’à le lire, ça fonctionne.

Thé vert, bento, pain-qui-sourit, prunes sèches, curry, gâteaux Kurumikko aux noix, sablés-pigeons, crabe tsugani, anguille, pulpe de soja sautée, haricots écarlates mijotés au miel, confit d’algue kombu… C’est sans fin ! Mais c’est un régal pour l’imagination que de lire tous ces plats mangés ou rêvés par notre narratrice Hatoko.

Je dois avouer avoir encore plus aimé ce second tome que le premier. Plus beau, plus doux, placé résolument sous le signe de la félicité, ce roman est un véritable cadeau. Autant La Papeterie Tsubaki était assez nouveau dans son genre, autant ici il n’y a pas de surprise… Mais justement, cet univers si calme et doux m’avait énormément manqué. Et le retrouver avec encore plus de puissance évocatrice m’a fait très plaisir.

Quand on lit l’un de deux romans de ce cycle, c’est une véritable parenthèse de bonheur qui s’ouvre à nous.

Et comme toujours, on en apprend plus sur la symbolique de chaque type de papier, stylo (bic ou plume), encre en fonction de l’événement… etc. Le détail va jusqu’au choix du timbre qui peut également apporter sa part de signification entre les lignes…

Ce second roman est aussi l’occasion de découvrir une Hatoko plus intime. Maintenant qu’elle a une famille, sa vie en est toute chamboulée. Mais tous ces changements sont pour le mieux, et on la voit devenir peu à peu une véritable mère pour PQ, sa belle-fille adorable et vive. Cet amour filial qui se développe au fil des pages est beau à voir. De même que les nombreuses interrogations qu’elle se pose sur sa légitimité en tant que mère pour PQ.

Enfin, c’est un réel plaisir que de retrouver les lettres écrites par Hatoko pour ses clients en langue originale. Les calligraphies sont superbes, même si comme moi on ne comprend pas un mot de japonais. Elles sont réalisées avec talent par Mitsui Tadahiro et ajoutent un charme magique indéniable au roman.

C’est donc une nouvelle pépite littéraire que nous offre Ito Ogawa. Merci à elle pour ces quelques heures de plénitude qui rend cette lecture inoubliable. Magique, tendre, unique… c’est le retour du livre-doudou !

Chronique : La mort avec précision

Un roman mémorable, incroyable, comme rarement j’en ai lu… Découvrez le merveilleux univers de Kôtarô Isaka, vous ne verrez plus la littérature de la même façon.

Il y a des livres qui ont la grâce. Qui vous font vous sentir mieux, qui vous donne un élan, une pulsion, vous faisant voir les choses autrement. La mort avec précision est ceux là.

Ce n’est pas le premier roman de Kôtarô Isaka, mais ce fut une véritable découverte pour moi. Et parlons même de révélation, n’ayons pas peur des mots.

En France, trois de ses ouvrages sont parus, tous aux éditions Picquier : La prière d’Audubon et Pierrot-la-gravité.

Et même si cet auteur japonais n’est pas connu dans nos latitudes, La mort avec précision a bénéficié d’une adaptation cinématographique au Japon.

Dans le quotidien d’un shinigami

Peut-être connaissez-vous le manga Death Note ? Si oui, vous êtes déjà familier de ce qu’est un shinigami est quel est son but dans « la vie ».

Un shinigami est une créature issue du folklore japonais. Ce n’est pas un yôkai, mais on le retrouve dans les croyances japonaises, c’est un psychopompe (comme la Faucheuse en occident par exemple). Son but est de choisir qui doit vivre et qui doit mourir sur Terre.

Dans La mort avec précision, être un shinigami inclus nombre de contraintes semblables à celles des hommes. Travail, mission, rapport, conclusion, mise en œuvre…

Notre dieu de la Mort doit ainsi travailler, enquêter sur la personne qu’on lui a attribuée pour une semaine. Au bout d’une semaine, il doit dire à son service et dire si la personne est apte ou non. Apte à quoi ? A quitter notre monde bien sûr…

Et si c’est oui, comme c’est le cas à 99%, c’est au shinigami de faire en sorte que la personne passe l’arme à gauche. Tout en subtilité, comme si c’était le destin… et il repart pour officier sur un autre cas.

C’est ainsi que nous suivons ce dieu de la Mort, lui qui est toujours accompagné par la pluie où qu’il aille, et qui n’a pas le droit de toucher les êtres humains… Il est seul, mais ne ressent jamais la solitude.

Une façon différente d’aborder la culture japonaise et sa littérature

Entre roman, policier et fantastique, on navigue entre ces trois styles que l’auteur maîtrise à la perfection. Le tout donne une œuvre incroyable, inclassable et atypique.

Loin du roman classique, il s’agit ici d’un recueil de nouvelles connexes qui une fois lues nous donne un tableau d’ensemble magnifique. C’est pourquoi que je le nommerais roman malgré tout. Toutes les nouvelles sont liées, mais c’est avant tout la dernière qui sert de clef de voûte à ce chef-d’œuvre de la littérature. L’histoire de cette vieille coiffeuse qui n’a jamais vu son petit-enfant et qui va trouver une solution incroyable pour le voir est fabuleuse… c’est marquant.

Pourquoi ai-je mentionné que ce livre était aussi un ? Tout simplement parce que chacune des nouvelles recèle une énigme, un mystère. Il y a l’histoire de cette femme harcelée par un mystérieux client au téléphone, celle de ce mort dans un hôtel isolé, en pleine tempête de neige… Ou encore l’incroyable vécu d’un jeune homme quand il était enfant et qui le poursuit encore dans sa vie d’adulte.

Et le lien entre toutes ces nouvelles est magnifiquement tissé au travers de ce fameux shinigami. Attachant, résolument drôle malgré lui, mystérieux… C’est ainsi que l’on peut décrire le narrateur de ces tranches de vie nippones.

J’ai rarement lu une histoire au personnage aussi attachant et étrange tout à la fois. Il n’a jamais vu le soleil car la pluie tombe systématiquement quand il descend sur la terre. Il adore la musique et dès qu’il a la moindre minute il fonce dans un magasin de CD écouter des samples. il y rencontre d’ailleurs souvent d’autres collègues shinigami. Pour une raison mystérieuse, la musique humaine leur procure un plaisir à nul autre pareil. Là où rien d’autre chez l’homme ne trouve grâce à leurs yeux, c’est amusant.

Autre détail sur notre psychopompe nippon : il est totalement hermétique à l’humour ou à toute forme d’expression imagée. Ce n’est pas par manque d’esprit, mais c’est tout simplement que les métaphores ou les expressions lui échappent totalement. C’est d’ailleurs pour cela qu’il est souvent drôle malgré lui.

  • Vous avez bien demandé si on était homos ?
  • Je blaguais, évidemment, et puis même si vous êtes homos, vous pourriez avoir un peu de dignité. Au fait, vous en êtes ou pas ?
  • Lui, oui, c’est un homo sapiens, ai-je répondu en désignant du regard Morioka […]. Moi, c’est différent.

Ce passage m’a fait sourire, cat il est systématiquement à côté de la plaque, et donc très touchant.

Et puis… derrière cette façade froide de dieu de la Mort, on découvre quelque chose d’incroyable. Loin d’une quelconque sensiblerie, on est simplement subjugué par ce portrait insensible et humain à la fois. C’est totalement paradoxal, il n’y a qu’en lisant cet ouvrage que vous comprendrez ce à quoi je fais référence…

Mais une chose est certaine. J’ai rarement été autant touchée par un texte, par son message, ses nombreuses symbolique sur la vie, ce qu’on décide d’en faire ou d’y voir. C’est une merveille. La mort avec précision fera indéniablement partie des livres qui vont me suivre toute ma vie. Et au-delà.

Mon seul regret, c’est que cet ouvrage ne soit pas plus connu, plus partagé tant il mériterait de circuler. Une fois qu’on l’a lu, on ne désire qu’une chose, en parler autour de soi, disséquer chaque phrase que l’on a lu, aimée… Je vous souhaite donc de faire cette découverte littéraire et de la diffuser autour de vous… ça vaut le détour.

PS : Pour l’anecdote, j’ai trouvé génial que l’auteur incorpore le héros d’un de ses autres romans à cet ouvrage. Ainsi, dans la nouvelle La mort en voyage nous croisons Haru, le personnage principal de son roman Pierrot-la-gravité.

Chronique : Basse naissance

Un ouvrage où l’on retrouve avec plaisir Kerry Hudson et sa plume passionnante prête à disséquer la société qui l’entoure… Cette fois-ci, ce n’est pas un roman qu’elle nous offre, mais une analyse poussée de son enfance Écossaise dans la misère financière et intellectuelle. Tout cela sans jamais y inclure une once de misérabilisme. Exercice magistral et passionnant.

Kerry Hudson est une autrice écossaise. Elle a auparavant écrit deux romans, tous deux remarquables. Le premier, très autobiographique : Tony Hogan ma payé un ice-cream soda avant de me piquer maman (chronique ici). Le second, La couleur de l’eau (chronique ici) qui a reçu le Prix Fémina étranger.

Avec Basse naissance, Kerry Hudson regarde par-dessus son épaule et (re)découvre l’enfance qu’elle a eu. Tout en découvrant qu’elle est loin d’avoir été la seule à vivre une enfance aussi démunie…

Ce récit de Kerry Hudson m’a beaucoup fait penser aux photos de Joseph Philippe Bevillard. Ce photographe a pris des centaines de clichés des gens du voyage irlandais. Aucun rapport donc, si ce n’est dans l’esprit. Cette pauvreté mise à nu sans misérabilisme. Ce paradoxe entre misère et bonheur mais également conscience de ne pas être dans la norme.

Un portrait de l’Ecosse et de ses écueils socio-économiques

On ne se rend pas compte à quel point l’invisibilité d’une famille monoparentale est violente. A quel point quantité de choses auraient pu tourner encore plus mal pour Kerry Hudson. Elle le dit elle-même, elle a eu de la chance, elle s’en est sortie.

Sortie des relations familiales toxiques, échappée du cercle vicieux du déséquilibre financier perpétuel.

Elle ne roule pas sur l’or, mais elle subvient à ses besoins, et a la chance de pouvoir s’acheter ce qu’elle souhaite quand elle le souhaite dans la mesure du raisonnable. Cela peut sembler étrange comme façon de voir, mais on comprend mieux ce que Kerry Hudson entend par là en lisant son ouvrage.

Passionnant, entre l’Ecosse d’hier et d’aujourd’hui, elle reprend le chemin de son enfance. Il est parfois difficile de repenser à certains événements pour elle, mais elle réussit l’exploit de ne jamais tomber dans le pathos.

Ainsi la suivons-nous dans une Ecosse de l’Est industrialisée et laissée à l’abandon à tous les niveaux : Aberdeen, Hetton-le-Hole, Airdrie…

C’est un ouvrage percutant, je pense me souvenir toute ma vie des quelques premières pages de l’ouvrage. De simples et terribles statistiques nous sont lancées par Kerry Hudson, et quand on comprend qu’elle a vécu la plupart des drames mentionnés et « qu’elle s’en est sortie », comme elle le dit, on a peine à y croire.

Sa vie est incroyable, sa résilience l’est tout autant.

Basse naissance est un ouvrage saisissant, à la fois chronique d’une Ecosse révolue et totalement actuelle. Un livre nécessaire qui peut faire écho à quantité d’actualités… Passionnant, positif malgré les apparences car Kerry Hudson a « vu quelque chose à l’horizon et s’est mise à courir ».

Coup de cœur absolu.

Crédit : Joseph-Philippe Bevillard.

Chronique : Ce qui reste de nous

Une magnifique histoire d’amour au destin extraordinaire !

Roman paru en 2018 aux éditions Fleuve, Ce qui reste de nous est le genre de roman parfait pour qui aime se plonger dans une belle et poignante histoire d’amour.

Jill Santopolo est une autrice américaine qui a déjà écrit quantité de romans pour la jeunesse (la série Paillettes et compagnie chez PKJ).

Par ailleurs, un nouveau livre de cette autrice est paru à la fin du mois de mai : Un jour nouveau. Quant à Ce qui reste de nous, il est paru simultanément en poche.

Une rencontre forcée par le destin

C’est le terrible jour où les tours jumelles du World Trade Center se sont effondrées que Gabe et Lucy se rencontrent. Et immédiatement, c’est le coup de foudre… ils vont s’aimer, se quitter, chacun voulant vivre ses ambitions.

Treize années passent, le destin a décidé de les réunir à nouveau… pour combien de temps ?

Sortez les kleenex et dévorez ce livre !

Si vous aimez les belles histoires d’amours, les déchirements amoureux, les hésitations… Ce roman est fait pour vous. Parfois très fleur-bleue, découvrir la romance entre Gabe et Lucy est un véritable régal.

J’ai lu cet ouvrage il ya maintenant plusieurs années, d’où une chronique un peu diffuse. Mais j’en garde le souvenir d’avoir passé un superbe moment de lecture. En particulier quand la fin approche ! Mais toutes les parties du roman sont réussies, son début avec la chute des deux tours du World Trade Center est bouleversant.

Ainsi, quand arrive la fin, c’est un véritable déchirement que de quitter les personnages qui vous ont accompagné pendant presque 400 pages avec leurs problèmes, leurs petits bonheurs, des pans entiers de leur vie…  

Tout ce que je puis vous dire à propos de ce roman, c’est qu’il est poignant, difficile à oublier (je me souviens encore parfaitement de la fin des années plus tard) et qu’il se lit tout seul. Peu de temps morts et l’écriture fluide de Jill Santopolo font merveille…

TRANCHE d´ÂGE :

Chronique Jeunesse : A la découverte de L’Agence Pendergast

Les deux premiers tomes de la saga ainsi que des cartes exclusives pour présenter les principaux personnages de la saga. Un kit de presse au top !

Une série de romans historiques et fantastiques réussie qui se joue des grands classiques du genre avec malice !

L’Agence Pendergast est le nom de la nouvelle série de romans jeunesse de Christophe Lambert (non, pas l’acteur !). Enfin, plus si nouvelle car depuis la parution des deux premiers ouvrages, deux autres sont parus en librairie.

Une saga à la Men in Black en plein début de XXème siècle

Besoin d’aventures, de mystères ? Et c’est encore mieux si c’est avec une bonne dose d’imaginaire ? Ne cherchez plus, la saga de romans L’Agence Pendergast sera parfaite à découvrir pour les enfants dès l’âge de 9 ans.

Pour le moment quatre tomes sont disponibles et la bonne nouvelle, c’est que vous n’êtes pas obligés de suivre un quelconque ordre pour les découvrir. Je vous conseille cependant de lire le tout premier : Le Prince des ténèbres car il introduit les personnages, mais après vous êtes libres.

Personnellement j’ai lu le premier et Le Monstre des égouts, que j’ai trouvé tous deux excellents.

Mythes, références littéraires et aventure !

Cet art de réussir à lier roman historique tout en distillant quantité de références littéraires (en particulier les romans fantastiques) et très souvent anglo-saxon. Alors quand un auteur français s’y essaye avec réussite, autant le souligner.

Ainsi, ce sont des références parfois très visibles, comme celle avec Dracula dans le premier tome, ou beaucoup plus subtiles telles que Peter Pan à peine distillé dans une phrase. J’ai notamment adoré la référence à Mortal Kombat dans Le Prince des ténèbres, ça m’a beaucoup amusée. Même si les enfants n’ont pas la référence, ils pourront toujours user de leur curiosité pour la comprendre.

Et ce n’est pas la seule, on y croise également des mentions de Balrog (ça vous parle ?) et l’histoire trouble d’un anneau unique à l’origine d’une brouille entre deux peuples. 

Et est-ce qu’on parle du personnage de Barrie dans Le Monstre des égouts ? Barrie comme James Matthew Barrie l’auteur de… Peter Pan.

Vous l’aurez compris, les clin-d’œil sont très nombreux même si ils ne seront peut-être pas tous visibles par les jeunes lecteurs… Charge à eux de les trouver et de s’en amuser !

Ainsi, cette série jeunesse mérite vraiment que l’on s’y attarde. Les histoires sont bien tournées, l’écriture est efficace… Sans oublier les illustrations qui complètent parfaitement l’ensemble. C’est aussi l’occasion de découvrir une collection chez Didier Jeunesse : Mon marque-page, qui comporte un marque-page à découper dans le rabat de chacun des ouvrages. De plus, ils sont très jolis, ce qui ne gâche rien.

Une série efficace, quatre tomes à découvrir :

  • Le Prince des ténèbres
  • Le Monstre des égouts
  • La sirène du Mississipi
  • Les griffes de la forêt

Chronique album jeunesse : Le festin des affreux

Un super album pour découvrir enfin ce que mangent les monstres des contes de fées !

Avec, Le Festin des Affreux, voici le grand retour de l’illustrateur Xavier Salomó ! Il avait déjà illustré les magnifiques albums L’histoire perdue (Seuil Jeunesse), OFF (Seuil Jeunesse), ou encore La machine à explorer le temps – Les aventures de Pam et Paul (Sarbacane).

Dans ce bel album paru au Seuil Jeunesse en avril 2017, on découvre les plats dont raffolent les pires monstres des contes de fées et de légendes !

A la narration, on découvre le texte goûtu de Meritxell Martí. Il est à la base docteur en sociologie de l’art et des nouvelles technologies à l’université ouverte de Catalogne. Il travaille très régulièrement avec Xavier Salomó.

Bienvenue à L’Asperge Pourrie…

« Chers convives,

Le restaurant ne pourra être tenu responsable des perturbations digestives et allergies alimentaires que provoqueraient certains plats »

Ainsi débute Le Festin des Affreux ! Vous voulez savoir ce que dévore un ogre ? Ce que savoure un vampire ? Ce que déguste un fantôme ? Tout vous sera présenté lors du festin extraordinaire des monstres les plus emblématiques !

Un album pour la jeunesse génial et original

Dans la production jeunesse actuelle, il est difficile de sortir du lot. Tant par la qualité que par l’originalité de l’histoire, se différencier n’est pas évident, d’autant qu’il ne faut pas faire n’importe quoi. Et pourtant, encore une fois, le duo que forment Xavier Salomó et Meritxell Martí fait des merveilles !

Le Festin des Affreux est tout ce que l’on rêve de lire aux enfants dès l’âge de 4/5 ans environ. Il y a de l’humour, et surtout beaucoup d’imagination.

Alors, que mange un fantôme d’après-vous ? Une soupe noire de chaînes aromatisée au tétanos, de l’amanite empoisonnée sur son lit de toiles d’araignées, un fromage d’Ecosse du XVIIème siècle, et un gâteau hanté façon dame blanche (super bien trouvé le coup de la Dame Blanche, non ?).

Et ça, ce n’est que le repas d’un monstre parmi neuf ! Impossible d’en dire plus, mais le dixième invité est franchement spécial et rebutant, surtout pour les monstres…

La chute de cette histoire est absolument géniale, son écriture est travaillée, recherchée, de même que les illustrations. C’est à découvrir sans réserves aucunes, c’est drôle, et aussi frais qu’un Cup-cake au « Petit Poucet » !

Bref, c’est un nouvel indispensable à ajouter à la bibliothèque des enfants.