Un témoignage aussi terrible qu’indispensable par une journaliste japonaise victime de viol
Paru aux éditions Picquier en 2019, La boîte noire est un témoignage écrit par la journaliste Ito Shiori. Elle y raconte de façon factuelle ce qu’elle a vécu : un terrible viol.
Mais la voix des victimes est encore et toujours difficile à faire entendre, et cela encore plus au pays du soleil levant, où les freins semblent décuplés. C’était sans compter sur le courage et la pugnacité de cette femme admirable qui livre ici son parcours et son combat pour elle et pour toutes les femmes. Le mouvement #metoo au Japon prend son essor, notamment par son biais… Cet ouvrage a reçu le Best Journalism Award en 2018.
Un ouvrage nécessaire
Parfois difficile à lire tant les scènes décrites par Ito Shiori sont terribles (je parle plus des phases de déni des autorités que de l’acte de viol en lui-même), La boîte noire est un ouvrage indispensable.
A lui seul, ce roman a réussi à faire bouger certaines lignes de l’administration japonaise très rigide et machiste. Mais ce n’est qu’un premier pas vers ce que doit devenir le Japon. Pays exemplaire dans quantité de domaines, celui du respect des femmes et de leur écoute n’en fait pas partie…
Quand Ito Shiori a trouvé le courage d’aller voir la police, une semaine après les faits, elle a raconté son histoire à une agente… de la circulation. Qui l’a redirigée ensuite vers un autre collègue à qui elle a dû tout réexpliquer. Ce dernier ne cessant de lui répéter que ça n’allait pas être facile de porter plainte, qu’il fallait être vraiment sûre avant de le faire, que ça pouvait jouer sur sa carrière… Bref tout été fait pour qu’elle abandonne. Aucune oreille attentive, même du côté des associations qui n’offrent pas d’assistance téléphonique et demande à la victime encore sonnée de se rendre surplace et refusent de délivrer la moindre aide par téléphone. Tout cela n’est pas normal, et ce n’est qu’une toute petite partie de ce que nous conte Ito Shiori sans sentimentalisme, juste avec les faits bruts.
Ce récit m’a bouleversée, mise en colère, j’ai eu l’impression d’être beaucoup plus prise par l’émotion que l’autrice elle-même, qui arrive à maintenir une certaine distance avec les faits. Certainement pour ne pas sombrer ou réagir avec un excès d’émotions. C’est tout à son honneur, mais elle a fait face à tant d’injustices et de détours dans son combat que l’on ne peux que l’admirer.
Je vous conseille vivement de découvrir La boîte noire, cet ouvrage éclaire une fois de plus tout le chemin à parcourir pour les femmes et cela quel que soit le pays. Les choses avancent, mais il ne faut rien lâcher et continuer le combat. Ito Shiori est devenue l’une de ces figures : courageuse et superbe dans sa lutte.
Une belle et tendre histoire d’amour, certes, mais également bien plus que cela ! Un roman ado qui a le mérite d’être assez original pour surprendre…
Marie Vareille est une autrice française à l’œuvre prolifique, elle écrit aussi bien pour les ados que pour les adultes. Chacun de ses livres est un succès de librairie, on peut citer Je peux très bien me passer de toi (Charleston en 2015) ou encore sa trilogieEllia la passeuse d’âmes parue chez PKJ (Prix Pierre Bottero en 2017). Le syndrome du spaghetti est une romance contemporaine qui s’inspire en partie du vécu de l’autrice sur certains aspects.
Une vie et un avenir entièrement au dédiés basket
Léa à 16 ans et déjà un plan de carrière sportive tout tracé. Son père est coach de l’équipe de basket de la ville, et elle compte intégrer l’INSEP (Institut National du Sport de l’Expertise et de la Performance) afin de pouvoir toucher du doigt son rêve jouer dans l’équipe féminine de la NBA, l’une des plus sélectives au monde.
Alors, certes les objectifs sont écrits, Léa a le mental et les capacités pour les atteindre mais, c’était sans compter sur un drame qui va toucher sa famille…
En parallèle, nous allons suivre le jeune Anthony, 17 ans, qui vit dans une cité un peu plus loin de chez Léa. Ils ne se connaissent pas, mais leur passion commune pour le basket va les réunir de la plus belle des façons.
Une histoire qui fonctionne à merveille… et pour cause, il y a du vécu !
Je dois confesser que j’avais quelques à priori quant à ce roman. Je craignais qu’il soit trop « facile », trop prévisible et quelque peu fleur bleue. J’ai été vite détrompée en quelques pages à peine, j’étais dedans.
L’histoire de Léa et du drame qui va toucher sa famille est violent, va tout remettre en question et soulever des points vitaux dans sa vie.
Elle va devoir revoir totalement son plan de carrière à cause d’un syndrome dont elle n’a jamais entendu parler : le syndrome de Marfan.
Et c’est là que la partie très personnelle de ce roman rejaillit : Marie Vareille connaît très bien le syndrome de Marfan, elle en est elle-même atteinte.
Et c’est ainsi que Léa et toute sa famille vont devoir vivre avec ce syndrome dont ils ne connaissaient même pas le nom il y a quelques semaines. Les examens médicaux, les recommandations, les interdictions sportives… c’est un parcours du combattant qui s’annonce. L’histoire prend un tournant aussi magnifique que terrible avec cette nouvelle information. Je ne vous dévoile pas plus d’éléments d’intrigue, mais sachez que le personnage de Léa est magnifique, poignant, combatif, désespéré… Et on l’aime pour ça. De même qu’Antony l’est à sa façon, bien que très différente.
Ces deux personnages sont fulgurants de beauté, beaux dans leur douleur et les épreuves qu’ils vont traverser côte à côte. Impossible de lâcher ce roman présenté pour ado, mais qui pourra plaire à toute personne qui aime les belles histoires et les personnages qui ont du corps, de la présence.
Il faut dire que ce roman m’a également beaucoup touchée pour une raison simple : je connais relativement bien le syndrome de Marfan. J’avais été diagnostiquée potentiellement porteuse de ce syndrome, à la suite d’examens très nombreux, il s’est avéré que je ne l’avais pas malgré un faisceau de symptômes. Bien heureusement. Mais je me souviens des spécialistes, de leurs explications, des risques liés à ce syndrome. C’est donc en connaissance de cause que je peux dire que tout ce qui est dans ce roman est crédible et totalement réaliste. Le bon comme le mauvais. Voilà pour la petite parenthèse personnelle.
Léa et Anthony crèvent la page (à défaut de l’écran), et ont les suivrait au bout du monde… Vous l’aurez saisi, c’est un énorme coup de cœur. A découvrir dès l’âge de 14 ans puis sans aucune limite d’âge !
PS : Autre sujet très intéressant et méconnu creusé dans ce roman : les joueurs de baskets de la NBA dont la carrière a été fauchée en plein vol suite à un diagnostic de Marfan. Les risques pour leur santé sont trop grands et la NBA refuse de recruter des joueurs qui ont ce syndrome… Il faut dire que Marfan regroupe quelques caractéristiques qui prédisposent au basket : hyperlaxité ligamentaire, grande taille… pour les points positifs. Mais les gros problèmes sont une paroi du cœur très fine qui peut conduire à une rupture et donc à la mort. Dans ces conditions, on comprends que la fédération de américaine de Basket refuse de prendre le risque… Mais certains joueurs on pris leur responsabilités et refusent d’abandonner leur carrière et leur passion. Ainsi, ceux que la NBA a refoulés ont été recrutés par des fédérations d’autres pays : Danemark, Chine… etc.
Voici des mini-chroniques pour découvrir quelques romans jeunesse qui pour certains m’ont fait passer un excellent moment de lecture. Tout particulièrement les deux derniers de cet article que je vous conseille vivement !
Les chroniques de Prydain – Tome 1 – Le livre des trois – Lloyd Alexander – Anne Carrière
Sorti en janvier 2020 en France, Les Chroniques de Prydain est une saga qui a eu un beau succès en son temps aux États-Unis. C’est la première fois que la série de romans paraît dans notre pays, mais elle date de 1964 ! Pour la petite histoire, sachez que les premiers tomes de cette saga qui en compte cinq au total ont inspiré très fortement le Disney Taram et le chaudron magique. Un magnifique dessin animé qui n’a pas eu le succès escompté à sa sortie, jugé trop sombre par rapport à ce que faisaient les studios Disney habituellement.
Ainsi, Les chroniques de Prydain est une saga qui fait partie des classiques du genre de la fantasy Outre-Atlantique. Alors, cela vaut-il le coup de la découvrir par chez nous ? J’avoue avoir été assez déçue par cette lecture… pour moi, cela a malheureusement été publié trop tard, même si la démarche est louable. Je m’explique : ce texte a assez mal vieilli, il s’y passe peu de choses, le personnage de Taram est assez insupportable, l’écriture y est lourde… Et je ne pense pas qu’il s’agisse forcément d’un problème de traduction. J’ai l’impression que le texte d’origine lui-même est lourd.
Moi qui adore la littérature jeunesse tous genres confondus, j’ai trouvé cette lecture laborieuse et très dispensable… On y retrouve les grandes lignes de toute saga du genre avec un jeune héros qui s’ignore, une destinée à accomplir, un royaume à sauver, etc. Mais rien qui fasse rêver et s’évader. C’est en cela que je pense qu’il était trop tard pour éditer chez nous ce texte. Il y a eu bien mieux de paru depuis, et même si c’est un classique ailleurs, il n’aura pas la même envergure chez nous… Se lit dès l’âge de 11 ans environ.
L’infinuit – Tome 1 – Ross Mackenzie – Auzou
Premier tome d’une saga fantastique qui en comptera trois, L’infinuit avait tout pour plaire sur le papier. Un univers qui semblait assez original, un titre joliment traduit, une couverture qui attire… ça fait rêver ! On y suit une jeune fille prénommée Larabelle qui va se découvrir des pouvoirs et un destin dépassant ses attentes les plus folles. Pour survivre depuis des années, elle écume les égouts de la ville à la recherche d’objets précieux qu’elle peux revendre…
L’atmosphère du roman est assez sombre, très nocturne et mystérieuse, tout cela semble très engageant…
Malheureusement, au bout de quelques chapitres, on voit déjà poindre une intrigue cousue de fil blanc et des personnages très classiques dans leur fonctionnement. Et pour moi, ce n’est pas parce qu’un ouvrage est dédié à la jeunesse qu’il se doit d’être « simple » ou « rassurant » et ne pas innover un peu. Dans l’Infinuit, on retrouve donc tous les mécanismes classiques du fantastique sans aucune envergure. C’est assez ennuyeux, en tout cas à mes yeux, et donc tout à fait oubliable… Se lit dès l’âge de 10 ans.
Le jeu d’Hiroki – Eric Senabre – Didier Jeunesse, collection Mon Marque-Page +
Pour ceux et celles qui aiment le fantastique, les jeux-vidéos et le Japon, ce roman sera absolument parfait. C’est un bon prétexte pour découvrir par petite touche le Japon et sa culture, et surtout, ceux qui aiment se faire un peu frissonner au travers d’une lecture pourraient y trouver leur compte !
On y suit le jeune Hiroki qui découvre dans les affaires de son père une vieille cartouche de jeu vidéo. Et chose incroyable, le jeu fonctionne toujours alors que les serveurs ont été coupés depuis longtemps ! Et chose encore plus étrange, le jeu semble connaître Hiroki personnellement… Rêve ou réalité ?
J’ai beaucoup aimé l’ambiance de ce roman, sans prétention mais très efficace. Entre le policier et le fantastique, ce mélange entre légendes nippones et technologie à travers les jeu-vidéos fonctionne à merveille !
A lire dès l’âge de 9 ans.
Enquête au collège – Tome 8 – L’élève qui n’existait pas – Jean-Philippe Arrou-Vignod – Gallimard Jeunesse
Quand j’ai commencé la lecture de cet ouvrage, je n’avais pas fait très attention à la tomaison de la série. Ainsi, je me suis lancée dans les Enquêtes au collège avec le tome 8, et en réalité, ce n’est pas du tout gênant ! Ainsi découvre-t-on le fameux et insupportable P.P. Cul-Vert : aussi intelligent qu’ayant une très haute idée de lui-même. Tout débute avec la rencontre d’un mystérieux élève dans les couloirs du collège, en pleine nuit… par Rémi (le narrateur). Sauf que le lendemain, il s’avère que cet élève n’existe pas dans le registre, toutes classes confondues ! S’ensuit une enquête enlevée par le trio que forment P.P.Cul-Vert, Rémi et Mathilde, entre humour et mystère…
Pour une première découverte de la saga, j’ai été très agréablement surprise. En même temps, j’aurais dû me douter que ça allait être une bonne lecture, ayant déjà apprécié d’autres ouvrages de l’auteur auparavant.
Pour ceux et celles qui aiment les intrigues entourées de mystère, ce pourrait être l’ouvrage idéal. A la fois drôle, bien ficelé et efficace. A découvrir dès l’âge de 9 ans.
Les romans pour ados comportent énormément de sous-genre, tout autant qu’en littérature en fait. Et parmi ces nombreux styles littéraires différents, celui du thriller/policier YA plaît beaucoup. En tout cas, les éditeurs en proposent une pléthore aux potentiels lecteurs… à nous ensuite de faire le tri entre le bon grain et l’ivraie.
Trouble vérité – E. Lockhart – Gallimard Jeunesse
L’autrice américaine E. Lockart a fait une entrée remarquée en France avec son tout premier roman Nous les menteurs, dont le final est aussi réussi que mémorable. Qu’en est-il avec Trouble vérité ? Pour moi, ce fut une déception… L’autrice a tenté d’utiliser la même recette qu’avec son précédent ouvrage, mais sans réussite.
On retrouve l’univers de la jeunesse dorée et insouciante américaine où tout est facile, parfait, brillant… On suit une adolescente qui semble devoir cacher aux yeux du monde entier qui elle est car elle est poursuivie… Par qui ? Pourquoi ? Les réponses arrivent par flash-back, le roman remontant peu à peu le temps pour arriver au dénouement tant attendu. La façon dont est construite l’histoire, en reculant dans le temps est originale et exacerbe l’intérêt du lecteur. Mais ce ne fut pas suffisant pour rendre cet ouvrage mémorable. Les révélations sont lentes à arriver, les personnages assez stéréotypés… Pour moi, ce fut une réelle déception.
Plein gris – Marion Brunet – PKJ
Marion Brunet est une autrice française dont la plume acérée a déjà su me séduire (aussi bien en jeunesse qu’en roman noir…). Avec Plein Gris, elle nous propose un thriller en huis-clos maritime où des adolescents partis en mer vont devoir survivre à une terrible tempête et à une ambiance délétère…
Le moins que l’on puisse dire c’est qu’en quelques pages, on est en plein dans l’intrigue. Les personnages sont bien campés, chacun avec son histoire personnelle crédible, ses blessures, ses traumas pour certains…
Malgré cela, je n’ai pas passé un aussi bon moment qu’escompté. Je n’ai pas retrouvé la verve qui m’avait tant plus dans L’été circulaire, notamment.
Peut-être est-ce l’accent énormément mis sur l’univers maritime (normal, me direz-vous pour un thriller sur un bateau) qui m’a lassée. En fait, je pense que l’histoire est trop longue pour ce qui s’y déroule, Plein Gris aurait fait une très bonne novella, mais sous forme de roman, c’est trop.
Je m’attendais à une intrigue plus surprenante, retentissante, mais tout jusqu’à la conclusion été assez prévisible. C’est dommage, car c’est un bel effet de surprise que je recherche dans les thrillers YA, et ce n’est pas si aisé que cela à trouver…
7 secondes – Tom Easton – Lumen
Une course-poursuite dans une Europe futuriste où la technologie nous poursuit à chaque seconde de notre vie, voici le monde dans lequel vit Mila. Un monde où pour vivre décemment, il faut avoir la chance d’habiter en Angleterre ou un autre pays riche qui a les moyens de se protéger des vagues de migrants voulant un avenir meilleur. C’est le cas de Mila, une jeune femme qui veut tout faire pour survivre et vivre décemment. Un rêve qu’elle partage avec des millions d’exilés qui tentent leur chance en traversant la Manche. Mais après avoir foulé le sol anglais, c’est loin d’être fini. Mila et ses semblables sont traqués, capturés, et même tués… Comment convaincre le gouvernement qu’elle a quelque chose de plus que les autres ? Qu’elle mérite un avenir meilleur ?
Elle l’ignore encore, mais Mila possède en effet quelque chose de spécial… et de dangereux. C’est ainsi qu’une course-poursuite s’engage. Et Mila n’a que 7 secondes d’avance sur ses assaillants, qui voient tout ce qu’elle voit et savent à tout moment où elle est…
L’idée était intéressante, mais malheureusement ce thriller futuriste manque d’ambition. Je m’attendais à une intrigue remettant en question ce terrible système inégalitaire, mais ce n’est pas le cas. On ne se concentre que sur Mila et sa petite personne, les autres qui souffrent comme elle ne sont pas son souci, alors même qu’elle arrive à monter assez haut dans les strates du système… C’est dommage, mais c’est un loupé. Dans le genre du thriller futuriste et chez le même éditeur, la duologie Dualed est géniale elle.
Cogito – Victor Dixen – Collection R
L’œuvre de Victor Dixen est aussi passionnante que très éclectique. Il a aussi bien réécrit des contes de fées que créé de toutes pièces une intrigue contemporaines incroyable avec des fées dans un camp d’été aux États-Unis. Sans parler de sa quadrilogie Phobos qui se propose de mélanger sciences et téléréalité sur fond de suspense ultra addictif… Avec Cogito, on découvre un autre pan de son œuvre qui se focalise cette fois sur les Intelligences Artificielles et leurs potentiels dangers envers l’humanité. L’émergence, ça vous dit quelque chose ? Si ce n’est pas le cas, vous allez en faire l’expérience…
Dans Cogito, Victor Dixen imagine notre société avec des avancées technologiques aussi merveilleuses que terribles. Les robots ont remplacé énormément d’humains dans quantité de corps de métiers, ce qui a créé énormément de chômage, de dénuement. Cette société de « rêve » a créé un degré de précarité sans précédent qu’aucune crise avant elle n’avait vécu. En encore une fois, ce sont les moins qualifiés, les moins dotés, qui en sont les victimes collatérales.
C’est dans ce contexte que l’on va suivre Roxane, sélectionnée parmi des adolescents triés sur le volet pour se voir implanter une puce qui changera sa vie. Plus de difficultés pour apprendre, plus d’examens insurmontables et de stress pour s’intégrer dans la société. Cette puce expérimentale est une aubaine, un véritable tremplin technologique et social. Roxane se voit ouvrir un véritable pont d’or, elle qui n’était vouée à aucun avenir, issue d’une famille touchée par le deuil et le chômage…
Mais quel peut bien être le revers de la médaille de ces promesses d’avenir meilleur ? Les Intelligences Artificielles sont-elles vraiment sous contrôle ? C’est ce que Cogito se propose d’imaginer…
J’ai beaucoup aimé l’ambiance de ce roman YA qui mélange technologie, histoire de la robotique et analyse d’une société future crédible et effrayante. Victor Dixen a fait beaucoup de recherches pour son intrigue, et ça se voit. C’est un thriller futuriste pour ados qui fonctionne à merveille, même si certains aspect y sont prévisibles, ça reste un régal. La fin est un petit peu rapide comparée à la mise en place de l’univers qui prenait vraiment son temps.
Mis à part ces petites remarques, Cogito est un bon roman pour ado qui sait tenir ses lecteurs en haleine, et c’est tout ce qu’on lui demande !
PS : J’ai adoré le petit caméo fait à propos de sa saga Phobos. C’est ainsi que l’on découvre que Phobos et Cogito se déroulent dans le même univers bien que la temporalité soit très éloignée.
Connaissez-vous Isabelle et Porculus ? Ce sont deux figures de la littérature jeunesse écrites et dessinées par Arnold Lobel, tout particulièrement ce cher petit cochon Porculus… zoom sur ces deux classiques parus à la fin des années 60. Et si ces titres ne vous disent rien, peut-être que vous connaitrez le plus célèbres des ouvrages d’Arnold Lobel : Le magicien des couleurs ! (couverture en fin d’article)
Porculus
C’est un petit cochon tout mignon tout jaune, qui adore plus que tout se plonger à corps perdu dans la boue… si douce… Sauf qu’un jour, la femme du fermier est prise d’une folie ménagère et décide de nettoyer la porcherie !
C’est un véritable drame pour le petit Porculus qui va très vite devenir très malheureux et décide de partir de la ferme pour se trouver un nouvel havre de paix (et de boue).
J’ai trouvé cette histoire aussi simple que très mignonne, je l’ai perçue comme un message disant « soi toi-même, et peu importe ce qu’en pense les autres ou ce qu’ils souhaitent t’imposer ». Quant aux dessins anciens, ils sont merveilleux et possèdent ce cachet inimitable de l’époque.
Isabelle
Nous voici de retour dans la petite ferme avec le même couple de paysans. Ils n’ont pas que Porculus comme animal, mais également la jument Isabelle, que la femme du fermier va prendre sous son aile. Et cela de façon un peu particulière en bichonnant, maquillant, habillant la jument comme un humain, enfin, une humaine. Sauf que… quand on chasse le naturel, il revient au galop !
Même si je préfère l’histoire de Porculus, celle d’Isabelle lui fait parfaitement écho.
En somme, ces deux courtes histoires sont parfaites à découvrir dès l’âge de 4 ans, puis à tenter de lire seul quand les enfants sont en CP/CE1. Il y a assez peu de texte pour s’en servir de première lecture !
Et voici pour conclure le plus célèbre des albums de l’auteur-illustrateur Arnold Lobel. Le magicien des couleurs est un classique parmi les classiques, indétrônable depuis presque 50 ans en France ! Il est utilisé depuis des décennies par des générations de professeurs, et on comprend pourquoi en quelques pages. Si vous ne l’avez jamais vu/lu, je vous le conseille vivement.
Chronique d’un roman que je n’ai pas totalement compris ni su apprécier…
Division avenue est un roman de l’autrice d’origine australienne Goldie Goldbloom. L’ouvrage est paru en début d’année 2021 aux éditions Christian Bourgois. Un autre de ses ouvrages est déjà paru chez nous, disponible en 10/18 : Gin et les italiens.
Dans Division Avenue, on découvre le fonctionnement d’une famille juive orthodoxe traditionnelle. Passionnant, mais vous avez intérêt à déjà avoir des bases sur la culture juive, sinon il y a un risque d’être largué… (comme moi).
Mariée, dix enfants, cinquante-sept ans… et enceinte.
Surie Eckstein est une bonne mère juive, le couple qu’elle forme avec son mari depuis de nombreuses décennies est parfait. Tout semble aller pour le mieux à Division Avenue. Sauf que Surie vient d’apprendre une nouvelle bouleversante : elle est à nouveau enceinte. Impossible pour elle de l’annoncer à qui que ce soit, y compris son mari. A son âge, elle pensait dorloter ses petits enfants et ne pas avoir à se balader en poussette avec son propre nourrisson…
Comment encaisser cette nouvelle pour elle ? Comment en parler à ses proches ? Comment gérer l’image qu’elle va donner d’elle aux autres personnes de la communauté ? La peur du jugement des autres est prégnant, et d’autant plus dans une communauté aussi fermée où tout le monde se connaît…
Intéressant, mais à réserver à certains initiés
Je trouvais l’idée du roman très accrocheuse. Ce paradoxe total qu’est Surie, déjà grand-mère et bientôt à nouveau mère… C’est intéressant et amène à se poser quantité de questions.
La première partie du roman est consacrée tout particulièrement au quotidien de Surie. Ses habitudes de vie, les différents membres de sa famille et sa relation avec eux. C’est assez lent, mais loin d’être inintéressant. On apprend au passage beaucoup de choses sur la culture juive, les traditions et leur poids, les nombreux symboles inhérents… Petit bémol cependant, on ne nous explique rien. Que ce soit au niveau du vocabulaire (tout est en fin de roman ! Pourquoi ?) ou des habitudes de vie, rien n’est expliqué. C’est là, tout simplement. J’ignorais par exemple qu’un couple marié dans la tradition juive orthodoxe se devait de dormir séparément quand la femme avait ses règles. De plus, les tabous semblent être très nombreux dans cette sous branche de la religion juive. Et quantité d’autres choses…
La seconde partie du roman est pour moi beaucoup plus dynamique et intéressante. Surie se révèle à elle-même. Mais malheureusement, l’autrice ne va pas assez au fond des choses pour moi. Elle aborde dans cette seconde partie des thèmes très actuels et intéressants : le consentement éclairé, la manipulation des plus jeunes et leur vulnérabilité. Et « pouf ! », à peine esquissées, ces thématiques sont mises de côté alors que le roman commençait à gagner en densité et en intérêt (de mon point de vue). Au final, l’un des thèmes les plus intéressants du roman est mis de côté avec une rapidité confondante… C’est dommage.
Mais plus qu’un roman sur la naissance ou à propos d’une grossesse gériatrique (oui le terme existe !), Division Avenue traite de la douleur de la perte. Cette grossesse est l’occasion pour Surie de repenser à ses erreurs du passé, notamment vis à vis l’un de ses fils parti à jamais. Cette grossesse serait-elle l’occasion d’une renaissance ?
Ainsi j’ai aimé découvrir la culture juive grâce à ce roman, mais rien n’est présenté ou expliqué aux lecteurs qui n’y connaissent rien comme moi. C’est dommage. Et pire que tout, il y a énormément de vocabulaire en hébreu – plus de 140 notes ! – et tout est en fin d’ouvrage, ce qui coupe terriblement la lecture et en retire la fluidité. Pourquoi ne pas avoir mis les notes en bas de page ? Vu la quantité, cela aurait paru plus à propos…
Enfin, je n’ai pas réussi à apprécier l’histoire de Division Avenue et de Surie. Au moment où l’ouvrage commençait à entrer dans le vif du sujet, on s’en éloigne et on tombe dans l’incompréhension. Je n’ai pas réussi à comprendre Surie ni ses actes, qui m’ont totalement perdue alors que je la voyais enfin trouver un sens à sa vie…
Un roman historique policier sur fond de médico-légal totalement immersif et fascinant !
Paru il y a
tout récemment aux éditions Lucca (qui gagneraient à être connues), Stupeur
nous conte l’histoire de Mary Mallon, une femme qui a réellement existé dans le
New York du XIXème siècle. Une histoire fascinante qui nous entraîne dans une
enquête incroyable et véridique des services d’hygiène new-yorkais.
Il s’agit du
premier roman de Julie Chibbaro à paraître en France. L’ouvrage est traduit par
Hermine Hémon, elle a déjà traduit plusieurs romans aux éditions Lucca. Elle a
également traduit le texte Binti de l’autrice Nnedi Okorafor aux éditions
ActuSF.
Une histoire incroyable… d’autant plus qu’elle est véridique
Bienvenue à
New York, où nous suivons Prudence, une jeune femme passionnée par les
sciences, notamment la médecine. Même si cet intérêt pour n’est pas du goût de
tout le monde quand il est question d’une jeune demoiselle… Qu’importe,
Prudence veut apprendre, découvrir, se rendre utile. C’est ainsi qu’une
opportunité s’ouvre à elle au service d’hygiène de New-York. Elle ne le sait
pas encore, mais elle va participer à une découverte incroyable dans le domaine
de la médecine… à une époque où la notion de porteur sain n’existait pas
encore et n’était qu’une simple théorie.
Passionnant, et rempli de faits incroyable
L’histoire
de notre jeune narratrice est certes passionnante, mais celle Mary Mallon l’est
plus encore. Qui est-elle ? Il s’agit d’une cuisinière d’origine irlandaise qui
a travaillé dans nombre de familles bourgoises new-yorkaises et qui laissait
dans son sillage de nombreux malades… totalement malgré elle.
Pourquoi ?
Comment ? Mary Mallon est un cas d’école qui s’ignore encore… Les services
d’hygiène de New-York ne le savent pas encore, mais c’est après elle qu’ils en
ont.
Au fil des
pages, ils remontent sa piste en suivant les foyers de contamination à la
fièvre thyphoïde. C’est ainsi que peu à peu, Prudence se prend au
« jeu » de la course contre la montre et la maladie.
Peu à peu
cependant, elle s’interroge sur la notion de libre arbitre, de liberté et
d’intérêt pour le bien commun. Comment trouver une solution au problème
insoluble que semble être Mary Mallon ?
Entre le
roman historique, le policier et le journal intime et naturaliste, Stupeur est
une lecture passionnante pour qui aime se plonger dans l’histoire, la vraie.
Aux Etats-Unis, Mary Mallon est devenue une véritable légende urbaine, elle est
même surnomée là-bad Mary Thyphoïde…C’est dire à quel point sont existence a
marqué.
Je ne peux
pas vous en dire plus sur l’histoire de cette pauvre immigrée irlandaise qui
n’a pas eu de chance dans la vie… Mais sachez qu’elle est aussi terrible
qu’incroyable. Cette lecture est d’autant plus intriguante quand on la met en
exergue avec l’époque que l’on connaît. Les mots porteur sain, asymptomatique,
foyer ou encore isolement font partie du vocabulaire de base de ce roman.
C’est à lire
pour découvrir un pan méconnu de l’histoire new-yorkaise, mais aussi pour
apprécier un personnage féminin fort qui cherche sa place dans un monde
d’hommes.
De plus,
vous découvrirez de magnifiques illustrations naturalistes ajoutées pour
l’édition française. Sans oublier une traduction fluide et irréprochable, bref,
Stupeur a tout pour plaire.
Les éditions Gallimard offrent une seconde vie à la saga avortée en FranceLa marque des anges. Peut-on espérer un renouveau de la trilogie et l’apparition d’une traduction du troisième opus ?
Je n’ai pas les réponses à ces questions, mais je souhaitai avant tout partager mon enthousiasme quant à cette réédition. La saga n’a pas eu la moindre chance en France : peu de communication, des couvertures assez peu engageantes (restons gentils), Gallimard a publié les deux premiers tomes de la série sans même en faire la promotion. Peu étonnant que cela n’ai pas pris… et tellement dommage quand on découvre toutes les qualités de cette saga sous-estimée et encore si peu connue chez nous.
Laini Taylor doit son renouveau en France grâce aux éditions Lumen et à leur formidable promotion autour de sa saga en deux tomes Le faiseur de rêves. Cela a permis de mettre en lumière La marque des anges, et heureusement, Gallimard Jeunesse redonne vie à cette publication née en 2012.
A gauche : La nouvelle couverture issue de la version américaine A droite : La couverture originale de Gallimard Jeunesse en 2012
Le premier tome vient donc de sortir en poche dans la collection ado de Gallimard Jeunesse : Pôle Fiction. On attend la suite avec impatience… et d’ici là, je vous laisse admirer les trois couvertures américaines de la saga, elles valent le détour.
Une chute brutale, un témoignage étrange, un lourd passé… Que s’est-il
passé exactement dans cette église désacralisée transformée en logement
social ?
Paru aux éditions Sonatine en 2018, Une autre histoire est un thriller
psychologique écrit par Sarah Naughton. Il est paru depuis en poche aux
éditions Pocket en 2019.
La vérité n’est jamais là où l’attend
Mags est une avocate à qui la vie sourit. Du moins, elle a fait en sorte
que la vie lui sourit, car son passé est loin d’être reluisant. Elle vit et
travaille à Las Vegas, aime son travail, s’est forgé une carrière grâce à son
travail…
Mais le passé se rappelle à elle quand elle apprend que son frère a été
victime d’une chute. Il est dans le coma, et nul de sait s’il se réveillera. Son
pronostic vital étant fortement engagé… Il semblerait que cette terrible chute
soit due à un suicide.
En qualité de sœur, Mags est tenue de se rendre à Londres pour voir son
frère et s’occuper de l’administratif. Mais à peine est-elle arrivée dans la
capitale, elle décide de creuser cette histoire de suicide. Pourquoi Abe
aurait-il voulu se suicider ? Et pourquoi le témoignage de Jody, sa petite
amie est-il si nébuleux ?
Une histoire qui fonctionne
Dans le genre thriller psychologique, Une autre histoire sait mener son
lecteur. Efficace, avec peu de personnages, mais tous très réussis. Une
temporalité quelque peu bousculée à bon escient pour ajouter un peu de piment à
l’intrigue… J’ai passé un excellent moment de lecture.
Même si certains indices ont parfois été un peu trop évidents, c’est avec
plaisir que l’on suit le déroulé de cette histoire dans le Londres des oubliés.
Ici, c’est le choc des cultures pour Mags, habitué au meilleur à grâce à son
travail d’avocate de Vegas. Mais quand elle décide de vivre dans le logement
social de son frère durant le temps qu’il passera à l’hôpital, elle découvre la
réalité de la vie pour certains.
C’est donc à la fois un thriller psychologique et un roman social que l’on découvre
ici. Une facette de la vie londonienne des laissés pour compte, la difficulté à
trouver un travail, à affronter les fins de mois…
Le lieu qui abrite toutes ces âmes perdues est ainsi bien choisi :
c’est une église désacralisée qui devient le théâtre central de l’intrigue. Des
vitraux pour vitre, une magnifique clé de voute pour plafond, l’église
réaménagée pour les plus démunis est un magnifique symbole.
Alors si vous aimez les romans qui se lisent vite et dont vous avez envie
de connaître l’issue, celui-ci sera parfait ! Ce n’est pas le genre que
l’on relit, mais un passe un excellent moment de lecture, et c’est bien ce que
l’on cherche avant tout, non ?
« Tu ne sais pas lire. C’est dommage. Mais la grande personne qui te
lit ce livre sait lire. Il faut en profiter ».
Paru chez Didier Jeunesse en 2013, cet ouvrage se propose de faire découvrir la lecture aux enfants de façon totalement atypique et drôle ! Préparez-vous à découvrir La fabuleuse méthode du Professeur Tagada !
L’ouvrage est malicieusement écrit par Christophe Nicolos et illustré avec
talent par Guillaume Long. Ils ont déjà travaillé ensemble sur la série de bd Tétine
Man chez Didier Jeunesse.
Une méthode 100% efficace en neuf leçons
Attention, préparez vos mirettes et celles de vos enfants ébaubis à la
méthode du professeur Tagada qui dépoussière les leçons traditionnelles de
lecture…
Prêts ? C’est parti ! Sous couvert d’humour, cet album se propose
de faire faire leurs premiers pas en lecture aux enfants.
Et quand toutes les leçons seront terminées, les enfants pourront lire les
mots plénipotentiaire ou encore hexakosioihexekontahexaphobie. Ou pas. Mais au
moins sauront-ils lire des mots essentiels tels que pipi, caca, papa, mémé,
bobo et autres joyeusetés.
L’apprentissage par l’humour
Partons à la découverte de l’alphabet et de ses mystérieuses propriétés.
Les consonnes, les voyelles et comment les reconnaître. Ainsi, vous saurez
quelle voyelle est utilisée en fonction d’un simple rire ! Pour plus de clarté,
on vous laisse admirer les illustrations qui accompagne cette subtile leçon.
Et tout est expliqué comme cela dans l’ouvrage ! Toujours avec humour et originalité c’est l’ouvrage idéal pour découvrir à petits petons la lecture. Évidemment, ce n’est pas une méthode de lecture à utiliser sur le long terme, mais elle est parfaite pour les enfants qui sont demandeurs.
C’est parfait pour leur montrer que la lecture peut être fun, s’en
s’attarder sur la complexité de notre langue. A un moment, la cédille fait une
petite incursion dans le livre… autant vous dire qu’elle n’est pas bien
reçue !
Le but n’est pas d’embrouiller les enfants avec quantité d’infos,
uniquement de leur proposer d’apprendre les bases en s’amusant. Et en cela, cet
ouvrage est parfait… ! A découvrir dès l’âge de 5 ans environ. C’est un
véritable coup de cœur.