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Chronique : Et ta vie m’appartiendra

Une réécriture diaboliquement efficace de La peau de chagrin de Balzac version contemporaine. Un véritable coup de cœur qui donne envie de (re)lire l’oeuvre d’origine..

Dernier roman en date de l’auteur français Gaël Aymon, Et ta vie m’appartiendra vient tout juste de paraître en librairie le 19 mars dernier. Enfin, vous pourrez le trouver en librairie après le confinement !

Gaël Aymon a déjà écrit quantité de romans pour la jeunesse et les ados, parmi eux : Contes d’un autre genre (Talents Hauts), La planète des dormants (Nathan), ou encore Mon âme frère (Actes Sud Junior).

Je dois avouer que c’est la première fois que je lis un de ses romans, et que j’ai été assez séduite pour vouloir découvrir plus amplement son univers… explications.

Un héritage comme tombé du ciel… bénédiction ou infortune ?

Irina est une adolescente à qui la vit n’a jamais sourit. Elle a une mère extrêmement difficile à gérer qui se plonge dans de nombreux trafics louches et ne fait rien de sa vie… Pire, elle entraîne sa fille dans la dépression en maintenant un foyer anxiogène… C’est dans ces difficiles conditions que l’adolescente tente le concours qui pourrait l’amener à intégrer la prestigieuse école Sciences Po. Elle n’en a rien dit à sa mère, elle sait que cette dernière la découragerait…

Elle envie souvent sa meilleure amie Halima à qui tout semble réussir : une famille stable, aimante, qui donne les moyens d’avancer à leur fille…

C’est ainsi que Halima réussit le concours de Sciences Po et que Irina échoue, forcément. Mais la roue du destin va tourner pour Irina quand sa grand-mère, qu’elle a à peine connue, lui offre en héritage une mystérieuse peau dure et sèche. Le dernier vœu de sa grand-mère est qu’elle conserve l’étrange relique au coffre de la banque. Et que surtout, elle ne s’en serve JAMAIS. Car la peau a le pouvoir d’exaucer tous les souhaits… Irina n’ayant connu que le manque d’amour et la misère va bien sûr être tentée… et son premier souhait d’une longue série sera d’être riche. Riche à un point tel qu’il est impossible de dépenser autant en une seule vie… à moins qu’elle soit courte.

Un roman diaboliquement bien ficelé, mélangeant culture classique et époque contemporaine avec efficacité

Magistral. Addictif. Marquant. Philosophique aussi… Voici les quelques adjectifs dont ont peut affubler sans équivoque ce roman. Certes, il est destiné aux adolescents, mais il pourrait sans problème être lu avec plaisir par des adultes tant il est parfaitement pensé jusqu’à sa conclusion.

On est rapidement plongés dans une ambiance de polar où tout est soupçon. Car plus on possède, plus on a peur de perdre quelque chose… c’est ce que va découvrir Irina. Elle qui n’avait rien, elle a maintenant tout et plus encore… Tantôt très psychologique, parfois glissant sur le polar et même l’espionnage, chaque facette de ce roman fonctionne. Les personnages sont peu nombreux, mais travaillés avec efficacité, on s’y croit en très peu de pages…

Il est très malin de s’inspirer directement d’un classique de la littérature pour le transformer en un conte philosophique de notre époque. Et ça fonctionne diablement bien…

Très bonne idée, pourquoi cela ? Car c’est un beau prétexte pour s’intéresser à l’histoire de La peau de chagrin. Et c’est belle occasion pour découvrir un classique de façon ludique et détournée… car une fois commencé Et ta vie m’appartiendra, impossible de s’arrêter. Comme si la fameuse « peau » prenait également possession de vous… ça fait peur ? Attendez de voir les bonnes idées qu’a trouvé Gaël Aymon pour donner vie à son roman et à sa « peau ».

Extrait du texte de La peau de chagrin de Balzac.

Grâce à cette phrase emblématique du roman original, vous comprendrez mieux le titre de cette réécriture contemporaine. Alors, faut-il avoir lu La peau de chagrin pour en profiter pleinement ? Non. Justement, ce génial thriller philosophique et psychologique est un prétexte pour le découvrir.

Gageons qu’il fera des émules qui voudrons découvrir la « vraie » histoire de la peau de chagrin. Ce classique qui a tant marqué les esprit qu’une expression en a été tirée.

Ainsi, ce roman ado a tout pour lui : un suspense efficace, une histoire qui tient la route sur tous les aspects, une mise au goût du jour qui fonctionne à souhait (c’est le cas de le dire)…

Il ne vous reste plus qu’à découvrir cette merveille, elle vaut le détour !

Chronique bd : Les enfants d’Evernight – Tome 1 – De l’autre côté de la nuit

Les enfants d'Evernight 01Attention à ce que vos souhaits ne vous fasse basculer de l’autre côté de la nuit…

Les enfants d’Evernight est une nouvelle série publiée aux éditions Delcourt et destinée à un public âgé entre onze et quinze ans.

Marc Yang est le dessinateur de cet ouvrage pour le moins original et très esthétique graphiquement, il a fait la rencontre de la scénariste Andoryss, sur le site Café Salé, véritable lieu de rencontre pour les illustrateurs et graphistes en herbe de talent. Le scénario signé Andoryss est sa première publication. De son vrai nom Mélanie Chapon, elle est actuellement professeur de sciences de la vie et de la terre et écrit en parallèle, c’est également une très grande fan de bd franco-belge et de mangas.

De l’autre côté du miroir…

Camille est une jeune fille d’une douzaine d’années qui a perdu très tôt sa mère. Elle vit à Londres une enfance solitaire. Pour remédier à ce renfermement sur soi-même, le père de Camille décide de la mettre en pension… mais c’est sans compter sur les mystérieux événements qui surviennent la nuit.

Camille a rêvé si fort de ne jamais sortir de son rêve qu’elle a basculé de l’autre côté de la nuit, dans le monde d’Evernight où en principe aucun être humain n’est censé se rendre.

Un monde complexe au premier abord

La jeune Camille qui débarque dans ce nouveau monde doit très vite trouver un moyen de rejoindre la Terre sous peine d’être emmenée à l’orphelinat (apparemment redouté) du pays si elle est retrouvée par les forces de l’ordre, ce qui ne saurait tarder… mais Maximillien, marchand de sable de son état et un des seuls êtres humains à être autorisé à vivre à Evernight va aider Camille à fuir…

L’histoire n’est pas sans faire penser à Alice au pays des merveilles par certains aspects : basculement vers un autre monde, aspect physique de Camille assez similaire à l’héroïne de Lewis Caroll, petite référence dans les dialogues, cet écho léger mais visible est bien employé.

Soyons clair, ce premier tome ne nous apprendra que peu de choses sur le monde d’Evernight, son fonctionnement ou ses enjeux et fait vraiment office de « livre introductif » afin de poser les personnages et le début de l’intrigue. Ainsi, ne soyez pas surpris d’être quelque peu « dépassé » par l’histoire qui va bien plus vite que sa compréhension.

Le lecteur se retrouve plongé et aussi déstabilisé que son héroïne Camille : on débarque, on découvre tout un nouvel univers avec ses propres lois. Evernight est peuplé de personnages anthropomorphes, tigres, rats, et autres animaux sont dotés des mêmes capacités intellectuelles que les humains.

Les enfants d'Evernight 01 inside

Un graphisme onirique et esthétique

Les illustrations réalisées par Yang collent parfaitement au scénario d’Evernight : on entre dans un monde totalement surréaliste, rêveur, où les animaux marins nagent en plein ciel et où l’on peu marcher sur les nuages.

Certaines planches méritent que l’on se penche dessus avec beaucoup d’attention pour leur beauté et leur esthétisme, le jeu des couleurs assez vives est très bien rendu. Autre point fort, le dessin des personnages, en particulier de leur visages : quel que soit leur angle de vue, ils sont reconnaissables et réussis, ce qui n’est pas le cas dans toutes les bd, où selon l’angle on a affaire un personnage méconnaissable alors qu’il s’agit normalement du même.

Enfin, ce mélange graphique qui emprunte beaucoup d’éléments aux univers de la fantasy et du steampunk réunis est très réussit. C’est un vrai plaisir des yeux que d’avoir ce foisonnement de couleurs et de détails, même si quelques rares planches ont l’air légèrement trop chargées.

Pour conclure, même s’il est difficile de comprendre tous les enjeux de ce premier tome introductif, le début de la série est très prometteur, espérons que la suite soit au moins aussi enthousiasmante. L’aventure ne fait que commencer.

7/10

 

AUTEUR : ,
TRANCHE d´ÂGE :