Archives de l’auteur : Laura

Chronique : Toujours plus à l’Est

Un récit sur la Corée du Sud d’aujourd’hui vue à travers les yeux d’un français… drôle, fascinant et extrêmement instructif.

Paru aux éditions Picquier en 2016, Toujours plus à l’est est le troisième ouvrage du français Benjamin Pelletier.

Grâce à lui, on se sent un peu plus proche de ce pays qui semble si exotique et attrayant à nos yeux… et une fois terminé, on a qu’une seule envie : prendre un billet aller-simple pour la Corée !

Entre le roman et le récit de voyage

Notre ouvrage commence quand Benjamin Pelletier arrive à Séoul et emménage dans un petit appartement, dans le quartier de Malli-dong, qu’il présente comme ayant « Un air de bricole et de système D« . Tout semble s’assembler parfaitement, mais tout en étant fait de bric et de broc. Dans ce quartier ancien vivent principalement des personnes âgées, ou des jeunes avec peu de moyens. Cette partie de Séoul est à l’opposé du reste de la ville, tout en lignes droites et propres. La partie ancienne de la capitale est d’ailleurs amenée à disparaître, Séoul veut oublier son passé au plus vite… 

C’est ainsi que pendant un an, nous suivons Benjamin Pelletier dans ses découvertes de la culture coréenne… et elle n’a pas fini de nous surprendre !

Une société aussi curieuse que fascinante, entre modernité et croyances anciennes

Pour les amoureux de l’Asie, cet ouvrage pourrait bien devenir un indispensable à découvrir. On y apprend tant d’anecdotes et de faits intéressants qu’il est impossible de tous les lister, mais c’est captivant ! 

Baguettes en métal, dans la plus pure tradition coréenne.

Que ce soit à propos de l’éducation, de l’alphabet (très particulier), des croyances, des habitudes de vie, de la nourriture, TOUT est différent de chez nous, en France. Pas nécessairement pour le mieux, mais juste différent. Et c’est cela qui m’a plu avant tout dans cet ouvrage que l’on peux classer entre le récit et le roman (sans oublier une bonne dose d’humour). 

De plus, malgré une fuite en avant perpétuelle des coréens -très bien placés au niveau mondial quand il s’agit de nouvelles technologies ou d’e-sport, notamment à League of Legends ou à Starcraft – ces derniers se réfèrent encore énormément à des croyances ou habitudes anciennes. Je vous ai listé une partie des superstitions du pays citées par l’auteur, je les trouve aussi géniales qu’intéressantes !

  • Leurs baguettes sont en métal car par le passé, les familles royales avaient peur d’être empoisonnées. Le poison s’oxydant sur le métal, ce dernier devenait visible (notamment l’arsenic).
  • Le chiffre 4 est leur crainte, il signifie la mort car le chiffre et le mot « mort » en chinois ont la même prononciation.
  • Il ne faut jamais se couper les ongles la nuit pour ne pas attirer les souris, toujours promptes à prendre forme humaine pour voler les âmes.
  • On ne siffle pas la nuit ! Car ça peut réveiller les fantômes.
  • Il ne faut pas nettoyer l’appartement que l’on quitte pour faire croire aux esprits que l’on quitte les lieux. Ainsi, ils ne nous cherchent pas.
  • Il ne faut en aucun cas se laver les cheveux avant un examen, de risque de vider son cerveau de toutes les connaissances accumulées…

Et ce n’est qu’une toute petite partie de ce que j’ai listé grâce à l’ouvrage ! Je ne vous ai pas parlé du symbole qu’est l’hibiscus pour eux ou encore des traditions vis à vis des personnes âgées ou comment est l’éducation.

On en apprend également beaucoup sur comment mangent les coréens. Là-bas, il n’y a pas de hiérarchie de plats, tout est servi en même temps ! On mange ce que l’on veut quand on en a envie. Le riz est quant à lui servi dans un bol en métal muni d’un couvercle. D’ailleurs, si vous souhaitez découvrir l’expérience culinaire coréenne à Paris, il y a les restaurants Dochilak (ce qui veut littéralement dire plat à emporter en coréen) qui sont très fidèles à l’esprit. Et leur porc à la sauce piquante est à se damner… parfait avec un bol de riz noir. 

Dans un restaurant Dochilak, à Paris… un délice !

Vous l’aurez compris, Toujours plus à l’Est est un ouvrage fort instructif qui est parfait pour découvrir en douceur une nouvelle culture. Je vous le conseille fortement si vous projetez d’aller en Corée ou que ce pays vous intéresse, tout simplement. 

Pour aller plus loin : 

N’hésitez pas à aller voir la chaîne YouTube The Korean Dream, tenue par un franco-coréen qui vit à Séoul. Ses vidéos sont extrêmement intéressantes, et on en apprend énormément sur la vie quotidienne en Corée : louer un appartement, découvrir Séoul autrement, ou tout simplement s’initier au Hangeul, commander dans un restaurant, etc. C’est une excellente chaîne et elle mérite qu’on s’y attarde !

TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : Fraternidad

Une ode à la liberté, et à tous ces nobles sentiments des temps anciens : l’honnêteté, l’honneur, la loyauté et le courage face à l’adversité… En somme, un sublime roman de cape et d’épée qui se déroule… à notre époque !

Paru en librairie à la fin du mois d’août, Fraternidad est le dernier roman en date de Thibault Vermot. Il avait auparavant déjà été remarqué pour son roman Colorado Train, également chez Sarbacane dans la collection Exprim’.

Outre sa magnifique couverture à la fois graphique et ancrée entre deux esprits et époques : des silhouettes encapuchonnées à la Anonymous qui font penser à notre ère et d’autres, armées de rapières tolédanes qui font penser aux temps où un combat à l’épée était la norme face à tout affront, Fraternidad est un pavé. Un bon gros pavé de presque 700 pages. Et ça se lit tout seul. C’est même trop court…

Une adolescence difficile, où le bonheur est presque toujours absent

Ed Perry est un adolescent introverti, et pour cause, dès qu’il se fait légèrement remarquer par ses camarades, ces derniers le molestent. En particulier le trio mené par Cliff, qui ne rate jamais une occasion de lui casser la tronche, ou de le balancer dans les poubelles du lycée pour faire bonne mesure. Ed Perry est un looser. Du moins selon ses semblables. Mais il cache un secret, quelque chose de si génial qu’il tient bon toute la semaine pour ces deux heures de bonheur le vendredi. Il oublie tout : sa famille merdique, son lycée pourri, ses crétins de « camarades » et part deux courtes heures s’habiller de collants, d’une cape et d’une épée et va par monts et par vaux avec Fenton De La Mare, un cheval.

Oui, Ed Perry fait du cheval deux heures par semaines pour tenir le coup. Et il est persuadé que c’est le début de grandes choses. Que la noblesse d’esprit et la justice ne sont pas mortes, et qu’à son échelle il peut changer le monde… il ne le sait pas encore, mais c’est encore loin d’être le cas. Pour devenir un héros, il faut traverser quantité d’adversités et de dangers… et c’est ce qu’il va faire.

Mais regardez cette beauté !

Noblesse d’esprit, réseaux sociaux, amitié et humour noir mêlés

Ce bouquin est une véritable claque littéraire ! A peine débuté, impossible de s’arrêter tant on a jamais rien lu de pareil (je vous met au défi d’avoir déjà eu un livre comme ça entre les mains). C’est drôle et tragique à la fois, plein d’esprit, parfois fort cru (Ed est un adolescent, et rien de plus normal, il a aussi des fantasmes sexuels que l’on découvre au fil des pages…).

L’argument phare de ce livre, c’est que c’est un roman de cape et d’épées qui se déroule à notre époque. Le paysage suranné de l’Angleterre, dans le Devon du Sud, mélangé aux dangers des réseaux sociaux et de ses terribles travers fait mouche. Au début, on se demande forcément comment l’auteur va nous emmener dans son univers sans faire un embrouillamini peu digeste… mais c’est tout le contraire !

L’art du détail… au dos du livre.

Véritable réussite et tour de force, Fraternidad est un roman qui donne de l’espoir, qui fait rire même dans les heures les plus sombres… C’est une ode à tous ces romans tels que Les trois mousquetaires, ou encore Le bossu pour ne citer qu’eux. C’est écrit avec fougue, verve et… je ne vous ai pas encore parlé des chapitres entiers narrés en vers libre !

Je veux vous raconter une mésaventure

Qui m’advint tout à l’heure.

Trois faquins imbéciles

M’ayant cherché des poux comme j’étais en ville

Tracèrent leur chemin à ma suite en voiture.

Moi, j’allais chevauchant parmi landes et ruines,

L’épée au vent, l’étrier gaillard, et le nez

Taquiné doucement par la brise marine.

Mais de retour au camp, je restai bouche bée : […]

On aimerait une seule chose : rejoindre Ed pour partager ses rêves d’un monde meilleur dans la petite pièce secrète qu’il s’est aménagée et sentir les effluves d’un bon repas nourrissant flotter dans l’air…

Personnellement, j’ai donc adoré ce roman contemporain qui se joue des codes et en créé de nouveaux. A la fois terriblement actuel et résolument nostalgique d’une époque que l’on croit révolue… c’est sublime. Et l’atmosphère de fin du monde qui transpire parfois entre les pages de ce roman atypique ajoute à sa beauté… A lire dès 15 ans, pour le reste, il n’y a pas de limites !

Interview de Bertrand Campeis pour sa collection Dimension Uchronie chez Rivière Blanche

Connaissez-vous Dimension Uchronie ? Il s’agit d’un recueil de nouvelles dédiées à ce sous-genre si particulier et fascinant de la science-fiction. Je vous invite ainsi à découvrir la collection ainsi que celui qui a réunit des nouvelles de tous bords pour notre plus grand plaisir…

La bibliothèque de Glow : Pouvez-vous vous présenter aux lecteurs de la Bibliothèque de Glow ?

Bertrand Campeis : Bonjour les lectrices et les lecteurs de la Bibliothèque de Glow ! Je m’appelle Bertrand campeis, j’ai très prochainement l’âge qui est la réponse à la plus grande question de l’univers et je suis un grand amateur d’Uchronie : j’en lis, j’écris des articles dessus, je fais également partie du Prix actuSF de l’Uchronie et maintenant je dirige même des anthologies sur ce thème spécifique. Je suis un énorme acheteur de livres en tout genre, de films, de dessins animés et je loge chez mes deux chats (en échange je leur fournis un lit douillet et plein de croquettes). Pour pouvoir acheter tous les livres et Blu-Ray qui s’entassent dans ma batcave aux merveilles je suis devenu fonctionnaire (J’aurais voulu être Bruce Wayne mais la place est déjà prise, donc je me suis contenté de devenir un grand fan de Batman tout court). Voilà, ça, c’est pour commencer. 🙂

La bibliothèque de Glow : Pouvez-vous expliquer aux lecteurs en quelques phrases ce qu’est l’uchronie ?

Bertrand Campeis :L’uchronie est un mot inventé à partir du mot utopie ! L’utopie c’est un lieu imaginaire (en grec U = Non et Topos = Lieu). L’uchronie c’est une histoire imaginaire qui aurait pu avoir lieu (U = Non et Chronos = Temps). C’est jouer avec le temps en imaginant qu’en changeant un évènement, on crée une autre Histoire. Cela peut aller de la grande Histoire (la plus connue étant Et si les Nazis avaient gagné la Seconde Guerre mondiale) à l’histoire personnelle (la vôtre par exemple ! Et si vous aviez raté le train dans lequel vous avez rencontré votre future copine ? Réussit tel examen auquel vous avez échoué ?) Comme vous le voyez, c’est un jeu de l’esprit avec des combinaisons qui peuvent aller… Jusqu’à l’infini (et au-delà !) Vous avez certainement lu de l’uchronie (en livres, BDs ou même mangas) vu (en films ou dans une série TV) ou même joué (jeu de plateau ou jeu vidéo) sans forcément le savoir 🙂 Si cela vous intéresse, j’ai eu la chance de co-écrire avec Karine Gobled un Guide de l’Uchronie paru chez ActuSF (il a été réédité en 2018 sous une forme réactualisée dans la collection Hélios) qui permet de (re)découvrir l’uchronie.

La bibliothèque de Glow : Comment avez-vous sélectionné les nouvelles de Dimension Uchronie ?

Bertrand Campeis :J’ai fait un appel à textes afin de faire une anthologie baptisée Dimension Uchronie et au final j’ai eu suffisamment de nouvelles pour me dire que je pouvais envisager de faire non pas une mais trois anthologies. Dès le départ, j’ai eu la chance d’être entouré d’ami.e.s qui m’ont donné plus qu’un sacré coup de main : Hermine m’a plus qu’aidé en relisant les nouvelles avec moi et aidée dans la phase de correction avec les autrices et auteurs. Avec son compagnon, Erwan, ils ont traduits les nouvelles étrangères que j’ai acheté au coup par coup. Je dois également beaucoup à Laurence, à Marie Marquez pour leur aide lors des phases de relecture /  correction sur les Bon à Tirer. L’autre personne à qui je dois énormément c’est Tiffanie Uldry, qui m’a fait de superbes couvertures. Et Last but not least Philippe Ward et Jean-Marc Lofficier ont été patients, calmes et m’ont pas mal expliqués comment il fallait bosser. Ces anthologies c’est une première pour moi : j’ai tâtonné, expérimenté, revu souvent ma copie et au final, j’ai eu l’impression de progresser par à coup, grâce aux autrices, aux auteurs, aux personnes qui ont lu l’anthologie et l’ont critiqué (en l’ayant aimé ou pas trop : on est là avant tout pour apprendre de ces erreurs et progresser). Ces anthologies, pour moi c’est avant tout un travail d’équipe, des rencontres, des discussions. Sans l’aide de tout le monde, les anthologies n’auraient pas pu sortir de manière aussi rapprochée (la première est sortie fin 2018 pour le salon de Sèvres, et les deux suivantes pour 2019, l’une pour début juin, l’autre pour Sèvres). Ce fût une expérience gratifiante, exaltante même mais qui nous a laissé sur les rotules (à l’heure où j’écris Dimension Uchronie 2 est bouclé et nous travaillons, Hermine et moi, sur le bouclage du dernier volume).

La bibliothèque de Glow : Les textes sont-ils inédits où ont-ils déjà vu le jour auparavant ?

Bertrand Campeis : Certains textes sont déjà parus ailleurs mais ont été retravaillées pour paraître chez nous. Les trois-quarts sont inédits. Dès le début nous avons fait un mix : rencontre avec des autrices et des auteurs que nous aimions énormément et textes provenant de l’appel à texte. Après un DU 1 comprenant 15 nouvelles, nous sommes partis sur 20 nouvelles pour DU2 et allons maintenir ce chiffre pour DU3 mais avec pas moins de 3 nouvelles étrangères (2 américaines et 1 japonaise si tout va bien). Le but est de se faire plaisir et de montrer la diversité de l’uchronie. Pour celle-ci est un jeu de l’esprit ce qui implique un aspect divertissant. J’adore les uchronies extrêmement intelligentes et nous permettant de réfléchir à notre société, de nous interroger sur notre façon de voir les choses et à côté de cela j’adore des uchronies orientées sur l’action, le divertissement pur. L’important ce n’est pas tant le message (ou l’absence de celui-ci) mais ce que l’on ressent devant une histoire.

La bibliothèque de Glow : Vous proposez également des nouvelles étrangères – comment les avez-vous sélectionnées et acquises ?

Bertrand Campeis : La première nouvelle, Alerte rouge, je l’avais découverte grâce à Eric Henriet, il en parlait dans son essai L’histoire revisitée ou panorama de l’uchronie sous toutes ses formes. Eric étant un ami, il a eu la gentillesse de me faire lire cette nouvelle. ensuite c’est assez Rock N’ Roll, j’ai découvert que l’auteur, Jerry Oltion, tenait un blog et je l’ai contacté, grâce à Hermine Hémon et Erwan Devos, afin de lui proposer d’acheter cette nouvelle. Il a accepté sans problème et voilà !

A partir de là je me suis dit que rajouter des nouvelles étrangère serait un sacré bonus dans les 3 anthologies : j’ai donc contacté Marie Robinette Kowal pour sa nouvelle The lady astronaut of Mars. Là ce la a été beaucoup plus long vu que je suis passé par son cabinet américain, qui m’a envoyé vers une agence française qui gérait ses droits à l’étranger. Cela a été très long (plus de 6 mois dans mes souvenirs) mais nous avons eu la primeur de cette nouvelle (pour la petite histoire l’intégralité du cycle a été achetée par Denoël lunes d’encre et devrait sortir chez nous à l’horizon 2020). Pour la nouvelle d’Aliette de Bodard, je lui ai tout simplement demandé à Sèvres en 2018 si elle avait une nouvelle uchronique à me proposer, elle m’en a envoyé une et Hermine et Erwan ont travaillé d’arrache-pied pour qu’elle sorte dans DU2. La dernière a également été un heureux hasard : Bondye Bon a été signalé par le site Uchronia The Alternate History List qui recense à peu près tout ce qui sort en langue anglaise (c’est d’autant plus méritoire et impressionnant qu’il est géré par une seule personne, Robert Schmunk). Le pitch m’a plu (une révolte d’esclaves américains qui a été sévèrement réprimandé, et c’est un euphémisme, dans les années 1830 réussit dans cette uchronie grâce au… Vaudou ! C’est tout de suite plus pratique quand vous avez une armée de morts pour vous en prendre à vos anciens maîtres…) et là aussi, j’ai négocié directement avec l’autrice. Quand je regarde cela rétrospectivement je me dis que j’ai eu beaucoup de chance ! Et qu’heureusement qu’Hermine et Erwan étaient là pour m’aider à parler avec tout le monde en english fuently.

 La bibliothèque de Glow : J’ai entendu dire qu’un second tome et un déjà un troisième étaient en préparation, pouvez-vous nous en dire plus ?

Bertrand Campeis : Un deuxième tome… (ndlr : déjà paru en librairie). Puis un troisième et dernier ! Au final on devrait atteindre 50 nouvelles uchroniques en tout. Le deuxième comporte 20 nouvelles jouant sur énormément de thèmes, que ce soit l’antiquité, le féminisme, le colonialisme, ou une autre façon de penser avec la nouvelle d’Aliette de Bodard. L’important c’est cela, découvrir à chaque fois des thèmes peu traités, ou connus mais traités différemment (celle de Sylwen Norden m’a pas mal marqué) j’ai adoré le texte que m’a proposé Jérôme Akkouche qui joue sur un thème peu traité (le steampunk et le monde de l’art). Jean Rébillat nous a fait une très chouette nouvelle imaginant une Angleterre toujours rattachée à la France par ce qui reste du Doggerland (bras de terre qui reliait l’Angleterre au continent et qui a été englouti dans notre réalité). Celle de Cédric Legentil m’a pas mal marqué car il a très bien cerné la mentalité japonaise (il imagine l’envoi d’un corps expéditionnaire japonais qui combat aux côtés de l’allié français lors de la Première Guerre mondiale, et sa vision est très juste et terrifiante). Il y a de l’humour, que ce soit avec la nouvelle de Gillen où l’Ecosse est devenue indépendante mais n’a plus de whisky ! Pascal Roussel nous régale avec un héros bondissant et très drôle qui libère la France d’une occupation extraterrestre qui a empêché la Révolution Française en 1789… Vu que le steampunk apparaît pas mal, j’ai demandé à Etienne Barrilier de faire une préface pour expliciter celui-ci (Merci à lui). Enfin j’ai eu une chouette nouvelle, jouant sur la thématique du temps, qui est utilisée comme une drogue, par Amélie Bousquet. Elle sortait un peu des sentier battus (je n’ai pas souvent eu l’occasion de lire des nouvelles où on se fait des shoots temporels, en dehors de Chronoreg, roman québécois de Daniel Sernine, donc je l’ai accepté avec plaisir).

Pour la couverture, nous avons décidé de jouer sur un autre possible avec Tiffanie Uldry : Et si le Japon était devenue une république plutôt qu’un empire ? Étant tombé par hasard sur un superbe portrait de Nakano Takeko, j’ai demandé à Tiffanie de me la représenter en Liberté guidant les troupes républicaines vers la victoire lors de la guerre civile de 1868 (qui, dans notre réalité, a vu une éphémère république indépendante d’Ezo exister sur l’île d’Hokkaido. Ici elle persiste et l’emporte). Le but avec cette couverture est de présenter d’autres alternatives, en montrant des femmes qui font l’Histoire, car on les occulte (ou plutôt les invisibilise) trop. et puis cela permettait de sortir de l’image cliché Japon impérial  ^^. La dernière couverture devrait pas mal plaire aussi, cette fois-ci nous découvrirons une autre Amérique.

Vous reprendrez bien un peu d’uchronie ? Au moment où vous lirez ces lignes Hermine Hémon et Bertrand Campeis seront en train de boucler Dimension Uchronie 3 ! Qu’avons-nous gardé pour la fin ? L’espace ! ^^ Partez et découvrez quinze nouvelles uchroniques (dont deux américaines, traduites par Hermine Hémon et Erwan Devos) qui seront vous montrer des réalités effroyables, bouleversantes et bel et bien différentes. Accrochez-vous, là où nous allons, il n’y a plus de routes ! Sortie pour le Salon de Sèvres.

Je rêvais de mettre à disposition du public des anthologies Mammouth : je suis en passe de réussir mon pari. Tout cela je le dois à Philippe Ward et Jean-Marc Lofficier, qui m’ont accueilli et aidé à bras ouverts (et expliqué comment il fallait bosser : j’ai véritablement découvert ce que c’était que l’édition en parlant avec eux. Et dans mon cas je me considère encore et toujours comme un amateur, je fais cela sur mon temps libre et je bénéficie du soutien d’ami.e.s sans qui tout n’avancerait pas aussi vite voire aussi bien). Merci à Hermine, à Marie, à celles et ceux qui ont écrit, qui ont lu ou critiqué l’anthologie. Et j’espère qu’avec cette deuxième anthologie, puis la troisième et dernière, cela permettra de découvrir à quel point l’uchronie permet de se faire plaisir, de vous faire plaisir, et d’apporter en sus d’un bon moment de lecture, un début de réflexion sur d’autres possibles.

Actualité éditoriale : La Faucheuse tome 3 arrive !

Après plus d’un an et demi d’attente, le voilà : le troisième et ultime tome de la saga La Faucheuse par Neal Shusterman arrive en France…

Il a fallut être patient, et le voici enfin qui arrive en librairie le 28 novembre 2019 sous le titre Le glas (toujours dans la collection R). Et c’est un exploit car nous sommes très proches de la date de sortie US ! En attendant la date fatidique où nous saurons enfin TOUT, voici la couverture de l’ouvrage.

Chronique jeunesse : Hôtel Heartwood – tome 2 – Un hiver si doux

Un second volet aussi tendre et adorable que le précédent…

Hôtel Heartwood est une série pour la jeunesse en quatre tomes parue chez Casterman. Le second tome est paru en France en février, durant la période la plus froide de l’hiver… Mais cette douce histoire vous réchauffera, c’est certain !

Une nouvelle saison à l’Hôtel pour Mona et ses collègues/amis

L’hiver approche, et avec lui les approvisionnements à gérer avant l’hibernation de quantité de clients. Les chambres sont prêtes : ni trop chaudes, ni trop froides afin que les pensionnaires dorment jusqu’au printemps, les stocks sont parés pour leur réveil (ils auront très faim en se levant de leur long sommeil) et l’équipe de l’Hôtel Heartwood a mérité de lever un peu le pied… Sauf que, évidemment, il va se passer pas mal de choses qui vont les empêcher de souffler. Des disparitions mystérieuses, des travaux d’aménagement pour accueillir au mieux les insectes et… l’arrivée d’une duchesse lapine !
Et ce n’est que le début pour la petite équipe de l’hôtel…

Toujours aussi chouette et plaisant

C’est une réussite que ce second tome ! On retrouve avec plaisir ce qui m’avait tellement plu dans le premier opus sans tomber dans la répétition. De nouveaux personnages arrivent, on apprend à mieux connaître les anciens ainsi que leur passé… notamment celui de Tilly l’écureuil. Les petits mystères qui parsèment la saison hivernale sont bien amenés, avec juste ce qu’il faut de suspense. Tout est parfaitement dosé, maîtrisé, on ne peux que passer un excellent moment de lecture.

Et comme précédemment, les illustrations sont magnifiques ! Toujours en noir et blanc, les crayonnés de Stephanie Gregin sont magnifiques, détaillés, précieux.

C’est un bel hommage au genre souvent boudé qu’est la fantasy animalière et donne envie de lire d’autres ouvrages dans le même genre… Hôtel Heartwood donne furieusement envie de (re)lire Le vent dans les saules… Tout est bon pour ne pas quitter cette ambiance feutrée et douce à nulle autre pareille !

Info fun : Vous pouvez aller sur le site officiel de l’Hôtel et réserver une chambre ! http://heartwoodhotel.com/rooms.html
Il vous suffit de dire à quelle date vous souhaitez réserver, préciser votre espèce (taupe, oiseau, ours, humain…) et d’envoyer un mail à info@heartwoodhotel.com . Selon votre espèce, vous ne pourrez peut-être pas réserver, j’ai essayé pour les ours, mais ce n’était pas possible car trop gros. Quant aux humains, ils ne peuvent pas réserver à l’Hôtel Heartwood… mais si vous êtes un raton-laveur ou un porc-épic, pas de problème !

L’entrée d’une des chambres de l’hôtel… on rêve d’y entrer… ça a l’air si confortable et cocooning !

Chronique : Quatre filles et quatre garçons

Un roman qui dépeint avec talent et réalisme les difficultés de l’adolescence… Pour en ressortir grandit !

Florence Hinckel est une autrice française à qui l’on doit de très nombreuses œuvres à destination de la jeunesse et des ados : U4 – Yannis, Le chat pitre, Le grand saut, Nos éclats de miroir… Elle est très prolifique et sort très régulièrement un nouvel ouvrage.

Avec Quatre filles et quatre garçons, elle a réussit à s’installer durablement dans le paysage éditorial, car son ouvrage est devenu un titre de fonds aussi bien pour les librairies que pour les bibliothèques.

Huit ados très différents aux problématiques qui le dont tout autant

Ils se prénomment Benoît, Sarah, Dorian, Mehdi, Justine, Clotilde, Joséphine ou Corentin. Ils sont inséparables depuis de longues années, ont partagé tant de moment complices qu’ils lisent dans les pensées de l’autre sans problème…

Sauf que. Ils ont 15 ans, l’adolescence arrive, les questionnements également. Les interrogations, la peur, les doutes, les premiers émois, la rébellion vis à vis des parents pour certains…

Au travers de cette année si particulière pour chacun.e, ils décident d’écrire un journal. Chacun.e choisira la forme qu’il/elle souhaite, ils peuvent s’enregistrer, se filmer, écrire, peu importe ! Ce qui compte, c’est qu’ils partagent un moment clé de leur vie au travers de confessions qu’ils relirons peut-être, une fois qu’ils auront atteint l’âge adulte…

Un roman aux allures de recueil de nouvelles liées fortement entre elles pour former un grand tout

Il est difficile de faire une chronique globale de cet ouvrage, j’ai ainsi décidé de vous le présenter personnage par personnage. Les histoires ne sont pas toutes égales en qualité, et c’est justement plus intéressant d’en parler en utilisant cet axe.

Joséphine : Elle s’interroge énormément sur les autres. Se demande qui est cette mystérieuse fille qu’elle croise souvent à l’abribus. Lui créé une vie dans sa tête tout en se demandant ce qu’il en est réellement.

Une bonne nouvelle dans sa vie ? Ses seins ont doublé de volume en l’espace d’une nuit ! (ou presque). C’est l’occasion pour elle de s’interroger sur ce qu’est l’amour, et comment on embrasse, d’ailleurs ?

Mais elle a également peur d’une chose : que ses parents se séparent à nouveau… Et ça la mine.

Autre chose… elle sait plein de choses, mais ne s’en vente pas. A peur de passer pour une intello auprès des autres, y compris de ses amis proches…

Son histoire est intéressante, mais comme c’est la première narratrice, ont la voit encore évoluer au fil des autres histoires.

Benoît : Un peu « fort », son surnom, c’est BN à cause d’une histoire un peu folle. Quand il était plus petit, il s’est perdu en montagne pendant plusieurs heures (presque une journée) et a survécu en mangeant la seule chose qui lui restait : des BN.

Ses deux parents sont profs dans le collège qu’il fréquente, ce qui n’est pas toujours facile à accepter (ni à faire accepter aux autres…).

Il a réussit ont ne sait trop comment à se faire foudroyer durant la période où il devait tenir son journal ! Et ça l’a rendu cool aux yeux de ses autres camarades.

Benoît s’interroge beaucoup sur l’image qu’il a des filles, comment il les perçoit, et si ce qu’il pense est juste, ou non. C’est en tout cas au final un garçon aussi gentil que respectueux de son prochain.

Sarah : C’est LA fille canon du groupe. Elle est belle, et elle le sait… ce qui lui porte fortement préjudice car elle a une idée (trop) haute d’elle-même en ce qui concerne son physique, elle trouve ainsi qu’aucun garçon n’est assez bien pour elle. Cependant, elle ne se trouve douée en rien et mise tout sur son physique pour avancer dans la vie. Elle ne rêve que d’une chose : devenir mannequin professionnelle.

Du côté de ses parents, ce sont des gens modestes. Son père tient de façon obsessionnelle un journal qui contient tous les chiffres sortis au Loto, tous les jours, depuis des années.

Depuis quelque temps, Sarah veut tellement atteindre son objectif de devenir mannequin qu’elle commence à se sous-alimenter afin d’atteindre les standards de beautés imposés… jusqu’à y laisser sa santé en devenant peu à peu anorexique. Et cela s’exacerbe quand elle est repérée par une agence de mannequinat très prestigieuse.

Dorian : C’est un ado assez effacé, il ne dit rien, même quand les événements deviennent graves. Il y a quelques années, dans un autre établissement, il était le bouc émissaire d’un autre garçon de son âge. Cela l’a beaucoup traumatisé et placé dans une situation de victime dont il n’est jamais vraiment sorti. Le nom de ce garçon qui le harcelait ? Bastoche. Mais le hasard remet l’ancien bourreau de Dorian sur sa route, et les ennuis reprennent. Harcèlement, cruauté, lynchage, Bastoche resserre son emprise malsaine sur Dorian et le coupe peu à peu de ses amis… 

Mehdi : On suit le long cheminement du jeune homme à réaliser – et assumer – qu’il est gay. Pas facile pour lui quand on voit le comportement de certains, ou ne serait-ce que leur façon de parler… La situation est une véritable torture pour lui. Il est encore plus effacé que Dorian, c’est dire. Mais peu à peu, la solution va venir à lui… Il est d’une gentillesse extrême et va même devenir un très bon ami de la jeune fille mystérieuse du bus : Solène.

Justine : Avec Justine, on assiste à un changement radical de personnalité par amour. Elle qui est si gentille, ponctuelle, parfois même un peu fade, elle va se rebeller contre tous pour ressembler au garçon à qui elle veut plaire. Elle l’a rencontré lors de son stage en librairie, il est gothique, et Justine va tout faire pour l’attirer à elle. Sa mère est une autrice célèbre qui écrit de nombreux romans à l’eau de rose (mais elle n’assume pas et écrit sous pseudonyme…), et Justine déteste ces romans, qu’elle juge mettre systématiquement les femmes en position de victimes…

Clotilde : Elle est belle, métisse et orpheline de mère (qui a été tuée par son ex à cause d’une chute dans les escaliers). Elle vit donc seule avec son père. Elle est gentille, d’une douceur extrême, mais elle possède cependant de fortes convictions féministes !

Joséphine : Elle est un peu l’archétype de l’adolescente qui s’interroge sur tout ce qui l’entoure, mais également sur son corps qui change. Ce n’est pas le personnage qui m’a le plus marqué car elle manque quelque peu de profondeur selon moi…

Corentin : On peut le qualifier de beau-gosse du groupe… Et il s’est mis à la musique avec un groupe nommé Les bêtes sauvages, et très vite, ils rencontrent un sacré succès… Mais cela ne va-t-il pas leur faire tourner la tête ? Corentin reconnaîtra-t-il ses amis ou leur tournera-t-il le dos pour les paillettes et les projecteurs ?

En somme, ce roman pour ado est très complet et intéressant. Il propose une représentation juste et variée de quantité d’adolscent.e.s de notre époque, même si parfois le trait est un peu forcé. Il y a bien quelques longueurs (normal sur un roman qui fait 750 pages !) mais la lecture reste agréable car partitionnée par personnage. Parfait pour rassurer et se découvrir quand on a 15 ans, en plus l’ouvrage est sorti en poche il y a peu…

Chronique : L’Enchanteur

Un roman ado des plus prometteurs qui ne m’a finalement pas séduite comme je l’espérais…

Dans le microcosme qu’est le monde de l’édition, Stephen Carrière est un auteur, mais également un éditeur. Vous connaissez probablement les éditions Anne-Carrière ? Et bien c’est lui qui s’occupe !

Mais outre la casquette d’éditeur, de traducteur et de découvreur de talents, Stephen Carrière est également auteur, la preuve en est avec L’Enchanteur, paru en début d’année 2019 aux éditions Pocket Jeunesse. Il avait par ailleurs écrit des romans il y a une dizaine d’année aux éditions Albin Michel.

Un faiseur de miracles au quotidien

Stan est un génie discret. Il est magistralement doué pour imbriquer les problèmes entre eux et les transformer en solution tout en préservant l’ordre établi. C’est ainsi qu’il est populaire mais très modeste, toujours là, sur son banc, quand on a besoin de lui. C’est ainsi qu’un groupe d’amis restreint mais incassable s’est forgé autour de lui… Parmi eux, Daniel, malade et dont les problèmes ne vont aller qu’en grandissant, car le cancer ne lui laisse aucun répit et il n’y a qu’une seule fin possible pour lui… Mais Stan a un projet fou pour que Daniel ait une fin mémorable pour la ville entière, y compris ceux qui ne le connaissaient pas. Tout cela sous le signe d’une des plus grandes œuvres de Shakespeare : Le songe d’une nuit d’été.

En parallèle à cette amitié que rien ne peux juguler, la ville semble changer depuis quelque temps. Les ruelles s’assombrissent, les rumeurs disent qu’un danger se prépare, que rien ne sera plus comme avant… et c’est vrai.

Un roman (trop) foisonnant

L’idée de base de L’Enchanteur a selon moi tout pour plaire, cependant on y perd pied rapidement. Beaucoup de personnages (j’ai eu du mal à dissocier chaque personnage du groupe d’amis notamment), parfois trop semblables, et surtout un trop-plein d’informations. J’ai toutefois découvert ce qu’était un égrégore (fascinant !) ou encore un trickster (ou farceur en français) dans une narration : Peeves dans Harry Potter, Loki dans les légendes nordiques ou encore Puck dans Le songe d’une nuit d’été).

Je ne suis jamais contre le fait d’apprendre de nouvelles choses, mais parfois c’est inséré de façon un peu trop dense et indigeste. Ici, on voit très bien que l’intrigue est ficelée au millimètre : tout a été pensé dans le moindre détail. Cette toile est longue à tisser, le travail scénaristique derrière est énorme, mais le final censé être la clé de voute de cette histoire, n’est pour moi pas à la hauteur.

Je ne sais pas ce qu’il manque pour faire de L’Enchanteur un bon roman, mais ça ne prend pas du tout pour moi. J’ai même eu une panne de lecture tellement c’était laborieux pour moi de le finir… En définitive, j’ai trouvé les ennemis du groupe de L’Enchanteur plus intéressants et plus vivants que les héros que l’on suit pendant plus de 400 pages.

Je pense que L’Enchanteur est un roman qui m’est passé totalement à côté, comme cela arrive parfois. Cependant, je ne doute pas qu’il trouvera son public car son idée est original même si la mise en œuvre est assez ardue… A découvrir dès l’âge de 15 ans.

Chronique jeunesse : Hôtel Heartwood – tome 1 – Une maison pour Mona

Un roman jeunesse empli de mignonitude et d’aventures… un régal !

Hôtel Heartwood est une série en quatre tomes destinée à la jeunesse. Le premier est paru en octobre 2018 aux éditions Casterman. Désormais, elle est entièrement traduite et disponible en librairie. L’histoire est signée Kallie George et les illustrations tendres sont de la main de Stephanie Graegin.

Une petite souris en errance…

Mona est une souris orpheline qui vit dans la forêt : elle a tout perdu suite à une inondation, sa petite maison, ses maigres affaires… il ne lui reste plus rien hormis sa valise en coque de noix ornée d’un cœur gravé. C’est ainsi qu’elle cherche un abri qui pourrait devenir sa nouvelle maison… et elle tombe sur le magnifique (et caché) Hôtel Heartwood ! Et c’est tout un monde de joie et de douceur qui s’ouvre à elle, dommage qu’elle ne puisse y rester que pendant l’automne, à la saison pleine, l’hôtel n’a pas besoin de mains supplémentaires en hiver… ce n’est donc que du temporaire pour la malheureuse souris… mais c’est déjà ça !

De la tendresse et de la bienveillance en quantité

Lire Hôtel Heartwood, c’est un peu comme de se couvrir d’un plaid tout doux, s’installer confortablement dans son fauteuil préférée et savourer une délicieuse boisson chaude… C’est doux, apaisant… on est dans une petite bulle de plaisir ! Je ne puis que vous conseiller ce merveilleux début de saga pour les enfants. On y trouve à la fois de l’aventure, de l’humour, un peu de suspense, et beaucoup de beaux sentiments (sans tomber dans le niais, ce qui n’était pas facile !).

Mona, l’héroïne de la série.

Il se peut que vous détestiez Tilly, la petite écureuil, mais le temps passant, vous réussirez certainement à l’apprécier malgré les apparences, qui sont contre elle… Pour les autres personnages, ils ont tous un petit quelque chose qui vous fera les aimer : Mr Heartwood et sa manie de parler tout le temps en rimes, Mme Prickles la cuisinière avec ses fameux palets aux graines exquis, le pic qui donne l’alerte en cas de danger, Ted l’ours (jeu de mot en VO avec Teddy Bear, ourson en peluche)…

On a une seule envie en refermant le premier tome des aventures de Mona à l’Hôtel Heartwood, c’est d’y retourner ! Et quelle chance, c’est possible puisqu’il y a encore trois autres tomes à découvrir… Le second se déroule pendant l’hiver (à la Saint Édredon) et s’intitule Un hiver si doux.

Chronique : Tuff

Comment s’en sortir quand on ne connaît que les difficultés et la violence de la rue à New York ? Voici l’histoire de Tuffy un roman atypique écrit avec verve !

Paru initialement aux éditions Cambourakis, Tuff est sorti en poche chez 10/18 en juin 2019. L’occasion pour moi de découvrir un auteur à part dans le vaste univers de la littérature américaine : Paul Beatty. Il a notamment écrit Slumberland, American Prophet ou encore Moi contre les Etats-Unis d’Amérique. Il est également poète en plus d’écrivain, et a même été couronné champion de slam.

Que faire quand on vient de survivre par inadvertance à une fusillade ?

Tuff est un afro-américain que tout le monde respecte dans le quartier. Il est obèse, n’a pas sa langue dans sa poche, et vit de menus trafics. Sa carrure imposante l’oblige à faire des boulots de videurs ou d’homme de main pour des revendeurs de drogues… C’est donc ce qu’il fait, car il a une femme et un bébé à nourrir et qu’il faut bien faire quelque chose. Mais malgré son physique qui impose le respect, Tuffy a une peur bleue des flingues. Alors, quand des types viennent régler leur comptes à son patron, il s’évanouit de peur… et devient le seul et unique survivant de ce carnage…

La boisson préférée de Tuffy.

Prise de conscience ? Oui, mais à la façon Tuff. Pour lui, les trafics foireux c’est fini, il veut trouver un travail moins dangereux, et ou il pourrait gagner assez pour subvenir aux besoins de ses proches… Mais il est difficile de s’extirper de tout ce merdier quand on a toujours connu que la rue, la violence, les parents négligents et maltraitants… Mais Tuff a un projet qu’il compte mener à bien…

Un portrait social dépeint avec réalisme et vivacité

Impossible de s’ennuyer en découvrant peu à peu ce qui constitue l’entourage et l’histoire de Tuff. Un père ex-Black-Panther, une mère totalement déconnectée de son rôle, des mauvais souvenirs qui remontent parfois… Tuff n’a pas grandit dans l’amour, et pourtant à sa façon il se construit un nid d’amour avec sa copine (avec qui il s’est marié par téléphone lorsqu’il était en prison) et son bébé. Mais les habitudes ont la vie dure, et il va falloir à Tuff beaucoup d’aide pour qu’il croie ne serait-ce qu’en lui-même.

A la fin de ce roman, nous n’aurons pas toutes les réponses quant à l’évolution possible de Tuff, personnage haut en couleurs. Mais ce n’est pas le plus important. On le voit peu à peu changer, prendre ses responsabilités – parfois – et faire encore des conneries – souvent.

  » « C’est ton fils ? Comme il est mignon, je peux le prendre ? » Winston lui tourna le dos et éloigna la poussette. « Impossible. Aucun Blanc l’a touché. Et si c’était le cas, je serais obligé de le buter comme une maman lapin quand un humain touche ses gosses. »  « 

Souvent drôle et cynique, ce roman est assez inclassable, mais il a réussit à me séduire. J’avoue avoir eu du mal au début à comprendre où j’étais et quels étaient les enjeux de l’histoire – la narration de Paul beatty étant assez dense – mais une fois dedans, c’est un régal !

Alors, si vous aimez New York et ses petites frappes, vous pourrez aimer Tuff. Drôle, agaçant, surprenant, vulgaire et réussit tout à la fois.

LIEN : Le site officiel de l’éditeur pour découvrir les autres ouvrages de Paul Beatty.

AUTEUR :
EDITEUR :
TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : DIX

Une réécriture à la sauce contemporaine du fameux roman Les dix petits nègres d’Agatha Christie… et ça le remet bien au goût du jour !

On connait déjà Marine Carteron grâce à son entrée remarquée ans la littérature ado avec la trilogie Les Autodafeurs (Rouergue). Depuis, elle a fait son chemin et a sorti d’autres livres comme la série Génération K (Rouergue) ou encore L’attaque des cubes.

Dix est paru en mars 2019 aux éditions du Rouergue, dans la très bonne collection ado Epik. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette réécriture dépoussière bien l’original dont elle est inspirée…

Une télé-réalité mettant en scène des lycéens dans un décor de rêve…

Une villa grand luxe au large d’une île isolée. Ils sont dix. Trois adolescents accompagnés de trois adultes… et aucun n’est blanc comme neige… Et ce qu’ils ne savent pas encore, c’est qu’ils vont payer chacun leur tour pour le crime…

Un roman noir à dévorer

Que l’on soit un adolescent ou un adulte, on lira avec le même plaisir Dix. Plus qu’un roman issu des Dix Petit Nègres, c’est un nouveau souffle que Marine Carteron offre au roman le plus connu d’Agatha Christie. Et là où la cohérence manque parfois dans le roman d’origine (on ne peux pas user de déduction !), ici l’autrice nous sèmes de légers indices quant à la personne derrière cette terrible machination. Mais bien malin qui saura deviner quelle est la personne à l’origine de ce terrible jeu télévisé…

Le mieux pour savourer ce roman, c’est de commencer par Les dix petits nègres. Pour moi, ça donne vraiment corps au travail monumental qu’a réalisé l’autrice pour s’approprier ce classique. Et elle a réussi à faire un sans faute. Les phrases sont courtes, d’une efficacité rare, parfois même âpres ou saignantes… Il y a notamment une phrase marquante dans ce roman qui donne le ton entier du texte :

 » Elle tomba. Sans élégance. Comme la merde qu’elle était « .

C’est brutal et subtil à la fois, étrange mélange me direz-vous… Est-il seulement possible ? Et bien oui, puisqu’elle l’a fait !

Dix est donc un futur classique de la littérature ado. Il est à mettre juste à côté du roman d’Agatha Christie et c’est un véritable régal de lire les deux ouvrages à la suite. Je suis maintenant fortement tentée pour lire l’ouvrage de Pierre Bayard intitulé La vérité sur les Dix petits nègres aux éditions de Minuit…