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Chronique : Division Avenue

Chronique d’un roman que je n’ai pas totalement compris ni su apprécier…

Division avenue est un roman de l’autrice d’origine australienne Goldie Goldbloom. L’ouvrage est paru en début d’année 2021 aux éditions Christian Bourgois. Un autre de ses ouvrages est déjà paru chez nous, disponible en 10/18 : Gin et les italiens.

Dans Division Avenue, on découvre le fonctionnement d’une famille juive orthodoxe traditionnelle. Passionnant, mais vous avez intérêt à déjà avoir des bases sur la culture juive, sinon il y a un risque d’être largué… (comme moi).

Mariée, dix enfants, cinquante-sept ans… et enceinte.

Surie Eckstein est une bonne mère juive, le couple qu’elle forme avec son mari depuis de nombreuses décennies est parfait. Tout semble aller pour le mieux à Division Avenue. Sauf que Surie vient d’apprendre une nouvelle bouleversante : elle est à nouveau enceinte. Impossible pour elle de l’annoncer à qui que ce soit, y compris son mari. A son âge, elle pensait dorloter ses petits enfants et ne pas avoir à se balader en poussette avec son propre nourrisson…


Comment encaisser cette nouvelle pour elle ? Comment en parler à ses proches ? Comment gérer l’image qu’elle va donner d’elle aux autres personnes de la communauté ? La peur du jugement des autres est prégnant, et d’autant plus dans une communauté aussi fermée où tout le monde se connaît…

Intéressant, mais à réserver à certains initiés

Je trouvais l’idée du roman très accrocheuse. Ce paradoxe total qu’est Surie, déjà grand-mère et bientôt à nouveau mère… C’est intéressant et amène à se poser quantité de questions.

La première partie du roman est consacrée tout particulièrement au quotidien de Surie. Ses habitudes de vie, les différents membres de sa famille et sa relation avec eux. C’est assez lent, mais loin d’être inintéressant. On apprend au passage beaucoup de choses sur la culture juive, les traditions et leur poids, les nombreux symboles inhérents…
Petit bémol cependant, on ne nous explique rien. Que ce soit au niveau du vocabulaire (tout est en fin de roman ! Pourquoi ?) ou des habitudes de vie, rien n’est expliqué. C’est là, tout simplement.
J’ignorais par exemple qu’un couple marié dans la tradition juive orthodoxe se devait de dormir séparément quand la femme avait ses règles. De plus, les tabous semblent être très nombreux dans cette sous branche de la religion juive. Et quantité d’autres choses…

La seconde partie du roman est pour moi beaucoup plus dynamique et intéressante. Surie se révèle à elle-même. Mais malheureusement, l’autrice ne va pas assez au fond des choses pour moi. Elle aborde dans cette seconde partie des thèmes très actuels et intéressants : le consentement éclairé, la manipulation des plus jeunes et leur vulnérabilité. Et « pouf ! », à peine esquissées, ces thématiques sont mises de côté alors que le roman commençait à gagner en densité et en intérêt (de mon point de vue).
Au final, l’un des thèmes les plus intéressants du roman est mis de côté avec une rapidité confondante… C’est dommage.

Mais plus qu’un roman sur la naissance ou à propos d’une grossesse gériatrique (oui le terme existe !), Division Avenue traite de la douleur de la perte. Cette grossesse est l’occasion pour Surie de repenser à ses erreurs du passé, notamment vis à vis l’un de ses fils parti à jamais. Cette grossesse serait-elle l’occasion d’une renaissance ?

Ainsi j’ai aimé découvrir la culture juive grâce à ce roman, mais rien n’est présenté ou expliqué aux lecteurs qui n’y connaissent rien comme moi. C’est dommage. Et pire que tout, il y a énormément de vocabulaire en hébreu – plus de 140 notes ! – et tout est en fin d’ouvrage, ce qui coupe terriblement la lecture et en retire la fluidité. Pourquoi ne pas avoir mis les notes en bas de page ? Vu la quantité, cela aurait paru plus à propos…

Enfin, je n’ai pas réussi à apprécier l’histoire de Division Avenue et de Surie. Au moment où l’ouvrage commençait à entrer dans le vif du sujet, on s’en éloigne et on tombe dans l’incompréhension. Je n’ai pas réussi à comprendre Surie ni ses actes, qui m’ont totalement perdue alors que je la voyais enfin trouver un sens à sa vie…

TRANCHE d´ÂGE :

Chronique : La Symphonie des Abysses – Tome 1 – La partition d’Abrielle

La symphonie des abysses 01Un univers magnifique et original en paradoxe total avec ses lois

Dernier roman en date de l’auteur française Carina Rozenfeld, La Symphonie des Abysses et le premier tome de ce qui devrait constituer une duologie. L’ouvrage est paru en février 2014 dans la collection R.

Avec ce nouveau récit, l’auteur traite à nouveau (après Phaenix) une thématique qu’elle affectionne tout particulièrement : la musique, mais aussi l’affirmation et l’émancipation de soi.

Elle a déjà écrit de nombreux romans fantastiques mais essaye toujours de renouveler son genre : romance, fantasy, fantastique, voyage dans le temps… Avec La Symphonie des Abysses nous sommes confronté à une société aux règles totalitaires qui semble évoluer dans notre futur, mais difficile d’en savoir plus tant le voile est pesant sur ce nouvel univers.

Article 2 : Il est interdit de chanter, d’écouter, ou de faire de la musique

Cette règle simple est facile à respecter pout les habitants de l’atoll, sauf pour la jeune Abrielle, forcée de contenir des chants qui la dépasse elle-même. Sans cesse tentée de chantonner et de murmurer des notes, cette dernière vit très mal l’article 2 du règlement, surtout depuis la disparition mystérieuse de son père.

Mais à la moindre incartade, c’est la mort garantie ; Article 3 : Quiconque se livrera à ces activités illicites sera mis à mort. Aussi Abrielle contient-elle son besoin de chanter autant que possible en espérant qu’elle ne faillira pas. Faisant sa part des tâches quotidiennes nécessaires à la communauté et parlant peu, la jeune fille se sent de plus en plus prisonnière… et ça n’est pas le mur gigantesque qui entoure l’atoll qui lui donne cette impression, mais bien ces lois aussi étranges qu’injustes…

Un roman qui fait l’éloge de la force de caractère et de la remise en question

Faut-il suivre aveuglément des lois qui n’ont pas de sens ? Ou qui sont obsolètes ? Peut-on s’affirmer sans que cela ne soit au détriment de la communauté ? Toutes ces questions, Abrielle se les pose de plus en plus… mais elle n’est pas la seule. En effet, le roman se découpe en deux « partitions », celle d’Abrielle, puis celle de Sand et de Cahill, dont je ne parlerais guère sous peine de vous gâcher une bonne partie du plaisir de lecture.

De l’époque à laquelle se déroule le roman, nous n’en savons rien sinon qu’il y a eu une « pluie de Lune », en effet, le satellite est depuis scindé en deux parties, le reste s’étant écrasé sur la Terre. L’image de cette Lune détruite est l’une des plus belles et des plus prégnantes du roman avec cette fameuse symphonie qui se retrouve dans tout ce qui est vivant.

Sans être clairement définie, nous savons que la Symphonie des Abysses est une sorte de mélange de chants que certains ont la chance d’entendre – comme Abrielle – ce qui fait d’elle une réminiscente et la met en danger.

Des thématiques de société traitées avec originalité

Carina Rozenfeld s’est lancé avec La Symphonie des Abysses dans un genre littéraire auquel elle ne s’était pas encore essayée : la dystopie (du moins, nous en avons quelques indices). Elle en profite pour faire passer des messages on ne peut plus actuels tels que la différence et l’acceptation de cette dernière par les autres.

La question de l’identité sexuelle est également abordée d’une façon extrêmement inattendue et originale qui m’a fascinée. Encore une fois, l’auteur réussit à faire montre d’imagination et nous surprend là où l’on ne l’attend pas. C’est réussi et bien pensé.

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En conclusion, ce premier tome est une vraie réussite, on retrouve l’inventivité si reconnaissable de Carina Rozenfeld. L’atoll et son utilité ne sont toujours pas définis à la fin du roman, nous laissant encore plus perplexe qu’au début. Quel est l’intérêt de ce mur électrifié ? Pourquoi ces règles absurdes ? On ne peut que spéculer joyeusement sur les nombreuses possibilités de scénarios, mais pour avoir des réponses à nos questions, il faudra patienter jusqu’à novembre 2014… En tout cas n’hésitez pas un seul instant à vous lancer dans cette nouvelle aventure bien menée !