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Chronique : Parce que je déteste la Corée

Que faire lorsque le pays d’où nous venons nous semble invivable ? Si il ne nous offrait aucune perspective d’avenir ?

Fraichement paru lors de la fameuse rentrée littéraire 2017, voici le premier roman du coréen Chang Kang-myoung à paraître en France. Ce sont les éditions Philippe Picquier qui nous offrent l’opportunité de découvrir d’une autre façon la culture littéraire coréenne… et ça détonne !

Parce que je déteste la Corée est un roman vibrant, vrai et qui questionne sur la position que peut trouver la nouvelle génération coréenne au sein de son propre pays…

Kyena, 27 ans, et un certain malaise…

Elle est jeune, travaille dans une grande banque, a un petit ami… La vie semble sourire à Kyena. Ou du moins elle n’est pas censée être malheureuse. Et pourtant… le mode de vie Coréen lui pèse de plus en plus pour de nombreuses raisons.

Elle n’aime pas ce travail qu’elle a dans une banque, son petit copain veut s’engager auprès d’elle mais sa belle-famille est loin de l’accueillir à bras ouverts. Et surtout, Kyena ne se voit pas avoir un avenir en Corée. Trop d’exigences, de confrontation entre ses rêves et la réalité… C’est ainsi, qu’elle décide de quitter amoureux, travail et famille pour l’Australie ! C’est un peu fou, mais Kyena ne manque pas de volonté et va tout faire pour que sa vie devienne se dont elle a toujours rêvé, sans pressions d’aucune sorte.

Un roman qui déborde de vie !

Le premier adjectif que je retiens pour qualifier ce roman atypique, c’est vivant. Parce que je déteste la Corée est un roman, certes, mais j’ai réellement cru en cette héroïne ordinaire qui se sentait piégée par les normes de son pays.

Kyena m’a fait rêver grâce à ses rêves de liberté plus grands qu’elle. Elle a beau trimer, se planter lamentablement parfois, faire d’énormes bêtises… elle se relève. Toujours prête à travailler dur pour atteindre ses objectifs. Et à force, qui sait… peut-être y arrivera-t-elle ? (vous n’avez qu’à lire le livre pour le savoir !).

Je l’ai comprise quand elle s’est retrouvée enfermée par une norme à laquelle elle ne voulait pas appartenir. J’ai vécu avec elle se sentiment d’injustice profond qu’elle a ressenti lorsque le fossé des inégalités sociales s’est rappelé à elle…

Chang Kang-myoung a un talent fou : il nous fait vivre non pas à côté, mais avec ses personnages. Quand j’ai lu ce roman, j’ai cru à un vrai témoignage tant c’était vibrant, véritable et touchant (et parfois dramatique).

Je ne peux que vous conseiller de lire ce livre pour mille et une raisons :

  • Il vous fera découvrir le fonctionnement de la Corée avec un œil nouveau
  • Il déborde d’énergie, comme sa narratrice, Kyena
  • Il vous dépaysera car on voyage constamment entre la Corée et l’Australie
  • Il vous donnera de la volonté, de la force, de l’espoir
  • Il vous permettra peut-être de remettre en question votre vie et vos souhaits

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Si ces raisons ne vous suffisent pas, je ne sais plus quoi dire pour vous convaincre. Je peux insister en vous disant que c’est mon premier coup de cœur de la rentrée littéraire 2017. Qu’il ma fallut lire beaucoup de romans inintéressants avec de tomber sur cette pépite. Alors, maintenant que j’ai déblayé la surproduction qu’est la rentrée littéraire, qu’attendez-vous pour en savourer l’essence même ?

Chronique : Voici venir les rêveurs

voici-venir-les-reveursLe rêve américain : but ultime d’une famille camerounaise qui a tout quitté pour le vivre pleinement

Imbolo Mbue, c’est un nom qui ne vous dit peut-être rien pour le moment, et c’est normal, Voici venir les rêveurs est son tout premier roman. Mais il a beau être son premier ouvrage, il a été un véritable phénomène éditorial, aussi bien aux États-Unis que dans le monde entier… tous les éditeurs s’en sont littéralement arraché les droits de traduction à la fameuse Foire du livre de Francfort en 2014. En France, ce sont les éditions Belfond qui ont décroché le droit de traduire et de publier son roman.

L’histoire forte et belle d’immigrés qui vivent à travers le prisme du rêve américain

Jende est un homme travailleur. Pour vivre pleinement le fameux rêve américain et amener sa famille du Cameroun aux États-Unis, il est prêt à tout. A travailler comme un fou. A suer sang et eau. A cumuler plusieurs travails. A mentir à l’immigration… Mais jusqu’où est-il prêt à aller pour créer le meilleur avenir possible à ses enfants et offrir la vie de rêve que sa femme adorée mérite tant ?

Un roman puissant et captivant, aux personnages terriblement attachants

La vie et l’histoire de Jende sont absolument passionnantes. On s’attache à cet homme qui souhaite le meilleur pour lui et sa famille. Qui est prêt à tout pour sauver les apparences et faire rêver ceux qui ont eu la malchance de rester au pays.

La femme de Jende, Neni est également une battante admirable, luttant continuellement pour porter à bout de bras sa famille. Sa personnalité est incroyable, surprenante, charismatique. On aimerait tous avoir la force de Neni tant elle subjugue par ses actes inattendus et osés parfois.

L’histoire de ce couple incroyable et fort nous est ici disséquée sous tous les angles. On en apprend énormément sur le Cameroun et l’image qu’ils ont des États-Unis là-bas. On y découvre également les terribles et cruelles traditions qui perdurent encore… Et Imbolo Mbue sait de quoi elle parle puisqu’elle-même est camerounaise.

La vision qu’elle nous offre des États-Unis est ainsi bien loin du paradis rêvé par tant de personnes (qu’elles soient camerounaises, ou d’ailleurs…). Lucide, terrible, réaliste, le concept du rêve américain y est ici totalement revu et corrigé.

Voici venir les rêveurs, c’est également l’histoire d’un scandale, celui de la chute de Lehman Brothers (en 2008). On assiste à la déchéance d’une puissance que l’on croyait immuable ; et comment ces trafics vont influer sur des petites vies qui semblent si insignifiantes pour certains…

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Ce roman est relativement passé inaperçu dans la presse et les médias, et c’est fort dommage. Belfond croit beaucoup en ce roman, et l’on comprend sans problème pourquoi une fois la lecture achevée. Imbolo Mbue nous offre un grand plaisir de lecture tout en nous permettant de nous attacher à des personnages forts émotionnellement. On est fébrile à l’idée de savoir ce qu’il va arriver à ces petites gens qui travaillent pour les plus grands… Un grand roman, ne passez pas à côté.

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TRANCHE d´ÂGE :