Chronique littérature étrangère : Nos tendres cruautés

Qui n’a jamais lu Anne Tyler ne peux pas se rendre compte au premier abord du talent de cet autrice, très difficile à décrire selon moi. Dans la plupart de ses ouvrages, il ne se passe rien ou presque. Des petites scènes d’une vie familiale ou solitaire. Des instants de bonheur dans une ville lambda des Etats-Unis. Mais s’il ne s’y passe rien, est-ce bien intéressant ? Oui, mille fois oui ! Mais pour cela il va falloir découvrir son oeuvre, sa patte, ses scènes à la fois mélancoliques et d’une normalité qui les rend magiques, immortelles.

Le seul roman qui détonne quelque peu dans son œuvre, c’est Vinegar Girl, une magnifique réécriture de La mégère apprivoisée de Shakespeare. Ce roman est un bijou au message sublime et mémorable. Elle a par ailleurs reçu le Prix Pulitzer pour son roman Leçons de conduite (10/18).

Nos tendres cruautés est quant à lui paru en avril 2022 sur les tables des librairies, et c’est encore une fois une merveille…

Le temps qui passe comme personnage principal

Sur près de soixante ans, nous allons suivre les membres d’une famille américaine tout ce qu’il y a de normal. Elle va évoluer, grandir, changer au fil des décennies, et peu à peu, ses membres et leur personnalité vont nous sembler familliers. Certains vont vous déplaire (il y a toujours un vilain petit canard dans une famille), d’autres saurons vous toucher ou vous paraître trop distants… Mais ils ne vous laisserons pas de marbre, c’est certains.

La vie familliale et ses piques

Quel joli titre que celui-ci : Nos tendres cruautés. Il retranscrit à la perfection l’amour d’une famille, mais aussi ses petites remarques déplacées ou désagrables que l’on ne manque pas d’entendre aux repas de famille. Le titre original est d’ailleurs bien différent : French braid (littéralement natte française).
Chaque chapitre nous fait faire un bon dans le temps au sein de cette famille de Baltimore absolument touchante de normalité. Chaque scène semble être une photo prise sur le vif dans l’instant, comme pour nous rester le plus possible en mémoire. Et pour certaines d’entre elles, c’est effectivement le cas. Certains personnages et/ou moment restent gravés littéralement. Je pense notamment à ce trajet pour New-York qu’une petite fille et sa grand-mère vont faire, ou encore à ce repas de famille étrange où il y a une personne surprise en plus… Ou ces moments égoïstes que Mercy s’octroie, elle qui n’en peux plus de la vie de couple et qui voit dans la peinture une façon de la fuir.

Chaque personnage saura vous toucher à sa façon, et je crois que les auteurs comme Anne Tyler sont rares. Elle a le pouvoir de concentrer une émotion incroyable dans un moment qui semble normal, qui n’a rien d’exceptionnel… Mais en sous-titre, n’essaye-t-elle pas de nous dire de justement profiter de ces moments de normalité ? C’est ce que j’ai décidé d’y voir personnellement, mais chacun pourra s’approprier cette histoire comme il le souhaite.

C’est donc un roman magnifique, touchant, légèrement amusant par son comique de situation, et surtout réaliste que nous offre Anne Tyler. Comme La danse du temps, je l’ai trouvé profondément mélancolique et juste dans son ton, rien que pour cela, il est parfait. Si vous ne connaissez pas cette autrice Nos tendres cruautés peut ainsi être une bonne porte d’entrée, tout comme Vinegar Girl !

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