La bibliothèque de Glow : Pourriez-vous raconter votre parcours aux lecteurs de La Bibliothèque de Glow ?
Gu Byeong-mo : Bonjour. J’ai toujours mené une vie discrète, tout ce qu’il y a de plus ordinaire, une vie sans aventure qui s’écarte très peu du banal. Ma famille est un peu compliquée et par réaction, j’ai toujours été poursuivie par l’idée de vivre une existence modèle, d’être comme tout le monde, c’était une véritable obsession.
C’est pourquoi, suite à mes études universitaires, je me suis fait embaucher dans une entreprise, me suis mariée, ai eu des enfants, bref, j’ai accepté docilement le cycle de vie classique que suivent la majeure partie des gens. Mais depuis quarante ans, j’ai toujours cette envie d’ailleurs, et finalement, créer un monde nouveau en écrivant des romans est devenu pour moi un moyen de voyager.
La bibliothèque de Glow : Les petits pains de la pleine lune est un beau récit initiatique, comment son univers si dur et particulier vous est-il venu à l’esprit ?
Gu Byeong-mo : Le thème et l’idée de ce roman, je les dois à « la maison en pain d’épices » qui apparait dans le conte Hansel et Gretel des Frères Grimm. Dans cette maison vit une très méchante sorcière. Hansel et Gretel sont des pauvres enfants abandonnés par leurs parents et qui risquent de se faire assassiner par la sorcière. Dans mon enfance, j’ai vécu une menace à peu près semblable à la leur, et j’ai éprouvé la même angoisse de mort, mais en ce qui me concerne, il n’existait pas de magicien pour me protéger. C’est la raison pour laquelle j’ai offert au personnage de mon roman un magicien capable de lui fournir un refuge, même s’il n’est que provisoire.
La bibliothèque de Glow : Une boulangerie magique et un peu sorcière, ça a de quoi faire rêver… et si vous ne deviez acheter qu’une seule pâtisserie de cette boutique que vous avez créé, laquelle serait-ce ?
Gu Byeong-mo : Au premier coup d’œil, c’est un espace de rêve, mais beaucoup des pâtisseries proposées dans cette boutique sont en décalage avec la réalité de la société humaine. Si j’avais un budget suffisant, j’achèterais un exemplaire de chacune des pâtisseries, mais ce serait seulement par curiosité car je n’aurais jamais l’occasion de les utiliser. Les lecteurs qui ont lu ce roman me disent souvent qu’ils auraient surtout besoin d’un « Financier sosie » pour envoyer leur double à leur place au bureau ou à l’école.
La bibliothèque de Glow : Est-ce que les contes de fées vous on aidée à tisser votre récit ?
Gu Byeong-mo : Depuis toujours, je m’intéresse beaucoup aux mythes, aux contes, aux légendes, et dans plusieurs de mes romans suite à celui-ci, je me suis approprié ces contes pour les transformer et les réinterpréter.
La bibliothèque de Glow : Lesquels vous ont ainsi inspirée ?
Gu Byeong-mo : En septembre 2015, je viens de publier un recueil de nouvelles que j’ai écrit en prenant comme concept principal « la réinterprétation des contes ». Certaines nouvelles reprennent des idées des contes d’Andersen comme Les souliers rouges , La petite fille aux allumettes, d’autres s’inspirent des écrits des Frères Grimm comme Le géant aux cheveux d’or, La petite gardeuse d’oies, Le prince grenouille, La sage Élise. Je les ai réinterprétés et reconstruits d’un point de vue moderne. Je pense que tous ces contes doivent vous être familiers, j’aimerais que beaucoup de lecteurs s’intéressent à mon ouvrage et le lisent, et peut-être ainsi paraîtra-t-il un jour en France.
La bibliothèque de Glow : En France, nous vous connaissons uniquement pour deux ouvrages : Fils de l’eau et Les petits pains de la pleine lune. En avez-vous écrit d’autres ? Que racontent-ils ?
Gu Byeong-mo : Je publie presque un nouveau roman par an. Ils traitent en général avec ironie de l’égoïsme et des maux de la société, j’essaie par le biais du réalisme magique de faire une critique de la dure réalité et de l’injustice de notre société.
La bibliothèque de Glow : La Corée est l’invitée d’honneur du prochain Salon du Livre en France, viendrez-vous à l’événement pour rencontrer vos lecteurs français ?
Gu Byeong-mo : Pour qu’un auteur coréen soit présent à un salon du livre international, il faut d’abord qu’il y soit invité. En général, on sélectionne des auteurs déjà connus, prometteurs en Corée dont les nombreux ouvrages ont été traduits et publiés dans les pays européens et anglophones. En ce qui me concerne, je ne suis pas encore un auteur assez réputé pour ça (je crois que je ne mérite pas encore d’être invitée dans un salon du livre international J ). Si vous, lecteurs, me soutenez et réclamez avec force ma présence auprès des Editions Philippe Picquier, cela pourrait faire flancher les éditeurs coréens… !
La bibliothèque de Glow : Autre chose à ajouter ?
Gu Byeong-mo : Je vous remercie d’avoir apprécié mon roman.
Aujourd’hui, en Corée, les petites librairies traditionnelles ferment les unes après les autres, seules quelques grandes librairies gérées par des grandes entreprises et qui vendent aussi en ligne parviennent à survivre. C’est pourquoi je suis profondément émue d’apprendre qu’en France, il existe encore des blogs tenus par des libraires, et que des gens continuent à venir acheter des livres dans des librairies indépendantes.
La bibliothèque de Glow : Un immense merci à Yeong-hee et Mélanie Basnel pour avoir assuré cette traduction. Sans elles, cette interview n’aurait jamais eu lieu. Merci également aux éditions Philippe Picquier et à son attachée de presse d’avoir permis cet échange avec Gu Byeong-mo.
L’amoureuse de la Corée que je suis est ravie d’avoir pu lire cette interview et de découvrir cet auteur… 🙂
Merci pour ce gentil message, j’essaierais d’organiser d’autres interviews avec des auteurs coréens ! Belle semaine.
Laura/Glow